Numéro 10 - Octobre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2018

SECURITE SOCIALE

2e Civ., 11 octobre 2018, n° 17-17.288, (P)

Rejet

Assujettissement – Personnes assujetties – Collaborateurs occasionnels du service public de la justice – Expert judiciaire désigné par le tribunal de commerce

Donne acte à l'URSSAF de Provence-Alpes-Côtes d'Azur du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 février 2017) que l'URSSAF du Var, aux droits de laquelle vient l'URSSAF de Provence-Alpes-Côte d'Azur (l'URSSAF), lui ayant notifié une lettre d'observations suivie, le 6 avril 2012, d'une mise en demeure portant notamment sur un redressement du chef de l'assujettissement des honoraires versés aux experts judiciaires en leur qualité de collaborateurs occasionnels du service public, la société X... (la société), titulaire d'une charge de greffier auprès du tribunal de commerce de Toulon, a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler le redressement litigieux, alors, selon le moyen :

1°/ que les experts désignés par le juge en application de l'article 264 du code de procédure civile, qui collaborent occasionnellement au service public, sont obligatoirement affiliées aux assurances sociales du régime général ; que les services de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics administratifs en dépendant et les organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service public administratif - tels que le greffe du tribunal de commerce - qui font appel à ces experts judiciaires sont redevables des cotisations de sécurité sociale, de la CSG et de la CRDS sur les rémunérations versées à ces experts ; qu'en jugeant que le greffe du tribunal de commerce n'est jamais redevable des cotisations sociales, CSG, CRDS sur ces sommes au prétexte inopérant qu'il ne nomme pas l'expert judiciaire, ni ne fixe le montant de ses honoraires mais qu'il n'a qu'une mission de séquestre, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 21°, du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1er du décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 modifié par décret n° 2008-267 du 18 mars 2008 ainsi que la lettre-circulaire Acoss n° 2008-065 ;

2°/ que les experts désignés par le juge en application de l'article 264 du code de procédure civile, qui collaborent occasionnellement au service public, sont obligatoirement affiliées aux assurances sociales du régime général ; que les services de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics administratifs en dépendant et les organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service public administratif - tels que le greffe du tribunal de commerce - qui font appel à ces experts judiciaires sont redevables des cotisations de sécurité sociale, de la CSG et de la CRDS sur les rémunérations versées à ces experts ; qu'en décidant du contraire au prétexte inopérant que l'article R. 741-2 du code de commerce définissant les missions du greffe du tribunal de commerce ne comportent pas l'obligation, en sa qualité de séquestre des provisions réglées par les justiciables, d'appliquer des prélèvements sociaux sur ces fonds ou de procéder à la modification des titre exécutoires, la cour d'appel a violé les articles L. 311-2 et L. 311-3, 21°, du code de la sécurité sociale dans leur rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1er du décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000 modifié par décret n° 2008-267 du 18 mars 2008 ainsi que la lettre-circulaire Acoss n° 2008-065 ;

Mais attendu que, selon les articles L. 311-3, 21°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014, et 1er, 2°, du décret n° 2000-35 du 17 janvier 2000, modifié par le décret n° 2008-267 du 18 mars 2008, applicables à la date d'exigibilité des cotisations et contributions litigieuses, les experts désignés par le juge en application de l'article 264 du code de procédure civile figurent au nombre des personnes qui, exerçant à titre occasionnel pour le compte de l'Etat, d'une collectivité territoriale ou d'un de leurs établissements publics administratifs, d'une autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale ou d'un organisme privé chargé de la gestion d'un service public à caractère administratif, une activité dont la rémunération est fixée par des dispositions législatives ou réglementaires ou par décision de justice doivent être obligatoirement affiliées au régime général ;

Et attendu qu'ayant fait ressortir que les experts judiciaires désignés par les juges du tribunal de commerce apportaient leur concours au service public de la justice, ce dont il résultait qu'ils avaient la qualité de collaborateurs occasionnels de la juridiction et non du greffe de celle-ci, la cour d'appel en a exactement déduit que la société, titulaire de la charge de greffier auprès de ce tribunal, n'était pas redevable des cotisations et contributions sociales afférentes aux honoraires versés aux experts ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Palle - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article L. 311-3, 21°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 ; article 1er, 2°, du décret 2000-35 du 17 janvier 2000, modifié par le décret 2008-267 du 18 mars 2008.

2e Civ., 11 octobre 2018, n° 17-25.956, (P)

Cassation

Caisse – Obligation de renseigner – Etendue – Relevé de situation individuelle – Contenu – Action en contestation – Recevabilité

Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles L. 161-17, L. 381-15, L. 382-17, R. 161-11 et D. 161-2-1-4 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article R. 142-1 du même code ;

Attendu, selon le deuxième de ces textes, que les ministres du culte et les membres des congrégations et collectivités religieuses qui ne relèvent pas, à titre obligatoire, d'un autre régime de base de sécurité sociale, relèvent du régime général et sont affiliés auprès de la Caisse d'assurance vieillesse, invalidité et maladie des cultes (la CAVIMAC) instituée par le troisième ; que, selon les dispositions combinées du premier, du quatrième et du cinquième, le relevé de situation individuelle que les organismes et services en charge des régimes de retraite adressent, périodiquement ou à leur demande, aux assurés comporte notamment, pour chaque année pour laquelle des droits ont été constitués, selon les régimes, les durées exprimées en années, trimestres, mois ou jours, les montants de cotisations ou le nombre de points pris en compte ou susceptibles d'être pris en compte pour la détermination des droits à pension ; qu'il en résulte que l'assuré est recevable, s'il l'estime erroné, à contester devant la juridiction du contentieux général le report des durées d'affiliation, montant des cotisations ou nombre de points figurant sur le relevé de situation individuelle qui lui a été adressé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant reçu de la CAVIMAC un relevé de situation individuelle, M. X... a demandé à celle-ci la prise en compte, pour la détermination de ses droits à pension, de sept trimestres correspondant à sa période de noviciat ; que la commission de recours amiable de la CAVIMAC ayant déclaré son recours irrecevable, l'intéressé a saisi une juridiction de sécurité sociale ;

Attendu que pour dire M. X... irrecevable en sa demande, l'arrêt énonce qu'il dispose d'un intérêt à agir, mais que l'étendue des droits de l'assuré social s'apprécie uniquement au moment de la liquidation de ses droits à pension ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. X... demandait la prise en compte de périodes d'affiliation et de cotisations susceptibles de lui ouvrir des droits à pension, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 juillet 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : M. Cadiot - Avocat général : Mme Nicolétis - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Articles L. 161-17, R. 161-11 et D. 161-2-1-4 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

Sur les mentions figurant sur le relevé de situation individuelle, à rapprocher : 2e Civ., 16 février 2012, pourvoi n° 11-10.646, Bull. 2012, II, n° 31 (cassation sans renvoi).

2e Civ., 11 octobre 2018, n° 17-22.686, (P)

Cassation partielle

Prestations – Infraction – Pénalité – Contrôle – Etendue – Détermination

Selon l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, la pénalité qu'il prévoit peut s'appliquer, notamment aux professionnels de santé, pour les manquements, inobservations, agissements et abus qu'il énumère. Il appartient au juge du contentieux général de la sécurité sociale saisi d'un recours formé contre la pénalité prononcée dans les conditions précisées par ce même texte de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l'adéquation du montant de la pénalité à l'importance de l'infraction commise par cette dernière.

Viole ainsi l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel qui, pour annuler la pénalité prononcée par la caisse à l'encontre d'un professionnel pour manquement aux règles de tarification, retient que la mise en demeure adressée à celui-ci tendant au remboursement de sommes indues a été annulée alors qu'une telle annulation est sans incidence sur la matérialité et la qualification du manquement reproché à ce professionnel.

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant relevé des irrégularités dans la tarification d'actes cotés AI3S par Mme X..., infirmière libérale, la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) a notifié à cette dernière un indu suivi, le 28 décembre 2010, d'une mise en demeure de payer une certaine somme et lui a infligé une pénalité financière ; que l'intéressée a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;

Sur le pourvoi incident qui est préalable :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les deux moyens du pourvoi incident, tels que reproduits en annexe, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen du pourvoi principal, tel que reproduit en annexe, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige ;

Attendu, selon ce texte, que la pénalité qu'il prévoit peut s'appliquer, notamment aux professionnels de santé pour les manquements, inobservations, agissements et abus qu'il énumère ; qu'il appartient au juge du contentieux général de la sécurité sociale saisi d'un recours formé contre la pénalité prononcée dans les conditions précisées par ce même texte de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l'adéquation du montant de la pénalité à l'importance de l'infraction commise par cette dernière ;

Attendu que pour dire n'y avoir lieu à la condamnation de Mme X... au paiement d'une pénalité, l'arrêt retient essentiellement que la demande de la caisse en paiement de l'indu est rejetée en raison de l'annulation de la mise en demeure notifiée à l'intéressée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la nullité de la mise en demeure notifiée pour le recouvrement de l'indu réclamé par la caisse était sans incidence sur la matérialité et la qualification du manquement aux règles de tarification reproché à Mme X..., la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen du pourvoi principal :

REJETTE le pourvoi incident ;

CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions confirmant le jugement entrepris du tribunal des affaires de sécurité sociale de Marseille en date du 29 février 2016 en ce qu'il a débouté la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône de sa demande de condamnation de Mme X... au paiement de la pénalité financière, l'arrêt rendu, le 14 juin 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt, et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.

- Président : Mme Flise - Rapporteur : Mme Moreau - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Marlange et de La Burgade -

Textes visés :

Article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 15 février 2018, pourvoi n° 17-12.966, Bull. 2018, II, n° 30 (cassation).

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