Numéro 1 - Janvier 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2019

COMPETENCE

1re Civ., 30 janvier 2019, n° 18-14.150, (P)

Cassation partielle

Compétence matérielle – Juge aux affaires familiales – Compétence exclusive – Etendue – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un jugement a prononcé le divorce de M. X... et de Mme Y... ; que des difficultés se sont élevées lors des opérations de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 267 du code civil, ensemble l'article L. 213-3, 2°, du code de l'organisation judiciaire ;

Attendu que le juge aux affaires familiales connaît de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, des personnes liées par un pacte civil de solidarité et des concubins ; que la liquidation à laquelle il est procédé en cas de divorce englobe tous les rapports pécuniaires entre les parties et qu'il appartient à l'époux qui se prétend créancier de l'autre de faire valoir sa créance selon les règles applicables à la liquidation de leur régime matrimonial lors de l'établissement des comptes s'y rapportant ;

Attendu que, pour rejeter la demande de M. X... au titre de créances antérieures au mariage, l'arrêt énonce que le juge aux affaires familiales n'est pas compétent pour statuer sur l'indivision ayant existé entre les parties avant leur union matrimoniale et ordonne seulement la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, puis retient que les créances nées avant le mariage n'ont pas vocation à être intégrées dans les comptes de liquidation du régime matrimonial ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 1538, alinéa 2, du code civil ensemble l'article 1315, devenu 1353 du même code ;

Attendu que, selon le premier de ces textes, les présomptions de propriété ont effet dans les rapports entre les époux ;

Attendu que, pour rejeter la demande en partage des meubles meublants, l'arrêt relève qu'il résulte du contrat de mariage que tous les produits de consommation tels que vins, combustibles et autres provisions existant au jour de la dissolution du mariage, seront présumés appartenir à chacun des époux dans la proportion de moitié, de même que les meubles meublants, et retient que M. X... ne justifie pas de l'existence de mobilier indivis, l'habitation ayant été meublée avant le mariage ;

Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les prétentions pécuniaires de M. X... relatives à une créance antérieure au mariage et sa demande relative au partage des meubles meublants garnissant le domicile conjugal, l'arrêt rendu le 16 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : M. Reynis - Avocat général : M. Sassoust - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Capron -

Textes visés :

Article 267 du code civil ; article L. 213-3, 2°, du code de l'organisation judiciaire.

Rapprochement(s) :

Sur la portée de l'objet de la liquidation à laquelle il est procédé en cas de divorce, à rapprocher : 1re Civ., 28 novembre 2000, pourvoi n° 98-13.405, Bull. 2000, I, n° 306 (cassation sans renvoi), et l'arrêt cité. Sur la portée de la détermination de l'étendue de la compétence du juge aux affaires familiales pour connaître de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux, à rapprocher : 1re Civ., 12 juillet 2017, pourvoi n° 16-20.482, Bull. 2017, I, n° 178 (cassation).

Com., 30 janvier 2019, n° 17-28.913, (P)

Rejet

Compétence territoriale – Clause attributive de compétence – Contrat type de commission de transport – Domaine d'application – Détermination – Portée

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé (Versailles, 26 octobre 2017), que la société Duplo France (la société Duplo) a donné mandat à la société Toll Global Forwarding France (la société Toll), qui exerce une activité d'organisation logistique des transports de marchandises en provenance ou à destination du territoire national ou international ainsi que celle de commissionnaire en douane, pour la représenter à compter du 1er janvier 2015 auprès de l'administration des douanes, notamment pour régler en son nom le montant des droits et taxes afférents aux déclarations de douane ; qu'en février 2015, la société Duplo a confié à la société Toll l'importation de marchandises au départ de Yokohama (Japon), à destination du Havre ; que la société Toll lui a adressé à ce titre une facture incluant les sommes destinées à l'administration des douanes, que la société Duplo a payée ; que le 1er juillet 2015, la société Duplo a reçu un avis de mise en recouvrement de la direction générale des douanes et droits indirects pour une somme correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) impayée par l'agence maritime Rommel, à laquelle la société Toll avait sous-traité le dédouanement des marchandises ; que la société Duplo a assigné la société Toll en référé en paiement d'une provision du montant de la TVA ;

Sur les deux premiers moyens, réunis :

Attendu que la société Toll fait grief à l'arrêt d'écarter l'exception d'incompétence du tribunal de commerce de Pontoise au profit du tribunal de commerce de Paris ainsi que le moyen tiré de la prescription annale alors, selon le moyen :

1°/ que selon l'article L. 1432-10 du code des transports, sans préjudice des dispositions impératives issues des conventions internationales et à défaut de convention écrite définissant les rapports entre les parties au contrat sur les matières mentionnées à l'article L. 1432-2, les clauses des contrats types mentionnées à la section 3 s'appliquent de plein droit aux contrats de commission de transport ayant pour objet une liaison internationale ; que le contrat type de commission de transport prévu par l'article D. 1432-3 du code des transports qui régit les relations entre le donneur d'ordre et le commissionnaire de transport dans l'organisation du transport, ainsi que dans celle des autres prestations comme des opérations de douane, attribue compétence au seul tribunal de commerce de Paris pour connaître de tout litige ou contestation relatif au contrat de commission ; qu'en décidant cependant que le contrat type de commission de transport ne devait pas s'appliquer aux opérations de douane dont le commissionnaire de transport était chargé, s'agissant d'une liaison internationale, au motif inopérant que les prestations accessoires aux opérations de douane relèvent du mandat et qu'en l'espèce la société Duplo avait expressément donné à la société Toll un mandat de « représentation en douane directe », la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ;

2°/ que selon l'article L. 1432-10 du code des transports, sans préjudice des dispositions impératives issues des conventions internationales et à défaut de convention écrite définissant les rapports entre les parties au contrat sur les matières mentionnées à l'article L. 1432-2, les clauses des contrats types mentionnés à la section 3 s'appliquent de plein droit aux contrats de commission de transport ayant pour objet une liaison internationale ; que le contrat type de commission de transport prévu par l'article D. 1432-3 du code des transports, qui régit les relations entre le donneur d'ordre et le commissionnaire de transport dans l'organisation du transport, ainsi que dans celle des autres prestations, comme les opérations de douane, prévoit que toutes les actions auxquelles le contrat de commission de transport peut donner lieu sont prescrites dans le délai d'un an ; que cette disposition s'applique, sauf clause contraire, à toutes les prestations effectuées par le commissionnaire de transport, y compris les prestations accessoires, telles les opérations de douane ; qu'en refusant de faire application de la prescription annale prévue au contrat type, aux motifs inopérants que les opérations de douane obéissent aux règles du mandat et que la société Duplo avait chargé le commissionnaire en douane d'une « représentation en douane directe », la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la société Duplo se prévalait d'un mandat non contesté confiant à la société Toll l'exécution, à compter du 1er janvier 2015, de l'intégralité des opérations de douane, jusqu'au paiement des droits et taxes afférents, l'arrêt retient qu'il s'agit d'une « prestation indépendante et détachable de l'opération même de transport » ; qu'ayant ainsi fait ressortir que l'exécution des opérations de douane, objet d'une convention spéciale distincte, ne constituait pas, au sens de l'article 2.7 du contrat type de commission de transport, une prestation accessoire au contrat de commission, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit que les stipulations du contrat type relatives à la prescription et à la compétence ne lui étaient pas applicables ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le troisième moyen :

Attendu que la société Toll fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une provision à la société Duplo alors, selon le moyen :

1°/ que le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en retenant que la société Toll avait failli à ses obligations en ayant recours à un sous-traitant, alors que son mandat ne comportait pas de faculté de substitution, et en condamnant la société Toll à payer une provision « sans qu'il soit nécessaire à la société Duplo de justifier de l'existence d'un préjudice », la cour d'appel, qui a condamné le commissionnaire à payer une provision en l'absence de tout préjudice établi, a violé l'article 873 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en condamnant la société Toll à une provision sans même vérifier si la société Duplo justifiait avoir été dans l'obligation de payer la TVA, ce qui était formellement contesté par la société Toll, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 873 du code de procédure civile ;

Mais attendu que l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le règlement par la société Duplo, le 4 février 2015, des factures de la société Toll, incluant « les sommes acquittées à l'administration des douanes », n'est pas contesté par les parties, que la société Toll a viré ces sommes le 11 mars 2015 sur le compte de son sous-traitant, l'agence Rommel, que celle-ci les a encaissées sans les reverser à l'administration des douanes et a, depuis, été mise en liquidation judiciaire, que la société Duplo a reçu un avis de mise en recouvrement émis par la direction générale des douanes et droits indirects le 1er juillet 2015 et que le mandat confié par la société Duplo à la société Toll ne comportait pas de faculté de substitution ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire, sans encourir les griefs du moyen, que l'obligation de la société Toll, mandataire initial, n'était pas sérieusement contestable en ce qu'elle portait sur l'utilisation des fonds remis en vue de procéder au paiement de la TVA ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Rémery (conseiller doyen faisant fonction de président) - Rapporteur : Mme Fontaine - Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; Me Rémy-Corlay -

Rapprochement(s) :

Sur une autre application du même principe, à rapprocher : Com., 28 mai 2002, pourvoi n° 00-14.765, Bull. 2002, IV, n° 97 (cassation).

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