Numéro 1 - Janvier 2021

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2021

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE

Soc., 20 janvier 2021, n° 19-21.535, n° 19-21.536, n° 19-21.537, n° 19-21.538, n° 19-21.540, n° 19-21.543, n° 19-21.545, n° 19-21.546, n° 19-21.547, n° 19-21.549, (P)

Rejet

Formalités légales – Mentions obligatoires – Motifs du recours – Remplacement d'un salarié – Qualification du salarié remplacé – Définition – Cas – Indication de l'emploi occupé par le salarié remplacé – Conditions – Détermination – Applications diverses

Il résulte de la combinaison des articles L. 122-3-1 et L. 122-3-13 du code du travail, devenus les articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du même code, qu'est réputé à durée indéterminée le contrat de travail à durée déterminée qui ne comporte pas la définition précise de son motif et que cette exigence de précision quant à la définition du motif implique nécessairement que le nom et la qualification du salarié remplacé figurent dans le contrat lorsqu'il s'agit de l'un des cas visés au 1º de l'article L. 122-1-1 devenu le 1° de l'article L. 1242-2 du code du travail.

Doit être approuvée une cour d'appel, qui après avoir retenu que la catégorie « personnel navigant commercial » comportait plusieurs qualifications telles qu'hôtesse et steward, chef de cabine, chef de cabine principal dont les fonctions et rémunérations étaient différentes et qui, après avoir retenu que les contrats à durée déterminée de remplacement ne comportaient que la mention de la catégorie de « personnel navigant commercial », a décidé à bon droit que la seule mention de la catégorie de « personnel navigant commercial » dont relevait le salarié remplacé ne permettait pas au salarié engagé de connaître la qualification du salarié remplacé en sorte que les contrats à durée déterminée conclus pour ce motif étaient irréguliers.

Formalités légales – Mentions obligatoires – Motifs du recours – Remplacement d'un salarié – Nom et qualification du salarié remplacé – Défaut – Effets – Contrat réputé à durée indéterminée – Portée

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° A 19-21.535, B 19-21.536, C19-21.537, D 19-21.538, F19-21.540, J 19-21.543, M 19-21.545, N 19-21.546, P 19-21.547 et R 19-21.549 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 19 février 2019 et 15 mai 2019), Mme X... et neuf autres salariés ont été engagés par la société Corsair par différents contrats à durée déterminée conclus pour des motifs divers (saison, accroissement temporaire d'activité, remplacement d'un salarié absent et remplacement dans l'attente de suppression de poste) pendant plusieurs années. A l'exception de Mme X... dont la relation contractuelle a cessé le 31 août 2010, les autres relations contractuelles ont pris fin au terme du dernier contrat, le 31 décembre 2012.

3. Les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et de demandes afférentes à la requalification ainsi qu'à la rupture illicite de leurs contrats.

Examen des moyens

Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche :

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui est irrecevable.

Sur le premier moyen du pourvoi principal :Publication sans intérêt

Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses deuxième et troisième branches

Enoncé du moyen

8. L'employeur fait le même grief aux arrêts, alors :

« 2°/ qu'une qualification professionnelle doit être déterminée par référence aux normes applicables à la profession ; que, pour considérer comme insuffisamment précise ''la catégorie 'personnel navigant commercial' ", la cour d'appel a retenu qu'elle ''comport[ait] plusieurs qualifications [:] HST [hôtesse et steward], chef de cabine, et chef de cabine principal dont les fonctions sont différentes et qui perçoivent des rémunérations différentes » ; qu'en statuant ainsi, en se fondant uniquement sur une différence de fonctions et de rémunérations susceptible de renvoyer, simplement, à des emplois distincts, sans viser aucune norme assimilant les hôtesses et stewards, chef de cabine, et chef de cabine principal à des qualifications professionnelles autonomes, la cour d'appel a violé les articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable ;

3°/ que l'exposante avait souligné que le ''personnel navigant commercial » constituait une qualification professionnelle autonome et non susceptible de subdivisions, en particulier en employés, agents de maîtrise et cadres, aucun texte conventionnel ne prévoyant ces distinctions, à la différence du personnel au sol ; que le protocole d'accord portant sur l'utilisation des contrats temporaires du 23 avril 1998 et son avenant de modification du 8 avril 1999 n'établissaient aucune distinction au sein du personnel navigant commercial, traité en une catégorie unique ; qu'enfin, l'article L. 421-1 du code de l'aviation civile, devenu l'article L. 6521-1 du code des transports qui distingue exclusivement, au sein du ''personnel navigant professionnel » : 1° (le) commandement et (la) conduite des aéronefs ; 2° (le) service à bord des moteurs, machines et instruments divers nécessaires à la navigation de l'aéronef ; 3° (le) service à bord des autres matériels montés sur aéronefs (...), 4° (les) services complémentaires de bord comprenant, notamment, le ''personnel navigant commercial du transport aérien », fait du ''personnel navigant commercial », une qualification professionnelle autonome à laquelle est appliqué un régime spécifique ; qu'en s'abstenant de rechercher, au regard de ces éléments, si le ''personnel navigant commercial », ne constituait pas une qualification professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, ensemble de l'article L. 6521-1 du code des transports, ainsi que du protocole d'accord portant sur l'utilisation des contrats temporaires du 23 avril 1998 et son avenant de modification du 8 avril 1999. »

Réponse de la Cour

9. Il résulte de la combinaison des articles L. 122-3-1 et L. 122-3-13 du code du travail, devenus les articles L. 1242-12 et L. 1245-1 du même code, qu'est réputé à durée indéterminée le contrat de travail à durée déterminée qui ne comporte pas la définition précise de son motif et que cette exigence de précision quant à la définition du motif implique nécessairement que le nom et la qualification du salarié remplacé figurent dans le contrat lorsqu'il s'agit de l'un des cas visés au 1º de l'article L. 122-1-1 devenu le 1° de l'article L. 1242-2 du code du travail.

10. La cour d'appel, qui a retenu que la catégorie « personnel navigant commercial » comportait plusieurs qualifications telles qu'hôtesse et steward, chef de cabine, chef de cabine principal dont les fonctions et rémunérations sont différentes et qui a constaté que les contrats à durée déterminée de remplacement ne comportaient que la mention de la catégorie de « personnel navigant commercial » (PNC), a, procédant à la recherche prétendument omise, décidé à bon droit que la seule mention de la catégorie de « personnel navigant commercial » dont relevait le salarié remplacé ne permettait pas aux salariés engagés de connaître la qualification du salarié remplacé, en sorte que les contrats à durée déterminée conclus pour ce motif étaient irréguliers.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le moyen des pourvois incidents n° B 19-21.536, C 19-21.537, D 19-21.538, F 19-21.540, J 19-21.543, M 19-21.545, N 19-21.546, P 19-21.547 et R 19-21.549

Enoncé du moyen

12. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes tendant à voir requalifier la relation de leurs contrat en contrat à durée indéterminée à compter de la conclusion du premier contrat à durée déterminée de saison, alors « qu'une activité saisonnière implique un accroissement d'activité indépendant de la volonté de l'employeur ; qu'en décidant que la compagnie aérienne Corsair pouvait conclure des contrats à durée déterminée saisonniers pour des emplois relevant du personnel navigant commercial quand ces emplois correspondaient à une activité régulière et permanente de la compagnie, la cour d'appel a violé l'article L. 1242-1 du code du travail et l'article L. 1242-2 du même code dans sa rédaction alors applicable. »

Réponse de la Cour

13. Le caractère saisonnier d'un emploi concerne des tâches normalement appelées à se répéter chaque année à des dates à peu près fixes, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs.

14. Ayant énoncé à bon droit que le fait qu'une compagnie aérienne ait une activité normale et permanente n'exclut pas le recours aux contrats de travail saisonniers dès lors que son activité plus importante du fait de l'accroissement significatif du nombre de passagers chaque année à des dates à peu près fixes, sur des destinations spécifiques et constaté que les contrats à durée déterminée avaient été conclus aux périodes de la plus forte affluence touristique soit, entre le 15 décembre et le 15 avril, puis entre le 15 juin et le 15 septembre, faisant ainsi ressortir qu'ils se rattachaient à des périodes de forte activité touristique destinées à se reproduire chaque année à des dates à peu près fixes, la cour d'appel a pu en déduire que l'employeur justifiait du caractère saisonnier de l'emploi occupé.

15. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Didier et Pinet ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Articles L. 122-3-1 et L. 122-3-13, devenus L. 1242-12 et L. 1245-1, du code du travail.

Rapprochement(s) :

Sur la sanction du défaut de mention du nom et de la qualification du salarié remplacé dans un contrat à durée déterminée, à rapprocher : Soc., 15 janvier 2020, pourvoi n° 18-16.399, Bull. 2020, (cassation), et l'arrêt cité.

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