Numéro 10 - Octobre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2020

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

1re Civ., 15 octobre 2020, n° 20-14.584, (P)

QPC - Renvoi au Conseil constitutionnel

Divorce – Prestation compensatoire – Prestation compensatoire versée sous forme de rente viagère – Loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 – Article 33-VI – Faculté de suppression par le juge – Droit au recours juridictionnel effectif – Principe d'égalité – Caractère sérieux – Renvoi au Conseil constitutionnel

Faits et procédure

1. Un jugement du 23 décembre 1999 a prononcé le divorce de M. Q... et de Mme R... et accordé à cette dernière une prestation compensatoire sous forme d'une rente viagère indexée.

2. Par arrêt du 14 mai 2019, la cour d'appel de Paris a, sur le fondement des articles 33-VI de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 et 276-3 du code civil, dans sa rédaction issue de ce texte, accueilli la demande de M. Q... de suppression de cette rente à compter du 26 novembre 2015.

Enoncé des questions prioritaires de constitutionnalité

3. A l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 14 mai 2019 par la cour d'appel de Paris, Mme R... a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité ainsi rédigées :

« 1°/ L'article 33-VI de la loi du n° 2004-439 de la loi du 26 mai 2004 méconnaît-il l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'il prévoit la possibilité pour le juge de supprimer la prestation compensatoire versée sous forme de rente viagère et fixée, judiciairement ou par convention, avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000, tandis qu'une telle faculté de suppression n'était pas ouverte au jour où la prestation a été fixée ? »

« 2°/ L'article 33-VI de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 relative au divorce méconnaît-il l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'il prévoit que les prestations compensatoires fixées sous forme de rente viagère avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000 pourront être révisées, suspendues ou supprimées en cas de changement important intervenu dans les besoins ou les ressources de l'une ou l'autre des parties ou en cas d'avantage manifestement excessif procuré au créancier par le maintien de la prestation compensatoire alors que les prestations compensatoires fixées sous forme de rente viagère après l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000 ne peuvent être révisées, suspendues ou supprimées qu'en cas de changement important intervenu dans les besoins ou les ressources de l'une ou l'autre des parties ? »

Examen des questions prioritaires de constitutionnalité

4. Aux termes de l'article 33 VI de la loi n° 2004-439 du 26 mai 2004, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, applicable au litige, les rentes viagères fixées par le juge ou par convention avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-596 du 30 juin 2000 relative à la prestation compensatoire en matière de divorce peuvent être révisées, suspendues ou supprimées à la demande du débiteur ou de ses héritiers lorsque leur maintien en l'état procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil. A ce titre, il est tenu compte de la durée du versement de la rente et du montant déjà versé.

5. Cette disposition, contestée par les deux questions prioritaires de constitutionnalité, est applicable au litige.

6. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

7. Les questions posées présentent un caractère sérieux en ce qu'en prévoyant que les prestations compensatoires fixées sous forme de rente viagère avant l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000 peuvent être révisées, suspendues ou supprimées non seulement en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties mais aussi lorsque la situation où le maintien de la prestation procurerait au créancier un avantage manifestement excessif au regard des critères posés à l'article 276 du code civil, tandis, d'une part, qu'une telle faculté de suppression n'était pas ouverte au jour où la prestation a été fixée, d'autre part, que celles fixées après l'entrée en vigueur de la loi du 30 juin 2000 ne peuvent l'être qu'en cas de changement important dans les ressources ou les besoins de l'une ou l'autre des parties, l'article 33-VI de la loi du 26 mai 2004 pourrait être de nature à méconnaître les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

8. En conséquence, il y a lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Vigneau - Avocat général : M. Poirret (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Article 33-VI de la Loi n° 2004-439 du 26 mai 2004 ; articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

Soc., 23 octobre 2020, n° 19-26.020, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Travail réglementation, contrôle de l'application de la législation – Lutte contre le travail illégal – Travail dissimulé – Sanctions – Indemnité forfaitaire – Article L. 8223-1 du code du travail – Droit de propriété et principe de responsabilité – Caractère sérieux ou nouveau – Défaut – Changement de circonstances de droit ou de fait – Défaut – Disposition déjà déclarée conforme – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

1. A l'occasion du pourvoi qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2019 par la cour d'appel de Toulouse, la société J. Rieux et Cie a, par mémoire distinct et motivé, demandé à la Cour de cassation le renvoi au Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« L'article L. 8223-1 du code du travail méconnaît-il les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'il met à la charge de l'employeur une indemnisation forfaitaire égale à six mois de salaires en matière de travail dissimulé, sans rapport avec l'ampleur du préjudice effectivement subi par le salarié et sans faculté de modulation pour le juge ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

2. La disposition contestée a déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de la décision n° 2011-111 QPC rendue le 25 mars 2011 par le Conseil constitutionnel. Aucun changement de circonstances de droit ou de fait n'est intervenu qui, affectant la portée de cette disposition, en justifierait le réexamen.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Sornay - Avocat général : Mme Rémery - Avocat(s) : SCP Zribi et Texier ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; article L. 8223-1 du code du travail.

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