Numéro 1 - Janvier 2024

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2024

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005)

Com., 17 janvier 2024, n° 22-20.185, (B), FRH

Cassation sans renvoi

Liquidation judiciaire – Clôture – Clôture pour insuffisance d'actif – Droit de poursuite individuelle – Non-recouvrement – Portée – Mesure d'exécution forcée – Résidence principale – Commandement de saisie-vente délivré sur les autres biens du débiteur (non)

Si, en application des articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce, le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale du débiteur est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble qui n'est pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire, il ne peut, après cette clôture, en dehors des exceptions prévues au deuxième des textes visés, recouvrer l'exercice individuel de ses actions.

En conséquence, le commandement de saisie-vente, acte qui engage la mesure d'exécution forcée, ne peut être délivré par ce créancier, après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de son débiteur, sur les autres biens de ce dernier.

Liquidation judiciaire – Jugement – Effets – Arrêt des poursuites individuelles – Domaine d'application – Exclusion – Cas – Inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 10 juin 2022), les 27 mai et 22 juillet 2016, M. [U] a été mis en redressement puis liquidation judiciaires, la procédure étant étendue à Mme [U] le 16 septembre suivant.

La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif le 3 avril 2018.

2. La société Caisse de crédit mutuel de [Localité 3] Sévigné (la banque) a déclaré au passif de la procédure une créance née d'un prêt hypothécaire qu'elle avait consenti aux débiteurs le 23 mars 2001 pour l'achat de leur résidence principale.

3. Le 1er juillet 2020, la banque a fait délivrer à M. et Mme [U] un commandement de payer aux fins de saisie-vente, pour obtenir paiement d'une certaine somme.

Le 30 juillet 2020, ces derniers ont fait assigner la banque devant le juge de l'exécution en nullité du commandement, puis, devant la cour d'appel, ils en ont demandé, subsidiairement, la mainlevée.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. M. et Mme [U] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes, alors que « le commandement de payer aux fins de saisie-vente ne concerne pas le droit de poursuite sur l'immeuble ; que la cour d'appel a constaté que les commandements litigieux n'étaient pas des commandements aux fins de saisie immobilière mais des commandements aux fins de saisie-vente qui ne concernent pas le droit de poursuite sur l'immeuble ; qu'en retenant cependant, pour refuser la mainlevée des commandements de saisie-vente, qu'ils avaient pour but d'interrompre la prescription et de pouvoir ainsi reprendre la saisie immobilière pour avoir paiement de la créance, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 643-11 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce et les articles L. 221-1 et R. 221-1 du code des procédures civiles d'exécution :

6. Il résulte des deux premiers textes susvisés que le créancier auquel l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale du débiteur est inopposable peut, même après clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, exercer son droit de poursuite sur l'immeuble qui n'est pas entré dans le gage commun des créanciers de la liquidation judiciaire. Il ne peut, en revanche, après cette clôture, en dehors des exceptions prévues au deuxième des textes visés, recouvrer l'exercice individuel de ses actions.

7. En conséquence, un commandement de saisie-vente, qui, selon les deux derniers textes susvisés, est un acte qui engage la mesure d'exécution forcée, ne peut être délivré par ce créancier, après la clôture pour insuffisance d'actif de la liquidation judiciaire de son débiteur, sur les autres biens de ce dernier.

8. Pour rejeter la demande de M. et Mme [U], l'arrêt, après avoir relevé que la créance de la banque, antérieure au jugement d'ouverture, avait été déclarée à la procédure collective, retient que la banque, qui a financé la résidence principale des époux, n'est pas un créancier antérieur au sens de l'article L. 643-11 du code de commerce et conserve en conséquence la possibilité de poursuivre la procédure de saisie de l'immeuble financé. Il en déduit que le commandement de payer aux fins de saisie-vente, qui avait pour seul objet d'interrompre la prescription, se fonde sur un titre exécutoire, à savoir l'acte authentique du 23 mars 2001, accompagné d'un décompte des sommes dues et qu'il n'est donc pas irrégulier.

9. En statuant ainsi, alors que ce commandement aux fins de saisie-vente était privé d'effet pour avoir été délivré après la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 juin 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Ordonne la mainlevée du commandement de payer aux fins de saisie-vente délivré le 1er juillet 2020 à M. et Mme [U] par la société Caisse de crédit mutuel de [Localité 3] Sévigné.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié ; SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Articles L. 526-1 et L. 643-11 du code de commerce.

Rapprochement(s) :

Sur la portée de l'inopposabilité de l'insaisissabilité de plein droit de la résidence principale, à rapprocher : Com., 13 décembre 2023, pourvoi n° 22-19.749, Bull., (cassation).

Com., 17 janvier 2024, n° 22-13.429, (B), FRH

Rejet

Organes – Liquidateur – Action en justice – Appel – Conclusions – Rapport à justice – Effet – Irrecevabilité à présenter des moyens de cassation

Le liquidateur, qui, devant la cour d'appel, s'en est rapporté à justice sur l'ensemble des prétentions des parties, n'est pas recevable à présenter des moyens de cassation devant la Cour de cassation.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 2 décembre 2021) et les productions, le 19 janvier 2005, M. [T] [M] a consenti à Mme [G], avocate, un prêt sans intérêt de 93 074 euros remboursable en 25 annuités.

Le même jour, [O] [P] a consenti à cette dernière un prêt également sans intérêt, de 89 500 euros remboursable en 25 annuités. Mme [G] a utilisé ces fonds pour acheter des biens immobiliers pour lesquels elle a déposé une déclaration d'insaisissabilité publiée le 8 décembre 2011.

2. Les prêts étant demeurés impayés, M. [M] et [O] [P] ont assigné Mme [G] en résolution des prêts et en remboursement.

3. Un jugement du 1er octobre 2012 a prononcé la résolution du prêt et la déchéance du terme, déclaré immédiatement exigible le capital restant dû, dit que la somme porterait intérêts et condamné Mme [G] à verser aux prêteurs des dommages et intérêts.

4. Après que Mme [G] a relevé appel du jugement, elle a été mise en redressement judiciaire le 21 février 2013.

5. Le [Date décès 2] 2016, [O] [P] est décédée, en laissant pour lui succéder ses deux enfants, [I] et [S] [M].

6. Le plan de redressement, arrêté le 16 octobre 2014, a été résolu par un jugement du 16 novembre 2017, confirmé par un arrêt du 11 décembre 2018, la liquidation de Mme [G] étant prononcée à la même date. M. [L] a été désigné liquidateur.

7. L'instance d'appel, précédemment interrompue, a été reprise par conclusions déposées le 21 août 2019 par MM. [T] et [I] [M] et Mme [S] [M] (les consorts [M]), ces derniers intervenant volontairement à l'instance.

8. Les consorts [M], qui avait préalablement déclaré leurs créances le 2 février 2018, ont assigné le liquidateur en intervention forcée.

Examen des moyens

Sur les trois moyens du pourvoi réunis

Enoncé des moyens

9. Par le premier moyen, le liquidateur fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement du 1er octobre 2012 ayant prononcé la résolution des prêts contractés le 19 janvier 2005 par Mme [G], prononcé la déchéance du terme, déclaré immédiatement exigible le capital restant dû, constaté les créances des consorts [M] et fixé ces créances au passif de la liquidation judiciaire, alors « que l'ouverture d'une procédure collective interrompt ou interdit toute action en justice, de la part des créanciers, tendant à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent ; qu'en confirmant le jugement ayant prononcé la résolution des prêts contractés le 19 janvier 2005, motif pris des manquements graves de Mme [G] à son obligation de rembourser les sommes empruntées, quand ils constataient par ailleurs qu'au cours de l'instance d'appel, une procédure collective avait été ouverte au profit de Mme [G], les juges du fond ont violé les articles L. 622-21, I et L. 641-3 du code de commerce. »

10. Par le deuxième moyen, il fait grief à l'arrêt de dire que les demandes formulées par Mme [G] étaient irrecevables à raison du dessaisissement lié à l'ouverture d'une procédure collective, puis de prononcer la résolution des prêts contractés le 19 janvier 2005, la déchéance du terme, de déclarer immédiatement exigible le capital restant dû, de constater les créances des consorts [M] et de les fixer au passif de la liquidation de Mme [G], alors « que le débiteur dessaisi de l'administration et de la disposition de ses biens, dont les droits et actions sur son patrimoine sont exercés par le liquidateur, conserve le droit propre d'exercer un recours contre les décisions fixant, après reprise d'une instance en cours lors du jugement d'ouverture, une créance à son passif ou le condamnant à payer un créancier ; que par suite, au cas d'espèce, étaient recevables les prétentions formées par Mme [G], après reprise d'instance, pour s'élever à l'encontre des demandes des consorts [M] tendant à la fixation de créances à leur profit au passif de Mme [G] ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 641-9 du code de commerce. »

11. Par le troisième moyen, il fait grief à l'arrêt de dire que les consorts [M] disposent d'un titre exécutoire leur permettant d'exercer leurs droits sur les immeubles appartenant à Mme [G], alors « que dans l'hypothèse où une déclaration d'insaisissabilité fait obstacle à ce que le mandataire judiciaire appréhende un bien en vue de le réaliser afin de désintéresser les créanciers, il appartient au premier chef au débiteur de défendre à l'action des créanciers se prévalant de l'inopposabilité à leur égard de la déclaration d'insaisissabilité, pour contester les créances qu'ils invoquent ; que par suite, au cas d'espèce, étaient recevables les prétentions formées par Mme [G] pour s'élever à l'encontre des demandes des consorts [M] qui invoquaient l'inopposabilité à leur égard de la déclaration d'insaisissabilité faite par Mme [G] ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 526-1, L. 622-7, L. 622-21, L. 641-3 et L. 641-9 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

12. Le liquidateur, qui, devant la cour d'appel, s'en est rapporté à justice sur l'ensemble des prétentions des consorts [M], n'est pas recevable à présenter ces moyens devant la Cour de cassation.

13. Les moyens sont donc irrecevables.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : Mme Vallansan - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP Richard -

Com., 17 janvier 2024, n° 23-12.283, (B) (R), FRH

Cassation partielle

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Assurance contre le risque de non-paiement – Subrogation de l'AGS – Domaine d'application – Créances garanties par le superprivilège

Il résulte du 2° de l'article L. 3253-16 du code du travail, que, lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, les institutions de garantie contre le non-paiement des salaires mentionnées à l'article L. 3253-14 de ce code sont subrogées dans les droits des salariés pour lesquels elles ont réalisé des avances, pour les créances garanties par le privilège prévu aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8, et les créances avancées au titre du 3° de l'article L. 3253-8 du même code.

Cette subrogation ayant pour effet d'investir ces institutions de garantie de la créance des salariés avec tous ses avantages et accessoires, présents et à venir, le superprivilège garantissant le paiement de leurs créances, qui n'est pas exclusivement attaché à la personne des salariés, est transmis à l'AGS, qui bénéficie, en application de l'article L. 625-8 du code de commerce, du droit à recevoir un paiement opéré sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective.

Doit, en conséquence, être censuré l'arrêt qui refuse ce droit à l'AGS, au motif que seul le salarié bénéficie d'un privilège spécifique et attaché à sa personne, dérogeant au principe d'interdiction des paiements instauré à l'ouverture des procédures collectives pour les créances antérieures, dont l'institution de garantie ne peut bénéficier sans remettre en cause les distributions de l'actif distribuable dans l'ordre défini par l'article L. 643-8 du code de commerce.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 20 janvier 2023), le 26 janvier 2022, la société Sigfox a été mise en redressement judiciaire.

Par deux jugements du 21 avril 2022, le tribunal a arrêté un plan de cession des actifs de la société Sigfox au bénéfice de la société Unadiz Holdings Pte, puis a converti la procédure collective en liquidation judiciaire, la société BDR et associés étant désignée en qualité de liquidateur.

2. Le 26 avril 2022, le liquidateur a saisi le Centre de gestion et d'études AGS (CGEA) de [Localité 4] d'une demande par l'Association de garantie des salaires (l'AGS) pour assurer le paiement des salaires dus pour la période du 1er au 21 avril 2022 et des congés payés dus entre le 1er juin 2020 et le 21 avril 2022.

3. Le CGEA lui ayant opposé un refus en faisant valoir que, la cession de l'entreprise étant définitive, le liquidateur disposait du prix de cession et d'une trésorerie suffisante pour assurer le paiement des sommes dont il demandait l'avance, ce dernier l'a assigné devant le tribunal de la procédure collective pour obtenir le versement des sommes portées sur le relevé des créances salariales numéroté 6.

4. L'AGS a alors demandé à recevoir un paiement sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective au titre de sa créance superprivilégiée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. L'UNEDIC, agissant en sa qualité de gestionnaire de l'AGS, fait grief à l'arrêt de la condamner au versement d'une somme équivalente au solde du relevé des créances salariales numéro 6, alors :

« 1°/ que ce n'est que si les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais prévus par l'article L. 3253-19 du code du travail, que le mandataire judiciaire peut demander, sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à son article L. 3253-14 ; qu'en jugeant qu'« en matière de redressement et de liquidation judiciaire, l'insuffisance des fonds est présumée, de sorte que son appréciation est confiée à la seule appréciation du mandataire » et qu'« en présence d'un relevé de créance présenté aux institutions de garantie des salaires sous la seule responsabilité du mandataire, la garantie de l'UNEDIC AGS-CGEA ne peut être exclue au motif qu'à la suite de l'adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession », pour rejeter l'argumentation de la délégation UNEDIC-AGS aux termes de laquelle la garantie de l'AGS ne pouvait être mise en oeuvre dès lors, d'une part, que le liquidateur disposait de 670 000 euros au titre de la trésorerie courante de la société Sigfox, ainsi que du prix de cession de 3 300 000 euros, la cour d'appel a violé l'article L. 3253-20 du code du travail ;

2°/ que l'AGS a un droit propre pour contester le principe et l'étendue de sa garantie, dans tous les cas où les conditions de celle-ci ne paraissent pas remplies ; qu'en jugeant qu'« en matière de redressement et de liquidation judiciaire, l'insuffisance des fonds est présumée, de sorte que son appréciation est confiée à la seule appréciation du mandataire » et « qu'en présence d'un relevé de créance présenté aux institutions de garantie des salaires sous la seule responsabilité du mandataire, la garantie de l'UNEDIC AGS-CGEA ne peut être exclue au motif qu'à la suite de l'adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession », la cour d'appel a violé l'article L. 3253-20 du code du travail, ensemble l'article L. 625-4 du code de commerce ;

3°/ que la charge de la preuve de ce que les créances ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais prévus par l'article L. 3253-19 du code du travail repose sur le mandataire judiciaire ; qu'en jugeant qu'« en matière de redressement et de liquidation judiciaire, l'insuffisance des fonds est présumée, de sorte que son appréciation est confiée à la seule appréciation du mandataire » et qu'« en présence d'un relevé de créance présenté aux institutions de garantie des salaires sous la seule responsabilité du mandataire, la garantie de l'UNEDIC AGS-CGEA ne peut être exclue au motif qu'à la suite de l'adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession », la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ;

4°/ qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; qu'en jugeant qu'« en matière de redressement et de liquidation judiciaire, l'insuffisance des fonds est présumée, de sorte que son appréciation est confiée à la seule appréciation du mandataire » et qu'« en présence d'un relevé de créance présenté aux institutions de garantie des salaires sous la seule responsabilité du mandataire, la garantie de l'UNEDIC AGS-CGEA ne peut être exclue au motif qu'à la suite de l'adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession », la cour d'appel a violé l'article 9 du code de procédure civile ;

5°/ que les présomptions qui ne sont pas établies par la loi, sont laissées à l'appréciation du juge, qui ne doit les admettre que si elles sont graves, précises et concordantes, et dans les cas seulement où la loi admet la preuve par tout moyen ; qu'« en jugeant qu'en matière de redressement et de liquidation judiciaire, l'insuffisance des fonds est présumée, de sorte que son appréciation est confiée à la seule appréciation du mandataire » et qu'« en présence d'un relevé de créance présenté aux institutions de garantie des salaires sous la seule responsabilité du mandataire, la garantie de l'UNEDIC AGS-CGEA ne peut être exclue au motif qu'à la suite de l'adoption de la décision de cession des actifs, les créances pourraient être payées sur les fonds disponibles issus du prix de cession », et qu'il ne serait pas possible à l'AGS de rapporter la preuve de l'existence de fonds disponibles, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil. »

Réponse de la Cour

6. D'une part, selon l'article L. 3253-19, 1° et 3°, du code du travail, en cas d'ouverture d'une procédure collective, il incombe au mandataire judiciaire d'établir le relevé des créances mentionnées aux articles L. 3253-2 et L. 3253-4 de ce code dans les dix jours suivant le prononcé du jugement d'ouverture et, pour les salaires et les indemnités de congés payés couvertes en application du 3° de l'article L. 3253-8 et les salaires couverts en application du dernier alinéa de ce même article, dans les dix jours suivant l'expiration des périodes de garantie prévues à ce 3° et ce, jusqu'à concurrence du plafond mentionné aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8 du même code.

7. D'autre part, l'article L. 3253-20 du code du travail dispose, en son premier alinéa, que si les créances salariales ne peuvent être payées en tout ou partie sur les fonds disponibles avant l'expiration des délais prévus par l'article L. 3253-19, le mandataire judiciaire demande, sur présentation des relevés, l'avance des fonds nécessaires aux institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 de ce code.

Le second alinéa de ce texte prévoit pour sa part, qu'en cas d'ouverture d'une sauvegarde, le mandataire judiciaire justifie à ces institutions, lors de sa demande, que l'insuffisance des fonds disponibles est caractérisée, la réalité de cette insuffisance pouvant être contestée par l'AGS devant le juge-commissaire.

8. Faisant l'exacte application de ces textes, la cour d'appel a retenu, sans instituer une présomption irréfragable ni méconnaître les règles gouvernant l'administration de la preuve, ni la subsidiarité de l'intervention de l'AGS, que l'obligation de justification préalable par le mandataire judiciaire de l'insuffisance des fonds disponibles de la procédure collective et la possibilité de sa contestation immédiate par les institutions de garantie ne sont prévues qu'en cas de sauvegarde et en a déduit qu'en dehors de cette procédure, aucun contrôle a priori n'est ouvert à l'AGS, de sorte que, sur la présentation d'un relevé de créances salariales établi sous sa responsabilité par le mandataire judiciaire, et afin de répondre à l'objectif d'une prise en charge rapide de ces créances, l'institution de garantie est tenue de verser les avances demandées.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

Mais sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. L'UNEDIC, agissant en sa qualité de gestionnaire de l'AGS, fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à obtenir la condamnation du liquidateur, ès qualités, à lui rembourser les sommes avancées au titre des créances salariales superprivilégiées, alors « que les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 du code du travail sont subrogées dans les droits des salariés pour lesquels elles ont réalisé des avances pour les créances garanties par le privilège prévu aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8 et les créances avancées au titre du 3° de l'article L. 3253-8, lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ; que nonobstant l'existence de toute autre créance, les créances que garantit le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail doivent, sur ordonnance du juge-commissaire, être payées dans les dix jours du prononcé du jugement ouvrant la procédure par le débiteur ou, lorsqu'il a une mission d'assistance, par l'administrateur, si le débiteur ou l'administrateur dispose des fonds nécessaires ; que toutefois, avant tout établissement du montant de ces créances, le débiteur ou l'administrateur s'il a une mission d'assistance doit, avec l'autorisation du juge-commissaire et dans la mesure des fonds disponibles, verser immédiatement aux salariés, à titre provisionnel, une somme égale à un mois de salaire impayé, sur la base du dernier bulletin de salaire, et sans pouvoir dépasser le plafond visé à l'article L. 143-10 du code du travail ; qu'à défaut de disponibilités, les sommes dues en vertu des deux règles précitées doivent être acquittées sur les premières rentrées de fonds ; qu'en jugeant que l'article L. 625-8 du code de commerce instaure, au bénéfice du seul salarié, un privilège spécifique dans les limites de l'article L. 3253-2 du code du travail, par dérogation au principe d'interdiction des paiements instauré à l'ouverture des procédures collectives pour les créances antérieures, avec versement sur les premières rentrées de fonds. Il s'agit d'un droit attaché à la personne du salarié pour lequel l'AGS ne peut bénéficier d'une subrogation sans remettre en cause les répartitions de l'actif distribuable dans l'ordre défini par l'article L. 643-8 du code de commerce », la cour d'appel a violé l'article L. 3253-16 du code du travail, ensemble l'article L. 625-9 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 625-8 du code de commerce, rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-14, alinéa 1er, du même code et L. 3253-16, 2° du code du travail :

11. Selon le premier de ces textes, nonobstant l'existence de toute autre créance, les créances que garantit le privilège établi aux articles L. 143-10 [L. 3253-2 et L. 3253-3], L. 143-11 [L. 3253-4], L. 742-6 et L. 751-15 [L. 7313-8] du code du travail doivent, sur ordonnance du juge-commissaire, être payées dans les dix jours du prononcé du jugement ouvrant la procédure par le débiteur ou, lorsqu'il a une mission d'assistance, par l'administrateur, si le débiteur ou l'administrateur dispose des fonds nécessaires et, qu'à défaut de disponibilités, ces sommes doivent être acquittées sur les premières rentrées de fonds.

12. Il résulte du troisième de ces textes que les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 du code du travail sont subrogées dans les droits des salariés pour lesquels elles ont réalisé des avances pour les créances garanties par le privilège prévu aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8, et les créances avancées au titre du 3° de l'article L. 3253-8 du même code, lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire.

13. Pour rejeter la demande du liquidateur, l'arrêt retient que l'article L. 625-8 du code de commerce institue, au bénéfice du seul salarié et attaché à sa personne, un privilège spécifique par dérogation au principe d'interdiction des paiements instauré à l'ouverture des procédures collectives pour les créances antérieures avec un versement sur les premières rentrées de fonds dont l'AGS ne peut bénéficier sans remettre en cause les distributions de l'actif distribuable dans l'ordre défini par l'article L. 643-8 de ce code.

14. En statuant ainsi, alors que la subrogation dont bénéficient les institutions de garantie a pour effet de les investir de la créance des salariés avec tous ses avantages et accessoires, présents et à venir, que le superprivilège garantissant le paiement de leurs créances, n'est pas exclusivement attaché à la personne des salariés, mais est transmis à l'AGS qui bénéficie ainsi du droit à recevoir un paiement sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande tendant au remboursement de ses avances au titre des créances salariales superprivilégiées formée par l'UNEDIC en sa qualité de gestionnaire de l'AGS, l'arrêt rendu le 20 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SARL Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 3253-2, L. 3253-4, L. 3253-8, L. 3253-14, L. 3253-16 et L. 7313-8 du code du travail ; articles L. 625-8 et L. 643-8 du code de commerce.

Com., 17 janvier 2024, n° 22-19.451, (B) (R), FS

Rejet

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Assurance contre le risque de non-paiement – Subrogation de l'AGS – Domaine d'application – Créances garanties par le superprivilège

Il résulte du 2° de l'article L. 3253-16 du code du travail, que, lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, les institutions de garantie contre le non-paiement des salaires mentionnées à l'article L. 3253-14 de ce code sont subrogées dans les droits des salariés pour lesquels elles ont réalisé des avances, pour les créances garanties par le privilège prévu aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8, et les créances avancées au titre du 3° de l'article L. 3253-8 du même code.

Doit être approuvé l'arrêt qui retient que cette subrogation ayant pour effet d'investir ces institutions de garantie de la créance des salariés avec tous ses avantages et accessoires, présents et à venir, le superprivilège garantissant le paiement de leurs créances, qui n'est pas exclusivement attaché à la personne des salariés, est transmis à l'AGS, laquelle bénéficie, en application de l'article L. 625-8 du code de commerce, du droit à recevoir un paiement qui, opéré sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective et hors le classement des différentes créances sujettes à admission, ne constitue pas un paiement à titre provisionnel opéré sur le fondement de l'article L. 643-3, alinéa 1, de ce code et ne peut ainsi donner lieu à répétition.

Redressement et liquidation judiciaires – Créances – Assurance contre le risque de non-paiement – Subrogation de l'AGS – Créances garanties par le superprivilège – Droit de recevoir paiement – Paiement à titre provisionnel (non)

Intervention

1. Il est donné acte au Conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires de son intervention volontaire au soutien de la société [L] [S], en sa qualité de liquidateur de la société Silicia Glass.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 7 juin 2022), le 28 août 2019, la société Silicia Glass a été mise en redressement judiciaire. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du 2 décembre 2019, la société [L] [S] étant désignée en qualité de liquidateur.

3. L'UNEDIC, en son Centre de gestion et d'études - AGS (CGEA) de [Localité 5], gestionnaire de l'Association de garantie des salaires (l'AGS), ayant avancé différentes rémunérations dues aux salariés de la société Silicia Glass, le liquidateur a saisi le juge-commissaire d'une requête aux fins d'être autorisé à lui régler, à titre provisionnel, la créance superprivilégiée qui en était résultée.

Examen des moyens

Sur le second moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Et sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. Le liquidateur fait grief à l'arrêt d'infirmer l'ordonnance du juge-commissaire en ce qu'elle a dit que le paiement autorisé au profit de l'AGS au titre de la créance superprivilégiée serait fait à titre provisionnel et que les fonds indûment versés devraient être restitués sur première demande du liquidateur en application des dispositions de l'article R. 643-2 du code de commerce, alors :

« 1°/ que la subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu'il a payé, la créance et ses accessoires, à l'exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier ; que le droit à un paiement prioritaire de la créance garantie par le superprivilège des salaires sur les fonds disponibles et les premières rentrées, prévu par l'article L. 625-8 du code de commerce, déroge à la règle de l'interdiction du paiement des créances antérieures à l'ouverture de la procédure, en raison de la nature alimentaire de la créance salariale ; que ce droit est dès lors exclusivement attaché à la personne du salarié ; que l'AGS subrogée dans les droits des salariés pour lesquels elle a réalisé des avances au titre des créances garanties par le privilège prévu à l'article L. 3253-2 pour les rémunérations de toute nature dues aux salariés pour les soixante derniers jours de travail, peut seulement se prévaloir du droit d'être payée par préférence sur toute autre créance privilégiée lors de la répartition de l'actif, mais ne peut bénéficier d'un droit au paiement prioritaire et définitif de sa créance sur les fonds disponibles et les premières rentrées ; qu'elle ne peut obtenir tout au plus qu'un paiement à titre provisionnel sur autorisation du juge-commissaire, les fonds indûment versés devant être restitués ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 625-8 du code de commerce, L. 3253-16 du code du travail et 1346-4 du code civil ;

2°/ qu'à supposer que l'AGS qui a réalisé des avances au titre des créances garanties par le privilège prévu à l'article L. 3253-2 pour les rémunérations de toute nature dues aux salariés pour les soixante derniers jours de travail, soit subrogée dans les droits des salariés au bénéfice du paiement prioritaire prévu par l'article L. 625-8 du code de commerce, ce droit à un paiement prioritaire ne l'autorise pas à échapper à l'obligation faite à tout créancier qui a reçu un paiement en violation de la règle de l'égalité des créanciers chirographaires ou par suite d'une erreur sur l'ordre des privilèges, de restituer les sommes ainsi versées ; que dès lors, quand bien même elle serait subrogée dans le droit des salariés à un paiement prioritaire des créances superprivilégiées, les sommes versées par avance à l'AGS au titre de ces créances ne peuvent l'être qu'à titre provisionnel et doivent être restituées le cas échéant notamment pour permettre de faire face aux frais et dépens de la liquidation judiciaire exposés dans l'intérêt de tous les créanciers y compris de l'AGS ; qu'en décidant que le juge-commissaire ne pouvait décider que les sommes ainsi versées l'étaient à titre provisionnel, la cour d'appel a violé les articles L. 625-8, L. 643-7-1, L. 643-8 et L. 643-3 dans leur rédaction applicable à la cause et R. 643-2 du code de commerce ;

3°/ qu'en toute hypothèse, le droit au paiement prioritaire des créances bénéficiant du superprivilège des salaires prévu par l'article L. 625-8 du code de commerce est sans application à une procédure de liquidation judiciaire qui plus est comme en l'espèce, sans poursuite d'activité ; que dès lors l'AGS qui a réalisé des avances au titre des créances garanties par le privilège prévu à l'article L. 3253-2 pour les rémunérations de toute nature dues aux salariés pour les soixante derniers jours de travail dans une procédure de liquidation judiciaire sans poursuite de l'activité, ne pouvait se prévaloir du droit au paiement prioritaire prévu par l'article L. 625-8 du code de commerce, pour échapper au caractère provisionnel du paiement de sa créance ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article L. 625-8 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

6. D'une part, l'article L. 625-8 du code de commerce, rendu applicable à la liquidation judiciaire de la société Silicia Glass par l'article L. 641-14, alinéa 1er, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021, prévoit que, nonobstant l'existence de toute autre créance, les créances que garantit le privilège établi aux articles L. 143-10 [L. 3253-2 et L. 3253-3], L. 143-11 [L. 3253-4], L. 742-6 et L. 751-15 [L. 7313-8] du code du travail doivent, sur ordonnance du juge-commissaire, être payées dans les dix jours du prononcé du jugement ouvrant la procédure par le débiteur ou, lorsqu'il a une mission d'assistance, par l'administrateur, si le débiteur ou l'administrateur dispose des fonds nécessaires et que, à défaut de disponibilités, ces sommes doivent être acquittées sur les premières rentrées de fonds.

7. D'autre part, il résulte du 2° de l'article L. 3253-16 du code du travail, que, lors d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, les institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 de ce code sont subrogées dans les droits des salariés pour lesquels elles ont réalisé des avances, pour les créances garanties par le privilège prévu aux articles L. 3253-2, L. 3253-4 et L. 7313-8, et les créances avancées au titre du 3° de l'article L. 3253-8 du même code.

8. La subrogation dont bénéficient les institutions de garantie ayant pour effet de les investir de la créance des salariés avec tous ses avantages et accessoires, présents et à venir, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que le superprivilège garantissant le paiement de leurs créances, lequel n'est pas exclusivement attaché à la personne des salariés, est transmis à l'AGS qui bénéficie ainsi du droit à recevoir un paiement qui, opéré sur les premières rentrées de fonds de la procédure collective et hors le classement des différentes créances sujettes à admission, ne constitue pas un paiement à titre provisionnel opéré sur le fondement de l'article L. 643-3, alinéa 1, du code de commerce et ne peut ainsi donner lieu à répétition.

9. Le moyen n'est donc fondé en aucune de ses branches.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Riffaud - Avocat général : Mme Henry - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SARL Delvolvé et Trichet -

Textes visés :

Articles L. 3253-2, L. 3253-4, L. 3253-8, L. 3253-14, L. 3253-16 et L. 7313-8 du code du travail ; articles L. 625-8 et L. 643-3, alinéa 1, du code de commerce.

Soc., 31 janvier 2024, n° 22-10.276, (B), FS

Rejet

Redressement judiciaire – Plan – Plan de cession – Substitution de cessionnaire – Conditions – Autorisation du tribunal – Défaut – Effets – Contrats de travail des salariés de l'entreprise cédée – Transfert des contrats de travail au cessionnaire – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 30 septembre 2021) et les productions, M. [I] a été engagé en qualité d'agent de sécurité à compter du 12 février 2015 par la société Leader sécurité.

2. Après l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Leader sécurité le 31 août 2017, le tribunal a prononcé le 17 août 2018 sa liquidation judiciaire et a arrêté un plan de cession de ses actifs, avec pour cessionnaire la société Groupe SAG, en précisant que l'entrée en jouissance de cette dernière aurait lieu à la date du jugement arrêtant le plan de cession.

3. Un avenant au contrat de travail a été soumis à la signature du salarié le 17 août 2018 par la société Agence alpine gardiennage sécurité (la société SAGS) aux fins de transférer son contrat de travail à cette société.

Le salarié a refusé de le signer, soutenant que la société Groupe SAG demeurait son employeur.

4. Le 29 août 2018, à l'occasion d'un litige l'opposant à la société Leader sécurité devant la juridiction prud'homale, le salarié a appelé en intervention forcée la société Groupe SAG, la société SAGS ainsi que M. [N], en sa qualité d'administrateur judiciaire et la société Luc Gomis, aux droits de laquelle est venue la société MJ synergie, en sa qualité de mandataire judiciaire de cette société, ainsi que l'AGS CGEA d'[Localité 8], pour faire juger que son contrat de travail avait été transféré à la société Groupe SAG et que le transfert décidé à la société SAGS était frauduleux.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. La société Groupe SAG fait grief à l'arrêt de dire que le contrat de travail du salarié a été transféré de plein droit en son sein en application du jugement du tribunal de commerce du 17 août 2018, alors « que le transfert de plein droit des contrats de travail organisé par l'article L 1224-1 du code du travail a pour objet d'assurer la pérennité de l'emploi des salariés ; qu'en affirmant, pour dire que la société Groupe SAG était l'employeur de M. [I] à compter du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 17 août 2018, que le transfert du contrat de travail de M. [I] au profit de la société SAGS s'était fait en fraude de l'article L 1224-1 du code du travail et du jugement du tribunal de commerce de Paris du 17 août 2018, dès lors que l'offre de reprise avait été présentée par la société Groupe SAG, après avoir pourtant relevé que les contrats de travail des salariés, dont celui de M. [I], s'étaient poursuivis au sein de la société SAGS de sorte que bien que le transfert ait opéré au sein d'une autre société que celle désignée dans le jugement, la pérennité des emplois avait été assurée, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L 1224-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.

8. Selon l'article L. 642-5, alinéa 1, du code de commerce, après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs, le tribunal retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé, le paiement des créanciers et qui présente les meilleures garanties d'exécution. Il arrête un ou plusieurs plans de cession.

9. En application de l'alinéa 3 du même texte, le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions applicables à tous.

10. En vertu de l'article L. 642-6 du code de commerce, une modification substantielle dans les objectifs et les moyens du plan ne peut être décidée que par le tribunal, à la demande du cessionnaire.

11. Aux termes de l'article L. 642-9, alinéa 3, du même code, toute substitution de cessionnaire doit être autorisée par le tribunal dans le jugement arrêtant le plan de cession, sans préjudice de la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 642-6.

L'auteur de l'offre retenue par le tribunal reste garant solidairement de l'exécution des engagements qu'il a souscrits.

12. Il en résulte qu'en l'absence d'autorisation par le tribunal ayant arrêté le plan de redressement d'une substitution de cessionnaire, les contrats de travail des salariés de l'entreprise cédée dont l'emploi est maintenu par le plan sont de plein droit transférés au cessionnaire.

13. La cour d'appel, qui a constaté que le jugement du tribunal de commerce n'avait arrêté le plan de cession qu'au profit de la société Groupe SAG et qu'il ne mentionnait aucune autorisation d'une éventuelle substitution du cessionnaire, notamment au profit de la société SAGS ou d'une société à créer, en a exactement déduit que le contrat de travail du salarié s'était poursuivi de plein droit avec la société Groupe SAG en application de l'article L. 1224-1 du code du travail.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

15. La société Groupe SAG fait grief à l'arrêt de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié à ses torts exclusifs à effet de cet arrêt et de la condamner, en conséquence, à verser au salarié diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, à titre d'indemnité de licenciement et à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui ordonner de remettre au salarié un certificat de travail mentionnant comme période d'emploi, le 17 août 2018 avec une reprise d'ancienneté au 12 février 2015 jusqu'à la date du prononcé de l'arrêt, une attestation Pôle emploi, un solde de tout compte et un bulletin de paie conformes, alors « que, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation, qui ne manquera pas d'intervenir du chef du premier et/ou du deuxième moyen, emportera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts exclusifs de la société Groupe SAG à effet du présent arrêt et en ce qu'il l'a condamnée à lui payer diverses sommes et lui remettre divers documents subséquents. »

Réponse de la Cour

16. Les premier et deuxième moyens étant rejetés, le grief tiré d'une cassation par voie de conséquence est sans portée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Sommer - Rapporteur : M. Pietton - Avocat général : Mme Grivel - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Poupet et Kacenelenbogen -

Textes visés :

Article L. 642-9, alinéa 3, du code de commerce ; article L. 1224-1 du code du travail.

Com., 17 janvier 2024, n° 22-18.090, (B), FRH

Cassation partielle

Responsabilités et sanctions – Responsabilité des créanciers – Conditions – Cas d'ouverture – Fraude – Caractérisation – Utilisation de moyens déloyaux

Aux termes de l'article L. 650-1 du code de commerce, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci.

Constitue un acte frauduleux, au sens de ce texte, celui réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu, ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 mai 2022), la société Banque populaire du Sud (la banque) a consenti à l'EARL Domaine du [6] (l'EARL) entre 1998 et 2009 plusieurs concours bancaires.

2. L'EARL a également souscrit un billet à ordre d'un montant de 440 000 euros le 14 mars 2008 qui est demeuré impayé à l'échéance du 15 avril 2008.

3. Les 2 mai et 31 juillet 2009, la banque a consenti aux époux [U] deux prêts relais respectivement de 273 000 euros et 400 000 euros dans l'attente de la vente d'un bien et en garantie desquels, ils ont consenti une hypothèque.

4. Le 30 mai 2012, un tribunal a ouvert une procédure de redressement judiciaire de l'EARL.

La banque a déclaré sa créance le 30 mai 2012.

Par un jugement du 19 janvier 2013, ce tribunal a constaté la confusion du patrimoine avec celui de M. [U] et lui a étendu la procédure.

5. Le 16 janvier 2014, un plan de redressement a été arrêté, M. [Y] étant désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

6. Le 6 janvier 2017, le commissaire à l'exécution du plan a assigné la banque en responsabilité du fait des concours consentis.

Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal, pris en ses troisième et quatrième branches

Enoncé du moyen

7. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer M. [Y], mandataire judiciaire, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de l'EARL et de M. [U], recevable et bien fondé en son action engagée à l'encontre de la banque pour soutien abusif à compter de mai 2009, de la condamner à réparer le préjudice subi par M. [Y], mandataire judiciaire, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de l'EARL et de M. [U], en raison du soutien abusif apporté à ces derniers à compter de mai 2009, de surseoir à statuer sur le préjudice, d'ordonner avant-dire droit une expertise pour statuer sur le préjudice et d'ordonner la nullité de l'hypothèque conventionnelle consentie, alors :

« 3°/ qu'en tout état de cause, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation est ouverte, un établissement de crédit ne peut être tenu pour responsable des préjudices subis du fait des concours qu'il a consentis et les garanties prises en contrepartie de ces concours annulées ou réduites non seulement que si les concours sont fautifs mais également que si les garanties sont disproportionnées à ceux-ci ou en cas d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou de fraude, laquelle suppose que ledit établissement ait utilisé, lors de l'octroi des concours fautifs, des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu ou ait été animé par l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative et prohibitive ; qu'en considérant, pour condamner la Banque populaire du Sud à réparer le préjudice subi en raison du soutien abusif apporté à l'Earl Domaine du [6] et à M. [G] [U] à compter de mai 2009 et pour annuler l'hypothèque conventionnelle consentie en garantie du prêt consenti par ce dernier le 8 octobre 2009, après avoir retenu que la banque était manifestement à l'origine des prêts relais contractés par M. [U], que les fonds empruntés avaient intégralement servi à rembourser les échéances des emprunts et que les prêts relais litigieux faisaient partie d'un montage financier d'ensemble orchestré par la banque pour tenter de maintenir l'activité de l'Earl du Domaine du [6], et qu'en conséquence, l'octroi par personnes interposées de prêts à cette Earl qui, dans une situation irrémédiablement compromise, ne pouvait assurer la charge de ses emprunts, caractérisait l'utilisation par la banque de procédés constitutifs de manoeuvres contraires aux lois et règlements permettant d'éluder l'application d'une loi impérative en matière de procédure collective avec la volonté caractérisée d'éluder l'application de la loi impérative visant l'état de cessation des paiements et le principe de l'égalité des créanciers, la cour d'appel, qui s'est bornée à caractériser le caractère fautif des concours consentis, s'est prononcée par des motifs impropres à établir que la Banque populaire du Sud avait commis une fraude, lors de l'octroi jugé fautif des prêts relais, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;

4°/ qu'en ajoutant, pour condamner la Banque populaire du Sud à réparer le préjudice subi en raison du soutien abusif apporté à l'Earl Domaine du [6] et à M. [U], annuler l'hypothèque conventionnelle consentie en garantie du prêt consenti par ce dernier le 8 octobre 2009 et commettre un expert avec notamment pour mission de réunir tous les éléments d'appréciation utiles permettant au tribunal de déterminer le préjudice subi à compter du 15 avril 2008, qu'en ne mettant pas le billet à l'ordre à l'encaissement le 15 avril 2008 et plus généralement, en laissant arriver le billet à ordre à échéance sans réagir, la banque avait commis une fraude qui avait retardé l'ouverture de la procédure collective prononcée, de manière inéluctable, en 2012, sans constater en quoi l'absence de réaction à l'échéance du billet à ordre avait été frauduleuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 650-1 du code de commerce :

8. Aux termes de ce texte, lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci.

9. Constitue un acte frauduleux, au sens de ce texte, celui réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu, ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive.

10. Pour condamner la banque à réparer le préjudice subi en raison du soutien abusif apporté à l'EARL et à M. [U] à compter de mai 2009 et pour annuler l'hypothèque conventionnelle consentie en garantie du prêt consenti par ce dernier, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la banque, en ne mettant pas le billet à ordre à l'encaissement, et en incitant M. et Mme [U] à souscrire les deux prêts relais dont les fonds ont intégralement servi à rembourser les échéances des emprunts et qui faisaient partie d'un montage financier d'ensemble orchestré par la banque pour tenter de maintenir l'activité de l'EARL, a usé de manoeuvres contraires aux lois et règlements permettant d'éluder l'application d'une loi impérative en matière de procédure collective avec la volonté caractérisée d'éluder l'application de la loi visant l'état de cessation des paiements et le principe de l'égalité des créanciers.

11. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser une fraude commise par la banque et sans constater en quoi l'absence de réaction de la banque à l'échéance du billet à ordre était frauduleuse, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal ni sur le pourvoi incident devenu sans objet, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il déclare M. [Y], mandataire judiciaire, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de l'EARL Domaine [6] et de M. [U] recevable et bien fondé en son action engagée à l'encontre de la société Banque populaire du Sud pour soutien abusif à compter de mai 2009, condamne la société Banque populaire du Sud à réparer le préjudice subi par M. [Y], mandataire judiciaire, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de l'EARL Domaine [6] et de M. [U] en raison du soutien abusif apporté à ces derniers à compter de mai 2009, sursoit à statuer sur le préjudice, ordonne avant dire-droit une expertise et ordonne la nullité de l'hypothèque conventionnelle consentie selon acte de prêt avec affectation hypothécaire du 8 octobre 2009 de M. [E] notaire à [Localité 8] par M. [G] [U] sur les biens et droits immobiliers sis à [Localité 7] [Adresse 1] et [Adresse 2], cadastrés section HN n° [Cadastre 4], lots n° 121, 122 et 123 et la radiation de l'inscription d'hypothèque conventionnelle inscrite au premier bureau de la conservation des hypothèques de Montpellier le 30 août 2012, volume 2012 V n° 6914 en renouvellement de l'inscription en date du 16 novembre 2009 volume 2009 V n° 5915 pour un montant principal de 400 000 euros sur les biens et droits immobiliers sis à [Localité 7] [Adresse 1] et [Adresse 2], cadastrés section HN n° [Cadastre 4], lots n° 121, 122 et 123 ainsi que la radiation du commandement publié à la conservation des hypothèques le 6 février 2013, volume 2013 S n° 19 et les formalités subséquentes, l'arrêt rendu le 18 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Vigneau - Rapporteur : M. Boutié - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SAS Buk Lament-Robillot ; SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés -

Textes visés :

Article L. 650-1 du code de commerce.

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