Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2022

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL

2e Civ., 27 janvier 2022, n° 20-17.330, (B), FRH

Cassation

Cotisations – Taux – Fixation – Eléments de calcul pris en compte – Modification par une décision de justice ultérieure – Portée

Le taux de cotisation dû au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles déterminé par les caisses régionales d'assurance maladie peut être remis en cause par une décision de justice qui en modifie les éléments de calcul.

L'employeur est recevable, à l'occasion de la notification du taux ainsi rectifié, à contester, devant la juridiction de la tarification, l'ensemble des bases de la tarification afférente à l'année en cause.

Cotisations – Taux – Fixation – Eléments de calcul pris en compte – Modification par une décision de justice ultérieure – Notification d'un taux rectifié – Effets

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 19 mai 2020), la caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (la caisse) a notifié, le 14 janvier 2019, à la société [3] (la société) le taux de cotisation au titre de l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles pour l'exercice 2019. A la suite d'une décision de justice du 24 septembre 2018, la caisse lui a notifié, le 14 mars 2019, un taux rectifié pour l'exercice 2019.

Le 3 mai 2019, la société a contesté ce taux, puis a saisi d'un recours la juridiction de la tarification.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

2. La société fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors « que l'employeur est recevable, à l'occasion de la notification d'un taux rectifié des cotisations d'accident du travail à la suite d'une décision de justice, à contester devant la juridiction du contentieux technique, l'ensemble des bases de la tarification afférente à l'année en cause, le taux de cotisation dû au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles déterminé par les caisses régionales d'assurance maladie peut être remis en cause par une décision de justice ultérieure qui en modifierait les éléments de calcul ; qu'au cas présent, il est constant qu'après avoir initialement notifié à la société son taux de la cotisation accident du travail pour l'exercice 2019 en janvier 2019, la caisse régionale d'assurance maladie avait, en application d'une décision de justice rendue le 24 septembre 2018, rectifié ce taux et notifié à société un nouveau taux pour l'exercice 2019, le 14 mars 2019 ; que la société pouvait donc, à l'occasion de la notification de ce nouveau taux, contester la tarification de la maladie professionnelle de la victime dès lors que le coût afférent à cette maladie constituait une base de calcul de ce taux ; qu'en déclarant néanmoins le recours formé par la société le 3 mai 2019, irrecevable comme tardif, la cour d'appel a violé les articles L. 242-5, R. 143-21 et D. 242-6-22 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles R. 142-13-2 et D. 242-6-22 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige :

3. Le taux de cotisation dû au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles déterminé par les caisses régionales d'assurance maladie peut être remis en cause par une décision de justice qui en modifie les éléments de calcul.

L'employeur est recevable, à l'occasion de la notification du taux ainsi rectifié, à contester, devant la juridiction de la tarification, l'ensemble des bases de la tarification afférente à l'année en cause.

4. Pour déclarer irrecevable le recours de la société au titre de l'exercice 2019, l'arrêt retient que l'employeur ne peut, à l'occasion de la rectification de son taux de cotisation, contester l'ensemble de sa tarification et que la notification du 14 mars 2019 ouvre de nouveaux droits de recours uniquement pour les éléments de calcul ayant justifié une nouvelle notification du taux de cotisation.

5. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'employeur avait reçu notification d'un taux rectifié, de sorte que, formé moins de deux mois après cette notification, son recours était recevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lapasset - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

2e Civ., 27 janvier 2022, n° 20-20.764, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Taux – Fixation – Etablissement distinct – Conditions – Fonctions support de nature administrative – Définition

Selon l'article 1, III, de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 15 février 2017, applicable au litige, les salariés des entreprises mentionnées aux 1° et 3° des articles D. 242-6-2 et D. 242-30 du code de la sécurité sociale constituent, sur demande de l'entreprise, un établissement distinct soumis à une tarification propre lorsqu'ils occupent à titre principal des fonctions support de nature administrative dans des locaux non exposés aux autres risques relevant de la même entreprise.

Pour l'application de ce texte, les fonctions support de nature administrative s'entendent des tâches de gestion administrative communes à toutes les entreprises telles que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les affaires juridiques, la gestion financière et les ressources humaines.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 20 août 2020), ayant antérieurement bénéficié du taux réduit des cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles applicable au personnel des sièges sociaux et bureaux des entreprises, la société [3] (la société), entreprise du bâtiment, relevant d'un mode de tarification mixte, a demandé, à la suite de la suppression du taux dit « bureau » par l'arrêté du 15 février 2017, à bénéficier d'une tarification propre à ses salariés occupant des fonctions support de nature administrative.

2. La caisse régionale d'assurance maladie d'Île-de-France (la Cramif) ayant exclu de l'application de ce taux certaines de ses salariées, la société a saisi d'un recours la juridiction de la tarification.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses quatre dernières branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses cinq autres branches

Enoncé du moyen

4. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de son recours, alors :

« 1°/ que les entreprises qui relèvent de la tarification collective ou mixte peuvent demander à ce qu'un de leurs établissements soit considéré comme distinct lorsque ses salariés occupent « à titre principal des fonctions support de nature administrative » ; que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les ressources humaines, les affaires juridiques et la gestion financière sont des fonctions supports pour lesquelles un tel taux peut être attribué, nonobstant les spécificités du poste inhérentes au secteur d'activité de l'employeur et au service auquel est affecté le salarié ; qu'en l'espèce, en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles la fiche de poste de Mme [H] mentionnait qu'elle « prépare des appels d'offres, elle établit les factures fournisseurs, elle centralise les comptes-rendus de chantiers pour classement sur serveurs ; elle est en charge de l'établissement de factures d'avancement de chantiers mensuelles (?) elle aide à la déclaration de sous-traitants ; elle est en charge de la mise à jour de la base serveur concernant le chantier en cours insertion », qui étaient toutes des fonctions support de nature administrative, nonobstant les spécificités du poste inhérentes à l'activité de la société et au service auquel était affecté la salariée, la cour d'appel violé l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, modifié par l'arrêté du 15 février 2017, et l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que les entreprises qui relèvent de la tarification collective ou mixte peuvent demander à ce qu'un de leurs établissements soit considéré comme distinct lorsque ses salariés occupent « à titre principal des fonctions support de nature administrative » ; que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les ressources humaines, les affaires juridiques et la gestion financière sont des fonctions supports pour lesquelles un tel taux peut être attribué, nonobstant les spécificités du poste inhérentes au secteur d'activité de l'employeur, au service auquel est affecté le salarié ; qu'en l'espèce, en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles la fiche de poste de Mme [I] mentionnait qu'elle « met en place des devis, courriers, travaux de gestion privatifs ; elle est en charge de négocier avec les différents partenaires ; elle détient la responsabilité technique, administrative ; commandes fournisseurs ; demande de diverses autorisations d'ouverture de chantier ; réalise les comptes-rendus de chantiers ; et établit les situations de travaux », qui étaient toutes des fonctions support de nature administrative, nonobstant les spécificités du poste inhérentes à l'activité de la société et au service auquel était affecté la salariée, la cour d'appel violé l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, modifié par l'arrêté du 15 février 2017 et l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale ;

3°/ que les entreprises qui relèvent de la tarification collective ou mixte peuvent demander à ce qu'un de leurs établissements soit considéré comme distinct lorsque ses salariés occupent « à titre principal des fonctions support de nature administrative » ; que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les ressources humaines, les affaires juridiques et la gestion financière sont des fonctions supports pour lesquelles un tel taux peut être attribué, nonobstant les spécificités du poste inhérentes au secteur d'activité de l'employeur et au service auquel est affecté le salarié ; qu'en l'espèce, en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles la fiche de poste de Mme [Z] mentionnait qu'elle « prépare des dossiers études, fait des demandes de prix auprès des fournisseurs ; établit des dossiers de candidatures (pour réponse à appels d'offres) traite des dossiers d'appel d'offres », qui étaient toutes des fonctions support de nature administrative, nonobstant les spécificités du poste inhérentes à l'activité de la société et au service auquel était affecté la salariée, la cour d'appel l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, modifié par l'arrêté du 15 février 2017 et l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale ;

4°/ que les entreprises qui relèvent de la tarification collective ou mixte peuvent demander à ce qu'un de leurs établissements soit considéré comme distinct lorsque ses salariés occupent « à titre principal des fonctions support de nature administrative » ; que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les ressources humaines, les affaires juridiques et la gestion financière sont des fonctions supports pour lesquelles un tel taux peut être attribué, nonobstant les spécificités du poste inhérentes au secteur d'activité de l'employeur et au service auquel est affecté le salarié ; qu'en l'espèce, en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles la fiche de poste de Mme [W], assistante technique amiante, rattachée au service amiante mentionnait qu'elle « effectue les saisies logiciel amiante, suivi des stocks consommables amiante, suivi de l'entretien amiante, gestion de commandes consommables amiante, gestion des formations amiante, suivi des formations amiante », qui étaient toutes des fonctions support de nature administrative, nonobstant les spécificités du poste inhérentes à l'activité de la société et au service amiante auquel était affecté la salariée, la cour d'appel violé l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, modifié par l'arrêté du 15 février 2017 et l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale ;

5°/ que les fonctions supports de nature administrative peuvent nécessiter des connaissances techniques spécifiques au secteur d'activité de l'entreprise sans perdre leur nature ; qu'en l'espèce, en se fondant sur la circonstance que Mmes [H], [I] et [Z] effectuaient des « missions spécifiques » qui « supposent de maîtriser la technique du secteur pour être menées à bien », inopérante pour en déduire que ces salariées n'occupaient pas des fonctions support de nature administrative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, modifié par l'arrêté du 15 février 2017 et de l'article L. 242-5 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article 1er, III, de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 15 février 2017, applicable au litige, les salariés des entreprises mentionnées aux 1° et 3° des articles D. 242-6-2 et D. 242-30 du code de la sécurité sociale constituent, sur demande de l'entreprise, un établissement distinct soumis à une tarification propre lorsqu'ils occupent à titre principal des fonctions support de nature administrative dans des locaux non exposés aux autres risques relevant de la même entreprise.

6. Pour l'application de ce texte, les fonctions support de nature administrative s'entendent des tâches de gestion administrative communes à toutes les entreprises telles que le secrétariat, l'accueil, la comptabilité, les affaires juridiques, la gestion financière et les ressources humaines.

7. Ayant constaté que les salariées concernées exerçaient respectivement les fonctions d'assistantes de travaux, d'assistante du service étude et d'assistante technique amiante, l'arrêt relève que les missions de ces salariées, relatées dans leur fiche de poste, ne consistent pas en des tâches de gestion communes à toutes les entreprises mais en des missions spécifiques directement liées à l'activité de gros-oeuvre de l'entreprise et qui requièrent une technicité et une connaissance du secteur pour être menées à bien.

8. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que les salariées concernées n'exerçant pas des fonctions support de nature administrative, les conditions requises pour l'application de la tarification propres aux salariés occupant à titre principal de telles fonctions, ne sont pas remplies.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Renault-Malignac - Avocat général : M. Halem - Avocat(s) : SCP Rousseau et Tapie ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article 1, III, de l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles, dans sa rédaction issue de l'arrêté du 15 février 2017 ; 1° et 3° des articles D. 242-6-2 et D. 242-30 du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 6 janvier 2022, n° 20-11.097, (B), FRH

Rejet

Cotisations – Taux – Fixation – Etablissement – Etablissement nouvellement créé

Aux termes de l'article D. 242-6-17, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, les taux nets collectifs sont applicables aux établissements nouvellement créés durant l'année de leur création et les deux années civiles suivantes, quel que soit leur effectif ou celui de l'entreprise dont ils relèvent.

Pour l'application de ce texte, en cas de dissimulation de l'existence d'un établissement, la date de création de cet établissement se situe au jour où son existence est révélée.

Cotisations – Taux – Fixation – Taux collectif – Application – Etablissement nouvellement créé – Durée – Point de départ – Date de création de l'établissement – Cas – Dissimulation

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, 19 novembre 2019), à la suite d'une inspection administrative, la [4] (la caisse) a notifié à la société [6] (la société) un taux collectif des cotisations dues au titre des accidents du travail et maladies professionnelles pour son établissement situé à Corbie, à effet au 1er février 2016.

2. La société a saisi la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail (la Cour nationale) d'un recours.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

3. La société fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes, alors :

« 1°/ que constitue un établissement distinct susceptible d'être assujetti à une tarification particulière en ce qui concerne les cotisations d'accidents du travail, toute entité présentant une implantation distincte et une activité propre, même si elle est rattachée pour sa gestion à une entreprise englobant d'autres activités ; que la seule existence d'une implantation locale à laquelle sont affectés des salariés ne caractérise pas un établissement justifiant l'assujettissement à une tarification particulière lorsque l'activité exercée par les salariés au sein de cet établissement est similaire à celle du siège social de l'entreprise et engendre des risques identiques justifiant leur classement sous le même code risque dans la nomenclature annexée à l'arrêté du 17 octobre 1995 relatif à la tarification des risques d'accidents du travail et de maladies professionnelles ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir que l'activité de son établissement de [Localité 5] était similaire à celle de son siège social d'[Localité 3] et que ces deux établissements, engendrant des risques identiques, étaient tous deux classés par la caisse sous le code risque 85.1.AD correspondant aux « Etablissements de soins privés y compris les centres de réadaptation fonctionnelle, autres instituts pour la santé (établissements thermaux etc.) » ; qu'en estimant néanmoins, que cet établissement devait être assujetti à une tarification distincte de celle du siège social au motif inopérant « que l'établissement d'[Localité 3] exerce une activité de clinique chirurgicale alors que l'établissement de [Localité 5] développe également une activité de rééducation », sans caractériser l'existence d'une activité propre engendrant un risque distinct de celui résultant de l'activité du siège social, la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail a privé sa décision de base légale au regard de l'article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale ;

2°/ qu'il appartient à la caisse qui a appliqué à un établissement une tarification distincte de celle de l'entreprise dont il dépend de démontrer sa nature d'établissement distinct et, notamment d'établir qu'il exerce une activité caractérisée par rapport à celle de l'entreprise, de nature à engendre un risque différent ; qu'est présumé engendrer un risque identique l'établissement dont l'activité relève de la même catégorie dans la nomenclature des risques ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats que l'activité de l'établissement de [Localité 5] et celle du siège social d'[Localité 3] étaient tous deux répertoriés sous le code risque 85.1.AD correspondant aux « Etablissements de soins privés y compris les centres de réadaptation fonctionnelle, autres instituts pour la santé (établissements thermaux etc.) » ; qu'il appartenait, dans ces conditions, à la caisse de démontrer que l'activité de l'établissement de [Localité 5] engendrait par nature des risques différents de celle du siège social ; qu'en décidant au contraire que cette charge incombait à la société la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, qui a renversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Aux termes de l'article D. 242-6-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement.

5. Pour l'application de ce texte, constitue un établissement distinct, susceptible d'être assujetti à une tarification particulière en ce qui concerne les cotisations d'accidents du travail et de maladies professionnelles, toute entité présentant une implantation distincte et une activité propre, même si elle est rattachée pour sa gestion à une entreprise englobant d'autres activités.

6. Ayant relevé d'une part que les établissements de [Localité 5] et d'[Localité 3] de la société disposent chacun d'une adresse propre, de sorte que les établissements présentent une implantation géographique distincte, et d'autre part, qu'il ressort de l'extrait Kbis que l'établissement d'[Localité 3] exerce une activité de clinique chirurgicale alors que l'établissement de [Localité 5] développe une activité de rééducation, la Cour nationale retient que la société ne produit aucun élément de preuve justifiant que l'activité de l'établissement de [Localité 5] n'est pas distincte de celle du siège social situé à [Localité 3].

7. De ces constatations, relevant de son pouvoir d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la Cour nationale, a pu, sans inverser la charge la preuve, décider que l'établissement situé à [Localité 5] était un établissement distinct, et en a exactement déduit qu'il devait faire l'objet d'une tarification distincte.

Sur le même moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

8. La société fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'il résulte de l'article D. 242-6-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que, sauf établissement nouveau, les taux réels sont applicables à chaque établissement d'une même entreprise lorsque l'effectif global de ladite entreprise est supérieur à cent cinquante salariés ; qu'il résulte de l'article D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable au litige, que ne peut être considéré comme un établissement nouvellement créé justifiant l'application du taux collectif, celui issu d'un précédent établissement dans lequel a été exercée une activité similaire, avec les mêmes moyens de production et ayant repris au moins la moitié du personnel ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir et démontrait que l'établissement de [Localité 5], implantation locale au sein de laquelle était appliqué le taux réel du siège social de l'entreprise, existait depuis le 1er février 2006, de sorte qu'il ne pouvait être considéré comme un établissement nouvellement créé et devait se voir appliquer un taux de cotisation calculé au regard de ses éléments statistiques propres ; qu'en décidant le contraire au motif inopérant que la caisse « n'a[urait] eu connaissance de l'existence de l'établissement de [Localité 5] qu'à l'occasion d'une inspection du 25 janvier 2016 », la Cour nationale a violé les articles D. 242-6-1, D. 242-6-2 et D. 242-6-17 du code de la sécurité sociale dans leurs rédactions applicables au litige. »

Réponse de la Cour

9. Aux termes de l'article D. 242-6-17, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2010-753 du 5 juillet 2010, applicable au litige, les taux nets collectifs sont applicables aux établissements nouvellement créés durant l'année de leur création et les deux années civiles suivantes, quel que soit leur effectif ou celui de l'entreprise dont ils relèvent.

10. Pour l'application de ce texte, en cas de dissimulation de l'existence d'un établissement, la date de création de cet établissement se situe au jour où son existence est révélée.

11. Ayant relevé que la caisse n'avait eu connaissance de l'existence de l'établissement de [Localité 5] qu'à l'occasion d'une inspection du 25 janvier 2016, la Cour nationale a décidé à bon droit que le taux collectif de cotisation lui était applicable à compter de l'année 2016.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dudit - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Article D. 242-6-17, alinéa 1, du code de la sécurité sociale.

2e Civ., 6 janvier 2022, n° 20-13.690, (B), FRH

Cassation

Maladies professionnelles – Dispositions générales – Travaux susceptibles de les provoquer – Exposition au risque – Pluralité d'employeurs – Imputation – Preuve – Charge – Détermination

Inverse la charge de la preuve et viole les articles 1353 du code civil, D. 242-6-5, D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale et 2, 4°, de l'arrêté interministériel du 16 octobre 1995, modifié, pris pour l'application de l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel qui, pour retenir que les conséquences financières de la maladie professionnelle de la victime doivent être inscrites au compte spécial, énonce que celle-ci, qui a travaillé dans un établissement inscrit dans la liste des établissements annexés à un arrêté ministériel fixant la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (ACAATA), est présumée, sauf preuve contraire, avoir été exposée habituellement à cette substance dans l'exercice de son activité, alors que la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant sa constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire.

Cotisations – Taux – Fixation – Taux individuel – Accidents ou maladies professionnelles prises en considération – Maladies professionnelles – Dépenses engagées par la caisse – Inscription au compte spécial

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 18 décembre 2019), la société [3], aux droits de laquelle vient la société [3] (la société), a contesté l'inscription au compte employeur des dépenses afférentes à la prise en charge au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles d'une atteinte pleurale déclarée le 4 novembre 2016 par un de ses salariés (la victime).

2. La [4] (la [4]) ayant rejeté sa demande, la société a saisi d'un recours la juridiction de la tarification.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

3. La [4] fait grief à l'arrêt de dire que les dépenses de la maladie déclarée par la victime doivent être imputées au compte spécial, alors :

« 2°/ que la présomption d'exposition au risque de la maladie professionnelle ne profite qu'aux salariés employés par une entreprise inscrite sur la liste [2] ; que cette présomption ne profite pas à l'employeur inscrit sur la liste et encore moins aux autres employeurs qui doivent rapporter la preuve que le salarié a été effectivement exposé, du fait de ses conditions de travail réelles au risque amiante chez son précédent employeur inscrit sur la liste [2] ; qu'en faisant profiter le dernier employeur de la présomption d'exposition au risque attaché à l'inscription du précédent employeur du salarié sur la liste [2], la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil, l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris par application de l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale ;

3°/ qu'il appartient à l'employeur qui demande l'inscription de la maladie professionnelle au compte spécial, de rapporter la preuve que le salarié, de par ses fonctions réelles a été effectivement exposé au risque chez un précédent employeur ; qu'en estimant que cette preuve était rapportée par la société sans même que soit indiquées les tâches exécutées par le salarié pendant un an et six mois seulement pour un précédent employeur, trente-cinq ans plus tôt, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris en application de l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1353 du code civil, D. 242-6-5, D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale et 2, 4°, de l'arrêté interministériel du 16 octobre 1995, modifié, pris pour l'application de l'article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale :

4. Selon les deuxième et troisième de ces textes, les dépenses engagées par les caisses d'assurance maladie par suite de la prise en charge de maladies professionnelles constatées ou contractées dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ne sont pas comprises dans la valeur du risque mais sont inscrites à un compte spécial.

5. Selon le dernier, sont inscrites au compte spécial, les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées lorsque la victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d'entreprises différentes sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie.

6. L'arrêt énonce que la victime, ayant travaillé dans un établissement inscrit dans la liste des établissements annexés à un arrêté ministériel fixant la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ([2]), est présumée, sauf preuve contraire, avoir été exposée habituellement à cette substance dans l'exercice de son activité, que son exposition chez cet employeur est établie par ses propres déclarations et par la présomption non utilement combattue d'exposition à l'amiante, que la [4] reconnaît expressément l'exposition du salarié au risque chez son dernier employeur et qu'il n'est pas possible de déterminer dans laquelle des deux entreprises l'exposition au risque a provoqué la maladie.

7. En statuant ainsi, alors que la maladie doit être considérée comme contractée au service du dernier employeur chez lequel la victime a été exposée au risque, avant sa constatation médicale, sauf à cet employeur à rapporter la preuve contraire, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la société rapportait la preuve que l'affection dont était atteinte la victime devait être imputée aux conditions de travail de celle-ci au sein de l'entreprise précédente, a inversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 décembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Lapasset - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Célice, Texidor, Périer -

Textes visés :

Article 1353 du code civil ; articles D. 242-6-5 et D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale ; article 2, 4°, de l'arrêté interministériel du 16 octobre 1995.

Rapprochement(s) :

Sur la détermination de la charge de la preuve de l'imputation de la maladie professionnelle en cas d'exposition du salarié au risque chez plusieurs employeurs : 2e Civ., 21 octobre 2010, pourvoi n° 09-67.494, Bull. 2010, II, n° 175 (cassation), et l'arrêt cité.

2e Civ., 6 janvier 2022, n° 20-14.502, (B), FS

Rejet

Rente – Majoration – Exclusion – Indemnisation antérieure – Perte de gains professionnels et incidence professionnelle

Il résulte des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que la rente versée à la victime d'un accident du travail et sa majoration en cas de faute inexcusable de l'employeur indemnisent, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent.

Dès lors, nul ne pouvant prétendre être indemnisé deux fois du même préjudice, la victime d'un accident du travail dû à la faute inexcusable de son employeur, qui a déjà obtenu de la part du tiers responsable la réparation de ses préjudices consécutifs à cet accident au titre des pertes de gains professionnels, du déficit fonctionnel permanent et de l'incidence professionnelle de l'incapacité, ne peut obtenir paiement de la majoration de la rente prévue par l'article L. 452-2 sauf à établir que les sommes ainsi versées par le tiers responsable ne couvraient pas entièrement le montant de la rente majorée.

Rente – Paiement – Imputation – Indemnisation des pertes de gains professionnels et des incidences professionnelles de l'incapacité

Rente – Préjudice indemnisé – Etendue – Détermination

Rente – Rente prévue à l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale – Objet – Indemnisation du préjudice professionnel et du déficit fonctionnel permanent

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 10 mai 2019), le 12 juin 2007, M. [Z] (la victime), salarié de la société [6] (l'employeur) mis à disposition de la société [7] (l'entreprise utilisatrice) en qualité de maçon finisseur, a été victime d'un accident, qui a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse). Après consolidation de l'état de santé de la victime, la caisse a fixé le taux d'incapacité permanente partielle de celle-ci à 20 % et lui a attribué une rente.

2. Un jugement irrévocable du tribunal de grande instance de Toulouse rendu le 30 janvier 2014 a déclaré trois autres sociétés (les tiers) responsables du préjudice subi par la victime consécutivement à l'accident du 12 juin 2007, les a condamnées in solidum à payer à la victime une certaine somme en réparation de son préjudice corporel et à la caisse une autre somme au titre de sa créance et réparti la charge définitive de la réparation entre les tiers.

3. La victime a, parallèlement, saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La victime fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant au versement de la majoration de la rente, alors :

« 1°/ que la faute d'un tiers – eût-elle donné lieu à indemnisation de la part de celui-ci au profit de la victime – n'est pas susceptible d'entraîner la réduction ou la suppression de majoration de rente allouée à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, en cas de faute inexcusable de l'employeur ; qu'en retenant l'inverse, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

2°/ que la rente majorée qui présente un caractère viager, répare notamment les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité permanente partielle subsistant au jour de la consolidation ; qu'en raison de son caractère viager, la rente majorée est mathématiquement supérieure au capital qui a pu être versé à la victime par ailleurs, de la part d'un tiers, au titre de l'incidence professionnelle et au titre de la perte de gains professionnels – sauf à démontrer que, compte tenu de son espérance de vie, la victime ne pourrait jamais obtenir, au titre du versement de la rente majorée, l'équivalent du montant du capital qui lui a été versé ; que, pour refuser de condamner l'employeur au paiement de la rente majorée due à la victime, la cour d'appel retient que la juridiction de droit commun a déjà « alloué à la victime une indemnité de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, une indemnité de 27 360 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, et une indemnité de 4 480 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels », de sorte que « la victime ne peut donc solliciter cumulativement aux indemnités listées, le paiement de la majoration de la rente accident du travail » ; qu'en statuant ainsi – sans vérifier que, compte tenu de son espérance de vie, il était impossible à la victime d'obtenir, au titre du versement de la rente majorée, le montant des sommes qui lui avaient déjà été versées au titre de la perte des gains professionnels et de l'incidence professionnelle – la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

3°/ qu' en cas de partage de la responsabilité de l'accident entre l'employeur et un tiers étranger à l'entreprise, la victime est en droit d'obtenir de ce tiers, dans les conditions du droit commun, la réparation de son entier dommage, dans la mesure où celui-ci n'est pas indemnisé par les prestations de sécurité sociale, y compris au titre de la faute inexcusable ; que le recours de la victime contre le tiers n'est pas subordonné à l'exercice préalable d'un recours contre l'employeur ; qu'en conséquence, lorsqu'elle statue sur la faute inexcusable de l'employeur, après que la juridiction de droit commun a statué sur la responsabilité du tiers, la juridiction de sécurité sociale doit s'assurer que la réparation de l'entier dommage de la part du tiers inclut la majoration de la rente viagère due au titre de la faute inexcusable de l'employeur, qui répare notamment les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité permanente partielle subsistant au jour de la consolidation ; qu'après avoir admis la faute inexcusable de l'employeur, pour refuser néanmoins de le condamner au paiement de la rente majorée due à la victime, la cour d'appel retient que la juridiction de droit commun a déjà « alloué à la victime une indemnité de 50 000 euros au titre de l'incidence professionnelle, une indemnité de 27 360 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, et une indemnité de 4 480 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels », de sorte que « la victime ne peut donc solliciter cumulativement aux indemnités listées, le paiement de la majoration de la rente accident du travail » ; que, ne tirant pas les conséquences s'évinçant de ses constatations, dont il ressort qu'un capital ne peut nécessairement pas inclure les arrérages d'une rente viagère, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1, L. 452-2 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale que lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la victime a droit à une indemnisation complémentaire et notamment à la majoration des indemnités qui lui sont dues en vertu du Livre IV. Lorsqu'une rente a été attribuée à la victime, le montant de sa majoration est fixé de telle sorte que la rente majorée allouée à la victime ne puisse excéder, soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité, soit le montant de ce salaire dans le cas d'incapacité totale.

6. Il résulte, par ailleurs, des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du même code que la rente versée à la victime d'un accident du travail et sa majoration en cas de faute inexcusable de l'employeur indemnisent, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent.

7. Après avoir jugé que l'accident du travail de la victime est imputable à la faute inexcusable de l'entreprise utilisatrice, substituée à l'employeur, l'arrêt constate que la caisse a fixé le taux d'incapacité permanente partielle de la victime à 20 %. Il énonce que cette dernière est dès lors fondée à solliciter, en application des dispositions de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, la fixation de la majoration de sa rente à son taux maximum, soit 10 %.

8. Il relève que le jugement du 30 janvier 2014 a toutefois indemnisé la victime des conséquences de l'accident en lui allouant :

 - au titre de l'incidence professionnelle, une indemnité de 50 000 euros,

 - au titre du déficit fonctionnel permanent, une indemnité de 27 360 euros,

 - au titre de la perte de gains professionnels actuels, celle de 4 480 euros, compte tenu de la prise en charge par la caisse de la somme de 5 492,60 euros, et que le jugement a alloué à la caisse au titre de la perte de gains professionnels futurs de la victime la somme de 32 313,78 euros.

9. Ayant énoncé que la rente majorée versée à la victime au titre de l'accident du travail en cas de faute inexcusable de son employeur recouvre l'indemnisation des pertes de gains professionnels, du déficit fonctionnel permanent et de l'incidence professionnelle de l'incapacité, qui ont déjà été réparés par le jugement du 30 janvier 2014, la cour d'appel, devant laquelle la victime n'a pas prétendu n'avoir pas été intégralement indemnisée de son préjudice corporel par les tiers ni que les sommes qui lui avaient été versées ne couvraient qu'imparfaitement le montant de la rente majorée, a décidé à bon droit, nul ne pouvant prétendre être indemnisé deux fois du même préjudice, que cette victime ne pouvait obtenir paiement de la majoration de la rente versée au titre de son accident du travail.

10. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Renault-Malignac - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Foussard et Froger ; SCP Gadiou et Chevallier ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 14 octobre 2021, pourvoi n° 19-24.456, Bull., (cassation).

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