Numéro 1 - Janvier 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2019

SANTE PUBLIQUE

1re Civ., 30 janvier 2019, n° 17-26.131, (P)

Cassation partielle sans renvoi

Lutte contre les maladies et les dépendances – Lutte contre les maladies mentales – Modalités de soins psychiatriques – Admission en soins psychiatriques – Procédure devant le juge des libertés et de la détention – Documents à communiquer – Arrêté du préfetr d'admission en soins psychiatriques

L'arrêté du préfet décidant l'admission en soins psychiatriques doit être communiqué au juge des libertés et de la détention saisi pour statuer sur cette mesure.

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel, et les pièces de la procédure, que, le 6 janvier 2016, le représentant de l'Etat dans le département a pris, à l'égard de M. X..., une décision d'admission en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, en application de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique ; que, le même jour, M. X... s'est enfui de l'établissement de soins ; que, le 16 juin 2016, le préfet a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de maintien de la mesure ;

Sur la recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le centre hospitalier spécialisé Henri Ey, relevée d'office après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles R. 3211-13 et R. 3211-19 du code de la santé publique ;

Attendu que le pourvoi formé contre le centre hospitalier spécialisé Henri Ey, avisé de l'audience conformément aux textes précités, mais qui n'était pas partie à l'instance, n'est pas recevable ;

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu les articles R. 3211-12 et R. 3211-24 du code de la santé publique ;

Attendu qu'une copie de l'arrêté d'admission en soins psychiatriques est communiquée au juge des libertés et de la détention quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par le préfet ;

Attendu que, pour prononcer la prolongation de l'hospitalisation sans consentement de M. X..., l'ordonnance énonce qu'il résulte des pièces du dossier que celui-ci a été admis en soins psychiatriques sans son consentement sur arrêté du préfet ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne ressort ni des décisions de première instance et d'appel ni des pièces de la procédure que l'arrêté d'admission en soins psychiatriques ait été produit, le premier président a violé les textes susvisés ;

Et vu les articles L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire et 1015 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle accorde l'aide juridictionnelle provisoire, l'ordonnance rendue le 22 juillet 2016, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Versailles ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Gargoullaud - Avocat général : M. Sassoust - Avocat(s) : SCP Monod, Colin et Stoclet -

Textes visés :

Articles R. 3211-12 et R. 3211-24 du code de la santé publique.

1re Civ., 9 janvier 2019, n° 18-12.906, (P)

Rejet

Transfusion sanguine – Virus de l'hépatite C – Contamination – Indemnisation – Modalités – Substitution de l'ONIAM à l'Etablissement français du sang – Effets – Mise en jeu de la garantie des assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang – Conditions – Contamination pendant la période de validité du contrat

Si l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM) ayant indemnisé des victimes de contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C et, le cas échéant, des tiers payeurs, a la possibilité de demander le remboursement des sommes versées aux assureurs des établissement de transfusion sanguine dans les conditions prévues aux articles 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 et 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, la garantie de ces assureurs ne peut être mobilisée qu'à la condition préalable qu'il soit établi que le fait dommageable, constitué par la contamination, s'est produit pendant la période de validité du contrat d'assurance.

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 15 novembre 2017), que M. X..., atteint d'hémophilie, a reçu, à partir de 1968, un grand nombre de produits sanguins provenant du centre de transfusion sanguine du Mans (le CTS du Mans) et du centre régional de transfusion sanguine de Nantes (le CRTS de Nantes) ; qu'ayant appris, en 1991, qu'il était contaminé par le virus de l'hépatite C, il a assigné en responsabilité et indemnisation, devant la juridiction administrative, l'Etablissement français du sang (EFS), venu aux droits de ces centres ; que, par jugement du 7 juin 2012, le tribunal administratif a retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de l'intéressé et condamné l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (l'ONIAM), substitué à l'EFS, à verser différentes sommes à M. X... en réparation de ses préjudices et à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône au titre de ses débours ; que l'EFS a assigné en garantie, devant la juridiction judiciaire, la société Covea Risks, assureur du CTS du Mans, et la Société d'assurance mutuelle des collectivités locales (SMACL), assureur du CRTS de Nantes du 26 mai 1977 au 31 décembre 1989 ; que la société MMA IARD est intervenue volontairement à l'instance en sa qualité d'assureur du CTS du Mans du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1981, et comme venant aux droits de la société Winterthur, assureur du CTS du Mans à compter du 1er janvier 1982 ; que l'ONIAM, substitué à l'EFS, est intervenu volontairement à cette instance ;

Attendu que l'ONIAM fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes à l'encontre des sociétés SMACL et MMA IARD, alors, selon le moyen :

1°/ que, hors les hypothèses dans lesquelles la couverture d'assurance est épuisée, le délai de validité de la couverture est expiré ou les assureurs peuvent se prévaloir de la prescription, la garantie des assureurs des établissements de transfusion sanguine est due à l'ONIAM lorsque l'origine transfusionnelle d'une contamination est admise, que l'établissement de transfusion sanguine qu'ils assurent a fourni au moins un produit administré à la victime et que la preuve que ce produit n'était pas contaminé n'a pu être rapportée ; qu'ayant constaté que l'origine transfusionnelle de la contamination de M. X... avait pour origine les injections de produits dérivés du sang reçus entre 1968 et 1987 des deux centres de transfusion sanguine du Mans et de Nantes, et l'absence de preuve que ces produits n'étaient pas contaminés, la cour d'appel, en écartant le recours en garantie de l'ONIAM au motif inopérant que la date de la contamination n'était pas déterminée, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 et 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, ensemble l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, dans leurs rédactions applicables ;

2°/ qu'en exigeant qu'il soit établi que la contamination a eu lieu pendant la période au cours de laquelle les centres de transfusion sanguine fournisseurs étaient assurés, quand il résulte de ses propres constatations que les produits fournis par ces établissements lorsque ces derniers étaient assurés n'ont pas vu leur innocuité démontrée, la cour d'appel a violé l'article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 complété par l'article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, ensemble l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, dans leurs rédactions applicables ;

3°/ qu'il résulte des termes clairs et précis de l'enquête transfusionnelle produite aux débats à laquelle l'arrêt se réfère, que les centres de transfusion sanguine du Mans et de Nantes ont fourni des produits sanguins pendant toute la période allant de 1968 à 1987, y compris pendant les périodes au cours desquelles ces établissement étaient assurés ; qu'en retenant une incertitude quant au point de savoir si la fourniture par l'un ou l'autre de ces établissements a eu lieu au cours des périodes pendant lesquelles ces établissements étaient assurés, la cour d'appel a dénaturé le document précité et a violé l'article 1103 du code civil ensemble le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ;

Mais attendu qu'il résulte des articles 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 et 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, que le législateur a confié à l'ONIAM et non plus à l'EFS, venant aux droits et obligations des établissements de transfusion sanguine, la mission d'indemniser les victimes de contaminations transfusionnelles, sans modifier le régime de responsabilité auquel ces derniers ont été soumis, et a donné à l'ONIAM la possibilité de demander à être garanti des sommes versées aux victimes de dommages et, le cas échéant, aux tiers payeurs par les assureurs de ces structures, de sorte que, hors les hypothèses dans lesquelles la couverture d'assurances est épuisée, le délai de validité de la couverture est expiré ou les assureurs peuvent se prévaloir de la prescription, leur garantie est due à l'ONIAM, lorsque l'origine transfusionnelle d'une contamination est admise, que l'établissement de transfusion sanguine qu'ils assurent a fourni au moins un produit administré à la victime et que la preuve que ce produit n'était pas contaminé n'a pu être rapportée ; que, cependant, une telle garantie ne peut être mobilisée qu'à la condition préalable qu'il soit établi que le fait dommageable, constitué par la contamination, s'est produit pendant la période de validité du contrat d'assurance ;

Et attendu qu'ayant constaté que la contamination, dont la date est demeurée indéterminée, avait pu se produire entre 1968 et 1987, et que les sociétés SMACL et MMA IARD n'avaient pas assuré le CTS du Mans et le CRTS de Nantes durant l'ensemble de cette période, la cour d'appel en a déduit, à bon droit et hors toute dénaturation, qu'elles ne pouvaient être tenues à garantie ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Duval-Arnould - Avocat général : M. Ingall-Montagnier (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Sevaux et Mathonnet ; SCP Gaschignard ; Me Le Prado -

Textes visés :

Article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ; article 67 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ; article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ; article 1103 du code civil ; article L. 1221-14 du code de la santé publique.

Rapprochement(s) :

Sur la condition préalable de la contamination pendant la période de validité du contrat d'assurance, à rapprocher : 2e Civ., 17 juin 2010, pourvoi n° 09-65.190, Bull. 2010, II, n° 118 (rejet). Sur les conditions du recours de l'ONIAM à l'encontre des assureurs des centres de transfusion sanguine, à l'issue de l'indemnisation de victimes de contamination par le virus de l'hépatite C, à rapprocher : 1re Civ., 20 septembre 2017, pourvoi n° 16-23.451, Bull. 2017, I, n° 197 (cassation partielle), et l'arrêt cité.

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