Numéro 1 - Janvier 2019

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Bulletin des arrêts des chambres civiles

Numéro 1 - Janvier 2019

AGENT IMMOBILIER

1re Civ., 23 janvier 2019, n° 18-11.677, (P)

Cassation partielle

Loi du 2 janvier 1970 – Domaine d'application – Distinction en fonction de la profession du mandant (non)

La loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 n'établit aucune distinction en fonction de la profession du mandant.

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, le premier dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 et le second dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006, et les articles 72 et 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, dans leur rédaction issue du décret n° 2005-1315 du 21 octobre 2005 ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 11 juillet 2013, la société HMC a confié à la société Y... immobilier stratégie et conseils (la société PRISC) un mandat non exclusif de vendre le fonds de commerce de l'hôtel « Le Pic blanc », moyennant des honoraires d'un montant de 125 000 euros à la charge de l'acquéreur et, le 29 août 2013, un second mandat non exclusif de vendre le fonds de commerce et les murs de l'hôtel « Alpenrose », moyennant des honoraires de 260 000 euros à la charge de l'acquéreur ; que, le 30 juillet 2014, les deux ventes ont été réalisées en faveur de la société Maranatha ; que la société PRISC a assigné la société HMC en indemnisation, sur le fondement de la clause pénale stipulée aux mandats ;

Attendu que, pour accueillir la demande, l'arrêt énonce que, selon son extrait Kbis, la société HMC a une activité de vente, location, gestion de tous biens immobiliers, syndic d'immeuble, études et réalisation de toutes opérations liées aux mandats ou mission d'agence immobilière, exécution et promotion de tout programme immobilier, création, acquisition et exploitation d'hôtels résidences de tourisme hôteliers ou para-hôteliers, et que, la société PRISC ayant la même activité, la loi du 2 janvier 1970 ne s'applique pas pour un mandat conclu entre deux professionnels ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la loi précitée n'établit aucune distinction en fonction de la profession du mandant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

RABAT partiellement l'arrêt n° 80 F-P+B rendu le 23 janvier 2019 par la première chambre civile et statuant à nouveau :

Rectifie partiellement le dispositif comme suit :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il valide les deux mandats signés entre la société HMC et la société I... F... immobilier stratégie et conseils les 11 juillet 2013 et 29 août 2013, en ce qu'il dit que la clause pénale contenue dans chacun de ces deux mandats ne contrevient pas aux dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, et en ce qu'il condamne la société HMC à payer à la société I... F... immobilier stratégie et conseils la somme de 385 000 euros, l'arrêt rendu le 23 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Le Gall - Avocat général : M. Sudre - Avocat(s) : SCP Ohl et Vexliard ; SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel -

Textes visés :

Article 1er de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2004-634 du 1er juillet 2004 ; article 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 ; articles 72 et 73 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972, dans leur rédaction issue du décret n° 2005-1315 du 21 octobre 2005.

Rapprochement(s) :

Sur le champ d'application des dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, à rapprocher : 1re Civ., 28 janvier 2003, pourvoi n° 00-21.758, Bull. 2003, I, n° 20 (rejet), et l'arrêt cité ; 1re Civ., 9 janvier 2019, pourvoi n° 17-27.841, Bull. 2019, I, (rejet), et l'arrêt cité.

1re Civ., 9 janvier 2019, n° 17-27.841, (P)

Rejet

Loi du 2 janvier 1970 – Domaine d'application – Sous-mandat du mandataire initial (non)

Les dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et de son décret d'application ne sont pas applicables au sous-mandat donné par un notaire, mandataire initial, à un agent immobilier.

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 20 septembre 2017), que, par acte sous seing privé du 15 mars 2013, M. X... (le notaire), notaire agissant en qualité de mandataire de M. Z... ainsi que de M. et Mme A... (les vendeurs), a confié à la société IFCA défiscalisation (l'agent immobilier) la mission de rechercher un acquéreur pour des biens et droits immobiliers leur appartenant ; que, le 24 juillet 2014, celle-ci l'a assigné, sur le fondement des articles 1779 et 1787 du code civil, en paiement de la somme de 281 250 euros au titre de sa rémunération, correspondant à 7,5 % du prix de vente des biens ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le notaire fait grief à l'arrêt d'accueillir la demande de la société, alors, selon le moyen :

1°/ que les dispositions édictées par la loi Hoguet et son décret d'application s'appliquent entre professionnels de l'immobilier ; qu'en énonçant, pour déclarer recevable l'action de la société, que les dispositions en cause ne s'appliquaient pas au sous-mandat donné par le mandataire initial à un mandataire substitué, lui-même agent immobilier, ni encore aux conventions de rémunération conclues entre un agent immobilier et un autre professionnel de l'immobilier, quand elles avaient vocation à s'appliquer entre professionnels, dans les rapports entre le notaire et la société, agent immobilier, la cour d'appel a violé les articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite loi Hoguet, et 72 de son décret d'application n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

2°/ que c'est aux conventions de rémunération conclues entre agents immobiliers que les dispositions de la loi Hoguet et de son décret d'application ne sont pas applicables ; qu'au demeurant, en retenant, pour déclarer l'action recevable, que M. X... était notaire et qu'il n'exerçait pas la profession d'agent immobilier, pour en déduire que les dispositions en cause n'étaient pas applicables en tant que le notaire précisait que la société était titulaire d'une carte professionnelle d'agent immobilier et qu'il lui avait délégué partie du mandat qui lui avait été donné de vendre en lui confiant la mission de rechercher un acquéreur, quand le mandat litigieux n'était pas une convention de rémunération conclue entre agents immobiliers, la cour d'appel a encore violé les articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite loi Hoguet, et 72 de son décret d'application n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le notaire avait confié à l'agent immobilier un sous-mandat en qualité de mandataire substitué des vendeurs, la cour d'appel a retenu, à bon droit, que, dans les rapports existant entre le notaire et l'agent immobilier, tous deux professionnels de l'immobilier, les dispositions de la loi du 2 janvier 1970 et de son décret d'application n'étaient pas applicables ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que le notaire fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à l'agent immobilier une certaine somme en réparation du dommage causé par la perte de sa rémunération, alors, selon le moyen :

1°/ que la cassation à intervenir sur le premier moyen du chef ayant déclaré recevable l'action de la société entraînera, par voie de conséquence, celle du chef ayant condamné le notaire à payer à cette société une somme de 150 000 euros en réparation du dommage causé par la perte de sa rémunération, qui se trouve dans un lien de dépendance nécessaire, et ce en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;

2°/ que le notaire a l'interdiction de rémunérer de ses deniers personnels les membres d'autres professions avec lesquelles il collabore ; qu'en se bornant, pour le condamner à payer à la société une indemnité de 150 000 euros en réparation du dommage causé par la perte de sa rémunération, à considérer qu'en sa qualité de notaire instrumentaire, il lui appartenait de prévoir dans l'acte que les frais de cette société étaient à la charge de l'acquéreur et que, faute de l'avoir fait, il devait la dédommager pour l'avoir privée de la faculté de percevoir sa rémunération de l'acquéreur, de sorte que c'était vainement, que, pour se soustraire à cette responsabilité, le notaire invoquait les dispositions de l'article 16 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 prohibant le partage des rémunérations, sans rechercher si, le partage d'émoluments ou d'honoraires de négociation étant strictement interdit, sauf entre notaires, et ne pouvant donc qu'être mis à la charge des clients eux-mêmes, la commission litigieuse, à la supposer due, devait être réglée par l'acquéreur, et si ce n'était d'ailleurs pas Mme D... qui avait réglé les honoraires de négociation des notaires, ce dont la société avait pleinement conscience puisqu'elle s'était adressée, dans un premier temps, à celle-ci pour obtenir paiement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 16 du décret n° 78-262 du 8 mars 1978 ;

Mais attendu qu'ayant retenu qu'il appartenait au notaire de prévoir, dans l'acte qu'il instrumentait, que la rémunération de l'agent immobilier serait à la charge de l'acquéreur et que, faute de l'avoir fait, il lui incombait de dédommager son mandataire ainsi privé de la faculté de percevoir sa commission, la cour d'appel, qui a condamné le notaire au paiement de dommages-intérêts et non d'une rémunération, n'était pas tenue d'effectuer une recherche inopérante ; que le moyen, rendu sans portée en sa première branche par le rejet des griefs du premier moyen, n'est pas fondé en sa seconde ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.

- Président : Mme Batut - Rapporteur : Mme Le Gall - Avocat(s) : SCP Caston ; SCP Sevaux et Mathonnet -

Textes visés :

Articles 1er et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 ; article 72 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972.

Rapprochement(s) :

Sur la non application des dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et de son décret d'application au sous-mandat donné par un notaire, mandataire initial, à un agent immobilier, à rapprocher : 1re Civ., 7 février 1995, pourvoi n° 93-14.158, Bull. 1995, I, n° 68 (rejet).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.