Numéro 1 - Janvier 2020

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2020

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL

Soc., 29 janvier 2020, n° 18-13.604, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Conventions et accords collectifs – Accords collectifs – Accord d'entreprise – Association Hôpital Saint-Camille – Accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail, l'aménagement du temps de travail et la durée du travail du 3 décembre 1999 – Article 3-1 – Aménagement du temps de travail – Droit au congé – Décompte – Modalités – Portée

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 3122-3 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, l'article 20 V de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, l'article L. 3141-3 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l'article 3-1 de l'accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail et l'aménagement du temps de travail et la durée du travail du 3 décembre 1999 ;

Attendu que les jours de modulation prévus dans le cadre d'une organisation du travail par cycle, qui visent à répartir des heures de travail au sein d'un même cycle, n'ont pas la même nature que les jours de réduction du temps de travail, qui constituent la contrepartie d'un travail supérieur à la durée légale hebdomadaire de travail de 35 heures ; qu'il en résulte qu'en cas de décompte des jours de congés en jours ouvrables, lorsque le dernier jour de congés correspond à un jour de modulation, ce dernier doit être comptabilisé comme jour de congé payé ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. H... a été engagé le 1er juillet 2000 par l'association Hôpital Saint-Camille en qualité de comptable ; qu'il a notamment saisi la juridiction prud'homale afin de demander le paiement de journées qui ont été décomptées de ses congés payés ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser au salarié un rappel de salaire outre les congés payés afférents, l'arrêt retient que le lundi non-travaillé par le salarié chaque quatorzaine est une journée RTT accordée en application de l'aménagement du temps de travail résultant de l'accord d'entreprise du 23 juin 1999, qu'il ne s'agit pas d'une journée non travaillée dans l'entreprise mais d'un jour non travaillé accordé au salarié, en conséquence, les lundis durant lesquels le salarié bénéficiait d'une journée de repos supplémentaire ne constituent pas une journée de congés payés mais une journée qui s'ajoute à ces derniers ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses constatations que le salarié était soumis à une organisation de travail par cycle et que le jour de modulation destiné à répartir des heures de travail au sein d'un même cycle, qui ne constituait pas un jour de récupération du temps de travail, devait être décompté des congés payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne l'Hôpital Saint-Camille à payer à M. H... les sommes de 222,86 euros brut à titre de rappel de salaire des 25 juin 2012 et 7 juillet 2014, outre 22,28 euros brut au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 25 octobre 2013, l'arrêt rendu le 17 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déboute M. H... de sa demande en paiement d'une somme à titre de rappel de salaire des 25 juin 2012 et 7 juillet 2014, outre les congés payés afférents.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Prieur - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Hémery, Thomas-Raquin et Le Guerer ; SCP Rousseau et Tapie -

Textes visés :

Article L. 3122-3 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ; article 20 V de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 ; article L. 3141-3 du code du travail, dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 ; article 3-1 de l'accord d'entreprise « Association Hôpital Saint-Camille » sur la réduction du temps de travail, l'aménagement du temps de travail et la durée du travail du 3 décembre 1999.

Rapprochement(s) :

Sur la différence de nature entre les jours de modulation ou jours de repos aménagé et les jours de réduction du temps de travail, à rapprocher : Soc., 24 avril 2013, pourvoi n° 10-20.473, Bull. 2013, V, n° 118 (rejet).

Soc., 22 janvier 2020, n° 18-15.209, (P)

Rejet

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 – Annexe VI relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale – Accord du 5 juillet 2013 – Article 3.3 – Désignation d'un expert en cas de désaccord entre les entreprises entrantes et sortantes – Procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise au cours des opérations d'expertise – Respect par l'expert – Défaut – Portée

Le non-respect par l'expert désigné en application des dispositions de l'article 3.3 de l'accord du 5 juillet 2013 relatif à l'annexe VI « Transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale » de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise au cours des opérations d'expertise, rend cette expertise irrégulière.

Dès lors, une cour d'appel qui constate par ailleurs que le salarié remplissait les conditions posées par l'article 2.2 de l'annexe VI précitée et qu'il n'était pas établi par l'entreprise entrante que son emploi n'était pas nécessaire aux besoins de l'activité transférée, peut en déduire que le refus de l'entreprise entrante de reprendre le contrat de travail était constitutif pour le salarié d'un trouble manifestement illicite.

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 – Annexe VI relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale – Accord du 5 juillet 2013 – Article 2.2 – Transfert partiel d'une équipe dédiée en cas de modification du périmètre de la prestation – Conditions – Détermination – Cas – Refus de l'entreprise entrante de reprendre le contrat de travail d'un salarié – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris,15 février 2018), statuant en référé, que M. U... a été engagé à compter du 12 octobre 2009 par la société [...] en qualité de coordinateur en zone aéroportuaire d'Orly, statut agent de maîtrise, la relation entre les parties relevant de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959 ; qu'à la suite d'un appel d'offres, le marché relatif au transfert des personnels navigants Air France et Hop, dont la société [...] était jusqu'alors titulaire, ont été attribués à la société Keolis Orly airport à compter du 1er juillet 2016, avec une réduction de leur périmètre ; que la société [...] et la société Keolis Orly airport n'étant pas parvenues à un accord sur le nombre de salariés dont le contrat de travail devait être transféré, elles ont en application de l'article 3.3 de l'accord du 5 juillet 2013 relatif à l'annexe VI « Transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale » attachée à la convention collective applicable, désigné un expert avec mission de déterminer le nombre de salariés susceptibles d'être transférés ; que l'expert a conclu que quinze emplois de conducteur étaient susceptibles d'être transférés mais aucun emploi d'agent de maîtrise ; que M. U..., informé le 11 juillet 2016 de ce que son contrat de travail ne pouvait pas être transféré, a saisi le 19 octobre 2016 la juridiction prud'homale en référé d'une demande tendant à voir ordonner son transfert au sein de la société Keolis Orly airport ;

Attendu que la société Kéolis Orly airport fait grief à l'arrêt d'ordonner sous astreinte le transfert du salarié en son sein dans un emploi correspondant à celui qu'il occupait au sein de la société [...], avec les mêmes qualifications et rémunérations alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des dispositions de l'annexe VI à la Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale, que dès lors qu'une entreprise devient titulaire d'un marché d'assistance en escale ou d'un contrat commercial d'assistance, elle s'engage à reprendre le personnel affecté à cette activité ; que lorsque la prestation est reprise avec un périmètre réduit, l'entreprise entrante reprend chez le cédant les effectifs déterminés par les besoins de l'activité transférée ; qu'en cas de désaccord sur le volume et la liste des emplois à transférer, les entreprises concernées doivent recourir à une procédure d'expertise à l'issue de laquelle l'expert précise le volume et la liste des emplois à transférer ; que cette liste s'impose aux salariés en ce sens qu'elle fait obstacle à ce qu'un salarié dont l'emploi n'y figure pas puisse exiger son transfert, sauf fraude à ses droits qu'il lui incombe d'établir et qui ne peut résulter du seul fait que l'expert a omis, avant de rendre son rapport, de consulter le comité d'entreprise ainsi que le prévoit l'article 3.3 de l'annexe VI ; qu'en jugeant que M. U... pouvait exiger son transfert, cependant qu'il était constant que son emploi ne figurait pas sur la liste de ceux transférables établie par l'expert au motif inopérant que l'expert n'avait pas consulté le comité d'entreprise, la cour d'appel a violé les articles 2.2 et 3.3 de l'annexe VI à la Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale ;

2°/ qu'une fois la liste et le volume des emplois déterminés par les entreprises ou par l'expertise prévue à l'article 3.3 de l'annexe VI, l'entreprise sortante communique à l'entreprise entrante, dans les plus brefs délais, la liste des salariés transférables ; que l'entreprise entrante, dès lors, ne peut se voir imposer le transfert de salariés qui ne figurent pas sur la liste et dont les coordonnées ne lui ont pas été transmises ; qu'il n'en va autrement qu'en cas de fraude aux droits du salarié, qu'il incombe à ce dernier d'établir ; qu'en refusant de faire produire effet, dans les rapports entre M. U... et la société Kéolis Orly airport, à la liste établie par la société Reinier, entreprise sortante, et en ordonnant le transfert de M. U... auprès de la société Kéolis Orly airport sans constater l'existence d'une fraude aux droits du salarié, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 3.1 de l'annexe VI à la Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale ;

3°/ que même en admettant inopposable à M. U..., dans ses rapports avec la société Kéolis Orly airport, le rapport d'expertise et la liste des salariés transférables établie par la société sortante, la cour d'appel ne pouvait ordonner son transfert sans constater la réunion des conditions prévues par l'annexe VI à la Convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959, relative au transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale ; que lorsque la prestation est reprise avec un périmètre réduit, l'entreprise entrante reprend chez le cédant les effectifs déterminés par les besoins de l'activité transférée ; qu'en ordonnant le transfert de M. U... auprès de la société Kéolis Orly airport, entreprise entrante, sans vérifier si son emploi était nécessaire aux besoins de l'activité transférée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2.2 de l'accord collectif précité ;

4°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, au motif que la société Kéolis Orly Airport n'établissait pas que la présence de M. U... n'était pas nécessaire aux besoins de l'activité transférée, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation des articles 9 du Code de procédure civile et 1353 [anciennement 1315] du code civil ;

5°/ que la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; que le seul refus, par l'entreprise entrante, du transfert d'un salarié en application de dispositions conventionnelles dont elle considère les conditions non réunies, ne constitue pas en soi un trouble manifestement illicite si l'entreprise sortante considère pour sa part que le contrat de travail n'est pas transféré, de telle sorte que l'emploi du salarié demandeur n'est pas immédiatement menacé ; qu'en jugeant néanmoins qu'un trouble manifestement illicite était caractérisé et que, dès lors, il y avait matière à référé, la cour d'appel a violé l'article R. 1455-6 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que l'expert n'avait pas respecté la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise au cours des opérations d'expertise telle que prévue par les dispositions de l'article 3.3 de l'annexe VI précité, en sorte que cette expertise, en ce qu'elle détermine le volume et les emplois à transférer, était irrégulière ; qu'ayant constaté, en l'état des éléments soumis aux débats, que M. U... remplissait les conditions posées par l'article 2.2 de l'annexe VI et qu'il n'était pas établi par l'entreprise entrante que son emploi n'était pas nécessaire aux besoins de l'activité transférée, la cour d'appel a pu en déduire que le refus de l'entreprise entrante de reprendre le contrat de travail était constitutif pour le salarié d'un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : M. Pietton - Avocat général : Mme Laulom - Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Articles 2.2 et 3.3 de l'accord du 5 juillet 2013 relatif à l'annexe VI « Transfert de personnel entre entreprises d'assistance en escale » de la convention collective nationale du personnel au sol des entreprises de transport aérien du 22 mai 1959.

Soc., 29 janvier 2020, n° 18-25.903, (P)

Cassation

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Sécurité sociale – Convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale – Avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs – Article 1er – Primes – Prime de responsabilité – Bénéficiaire – Agents techniques – Définition – Fondement – Portée

Pour bénéficier de la prime de responsabilité prévue par l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs modifié par le protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois, les salariés délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs doivent avoir la qualité d'agent technique, laquelle est réservée aux salariés de niveaux de classification 1 à 3, à l'exclusion des salariés de niveau 4 qui exercent leurs activités en bénéficiant d'une autonomie de décision ou organisent, assistent sur le plan technique ou animent les activités d'une équipe.

Encourt la cassation le jugement qui attribue la prime de responsabilité à un salarié occupant un poste d'assistant technique de maîtrise des risques en retenant que malgré sa promotion au niveau 4S le salarié continuait de remplir les conditions d'attribution de la prime, non en raison de la désignation et la de classification de son emploi, mais au titre de l'exercice effectif de la fonction de contrôle assortie d'une délégation écrite de l'agent comptable.

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Sécurité sociale – Convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale – Avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs – Article 1er – Primes – Prime de responsabilité – Bénéfice – Catégorie des agents techniques – Détermination – Portée

Conventions et accords collectifs – Conventions diverses – Sécurité sociale – Convention collective nationale de travail du 8 février 1957 du personnel des organismes de sécurité sociale – Avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs – Article 1er – Primes – Prime de responsabilité – Bénéfice – Catégorie des agents techniques – Exclusion – Salariés de niveau de classification 4 – Portée

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Bordeaux, 26 janvier 2018), rendu en dernier ressort, Mme A... a été engagée par la Caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde le 1er décembre 2004.

2. Jusqu'au mois de septembre 2013, elle a occupé le poste de « gestionnaire maîtrise des risques » de niveau 3S, coefficient 215 et a perçu une « prime mensuelle de contrôle permanente ».

3. Du 1er octobre 2013 au 30 avril 2017, elle a occupé le poste « d'assistante technique maîtrise des risques » de niveau 4S, coefficient 240 et n'a plus perçu la « prime mensuelle de contrôle permanente ».

4. A compter du 1er mai 2017, elle a été nommée « responsable d'unité » niveau 5A.

5. Elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes de rappels de prime de responsabilité dite prime de contrôle et de prime de vacances outre congés payés afférents pour la période où elle occupait un emploi classé au niveau 4S soit du 1er octobre 2013 au 30 avril 2017.

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. L'employeur fait grief au jugement de le condamner à payer diverses sommes au titre de la prime de responsabilité, de la prime de vacances outre congés payés afférents alors « que l'avenant du 25 janvier 1978 à la convention collective du personnel des organismes de sécurité sociale réserve le bénéfice d'une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire, aux seuls « agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs » ; que pour bénéficier de cette prime, le salarié doit donc d'une part appartenir à la catégorie des « agents techniques » et d'autre part exercer, au sein de cette catégorie, des fonctions de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs sur délégation de l'agent comptable, ces conditions étant cumulatives ; que l'appartenance à la catégorie des agents techniques s'apprécie par référence au protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois et ne concerne que les salariés de niveaux de classification 1 à 3, à l'exclusion des salariés de niveau 4 et de niveau supérieur qui exercent leurs activités en bénéficiant d'une autonomie de décision ou organisent, assistent sur le plan technique ou animent les activités d'une équipe ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes a constaté que la salariée bénéficiait du niveau 4S, l'intéressée ne discutant pas que les fonctions qu'elle exerçait réellement étaient celles inhérentes à ce niveau ; qu'en jugeant cependant qu'elle pouvait prétendre au bénéfice de la prime de responsabilité au prétexte qu'après sa promotion à ce niveau, elle continuait d'en remplir les conditions d'attribution non pas en raison de la désignation et la classification de son temps mais au titre de l'exercice effectif de la fonction de contrôle assortie d'une délégation écrite de l'agent comptable, le conseil de prud'hommes a violé le texte précité. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs du 25 janvier 1978 modifié par le protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois :

7. Aux termes de l'alinéa premier de ce texte, les agents techniques délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs perçoivent une prime mensuelle de responsabilité correspondant à 5 % du salaire de leur coefficient de qualification.

8. Il résulte de ce texte que, pour bénéficier de la prime de responsabilité, les salariés délégués de l'agent comptable qui exercent une fonction de contrôle des décomptes ou des comptes employeurs doivent avoir la qualité d'agent technique, laquelle est réservée aux salariés de niveaux de classification 1 à 3, à l'exclusion des salariés de niveau 4 qui exercent leurs activités en bénéficiant d'une autonomie de décision ou organisent, assistent sur le plan technique ou animent les activités d'une équipe.

9. Pour faire droit aux demandes de la salariée, le jugement retient que si la dénomination d'agent technique a disparu à la suite de la révision conventionnelle, il n'est pas démenti que, postérieurement à sa promotion au niveau 4S, la salariée continuait de remplir les conditions de la prime, non en raison de la désignation et la de classification de son emploi mais au titre de l'exercice effectif de la fonction de contrôle assortie d'une délégation écrite de l'agent comptable, éléments essentiels conditionnant l'octroi de la prime.

10. En statuant ainsi, en omettant l'une des conditions d'attribution de la prime et alors qu'il ressortait de ses constatations que la salariée occupait des fonctions classées au niveau 4 en sorte que, n'ayant pas la qualité d'agent technique, elle ne pouvait bénéficier de la prime de responsabilité, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen unique, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 26 janvier 2018, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Bordeaux ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Libourne.

- Président : M. Cathala - Rapporteur : Mme Ala - Avocat général : M. Desplan - Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 1er de l'avenant du 25 janvier 1978 portant attribution d'une prime de responsabilité aux agents techniques exerçant une fonction de contrôle des comptes ou des décomptes employeurs modifié par le protocole d'accord du 30 novembre 2004 relatif au dispositif de rémunération et à la classification des emplois.

Rapprochement(s) :

Sur la notion d'agent technique conditionnant l'octroi de certaines primes, à rapprocher : Soc., 26 septembre 2018, pourvoi n° 17-23.055, Bull. 2018, V, (cassation).

Soc., 8 janvier 2020, n° 18-17.708, (P)

Rejet

Conventions et accords collectifs – Dispositions générales – Principe de faveur – Concours entre plusieurs accords successifs – Détermination de l'accord le plus favorable – Modalités – Portée

Ayant, procédant à une comparaison des dispositions d'un accord de groupe avec celles des accords d'entreprise antérieurs par ensemble d'avantages ayant le même objet ou la même cause, retenu que la renonciation des salariés à certains avantages, dont le retour à une durée de travail hebdomadaire de 35 heures sans augmentation de salaire, la perte de la possibilité d'utiliser les jours de congé de formation capitalisés pour bénéficier d'un congé de fin de carrière et la perte du choix d'utiliser librement les heures supplémentaires capitalisées au lieu de les faire rémunérer, avait eu une contrepartie réelle et effective de la part de la société par ses engagements en ce qui concerne le niveau d'activité global de production en France et le maintien d'un certain niveau d'emploi, engagements qui avaient été respectés, et ainsi caractérisé que les dispositions de l'accord de groupe étaient globalement plus favorables à l'ensemble des salariés du groupe que celles des précédents accords d'entreprise, la renonciation à certains avantages étant compensée par les engagements de maintien de l'emploi, la cour d'appel a pu en déduire qu'en vertu du principe de faveur il convenait d'appliquer l'accord de groupe.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Douai, 30 mars 2018), que la société Maubeuge construction automobile (la société), société de la filière industrielle du groupe [...], a conclu un accord d'entreprise le 9 mai 1994 puis un accord « compétitivité, emploi et aménagement réduction du temps de travail » le 30 juin 1999, lequel a donné lieu à deux avenants des 9 mars et 19 décembre 2001 ; que, le 13 mars 2013, la société [...], agissant tant en son nom propre qu'au nom de celui de ses filiales industrielles, a conclu un accord de groupe intitulé « Contrat pour une nouvelle dynamique de croissance et de développement social de [...] en France », signé par les organisations syndicales CFDT, CFE-CGC et FO ; que, le 18 avril 2014, le syndicat [...] a fait assigner la société, l'Union syndicale CFDT, le syndicat FO, le syndicat CFE-CGC, le syndicat CFTC, le syndicat SL et le syndicat CGT pour voir ordonner à la société le rétablissement des dispositions de l'accord d'entreprise du 9 mai 1994 avec ses avenants des 9 mars et 19 décembre 2001, avec effet au 13 mars 2013, et subsidiairement, voir dire l'accord de groupe du 13 mars 2013 inopposable aux syndicats et personnel de la société ; que la société a appelé dans la cause en intervention forcée et aux fins de déclaration de jugement commun la fédération générale des mines et de la métallurgie CFDT, la fédération FO de la métallurgie et la fédération de la métallurgie CFE-CGC ; que le syndicat CGT Maubeuge construction automobile et la société [...] sont intervenus volontairement dans la procédure ;

Sur le premier moyen : Publication sans intérêt

Sur le second moyen :

Attendu que le syndicat [...] et le syndicat CGT Maubeuge construction automobile font grief à l'arrêt de dire que l'accord « Contrat pour une nouvelle dynamique de croissance et de développement social de [...] en France » signé le 13 mars 2013 était globalement plus favorable que les accords d'entreprises signés les 9 mai 1994, 30 juin 1999, avec leurs avenants des 9 mars et 19 décembre 2001, de refuser en conséquence de considérer que les articles 3.2, 3.2-1, 3.2-6, 3.3.-1, 4.5, 4.6, 4.6-1,4.6-2, 4.6-3, 4.6-4, 5.1, 5.2, 5.3, 5.3-1,5.3-2, 6.1, 6.1-1, 6.1-2, 6.1-3, 6.2-1, 6.2-2, 6.2-3 des accords des 9 mai 1994 et 30 juin 1999 ainsi que les dispositions des avenants n° 2 et 3 en date des 9 mars 2001 et 19 décembre 2001 devaient recevoir application en vertu du principe de faveur et de refuser d'ordonner à la société le rétablissement de ces dispositions dont l'application a été supprimée, et ce avec effet au 23 mars 2013 alors, selon le moyen :

1°/ sur la méthode de comparaison, que, dans le cadre d'un accord dit donnant-donnant, les juges sont tenus de vérifier si les engagements pris par l'une des parties constituent une contrepartie véritable aux concessions faites par l'autre partie ; qu'en l'espèce, les syndicats soutenaient que les engagements pris par la société [...] en matière d'emploi ne pouvaient constituer une contrepartie véritable aux droits auxquels les salariés renonçaient dès lors que la réalisation des engagements annoncés tant en termes de niveau d'activité globale du groupe et d'emploi (embauche de sept cent soixante salariés) tenait à la dynamique du marché mondial et non pas à la renonciation obtenue par le biais de l'accord de groupe, que la situation du groupe n'était pas obérée, et que la finalité de l'accord était la recherche d'une meilleure rentabilité par une baisse du coût du travail ; que pour dire que l'accord du 13 mars 2013 constituait un ensemble indivisible comportant des clauses interdépendantes, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que la société [...] s'était engagée à maintenir l'ensemble des sites industriels en France, un niveau d'activité globale de production suffisant et de ce fait un certain niveau d'emploi en France ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les parties, si les engagements pris par la société, bien que réalisés, constituaient de véritables contreparties aux droits concédés, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 2253-1 et suivants et L. 2232-30 et suivants du code du travail ;

2°/ toujours sur la méthode de comparaison, que, dans le cadre d'un accord dit donnant-donnant, les juges sont tenus de vérifier si les clauses prétendument indivisibles et interdépendantes constituent les causes réciproques les unes des autres ; qu'en l'espèce, les clauses relatives aux engagements en matière d'emploi et celles prévoyant les renonciation à certains droits conventionnels ne pouvaient être considérées comme un ensemble indivisible et interdépendant dans la mesure où les premières concernaient un engagement quantitatif en terme de niveau d'activité et d'emploi au niveau du groupe tandis que les secondes constituaient des renonciations à des droits conventionnels établis au niveau de l'entreprise ; que pour dire que l'accord du 13 mars 2013 était un ensemble indivisible comportant des clauses interdépendantes, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que, dans cet accord, les parties avaient entendu lier le bénéfice de certains avantages à la renonciation à d'autres, dans le cadre d'une négociation dite donnant-donnant, en vue de maintenir l'emploi dans l'ensemble du groupe, et que le sacrifice de certains avantages apparaît comme la contrepartie de l'octroi d'autres ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les parties, si les stipulations prétendument interdépendantes et indivisibles étaient la cause réciproque les unes des autres, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 2253-1 et suivants et L. 2232-30 et suivant du code du travail ;

3°/ sur la comparaison des stipulations, que, dans le cadre d'un accord dit donnant-donnant, l'appréciation du caractère plus ou moins favorable de stipulations conventionnelles en concours doit se faire au niveau de la collectivité directement affectées par les renonciations conventionnelles ; que ne peuvent être considérées comme plus favorables les stipulations d'un accord de groupe prévoyant un engagement global de maintien de l'emploi et de l'activité au niveau du groupe alors que les effectifs de la société affectée par les renonciations conventionnelles ont diminué au cours de la période consécutive à la signature de l'accord de groupe ; qu'en l'espèce, les syndicats soutenaient que, précisément à propos de la société MCA, la société [...] n'avait pas tenu ses engagements puisque les effectifs avaient diminué au niveau de l'entreprise et qu'en conséquence l'accord du 13 mars 2013 ne pouvait être considéré comme plus favorable de ce fait ; que pour dire que l'accord du 13 mars 2013 était globalement plus favorable que les accords antérieurs, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que la renonciation des salariés à certains avantages a eu une contrepartie réelle et effective dans le respect par [...] de ses engagements qui ont permis le maintien de l'emploi ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 2253-1 et suivants et L. 2232-30 et suivants du code du travail ;

4°/ toujours sur la comparaison des stipulations, que les juges sont tenus de répondre aux écritures et allégations des parties ; qu'en l'espèce, les syndicats soutenaient que si, par extraordinaire, les juges étaient amenés à procéder à une comparaison globale entre l'accord du 13 mars 2013 et les autres accords, en tout état de cause, l'accord du 13 mars 2013 ne pouvait être opposé aux salariés de la société MCA dans la mesure où les effectifs avaient diminué au cours de la période postérieure à l'entrée en vigueur de l'accord ; que la cour d'appel, tant dans le rappel des prétentions des parties que dans le corps de sa motivation, n'a aucunement répondu aux syndicats de ce chef ; qu'en s'abstenant de répondre à cette allégation, déterminante dans l'issue du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, procédant à une comparaison des dispositions de l'accord de groupe du 13 mars 2013 avec celles des accords d'entreprise de la société MCA par ensemble d'avantages ayant le même objet ou la même cause, retenu que la renonciation des salariés à certains avantages, dont le retour à une durée de travail hebdomadaire de 35 heures sans augmentation de salaire, la perte de la possibilité d'utiliser les jours de congé de formation capitalisés pour bénéficier d'un congé de fin de carrière et la perte du choix d'utiliser librement les heures supplémentaires capitalisées au lieu de les faire rémunérer, avait eu une contrepartie réelle et effective de la part de [...] par ses engagements en ce qui concerne le niveau d'activité global de production en France et le maintien d'un certain niveau d'emploi, engagements qui avaient été respectés, et ainsi caractérisé que les dispositions de l'accord de groupe étaient globalement plus favorables à l'ensemble des salariés du groupe que celles de l'accord d'entreprise du 9 mai 1994 et de l'accord d'entreprise du 30 juin 1999 modifié par avenants des 9 mars 2001 et 19 décembre 2001, la renonciation à certains avantages étant compensée par les engagements de maintien de l'emploi, la cour d'appel, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu en déduire qu'en vertu du principe de faveur il convenait d'appliquer l'accord de groupe du 13 mars 2013 ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Rinuy - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez ; SCP Célice, Texidor, Périer ; SCP Thouvenin, Coudray et Grévy -

Textes visés :

Articles L. 2253-1 et suivants et L. 2232-30 et suivants du code du travail.

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