Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2022

OFFICIERS PUBLICS OU MINISTERIELS

2e Civ., 20 janvier 2022, n° 20-14.537, (B), FRH

Rejet

Huissier de justice – Tarif – Droit de recouvrement et d'encaissement – Recouvrement – Définition

Il résulte de l'article A444-32 du code de commerce et du tableau n° 129 figurant à l'annexe 4-7 du Titre quatrième bis du code de commerce, auquel il renvoie, que le terme de recouvrement implique l'existence d'une démarche, amiable ou judiciaire, en vue de la récupération d'un élément d'actif, en application d'une décision de justice.

En conséquence se trouve légalement justifiée l'ordonnance d'un premier président qui, mettant en évidence que l'action d'un huissier de justice, après remise d'un titre exécutoire, était à l'origine du paiement amiable des sommes par une communauté de communes, en a exactement déduit que la rémunération de l'huissier de justice était soumise au barème prévu à l'article A. 444-32 du code de commerce.

Huissier de justice – Tarif – Droit de recouvrement et d'encaissement – Cas

Huissier de justice – Acte – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Douai, 27 janvier 2020), la société Mahout est bénéficiaire d'un arrêt rendu le 20 décembre 2018 par une cour d'appel, qui a jugé nulle pour dol une vente immobilière conclue en novembre 2015 entre cette société et la Communauté de communes du [Localité 4] et du [Localité 3].

2. Par acte du 17 janvier 2019 comportant commandement de payer une certaine somme en principal, frais et intérêts, M. [W], huissier de justice, a signifié l'arrêt à la Communauté de communes. M. [W] a conservé une certaine somme au titre des émoluments proportionnels de l'article A 444-32 du code de commerce.

3. Contestant l'application de cet article, la société Mahout a sollicité la vérification des émoluments de M. [W] auprès d'un tribunal d'instance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. La société Mahout fait grief à l'ordonnance de fixer à la somme totale de 6 648 euros TTC le droit proportionnel auquel M. [W], huissier de justice, a droit en application de l'article A 444-32 du code de commerce, alors :

« 1°/ que l'article A 444–32 du code de commerce prévoit que « la prestation de recouvrement ou d'encaissement figurant au numéro 129 du tableau 3-1 donne lieu à la perception d'un émolument ainsi fixé : 1° Si le montant de la créance est inférieur ou égal à 188 euros, un émolument fixe de 21,28 euros ; 2° Au-delà du seuil de 188 euros mentionné au 1°, dans la limite de 5 540 euros, un émolument proportionnel aux sommes encaissées ou recouvrées au titre de la créance en principal ou du montant de la condamnation, à l'exclusion des dépens » selon un barème déterminé ; qu'il ressort de ce texte que le droit proportionnel prévu à l'article A 444–32 du code de commerce ne s'applique qu'à la prestation de recouvrement ou d'encaissement figurant au numéro 129 du tableau 3-1 ; que le numéro 129 du tableau 3-1, auquel renvoient les articles R. 444-3, A. 444-10 et A. 444-32 du code de commerce, est relatif aux seuls actes de « recouvrement forcé de créances » et aux actes d'établissement de procès-verbaux constatant que le destinataire de la signification est sans domicile, ni résidence ni lieu de travail connus ; que s'agissant du recouvrement de créance le champ d'application de l'article A. 444–32 du code de commerce est donc limité aux actes de recouvrement forcé réalisés par un huissier de justice ; que dès lors en considérant que des démarches de recouvrement amiables justifiaient la perception par l'huissier de justice de l'émolument proportionnel aux sommes encaissées ou recouvrées de l'article A. 444–32 du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte ;

2°/ que les dispositions de l'article A. 444–32 du code de commerce permettent la perception par l'huissier de justice de l'émolument proportionnel aux sommes encaissées ou recouvrées par l'effet d'un acte de recouvrement forcé ; que tel n'est pas le cas d'un commandement de payer émis à l'encontre d'une personne publique pour l'exécution d'une décision de justice passée en force de chose jugée ; qu'il ressort des propres constatations de l'ordonnance de taxe rendue par la cour d'appel de Douai que le commandement de payer délivré par M. [W] à la Communauté de communes du [Localité 4] et du [Localité 3] est un acte dépourvu de toute utilité juridique, une personne publique ne pouvant faire l'objet d'une voie d'exécution privée ; que l'ordonnance n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des strictes conditions d'application de l'article A. 444–32 du code de commerce. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte de l'article A. 444-2 du code de commerce et du tableau n° 129 figurant à l'annexe 4-7 du titre quatrième bis du code de commerce, auquel il renvoie, que le terme de recouvrement implique l'existence d'une démarche, amiable ou judiciaire, en vue de la récupération d'un élément d'actif, en application d'une décision de justice.

6. L'ordonnance retient que M. [W] s'est vu confier mandat de recouvrer les condamnations issues de l'arrêt de la cour d'appel de Douai du 20 décembre 2018 à l'encontre de la Communauté de communes par lettre du 15 janvier 2019. Elle ajoute que s'il est certain que la délivrance à celle-ci d'un commandement de payer le 17 janvier 2019 est un acte dépourvu de toute utilité juridique en vue d'une éventuelle voie d'exécution ultérieure, une personne publique ne pouvant faire l'objet de saisie-vente ou autre voie d'exécution privée, pour autant, le juge de la taxe, qui n'est pas compétent pour statuer sur l'annulation d'un acte d'exécution, constate que M. [W] a relancé la Communauté de communes par courrier simple en date du 25 janvier 2019, suite à la délivrance du commandement du 17 janvier, qu'il a perçu le principal des sommes réclamées le 31 janvier 2019 et sollicité de la Communauté de communes, par courrier simple du 15 février 2019, le versement du solde, paiement effectué le 20 février 2019.

7. L'ordonnance énonce qu'aucune des trente pièces produites par la société Mahout ne permet de considérer que le paiement des sommes dues n'a été induit que par la seule action de son avocat et que la correspondance invoquée à cet effet par laquelle l'avocat de la Communauté de communes assure celui de la société Mahout d'un paiement amiable, date du 21 janvier 2019 et se trouve être postérieure à la délivrance du commandement délivré par M. [W] du 17 janvier 2019.

8. De ces constatations et énonciations, mettant en évidence que l'action de M. [W], après remise du titre exécutoire, était à l'origine du paiement amiable des sommes par la Communauté de communes, le premier président a exactement déduit qu'il y avait lieu de faire application de l'article A. 444-32 du code de commerce.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : M. Pradel - Avocat(s) : SCP de Nervo et Poupet ; Me Le Prado -

Textes visés :

Article A444-32 et tableau n° 129, figurant à l'annexe 4-7 du Titre quatrième bis auquel il renvoie, du code de commerce.

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