Numéro 10 - Octobre 2018

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 10 - Octobre 2018

ASSURANCE RESPONSABILITE

1re Civ., 24 octobre 2018, n° 17-31.306, (P)

Rejet

Action directe de la victime – Compétence – Compétence judiciaire – Etendue – Limites – Détermination

Action directe de la victime – Compétence – Distinction de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 23 novembre 2017), qu'ayant été victime de dommages à la suite de soins reçus le 13 février 2002 au sein du [...] (le centre hospitalier), Mme X... a assigné en indemnisation l'assureur de cet établissement public de santé, la Société hospitalière d'assurances mutuelles (la SHAM) ; que celle-ci a soulevé une exception d'incompétence au profit de la juridiction administrative ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de décliner la compétence de la juridiction judiciaire pour connaître de ses demandes dirigées contre la SHAM, alors, selon le moyen, que les juridictions de l'ordre judiciaire sont seules compétentes pour connaître de l'action directe intentée par la victime d'un accident médical contre l'assureur du responsable, peu important que ce contrat d'assurance soit de droit public ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a lié la compétence des juridictions administratives pour connaître de l'action directe intentée par Mme X... contre la SHAM à la nature de droit public du contrat d'assurance, a violé la loi des 16-24 août 1790 et l'article L. 124-3 du code des assurances ;

Mais attendu que, si l'action directe ouverte par l'article L. 124-3 du code des assurances à la victime d'un dommage, ou à l'assureur de celle-ci subrogé dans ses droits, contre l'assureur de l'auteur responsable du sinistre, tend à la réparation du préjudice subi par la victime, elle se distingue de l'action en responsabilité contre l'auteur du dommage en ce qu'elle poursuit l'exécution de l'obligation de réparer qui pèse sur l'assureur en vertu du contrat d'assurance ; que la détermination de l'ordre de juridiction compétent pour en connaître dépend du caractère administratif ou de droit privé de ce contrat ;

Et attendu qu'après avoir constaté que le contrat d'assurance liant la SHAM au centre hospitalier avait été passé en application du code des marchés publics, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que, conformément à l'article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier, ce contrat avait un caractère administratif ; qu'elle en a exactement déduit que l'action directe exercée par Mme X... relevait de la compétence de la juridiction administrative ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Canas - Avocat général : M. Chaumont - Avocat(s) : SCP L. Poulet-Odent ; Me Le Prado -

Textes visés :

Loi des 16-24 août 1790 ; article L. 124-3 du code des assurances ; article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001 portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier.

Rapprochement(s) :

Sur la compétence de la juridiction administrative pour se prononcer sur l'action directe exercée par la victime d'un dommage sur le fondement d'un contrat d'assurance passé par un établissement public de santé en application du code des marchés publics, cf. : Avis du Conseil d'Etat, 31 mars 2010, n° 333627, publié au Recueil Lebon. Sur le caractère administratif du contrat d'assurance conclu à l'occasion d'un marché public, à rapprocher : 1re Civ., 23 janvier 2007, pourvoi n° 04-18.630, Bull. 2007, I, n° 40 (cassation sans renvoi), et la décision citée.

3e Civ., 18 octobre 2018, n° 17-23.741, (P)

Rejet

Caractère obligatoire – Travaux de bâtiment – Garantie – Etendue – Secteur d'activité déclaré par l'assuré

La cour d'appel qui relève qu'une entreprise avait souscrit un contrat d'assurance garantissant uniquement les travaux de techniques courantes correspondant aux activités déclarées de gros oeuvre, plâtrerie - cloisons sèches, charpentes et ossature bois, couverture-zinguerie, plomberie - installation sanitaire, menuiserie - PVC et que le maître de l'ouvrage avait conclu avec elle un contrat de construction de maison individuelle, en déduit à bon droit que, l'activité construction de maison individuelle n'ayant pas été déclarée, les demandes en garantie formées par ce dernier contre l'assureur doivent être rejetées.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 avril 2017), que M. X... et la société Euroconstruction ont conclu un contrat de construction de maison individuelle ; que, le constructeur ayant abandonné le chantier courant décembre 2003, M. X... l'a assigné en réparation des désordres et inexécutions ; qu'un précédent jugement a fixé la réception judiciaire de l'ouvrage au 14 juin 2005 et a reconnu l'entière responsabilité de la société Euroconstruction dans les désordres affectant l'immeuble ; que, se plaignant de nouveaux désordres, M. X... a, après expertise, assigné la société MMA, assureur de la société Euroconstruction, en paiement de sommes ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que tout contrat d'assurance souscrit par une personne assujettie à l'obligation d'assurance est, nonobstant toute clause contraire, réputé comporter des garanties au moins équivalentes à celles figurant dans les clauses types prévues par l'article A. 243-1 du code des assurances ; que si la garantie convenue ne peut s'appliquer qu'à l'activité déclarée par l'assuré, celle-ci doit être appréciée indépendamment de la forme du contrat conclu avec le maître de l'ouvrage ; qu'en écartant la garantie de la compagnie MMA au motif inopérant que l'activité de construction de maison individuelle n'avait pas été déclarée par la société Euroconstruction, quand il importait seulement de rechercher si les désordres invoqués se rapportaient à l'une des activités de construction déclarées par cette société dans le contrat d'assurance, la cour d'appel a violé l'article L. 241-1 du code des assurances ;

2°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si, nonobstant l'absence de mention « construction de maisons individuelles » dans la police litigieuse, l'ensemble des activités déclarées par la société Euroconstruction ne correspondait pas manifestement à une telle activité, et ce d'autant plus que la nomenclature commune aux assureurs des activités de BTP pour les attestations d'assurance des constructeurs, établie par la Fédération française des sociétés d'assurances, ne référençait pas l'activité de construction de maisons individuelles, mais seulement les activités par lots techniques, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard articles L. 241-1 du code des assurances et 1134 devenu 1103 du code civil ;

3°/ que l'obligation d'assurance dépend de l'analyse de la police souscrite et non pas de la comparaison de celle-ci avec d'autres polices proposées par l'assureur ; qu'en retenant que M. X... n'avait pas souscrit le contrat particulier proposé par l'assureur en matière de construction de maisons individuelles, la cour d'appel s'est prononcée par un motif impropre à écarter l'obligation d'assurance de la société MMA au regard des obligations résultant du contrat d'assurance souscrit par la société Euroconstruction, et a violé l'article L. 241-1 du code des assurances ;

4°/ qu'en laissant sans aucune réponse les conclusions d'appel de M. X... soutenant que la société MMA avait, en cours d'instance, admis que le contrat d'assurance s'appliquait aux travaux de construction de la maison de M. X... puisque, aux termes d'un courrier du 26 mars 2015 et d'un quitus du 4 avril 2015, elle l'avait indemnisé dans le cadre d'un recours amiable pour des désordres dont elle avait reconnu la nature décennale sur le mur de clôture, lequel faisait partie des travaux effectués par l'entreprise Euroconstruction au titre de l'exécution du contrat de construction litigieux, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant relevé que la société Euroconstruction avait souscrit un contrat d'assurance garantissant uniquement les travaux de techniques courantes correspondant aux activités déclarées de gros oeuvre, plâtrerie - cloisons sèches, charpentes et ossature bois, couverture- zinguerie, plomberie - installation sanitaire, menuiserie - PVC et que M. X... avait conclu avec la société Euroconstruction un contrat de construction de maison individuelle, garage, piscine, mur de clôture et restauration d'un cabanon en pierre, la cour d'appel en a déduit à bon droit que, l'activité construction de maison individuelle n'ayant pas été déclarée, les demandes en garantie formées par M. X... devaient être rejetées, et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Pronier - Avocat général : M. Brun - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; Me Le Prado -

Textes visés :

Article L. 241-1 du code des assurances ; article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.

Rapprochement(s) :

Sur la limitation de la garantie obligatoire aux travaux relevant de l'activité déclarée à l'assureur, à rapprocher : 3e Civ., 28 septembre 2005, pourvoi n° 04-14.472, Bull. 2005, III, n° 174 (rejet), et l'arrêt cité ; 3e Civ., 21 janvier 2015, pourvoi n° 13-25.268, Bull. 2015, III, n° 5 (cassation partielle).

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