Numéro 1 - Janvier 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2019

CONSTRUCTION IMMOBILIERE

3e Civ., 30 janvier 2019, n° 17-25.952, (P)

Rejet

Maison individuelle – Contrat de construction – Nullité – Modification du projet initial – Signature d'un avenant – Effets – Notification de l'acte – Défaut – Sanction – Portée

L'avenant modifiant un des éléments visés à l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation doit être notifié dans les termes de l'article L. 271-1 du même code mais la sanction du défaut de notification n'est ni la nullité ni l'inopposabilité de cet avenant ; dans ce cas, le délai de rétractation ouvert par l'article L. 271-1 du même code n'a pas commencé à courir.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 9 mai 2017), que M. et Mme X... ont conclu avec la société Cmagic un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture du plan ; que la garantie de livraison à prix et délai convenus a été délivrée par la société CGI BAT qui a exigé que le délai de livraison fût porté de neuf à vingt-cinq mois ; qu'un avenant n° 2 a été signé, sur ce point, entre les parties ; que M. et Mme X... ont pris possession de l'immeuble contre le gré du constructeur le 23 octobre 2009 avant l'expiration du délai contractuel reporté au 13 juin 2010 ; qu'après expertise judiciaire, M. et Mme X... ont résilié unilatéralement le contrat le 16 juin 2011 et assigné la société Cmagic et la CGI Bat en indemnisation ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de rejeter leur demande tendant à la fixation de la livraison de l'immeuble au 28 novembre 2011 et à l'annulation de l'avenant n° 2 et de les condamner à payer une certaine somme à titre de pénalités, alors, selon le moyen :

1°/ que la livraison de l'immeuble s'entend de la mise à disposition d'un immeuble en état d'être habité ; qu'en se bornant à constater que les époux X... avaient pris possession de l'ouvrage le 23 octobre 2009, et par cet acte, auraient manifesté leur volonté de considérer que l'immeuble était en état d'être habité sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si à cette date l'ouvrage présentait des irrégularités, résultant notamment à l'absence de consuel nécessaire au raccordement à l'électricité et de l'impraticabilité du sol, de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes et des jeunes enfants, de sorte qu'il n'était pas habitable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 231-6, I, du code de la construction et de l'habitation ;

2°/ qu'en toute hypothèse, en affirmant que par la prise de possession de l'ouvrage, les maîtres de l'ouvrage avaient considéré que l'immeuble était en état d'être habité, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si cette prise de possession n'était pas justifiée par le litige opposant les maîtres de l'ouvrage au constructeur et si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas, dans le même temps, souligné les dangers et désordres, relatifs notamment au consuel et à la praticabilité du sol, que présentaient la maison, de sorte que ce comportement ne pouvait valoir acceptation de l'immeuble en l'état, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ que la modification d'un des éléments visés à l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation du contrat de construction de maison individuelle est soumise au même formalisme que celui qui s'impose lors de sa conclusion et doit donc faire l'objet d'une notification par lettre recommandée, le maître de l'ouvrage disposant alors d'une faculté de rétractation ; qu'en jugeant que l'avenant n° 2 du 15 février 2008 était opposable aux époux X... sans rechercher, comme elle y était invitée, si cet avenant qui modifie le délai d'exécution des travaux visé à l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation avait été conclu conformément aux formes qui s'imposent lors de la conclusion du contrat de construction de maison individuelle, et avait fait l'objet d'une notification par lettre recommandée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 230-1, L. 231-1, L. 231-2 et L. 231-9 du code de la construction et de l'habitation ;

Mais attendu, d'une part, que la sanction du défaut de notification d'un avenant modifiant un des éléments visés à l'article L. 231-2 du code de la construction et de l'habitation n'est ni la nullité ni l'inopposabilité de cet avenant ; que, dans ce cas, le délai de rétractation ouvert par l'article L. 271-1 du même code n'a pas commencé à courir ; qu'ayant relevé que M. et Mme X... ne sollicitaient que la nullité de l'avenant prorogeant le délai d'exécution des travaux, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche inopérante ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que M. et Mme X... avaient pris possession de l'immeuble contre le gré du constructeur avant la date du délai contractuel de livraison puis rompu unilatéralement le contrat, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a pu en déduire que M. et Mme X... ne pouvaient réclamer des pénalités de retard et a légalement justifié sa décision ;

Sur le troisième moyen pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de les condamner à payer une certaine somme au liquidateur judiciaire de la société Cmagic ;

Mais attendu qu'ayant relevé que l'article 28 du contrat prévoyait, en cas de résiliation unilatérale par le maître d'ouvrage sur le fondement de l'article 1794 du code civil, une indemnité de 10 % calculée sur le solde du contrat et retenu qu'à la date de résiliation, ce solde permettait le calcul de la pénalité, la cour d'appel, qui a constaté que M. et Mme X... contestaient toute créance de ce chef de la société Cmagic, n'invoquaient pas la connexité d'éventuelles créances réciproques et ne réclamaient pas de compensation, a pu les condamner à payer au liquidateur de la société Cmagic la somme litigieuse ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé :

Attendu que, la cassation n'étant pas prononcée sur les moyens précédents, le grief tiré d'une annulation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les autres griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le pourvoi incident de la société Caisse de garantie immobilière du bâtiment qui n'est qu'éventuel :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Chauvin - Rapporteur : M. Bureau - Avocat(s) : SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Articles L. 231-2 et L. 271-1 du code de la construction et de l'habitation.

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