Numéro 1 - Janvier 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2019

INDIVISION

1re Civ., 30 janvier 2019, n° 18-12.403, (P)

Rejet

Chose indivise – Usage – Usage par un indivisaire – Limites – Droits des autres indivisaires – Etendue – Détermination – Portée

Aux termes de l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires.

Il en résulte que lorsqu'il est incompatible avec les droits concurrents d'un coïndivisaire, le maintien dans les lieux d'un indivisaire constitue un trouble manifestement illicite auquel le juge des référés peut mettre fin en ordonnant l'expulsion de l'occupant.

Chose indivise – Usage – Usage par un indivisaire – Compatibilité avec les droits des autres indivisaires – Défaut – Caractérisation – Cas – Occupation de l'immeuble indivis – Maintien dans les lieux d'un indivisaire – Portée

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en référé (Reims, 8 décembre 2017), qu'après le divorce de M. Y... et de Mme X..., des difficultés sont nées pour la liquidation et le partage de leur communauté ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de lui ordonner de libérer l'immeuble indivis dans un certain délai sous astreinte, alors, selon le moyen :

1°/ que chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires ; que, dès lors, ne constitue pas un trouble manifestement illicite l'occupation privative par un indivisaire de l'immeuble indivis, lors même que sa licitation aurait été ordonnée judiciairement ; qu'ayant constaté qu'elle était indivisaire de l'immeuble et qu'elle occupait privativement sans opposition à ce titre de M. Y..., coïndivisaire, il en résultait que celle-ci avait un titre légitime d'occupation, de sorte que cette occupation, qui ne faisait pas obstacle à une licitation, ne constituait pas un trouble manifestement illicite et qu'en ordonnant néanmoins l'expulsion de celle-ci, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1, du code de procédure civile ;

2°/ que le payement doit être fait au domicile du débiteur ; qu'ainsi, en l'absence de toute réclamation de M. Y..., coïndivisaire, du règlement de l'indemnité due par elle au titre de la jouissance privative de l'immeuble, celle-ci fut-elle fixée judiciairement, le défaut de payement volontaire de l'indemnité ne constituait pas un trouble manifestement illicite et qu'en se fondant sur cette circonstance pour ordonner son expulsion de l'immeuble indivis qu'elle occupait privativement, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1, du code de procédure civile ;

3°/ que le seul défaut de payement de l'indemnité de l'article 815-9, alinéa 2, du code civil ne prive pas l'indivisaire de son droit de jouissance du bien indivis, lequel résulte de son droit de propriété, de sorte que cette circonstance ne constitue pas un trouble manifestement illicite justifiant son expulsion et qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 1, du code civil ;

4°/ que tout jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer que « le maintien dans les lieux de Mme X... est incompatible avec les droits concurrents de M. Y... sur l'immeuble indivis », sans s'expliquer sur cette incompatibilité autrement que par référence à la dette d'indemnité pour jouissance privative et l'existence d'une inertie de Mme X..., pourtant insusceptible de faire obstacle à la licitation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé qu'aux termes de l'article 815-9 du code civil, chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires, l'arrêt constate que Mme X... occupe l'immeuble indivis sans avoir versé aucune somme au titre de l'indemnité d'occupation dont elle est redevable depuis 2004 et, qu'à la suite du jugement ayant ordonné la licitation de ce bien, elle n'a répondu ni à la lettre simple ni à la lettre recommandée du notaire lui demandant de procéder ou de le laisser procéder aux diagnostics immobiliers nécessaires et ne s'est pas plus manifestée auprès de l'huissier de justice qui s'est rendu sur les lieux sans pouvoir la rencontrer ; qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a souverainement estimé, par une décision motivée, que le maintien dans les lieux de Mme X... était incompatible avec les droits concurrents de M. Y... sur l'immeuble indivis et a pu en déduire l'existence d'un trouble manifestement illicite ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Auroy - Avocat(s) : SCP Boutet et Hourdeaux ; SCP Didier et Pinet -

Textes visés :

Article 815-9 du code civil ; article 809, alinéa 1, du code de procédure civile.

Rapprochement(s) :

Sur le maintien dans les lieux d'un indivisaire incompatible avec les droits concurrents d'un coïndivisaire, à rapprocher : 1re Civ., 26 octobre 2011, pourvoi n° 10-21.802, Bull. 2011, I, n° 183 (cassation partielle).

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