Numéro 10 - Octobre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2018

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE

Soc., 10 octobre 2018, n° 17-18.294, (P)

Cassation partielle

Succession de contrats à durée déterminée – Validité – Conditions – Délai de carence – Respect – Exclusion – Cas – Détermination

Une succession de contrats de travail à durée déterminée, sans délai de carence, n'est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l'un des motifs prévus limitativement par l'article L. 1244-4 du code du travail.

Viole les articles L. 1244-3 et L. 1244-4 du code du travail, ensemble l'article L. 1245-1 du même code, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, la cour d'appel qui rejette une demande tendant à la requalification d'une succession de deux contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée après avoir constaté que le premier contrat de travail à durée déterminée avait été conclu entre les parties en raison d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, soit pour un motif non prévu à l'article L. 1244-4 du code du travail, de sorte qu'un délai de carence répondant aux exigences de l'article L. 1244-3 du même code devait être observé avant la conclusion du second contrat de travail à durée déterminée pour remplacement d'un salarié.

Qualification donnée au contrat – Demande de requalification – Requalification par le juge – Cas – Succession de contrats pour motifs distincts – Limites – Détermination

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1244-3 et L. 1244-4 du code du travail, ensemble l'article L. 1245-1 du même code, dans leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé en qualité de peintre par la société Jean C... suivant contrat de travail à durée déterminée du 12 juillet 2010 arrivant à échéance le 26 novembre suivant ; que ce contrat a été prolongé jusqu'au 23 décembre 2010 ; que, le 5 janvier 2011, le salarié a signé un nouveau contrat de travail à durée déterminée pour une durée s'achevant le 30 novembre 2011, puis le 1er décembre 2011, un contrat de travail à durée indéterminée ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir la requalification des contrats de travail à durée déterminée en un contrat de travail à durée indéterminée et le paiement de diverses sommes ;

Attendu que pour rejeter la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée du 5 janvier 2011 en un contrat de travail à durée indéterminée et les demandes indemnitaires subséquentes du salarié, l'arrêt retient que ce second contrat de travail à durée déterminée avait pour objet de pourvoir au remplacement d'un salarié permanent de l'entreprise, que dès lors ce remplacement ne s'effectuait nullement sur le poste de travail dont la création et l'existence étaient la conséquence d'un surcroît d'activité et avait justifié la conclusion du premier contrat de travail, que le délai de douze jours entre les deux contrats était suffisant compte tenu de l'ancienneté de M. X... dans l'entreprise ;

Attendu cependant que l'article L. 1244-4 du code du travail n'exclut l'application des dispositions de l'article L. 1244-3 imposant le respect d'un délai de carence avant la conclusion d'un nouveau contrat à durée déterminée que dans les situations qu'il mentionne ; qu'il en résulte qu'une succession de contrats de travail à durée déterminée, sans délai de carence, n'est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l'un des motifs prévus limitativement par l'article L. 1244-4 du code du travail ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il ressortait de ses constatations que le premier contrat de travail à durée déterminée avait été conclu entre les parties en raison d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, soit pour un motif non prévu à l'article L. 1244-4 du code du travail, de sorte qu'un délai de carence répondant aux exigences de l'article L. 1244-3 du même code devait être observé avant la conclusion du second contrat de travail à durée déterminée pour remplacement d'un salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. X... tendant à la requalification du contrat de travail à durée déterminée du 5 janvier 2011 en un contrat de travail à durée indéterminée et les demandes indemnitaires du salarié subséquentes, l'arrêt rendu le 6 avril 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.

- Président : M. Frouin - Rapporteur : Mme Monge - Avocat général : M. Lemaire - Avocat(s) : SCP Alain Bénabent -

Textes visés :

Articles L. 1244-3, L. 1244-4 et L. 1245-1 du code du travail, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

Rapprochement(s) :

Sur le principe selon lequel les contrats de travail à durée déterminée pour un même salarié peuvent se succéder sans délai de carence s'ils sont conclus pour les motifs limitativement énumérés par la loi, dans le même sens que : Soc., 30 septembre 2014, pourvoi n° 13-18.162, Bull. 2014, V, n° 217 (rejet), et l'arrêt cité.

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