Numéro 10 - Octobre 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2019

MARIAGE

1re Civ., 3 octobre 2019, n° 18-20.828, (P)

Cassation partielle

Devoirs et droits respectifs des époux – Contribution aux charges du mariage – Obligation – Exécution – Modalités – Apport en capital provenant de la vente de biens personnels de l'un des époux pour financer l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial (non)

Il résulte de l'article 214 du code civil que, sauf convention matrimoniale contraire, l'apport en capital provenant de la vente de biens personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.

Viole ce texte la cour d'appel qui, après avoir relevé que le mari avait utilisé des fonds provenant de la vente de biens acquis avant le mariage pour financer la totalité de l'acquisition, en indivision avec son épouse séparée de biens, d'un bien immobilier affecté à l'usage familial, retient que cette dépense participe de la contribution aux charges du mariage.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. Y... et de Mme A..., mariés sous le régime de la séparation de biens ; que des difficultés sont nées pour le règlement de leurs intérêts patrimoniaux ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 214 du code civil ;

Attendu que, sauf convention matrimoniale contraire, l'apport en capital provenant de la vente de biens personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l'acquisition d'un bien indivis affecté à l'usage familial, ne participe pas de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. Y... tendant à se voir reconnaître titulaire d'une créance au titre du financement de la totalité du prix d'acquisition de la maison des [...], achetée par les époux, en indivision, pour moitié chacun, après avoir relevé que celui-ci avait investi dans cette opération des fonds personnels, provenant de la vente de biens acquis avant le mariage, l'arrêt retient que le patrimoine de l'époux permettait cette acquisition, sans qu'il y ait lieu de distinguer ses disponibilités en revenus et en capital, la notion de contribution aux charges du mariage pouvant comprendre de façon extensive toute dépense, tout investissement réalisé dans l'intérêt de la famille, et que, dès lors qu'elle n'apparaît pas disproportionnée au regard de ses capacités financières, lesquelles ne se réduisent pas à ses seuls revenus, cette dépense d'investissement à affectation familiale doit être analysée comme une participation à l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles 815-9, alinéa 2, et 815-10 du code civil ;

Attendu que l'arrêt dit qu'une indemnité est due par M. Y... à Mme A... pour l'occupation du bien indivis situé à [...] ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité d'occupation devait revenir à l'indivision, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. Y... ne dispose d'aucune créance à l'égard de son épouse ou de l'indivision s'agissant de la villa des [...] et fixe le montant de l'indemnité d'occupation due par M. Y... à son ex-épouse au titre du bien de [...] à la somme mensuelle de 960 euros divisée par deux, soit 480 euros par mois à compter du 3 septembre 2011, jusqu'au partage, l'arrêt rendu le 6 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Auroy - Avocat général : Mme Marilly - Avocat(s) : SCP Bénabent ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 214 du code civil.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.