Numéro 1 - Janvier 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2021

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION

Soc., 13 janvier 2021, n° 19-21.138, (P)

Rejet

Employeur – Discrimination entre salariés – Dénonciation de faits de discrimination – Sanction interdite – Exception – Mauvaise foi – Caractérisation – Portée

Aux termes de l'article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés. En vertu de l'article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul. Il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 7 juin 2019), M. T... a été engagé le 19 mai 2008 en qualité d'ingénieur électronique par la société Serma ingénierie (la société).

2. Le 27 février 2012, il a adressé un courrier au président du groupe ainsi qu'à son supérieur hiérarchique pour dénoncer des faits de discrimination en raison de son origine à son encontre de la part du directeur commercial. Il a également saisi le Défenseur des droits, lequel a classé l'affaire le 22 décembre 2014.

3. Le 22 mars 2012, il a été licencié pour faute grave, l'employeur lui reprochant de proférer des accusations de discrimination en raison de son origine dont il avait conscience du caractère fallacieux.

4. Le 11 décembre 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de la contestation de son licenciement.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement repose sur une faute grave, de le débouter de l'intégralité de ses demandes, alors :

« 1°/ que la seule fausseté des faits dénoncés ne peut justifier le licenciement d'un salarié qui dénonce des faits discriminatoires ; qu'en retenant, pour dire que le licenciement de M. T... était fondé, que la dénonciation de discrimination avait été faite de mauvaise foi, les juges ont retenu que la mission proposée à Pessac n'était pas déloyale, que l'employeur avait adressé le curriculum du salarié à différentes entreprises, que la situation d'inter-contrat était commune à des nombreux salariés et que le courrier de M. E... était justifié au regard des horaires effectués par le salarié, la cour d'appel s'est fondée sur la seule fausseté de la déclaration, et a ainsi violé les articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail ;

2°/ que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif sauf mauvaise foi, laquelle résulte de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce ; qu'en retenant que la société était lauréate d'un prix contre les discrimination, que le salarié avait voulu obtenir une rupture conventionnelle, ou encore que le salarié avait créé son entreprise peu de temps après son licenciement, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs impropres à établir la mauvaise foi de M. T..., et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-3, L. 1132-4 et L. 1234-5 du code du travail. »

Réponse de la Cour

7. Aux termes de l'article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L. 1132-1 et L. 1132-2 ou pour les avoir relatés.

En vertu de l'article L. 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l'égard d'un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul. Il s'en déduit que le salarié qui relate des faits de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu'il dénonce et non de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis.

8. Après avoir retenu que la discrimination alléguée n'était pas établie, la cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a relevé que l'employeur démontrait que plusieurs propositions de missions avaient été faites au salarié qui se trouvait en inter-contrat, que celui-ci avait refusé en février 2012 d'effectuer une mission à Pessac, et que, dans le même temps, il alléguait auprès du Défenseur des droits et de ses supérieurs hiérarchiques pour la première fois une situation de discrimination en raison de ses origines, que l'allégation a été faite par le salarié en des termes très généraux sans invoquer de faits circonstanciés, que le salarié était dès le mois de décembre 2011 déterminé à quitter l'entreprise, son désengagement professionnel durant la période d'inter-contrat montrant sa volonté d'obtenir une rupture conventionnelle du contrat de travail en cherchant à imposer ses conditions financières, qu'aucune alerte n'avait été faite durant la relation de travail auprès des délégués du personnel, de la médecine du travail ou de l'inspection du travail et que le salarié n'avait fait aucun lien avec ses origines avant les emails adressés à ses supérieurs hiérarchiques et au Défenseur des droits en février 2012.

9. La cour d'appel a pu en déduire que le salarié connaissait la fausseté des faits allégués de discrimination en raison de son origine.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Ott - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol -

Textes visés :

Articles L. 1132-3 et L. 1132-4 du code du travail.

2e Civ., 28 janvier 2021, n° 19-25.459, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Maladie – Accident du travail ou maladie professionnelle – Protection – Etendue

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quelle que soit la date à laquelle elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine l'accident ou la maladie, indépendamment de la prise en charge de l'événement au titre de la législation professionnelle.

Dès lors, l'inopposabilité à l'employeur de la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle est sans incidence sur son obligation au versement de l'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail.

Maladie du salarié – Accident du travail ou maladie professionnelle – Inaptitude au travail – Obligation de reclassement – Impossibilité – Effets – Indemnité de l'article L. 1226-14 du code du travail et indemnité spéciale de licenciement – Attribution – Inopposabilité à l'employeur de la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 octobre 2019), la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de- Marne (la caisse) ayant pris en charge, au titre de la législation professionnelle, l'accident dont l'un de ses salariés a déclaré avoir été victime le 18 novembre 2013, la société Prenium (l'employeur) a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. La caisse fait grief à l'arrêt de déclarer inopposable à l'employeur la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident, alors « que la preuve de la survenance d'un accident au temps et sur le lieu du travail peut, en l'absence de témoin direct, résulter des déclarations du salarié corroborées par des documents médicaux et, en particulier, par un certificat médical établi dans un temps proche de l'accident confirmant l'existence de la lésion déclarée ; qu'en l'espèce, en sus des déclarations de la victime, un certificat médical établi le lendemain de l'accident a attesté de ce que le salarié souffrait d'un « stress au travail, de menaces, d'insomnie, d'anorexie » ; qu'en estimant que ce certificat médical ne valait que pour ses constatations purement médicales, et ne pouvait valoir présomption corroborant les déclarations de la victime de sorte que la caisse ne rapportait pas la preuve d'un accident du travail au temps et au lieu de travail ; que la cour d'appel s'est refusée à apprécier la valeur probante à titre de présomption de ce certificat médical pour établir la matérialité de l'accident du travail ; qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles L. 411-1 du code de la sécurité sociale et 1382 du code civil. »

Réponse de la Cour

4. Sous couvert de griefs non fondés de violation des articles 1382 du code civil et L. 411-1 du code de la sécurité sociale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, l'appréciation souveraine par les juges du fond des éléments de fait et de preuve soumis aux débats.

5. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

6. La caisse fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à l'employeur une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors « que les décisions prises par les organismes de sécurité sociale dans leur rapport avec les employeurs ne peuvent pas être invoquées par les salariés dans leur rapport avec leurs employeurs en raison de l'indépendance des législations de sécurité sociale et de droit du travail ; que la décision de prise en charge de l'accident de travail prise par la caisse au profit du salarié ne pouvait pas être invoquée par celui-ci pour demander une indemnité spéciale de licenciement à son employeur ; que seules les juridictions prud'homales qui n'étaient tenues par aucune autorité de la chose décidée par l'organisme de sécurité sociale, avaient compétence pour apprécier si l'accident était un accident du travail et s'il justifiait le paiement d'indemnité spéciale de licenciement ; que par hypothèse la décision de la caisse – à la supposer fautive – ne pouvait pas être causale de l'obligation faite à l'employeur de verser l'indemnité litigieuse ; qu'en retenant néanmoins que la faute de la caisse avait contraint l'employeur à verser l'indemnité spéciale de licenciement à son salarié de sorte qu'il pouvait en demander réparation à la caisse, la cour d'appel a violé les articles L. 1286-19 et suivants du code du travail et 1240 (ancien article 1382 du code civil). »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1240 du code civil et L. 1226-14 du code du travail :

7. Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quelle que soit la date à laquelle elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine l'accident ou la maladie, indépendamment de la prise en charge de l'événement au titre de la législation professionnelle.

8. Pour condamner la caisse au paiement de dommages-intérêts correspondant au montant de l'indemnité spéciale de licenciement versée par l'employeur, l'arrêt retient que la condamnation de celui-ci au versement de cette indemnité est la conséquence directe et certaine de la reconnaissance fautive par la caisse du caractère professionnel de l'accident du salarié.

9. En statuant ainsi, alors que l'inopposabilité à l'employeur de la prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle était sans incidence sur l'obligation de l'employeur au versement de l'indemnité spéciale de licenciement, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

11. Il y a lieu de rejeter la demande de dommages-intérêts formée par l'employeur.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne à payer à la société Prenium une somme de 20 473,67 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 11 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

DEBOUTE la société Prenium de sa demande de dommages-intérêts.

- Président : M. Pireyre - Rapporteur : Mme Cassignard - Avocat général : M. de Monteynard - Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol ; SCP Piwnica et Molinié -

Textes visés :

Article 1240 du code civil ; article L. 1226-14 du code du travail.

Rapprochement(s) :

Soc., 29 juin 2011, pourvoi n° 10-11.699, Bull. 2011, V, n° 169 (rejet), et les arrêts cités.

Soc., 20 janvier 2021, n° 19-20.544, (P)

Cassation

Maladie du salarié – Accident du travail ou maladie professionnelle – Inaptitude au travail – Inaptitude consécutive à l'accident – Décision d'inaptitude – Décision du conseil médical de l'aéronautique – Portée

Il résulte des articles L. 6511-1, L. 6511-2, L. 6511-4 du code des transports, et L. 4624-4 du code du travail qu'un salarié, qui a été déclaré, par décision du conseil médical de l'aéronautique civile, inapte définitivement à exercer la profession de personnel navigant classe 1, n'est pas apte à occuper un poste d'officier pilote de ligne et qu'un poste au sol constitue non une transformation du poste de travail qu'il occupait, mais un changement de poste.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 juin 2019), Mme E..., épouse U..., a été engagée par contrat du 28 octobre 2008 en qualité de personnel technique naviguant PNT, par la société Brit air, devenue la société Hop ! (la société).

2. Le 23 juillet 2015, le conseil médical de l'aéronautique civile (CMAC) a déclaré la salariée « inapte définitivement à exercer sa profession de naviguant comme classe 1 ».

3. Le 4 septembre 2015, à l'issue d'une visite médicale, le médecin du travail a déclaré la salariée « apte avec aménagement de poste (pas de vol), apte à un poste au sol et qu'une formation pouvait être proposée ». Cet avis a été confirmé le 17 janvier 2017.

4. Sur recours de la société, la cour d'appel a désigné un expert qui a conclu que, pendant la période d'inaptitude au vol, la salariée était apte au plan médical à un travail au sol, en utilisant ses qualifications de pilote.

5. Le 6 août 2018, le médecin du travail a émis un avis d'aptitude en considérant qu'il n'y avait pas de contre-indication médicale à ce que la salariée occupe son poste d'officier pilote de ligne.

6. Le 16 août 2018, l'employeur a saisi la juridiction prud'homale, d'une contestation de cet avis.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. L'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que la qualité de navigant professionnel de l'aéronautique civile est subordonnée à l'obtention de titres aéronautiques, définis à l'article L. 6511-2 du code des transports ; que la validité de ces titres est elle-même subordonnée à des conditions d'aptitude médicale, périodiquement attestées par des centres d'expertise de médecine aéronautique et, en cas de recours, par le conseil médical de l'aéronautique civile ; que si l'intervention du médecin du travail s'impose avant d'envisager tout reclassement ou licenciement d'un personnel navigant technique devenu inapte à son poste de travail, le conseil médical de l'aéronautique civile est, en revanche, seul compétent pour se prononcer sur le caractère définitif de l'inaptitude d'un navigant professionnel à conduire ou commander des aéronefs à titre professionnel ; que, dans ces conditions, le médecin du travail et, en cas de recours, le conseil de prud'hommes, saisis postérieurement à une décision d'inaptitude définitive du conseil médical de l'aéronautique civile, doivent se conformer à cette dernière sur la question de l'inaptitude du salarié à utiliser sa licence et à exercer une fonction qui implique de piloter des aéronefs, et qu'ils doivent en tirer les conclusions qui s'imposent dans leur propre décision d'aptitude ou d'inaptitude à un poste de personnel navigant technique ; qu'au cas présent, le conseil médical de l'aéronautique civile a rendu un avis le 22 juillet 2015, considérant Mme U... « inapte 4 définitivement à exercer la profession de personnel navigant(e) comme classe 1.Inapte classe 2 », ce qui a entraîné la perte de validité de la licence lui permettant d'assurer des fonctions de personnel navigant professionnel ; que dès lors, le médecin du travail puis le juge, saisis de la question de l'aptitude de la salariée à son poste de personnel navigant technique, ne pouvaient que constater que Mme U... était inapte à conduire ou commander un aéronef, et en tirer les conséquences qui s'imposaient pour rendre leur avis ; qu'en considérant toutefois que l'avis d'aptitude rendu le 6 août 2018 par le médecin du travail, aux termes duquel il n'existait pas, pour la salariée, « de contre-indication médicale à occuper son poste d'officier pilote de ligne », n'était pas incompatible avec l'avis de la commission médicale de l'aéronautique civile du 22 juillet 2015 déclarant la salariée « inapte définitivement à exercer la profession de personnel navigant(e)", et en déboutant la société de sa demande d'annulation de l'avis du médecin du travail du 6 août 2018, la cour d'appel a violé les articles L. 6511-2, L. 6511-4 et L. 6521-6 du code des transports, R. 410-5 du code de l'aviation civile, et L. 4624-4 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 6511-1, L. 6511-2, L. 6511-4 du code des transports, et l'article L. 4624-4 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

8. Il résulte des deux premiers de ces textes que les pilotes doivent être pourvus de titres aéronautiques et de qualifications dans des conditions déterminées par voie réglementaire, et que les titres aéronautiques attestent l'acquisition de connaissances générales théoriques et pratiques et ouvrent à leurs titulaires le droit de remplir les fonctions correspondantes, sous réserve, le cas échéant, de l'aptitude médicale requise correspondante.

Selon le troisième, les conditions d'aptitude médicale mentionnées à l'article L. 6511-2 sont attestées par des centres d'expertise de médecine aéronautique ou par des médecins examinateurs agréés par l'autorité administrative, dans des conditions définies par voie réglementaire. Un recours peut être formé, à l'initiative de l'autorité administrative, de l'intéressé ou de l'employeur, contre les décisions prises par les centres de médecine aéronautique ou les médecins examinateurs, devant une commission médicale définie par décret en Conseil d'Etat. Cette commission statue sur l'aptitude du personnel navigant.

9. Aux termes du dernier, après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l'équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l'employeur, le médecin du travail qui constate qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n'est possible et que l'état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail.

L'avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d'indications relatives au reclassement du travailleur.

10. Il résulte de ces dispositions qu'un salarié, qui a été déclaré, par décision du conseil médical de l'aéronautique civile, inapte définitivement à exercer la profession de personnel navigant classe 1, n'est pas apte à occuper un poste d'officier pilote de ligne.

11. Pour débouter l'employeur de l'ensemble de ses demandes, l'arrêt retient qu'en se bornant à invoquer la décision administrative du CMAC, sans répondre aux arguments invoqués par la salariée qui indique sans être contredite qu'elle est titulaire de la licence de membre équipage de conduite, valable jusqu'au 30 avril 2019 et que la DGAC a confirmé ces qualifications le 20 septembre 2018, l'employeur qui s'affranchit des conclusions du rapport d'expertise qu'il a suscité, soulignant qu'en dépit de l'apparente contradiction de l'avis précédent du médecin du travail avec la décision du CMAC, la salariée était parfaitement apte à utiliser ses qualifications de pilote pour un travail sur simulateur de vol voire d'instructeur, ne démontre pas que l'avis rendu le 6 août 2018 par le médecin du travail, déclarant la salariée apte à son poste en l'absence « de contre indication médicale à occuper son poste d'officier pilote de ligne », soit incompatible avec la décision du CMAC faisant seulement obstacle à ce qu'elle puisse effectivement occuper un emploi de PNT1.

L'arrêt retient encore que la société Hop ! qui procède par affirmations, ne démontre pas qu'aucune mesure d'aménagement, d'adaptation ou de transformation du poste de travail de « personnel navigant technique - officier pilote de ligne », occupé par l'intéressée, n'est possible et que son état de santé justifie un changement de poste au statut personnel au sol.

12. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le CMAC avait, par décision du 23 juillet 2015, déclaré l'intéressée inapte définitivement à exercer sa profession de navigant comme classe 1, ce dont il résultait qu'elle n'était pas apte au poste d'officier-pilote de ligne qu'elle occupait, et qu'un poste au sol constituait non une transformation du poste de travail qu'elle occupait, mais un changement de poste, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 5 juin 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Ricour - Avocat général : Mme Roques - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 6511-1, L. 6511-2 et L. 6511-4 du code des transports ; article L. 4624-4 du code du travail.

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