Numéro 10 - Octobre 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2020

MINEUR

1re Civ., 15 octobre 2020, n° 20-14.993, (P)

Cassation

Assistance éducative – Intervention du juge des enfants – Mesures d'assistance – Placement – Aide sociale à l'enfance – Conditions – Minorité – Absence d'acte d'état civil probant – Examen du caractère vraisemblable de l'âge allégué – Nécessité

Il se déduit des articles 375, alinéa 1, et 388, alinéas 1 et 2, du code civil que lorsque le juge, saisi d'une demande de protection d'un mineur au titre de l'assistance éducative, constate que les actes de l'état civil étrangers produits ne sont pas probants, au sens de l'article 47 du code civil, il ne peut rejeter cette demande sans examiner le caractère vraisemblable de l'âge allégué et, le cas échéant, ordonner un examen radiologique osseux.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 19 novembre 2019), par jugement du 24 avril 2019, le juge des enfants a confié N... A..., se disant né le [...] à Conakry (Guinée), au service de l'aide sociale à l'enfance du département de la Seine-Maritime jusqu'au 12 juin 2021, date de sa majorité.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

3. N... A... fait grief à l'arrêt de constater que sa minorité n'est pas établie et, en conséquence, de prononcer un non-lieu à assistance éducative, alors « que le juge ne peut écarter la minorité d'un jeune migrant invoquant le bénéfice de mesures d'assistance éducative sans se fonder sur des éléments de nature à établir que l'âge allégué par celui-ci ne correspond pas à la réalité ; qu'en l'espèce, pour juger que la minorité de l'exposant n'était pas établie et qu'il n'y avait pas lieu à assistance éducative à son égard, la cour d'appel s'est bornée à écarter la force probante des documents d'état civil qui lui étaient soumis ; qu'en ne recherchant pas, au besoin en ordonnant une mesure d'instruction, s'il existait une discordance entre l'âge allégué par l'exposant et son âge réel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 375 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 375, alinéa 1er, et 388, alinéas 1 et 2, du code civil :

4. Selon le premier de ces textes, si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par justice.

5. Selon le second, le mineur est l'individu de l'un ou l'autre sexe qui n'a point encore l'âge de dix-huit ans accomplis. Des examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l'âge peuvent être réalisés, en l'absence de documents d'identité valables et lorsque l'âge allégué n'est pas vraisemblable, sur décision de l'autorité judiciaire et après recueil de l'accord de l'intéressé.

6. Il se déduit de ces dispositions que lorsque le juge, saisi d'une demande de protection d'un mineur au titre de l'assistance éducative, constate que les actes de l'état civil étrangers produits ne sont pas probants, au sens de l'article 47 du code civil, il ne peut rejeter cette demande sans examiner le caractère vraisemblable de l'âge allégué et, le cas échéant, ordonner un examen radiologique osseux.

7. Pour refuser le bénéfice de l'assistance éducative à N... A..., l'arrêt relève qu'au regard des incohérences manifestes des documents de l'état civil produits, la présomption de régularité édictée par l'article 47 du code civil est renversée, de sorte que sa minorité ne peut être retenue.

8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui incombait, si l'âge allégué par l'intéressé n'était pas vraisemblable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rouen autrement composée.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Acquaviva - Avocat général : M. Poirret (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Melka-Prigent ; SARL Cabinet Briard -

Textes visés :

Article 375, alinéa 1, et 388, alinéas 1 et 2, du code civil.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 3 octobre 2018, pourvoi n° 18-19.442, Bull. 2018, (rejet).

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