Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2022

APPEL CIVIL

2e Civ., 13 janvier 2022, n° 20-17.516, (B), FS

Rejet

Acte d'appel – Mentions nécessaires – Chefs du jugement critiqués – Défaut – Portée

Il résulte de la combinaison des articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, ainsi que des articles 748-1 et 930-1 du même code, que la déclaration d'appel, dans laquelle doit figurer l'énonciation des chefs critiqués du jugement, est un acte de procédure se suffisant à lui seul.

Cependant, en cas d'empêchement d'ordre technique, l'appelant peut compléter la déclaration d'appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer.

Acte d'appel – Validité – Conditions – Mentions nécessaires – Chefs du jugement critiqués – Exclusion – Cas – Empêchement d'ordre technique

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 14 mai 2020), la société Monte Paschi Banque (la banque) a interjeté appel, le 18 septembre 2017, d'un jugement ayant rejeté sa demande de sursis à statuer et l'ayant condamnée au paiement d'une certaine somme avec intérêts au taux légal à la société MCE 5 Development (la société).

2. Par une ordonnance qui n'a pas été déférée à la cour d'appel, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de la société tendant à voir déclarer nulle la déclaration d'appel mentionnant un appel total sans distinguer les chefs critiqués du jugement.

3. La société a saisi la cour d'appel d'une demande tendant à voir dire sa saisine non valable, le nombre de caractères nécessaires à l'énonciation des chefs critiqués du jugement ne justifiant pas qu'un document les mentionnant soit joint à la déclaration d'appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, ci-après annexé

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. La banque fait grief à l'arrêt de constater que la cour d'appel n'était saisie d'aucune demande par la déclaration d'appel du 18 septembre 2017 qui n'a pas opéré dévolution, alors « que la déclaration d'appel doit préciser les chefs de jugement que l'appel critique expressément et ceux qui en dépendent ; que si la déclaration d'appel doit être faite « par acte », aucune forme n'est cependant imposée à cette déclaration en ce qu'elle doit mentionner les chefs de jugement critiqués ; qu'en décidant dès lors que « l'annexe », qui indiquait les chefs de jugement expressément critiqués, n'était pas de nature à opérer dévolution en ce qu'elle ne valait pas déclaration d'appel, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi, en violation des articles 562 et 901 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Selon l'article 901, 4°, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, la déclaration d'appel est faite, à peine de nullité, par acte contenant notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

En application des articles 748-1 et 930-1 du même code, cet acte est accompli et transmis par voie électronique.

7. En application de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, seul l'acte d'appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement.

8. Il en résulte que les mentions prévues par l'article 901, 4°, du code de procédure civile doivent figurer dans la déclaration d'appel, laquelle est un acte de procédure se suffisant à lui seul.

9. Cependant, en cas d'empêchement d'ordre technique, l'appelant peut compléter la déclaration d'appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer.

10. Ayant constaté que les chefs critiqués du jugement n'avaient pas été énoncés dans la déclaration d'appel formalisée par la banque, celle-ci s'étant bornée à y joindre un document intitulé « motif déclaration d'appel pdf », la cour d'appel, devant laquelle la banque n'alléguait pas un empêchement technique à renseigner la déclaration, en a exactement déduit que celui-ci ne valait pas déclaration d'appel, seul l'acte d'appel opérant la dévolution des chefs critiqués du jugement.

11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Kermina - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier ; SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Articles 562 et 901, 4°, du code de procédure civile, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 ; articles 748-1 et 930-1 du code de procédure civile.

2e Civ., 13 janvier 2022, n° 20-11.081, (B) (R), FS

Rejet

Appelant – Conclusions – Domicile – Fausse indication – Recevabilité – Condition

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 21 novembre 2019), sur des poursuites de saisie immobilière diligentées contre la société Eurise, tiers détenteur, par l'agent comptable du service des impôts de [Localité 10] (le Trésor public), celui-ci lui a délivré un commandement de payer ou de délaisser après avoir délivré un commandement de payer à M. [E], débiteur.

2. Par jugement d'orientation du 11 décembre 2008, un juge de l'exécution a notamment validé la procédure de saisie immobilière, ordonné la vente forcée et fixé la date d'adjudication. M. [E] et la société Eurise ont relevé appel de ce jugement. Celui-ci a été confirmé par l'arrêt du 21 novembre 2019, sauf en ce qui concerne le montant de la créance qu'elle a réduit.

Recevabilité, contestée par la défense, et objet du pourvoi

3. Le prononcé de la caducité ne fait pas perdre son fondement juridique à la disposition d'un jugement, rendu à l'occasion d'une saisie immobilière, qui a statué sur une contestation ou une demande portant sur le fond du droit, disposition revêtue de l'autorité de la chose jugée.

4. La cour d'appel ayant fixé le montant de la créance du poursuivant, le pourvoi conserve son objet et est recevable, en tant qu'il attaque ce chef de dispositif, et ceux ayant déclaré irrecevables les conclusions de M. [E] et les contestations et demandes de la société Eurise.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. M. [E] et la société Eurise font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les conclusions prises au nom de M. [E] et, en conséquence, de confirmer le jugement d'orientation entrepris ayant ordonné la vente forcée des biens et droits immobiliers sis à [Adresse 9], cadastré section [Cadastre 7], sauf à réduire à la somme de 391 439,57 euros le montant de la créance de l'administration poursuivante, alors :

« 1°/ que les conclusions d'une partie ayant mentionné un domicile inexact sont recevables dès que l'indication du domicile réel a été fournie ; qu'ayant relevé que si M. [E] avait d'abord communiqué une adresse postale ne correspondant pas à son domicile, il avait ultérieurement indiqué son domicile réel, correspondant à celui mentionné sur son passeport, la cour d'appel ne pouvait exiger en outre, pour déclarer néanmoins irrecevables ses conclusions, qu'il justifie davantage encore de l'effectivité de ce domicile, quand il incombait à l'administration fiscale, qui entendait se prévaloir de l'irrecevabilité desdites écritures, de justifier le cas échéant que le domicile ainsi indiqué était inexact ou fictif ; que l'arrêt a donc été rendu au prix d'une violation des articles 961 du code de procédure civile et 1353 du code civil ;

2°/ que les conclusions d'une partie ayant mentionné un domicile inexact sont recevables dès que l'indication du domicile réel a été fournie ; qu'en se bornant à relever que la production par M. [E] d'une copie de la première page de son passeport délivré en 2014 mentionnant comme domicile la nouvelle adresse qu'il avait indiquée était insuffisante à établir l'effectivité de ce domicile, sans pour autant constater son inexactitude ou son caractère fictif, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 961 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. En application de l'article 961 du code de procédure civile, les conclusions des parties doivent, à peine d'irrecevabilité, indiquer, pour les personnes physiques, leur domicile réel.

7. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu'au jour du prononcé de la clôture, ou, en l'absence de mise en état, jusqu'à l'ouverture des débats.

8. Il en résulte que, si la charge de la preuve de la fictivité du domicile pèse sur celui qui se prévaut de cette irrégularité, il appartient à celui qui prétend la régulariser de prouver que la nouvelle adresse indiquée constitue son domicile réel.

9. Ayant souverainement retenu que, dans sa déclaration d'appel et ses écritures, M. [E] se disait domicilié à [Localité 8], Floride, Etats-Unis d'Amérique, mais qu'il résultait des pièces produites par le créancier poursuivant qu'il s'agissait d'une propriété vacante, que M. [E] ne contestait pas ne pas résider à cette adresse et que dans ses dernières écritures, il se disait être domicilié à [Adresse 6] au Panama, sans justifier de l'effectivité de ce domicile, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré ses conclusions irrecevables.

Sur le second moyen

Enoncé du moyen

10. M. [E] et la société Eurise font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les contestations et demandes incidentes présentées par la société Eurise et, en conséquence, de confirmer le jugement d'orientation entrepris ayant ordonné la vente forcée des biens et droits immobiliers sis à [Adresse 9], cadastré section [Cadastre 7], sauf à réduire à la somme de 391 439,57 euros le montant de la créance de l'administration poursuivante, alors « que même si la saisie immobilière est diligentée contre le tiers détenteur de l'immeuble sur lequel le créancier poursuivant dispose d'un droit de suite, le droit à un procès équitable, en ce qu'il postule le respect des droits de la défense et l'exigence d'un procès à armes égales, implique que le débiteur principal soit régulièrement assigné à l'audience d'orientation, aux côtés du tiers détenteur, à l'effet de lui permettre de contester utilement l'existence, l'étendue ou encore l'exigibilité de la créance qui fonde les poursuites et de se prémunir par la même du recours ultérieur dont dispose à son encontre le tiers détenteur ; que dès lors, en considérant qu'il était indifférent que l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation délivrée à M. [E] fût entachée de nullité, motif pris qu'aucune disposition légale n'exige que le débiteur soit assigné à l'audience d'orientation quand la saisie immobilière est poursuivie contre le tiers détenteur, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

11. Selon l'article R. 321-19 du code des procédures civiles d'exécution, la signification du commandement de payer valant saisie au tiers détenteur, produit à l'égard de celui-ci les effets attachés à la signification au débiteur du commandement de payer valant saisie. A défaut pour le tiers détenteur de satisfaire à la sommation qui lui est faite, la saisie immobilière et la vente sont poursuivies à l'encontre de celui-ci, selon les modalités prévues par le livre III de ce code.

12. Il ne résulte ni de l'article R. 322-4 du code des procédures civiles d'exécution, ni d'aucun autre texte qu'en cas de saisie immobilière entre les mains d'un tiers détenteur, le débiteur des causes de la saisie doive être assigné à l'audience d'orientation.

13. Par ailleurs, le débiteur est recevable à former tierce opposition contre le jugement d'orientation, et est, préalablement à la procédure judiciaire, destinataire, en application de l'article R. 321-5 du même code, d'un commandement de payer mentionnant la délivrance du commandement valant saisie au tiers détenteur.

14. Il est mis en mesure de faire valoir ses droits et c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait.

15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE le pourvoi irrecevable sauf en ce qu'il attaque le chef de dispositif ayant fixé le montant de la créance du comptable du service des impôts des particuliers de [Localité 10] agglomération, et ceux ayant déclaré irrecevables les conclusions de M. [E] et les contestations et demandes de la société Eurise ;

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Dumas - Avocat général : M. Aparisi - Avocat(s) : SCP Leduc et Vigand ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 961 du code de procédure civile.

2e Civ., 13 janvier 2022, n° 20-12.914, (B), FRH

Rejet

Délai – Point de départ – Notification – Notification à deux reprises – Première notification régulière – Portée

Il résulte des articles 528 du code de procédure civile et R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution que lorsqu'un jugement est notifié à deux reprises, la première notification régulière fait courir les délais de recours.

Délai – Point de départ – Notification – Deuxième notification dans le délai ouvert par la première – Appel formé dans le délai ouvert par la deuxième notification – Recevabilité

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 juin 2019), par arrêt du 11 mai 2004, une cour d'appel a condamné, sous astreinte, M. [N], Mme [A], Mme [D], M. [I] et Mme [W] épouse [I] à rétablir le passage par le chemin d'exploitation entre leurs parcelles et celles appartenant à Mme [R].

2. Mme [R] a saisi, aux fins de liquidation de l'astreinte, un juge de l'exécution, qui l'a déboutée de ses demandes par jugement du 31 janvier 2017.

3. Ce jugement a été notifié par le greffe par lettre recommandée, dont Mme [R] a accusé réception le 1er février 2017, puis a été signifié à la requête de Mme [A] à Mme [R], le 3 février 2017.

4. Mme [R] ayant interjeté appel le 17 février 2017, la cour d'appel, après avoir sollicité les observations des parties, a relevé d'office une fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Mme [R] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable son appel, alors « que la seconde notification régulière d'une décision de justice, effectuée dans le délai de recours ouvert par la première, fait courir un nouveau délai à compter de sa date ; que l'article R. 121-15 du code des procédures civiles d'exécution prévoit un double mode de signification, par le greffe de la juridiction et à l'initiative des parties ; qu'en jugeant tardif l'appel interjeté par Mme [R], aux motifs que « lorsqu'un jugement est notifié à deux reprises, la première notification régulière fait courir le délai de recours », de sorte que la signification du jugement effectuée à la requête de Mme [A] le 3 février 2017, dans le délai d'appel ouvert par la première notification de la décision effectuée par le greffe le 1er février 2017, n'avait pas fait courir un nouveau délai d'appel de quinze jours à compter du 3 février 2017, la cour d'appel a violé les articles R. 121-15 et R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution et l'article 528 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

6. Il résulte des articles 528 du code de procédure civile et R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution que lorsqu'un jugement est notifié à deux reprises, la première notification régulière fait courir les délais de recours.

7. Ayant relevé que le jugement d'un juge de l'exécution avait été notifié par le greffe, conformément à l'article R. 121-15, alinéa 1er, du code des procédures civiles d'exécution, par lettre recommandée dont la destinataire avait accusé réception le 1er février 2017, la cour d'appel en a exactement déduit que cette première notification avait fait courir le délai de recours et que l'appel interjeté le 17 février 2019 était irrecevable, comme tardif.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Jollec - Avocat(s) : Me Balat ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 528 du code de procédure civile ; article R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution.

Rapprochement(s) :

2e Civ., 3 avril 2003, pourvoi n° 01-04.043, Bull. 2003, II, n° 91 (cassation sans renvoi) ; 2e Civ., 5 février 2009, pourvoi n° 07-13.589, Bull. 2009, II, n° 35 (rejet).

1re Civ., 12 janvier 2022, n° 20-50.027, (B), FS

Rejet

Effet dévolutif – Portée – Applications diverses – Etrangers – Mesures d'éloignement – Arrêté d'assignation à résidence

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Lyon, 22 juin 2020), et les pièces de la procédure, le 19 juin 2020, M. [U], de nationalité albanaise, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une interdiction de retour sur le territoire français.

2. Saisi, le 20 juin 2020, par M. [U] d'une contestation de la décision de placement en rétention sur le fondement de l'article L. 512-1, III, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par le préfet, d'une requête en prolongation de la mesure sur le fondement de l'article L. 552-1 du même code, le juge des libertés et de la détention a joint les deux procédures, constaté l'irrégularité de la procédure préalable à la rétention, rejeté la requête du préfet et dit n'y avoir lieu de statuer sur la contestation de la régularité du placement en rétention.

Examen des moyens

Sur le second moyen, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

4. Le procureur général près la cour d'appel de Lyon fait grief à l'ordonnance de constater que M. [U] a été assigné à résidence pour permettre l'exécution de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet et de déclarer, en conséquence, sans objet, l'appel du ministère public, alors « que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que le parquet a interjeté appel de l'ordonnance ayant constaté l'irrégularité de la procédure ; qu'en n'examinant pas le chef principal de l'appel, c'est à dire la légalité du placement en retenue administrative, au motif que la délivrance d'un arrêté d'assignation à résidence [était intervenue] ultérieurement, le délégué du premier président n'a pas rempli son office et a excédé ses pouvoirs, et ainsi violé l'article 562 du code de procédure civile »

Réponse de la Cour

5. Ayant relevé que, par un arrêté postérieur à l'appel interjeté par le ministère public à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, M. [U] avait été assigné à résidence pour assurer l'exécution de son interdiction de retour sur le territoire national, faisant ainsi ressortir que la requête en prolongation de la rétention était devenue sans objet, le premier président en a exactement déduit que l'appel était devenu sans objet.

6. Le moyen n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : Mme Dard - Avocat général : Mme Caron-Déglise -

Textes visés :

Article 562 du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

1re Civ., 19 septembre 2019, pourvoi n° 18-20.359, Bull., (cassation sans renvoi).

2e Civ., 13 janvier 2022, n° 20-19.978, (B), FRH

Rejet

Procédure avec représentation obligatoire – Procédure à jour fixe – Conclusions – Conclusions tardives – Office du juge

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 juin 2020), sur le fondement d'un acte notarié, la société Les Vergers a fait délivrer, le 14 décembre 2017, un commandement de payer valant saisie immobilière à la société [Adresse 3] (la société [Adresse 3]).

2. Par acte du 20 mars 2018, M. [J], associé de la société [Adresse 3], et cette dernière ont assigné la société Les Vergers devant un tribunal de grande instance en nullité du contrat de prêt.

3. Par jugement du 12 août 2019, un juge de l'exécution a sursis à statuer sur la procédure de saisie immobilière, dans l'attente de la décision du tribunal de grande instance.

4. La société Les Vergers a été autorisée par le premier président d'une cour d'appel à interjeter appel immédiat de ce jugement.

Examen des moyens

Sur les premier, quatrième, cinquième et sixième moyens, ci-après annexés

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, dont le premier est irrecevable et les suivants ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. La société [Adresse 3] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les conclusions et les pièces n° 25 à 38 qu'elle a déposées le 20 janvier 2020, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en déclarant irrecevables, à la demande de la société Les Vergers, les conclusions et pièces numéros 25 à 38 déposées le 20 janvier 2020 par la SCCV [Adresse 3], au motif que ces écritures et pièces avaient été déposées trois heures avant l'audience de plaidoiries, de sorte que la société Les Vergers s'était trouvée dans l'impossibilité d'en prendre connaissance en temps utile, sans préciser à quelle heure la société Les Vergers avait contesté ce dépôt prétendument tardif de conclusions et de pièces et sans rechercher si la SCCV [Adresse 3] avait été en mesure de s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse au moyen

7. En premier lieu, l'arrêt constate qu'en application d'une ordonnance du 24 octobre 2019 fixant un calendrier de procédure, la société Les Vergers a assigné la société [Adresse 3] le 6 novembre 2019 et que cette dernière a conclu le dernier jour du délai qui lui était imparti, soit le 20 décembre 2019, sans communiquer ses pièces malgré une sommation du 24 décembre 2019.

8. En deuxième lieu, il relève que la société Les Vergers a répliqué par conclusions notifiées le 6 janvier 2020 tandis que la société [Adresse 3] a attendu le 20 janvier 2020 à 11 heures 39 pour notifier de nouvelles conclusions, à 12 heures 03 pour communiquer ses pièces n° 1 à 11, à 12 heures 28 ses pièces 21 à 24, et à 12 heures 36 pour communiquer ses nouvelles pièces 25 à 30 non produites en première instance, soit moins de 3 heures avant l'audience de plaidoiries fixée dès l'ordonnance de référé rendue le 16 octobre 2019 par la juridiction du premier président.

9. En dernier lieu, l'arrêt retient qu'aucun motif ne justifie un tel comportement contraire à la loyauté des débats et au principe du contradictoire qui, du fait du dépôt tardif de nouvelles écritures et de nouvelles pièces, a mis la société Les Vergers dans l'impossibilité d'en prendre connaissance en temps utile.

10. C'est en l'état de ces constatations et énonciations que la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si la société [Adresse 3] avait été en mesure de s'expliquer sur la demande de rejet des conclusions tardives et des pièces, a souverainement apprécié si la société Les Vergers avait eu un temps utile pour prendre connaissance des dernières conclusions et pièces.

11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Et sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. La société [Adresse 3] fait grief à l'arrêt la débouter de toutes ses demandes, de mentionner que la créance de la société Les Vergers s'élevait à 1 000 000 euros avec intérêts au taux de 17 % l'an du 15 décembre 2011 jusqu'à complet remboursement du prêt, avec imputation sur les intérêts des sommes de 107 819,34 euros le 7 novembre 2013, 51 426,72 euros le 3 août 2016, 9 000 euros le 30 décembre 2016 et 250 000 euros le 10 avril 2017 et d'ordonner la vente forcée des biens saisis, alors « qu'aux termes de l'article 16 du code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant, pour débouter la SCCV [Adresse 3] de toutes ses demandes, fixer la créance de la société Les Vergers et ordonner la vente forcée des biens saisis, que les pièces n° 12 à 20 produites par la SCCV [Adresse 3] ne figuraient pas au dossier remis à la cour d'appel, sans inviter les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de ces pièces qui figuraient au bordereau de pièces annexé aux conclusions d'intimées de la SCCV [Adresse 3] notifiées le 20 décembre 2019, déclarées recevables, et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé. »

Réponse de la Cour

13. Après avoir constaté que les pièces numéros 12 à 20 et 31 à 38 visées au bordereau de pièces ne figuraient pas au dossier de plaidoirie, la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur cette absence de pièces, n'avait donc pas à inviter les parties à s'expliquer.

14. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Jollec - Avocat(s) : Me Bertrand ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

2e Civ., 13 janvier 2022, n° 20-18.121, (B), FRH

Cassation

Procédure avec représentation obligatoire – Procédures fondées sur l'article 905 du code de procédure civile – Domaine d'application – Décisions du juge de l'exécution – Application de plein droit – Portée

Il résulte de l'application combinée des articles 905, 905-2, alinéa 1, et 911 du code de procédure civile, et R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que l'appel d'une décision du juge de l'exécution est, sauf autorisation d'assigner à jour fixe, soumis à la procédure à bref délai, et ce même en l'absence d'avis de fixation, de sorte que les conclusions de l'appelant, qui peuvent être déposées au greffe avant la fixation de l'affaire à bref délai, doivent être notifiées à l'intimé dans le délai maximal d'un mois suivant la réception, par l'appelant, de l'avis de fixation à bref délai.

Procédure avec représentation obligatoire – Appel des décisions du juge de l'exécution – Dispositions applicables – Détermination – Portée

Appelant – Conclusions – Notification – Procédure à bref délai – Point de départ – Détermination – Portée

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 mai 2020) et les productions, Mme [W] a relevé appel le 3 septembre 2019 d'un jugement du juge de l'exécution d'un tribunal de grande instance, rendu dans un litige l'opposant à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la caisse), et a remis, le même jour, au greffe ses conclusions d'appelante.

2. Le 7 octobre 2019, Mme [W] a reçu l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, délivré en application de l'article 905 du code de procédure civile.

3. Le 9 octobre 2019, Mme [W] a, de nouveau, déposé ses conclusions d'appelante au greffe et les a notifiées à la caisse, alors constituée.

4. Après avoir invité les parties à présenter leurs observations, le magistrat de la chambre concernée, désigné par le premier président, a prononcé la caducité de la déclaration d'appel au 3 octobre 2019.

5. Mme [W] a déféré cette ordonnance à la formation collégiale de la cour d'appel.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Mme [W] fait grief à l'arrêt de constater, à la date du 3 octobre 2019, la caducité de la déclaration d'appel et de prononcer sa caducité, alors « qu'à compter de la fixation de l'affaire à bref délai en application de l'article 905 du code de procédure civile, la procédure est soumise aux délais et aux sanctions prévues par les articles 905-1 et suivants du même code ; que lorsque l'affaire est fixée à bref délai, l'appelant dispose, à peine de caducité de la déclaration d'appel, d'un délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe et les notifier aux avocats des parties et d'un délai d'un mois supplémentaire à compter de l'expiration ce délai pour les signifier aux parties qui n'ont pas constitué avocat ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que sur la déclaration d'appel de Mme [W] du 3 septembre 2019, le président de la chambre saisie a fixé l'affaire à bref délai par un avis de fixation du 7 octobre 2019, que Mme [W] a remis au greffe et notifié ses conclusions d'appel au conseil de l'intimée, la Cipav, le 9 octobre 2019, dans le délai d'un mois de la réception de l'avis de fixation ; qu'en retenant néanmoins que la déclaration d'appel était caduque dès lors que le délai pour signifier ses conclusions à l'intimée expirait le 3 octobre 2019, un mois après la remise au greffe de ses conclusions d'appel, la cour d'appel a violé les articles 905, 905-2 et 911 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 905, 905-2 et 911 du code de procédure civile, et l'article R. 121-20 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 :

7. Il résulte, d'abord, du dernier de ces textes que lorsque l'appel est relatif à une décision du juge de l'exécution, sauf autorisation d'assigner à jour fixe, l'instruction à bref délai s'applique de plein droit, même en l'absence d'ordonnance de fixation en ce sens.

8. Il résulte, ensuite, des articles 905-2, alinéa 1er, et 911 susvisés, qu'à peine de caducité de la déclaration d'appel, l'appelant doit, au plus tard dans le délai d'un mois à compter de la réception de l'avis de fixation de l'affaire à bref délai, remettre ses conclusions au greffe et les notifier à l'avocat de l'intimé.

9. Il s'ensuit que les conclusions d'appelant d'un jugement du juge de l'exécution, qui peuvent être déposées au greffe avant la fixation de l'affaire à bref délai, doivent être notifiées à l'intimé dans le délai maximal d'un mois suivant la réception, par l'appelant, de l'avis de fixation à bref délai.

10. Pour constater, à la date du 3 octobre 2019, la caducité de la déclaration d'appel et prononcer sa caducité, l'arrêt retient que le délai d'un mois ouvert à l'appelante pour signifier ses conclusions à l'intimée n'ayant pas constitué avocat expirait le 3 octobre 2019, soit un mois après la remise au greffe de ses premières conclusions le 3 septembre 2019, peu important que l'avis de fixation ait été adressé postérieurement à cette dernière date.

11. En statuant ainsi, tout en constatant que les conclusions d'appelante, régulièrement remises au greffe avant l'avis de fixation, avaient été notifiées à la caisse, dont il n'était pas discuté qu'elle avait alors constitué avocat, le 9 octobre 2021, dans le délai d'un mois suivant la réception, par l'appelante, de l'avis de fixation prévu par l'article 905-2 du code de procédure civile, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Kermina - Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano ; SCP Boutet et Hourdeaux -

Textes visés :

Articles 905, 905-2, alinéa 1, et 911 du code de procédure civile et article R.121-20 du code des procédures civiles d'exécution, dans leur rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017.

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