Numéro 9 - Septembre 2023

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

LOIS ET REGLEMENTS

Crim., 6 septembre 2023, n° 22-84.919, (B), FRH

Rejet

Application dans le temps – Loi relative au régime d'exécution et d'application des peines – Suivi socio-judiciaire – Ajout d'un dispositif électronique mobile anti-rapprochement – Aggravation de la situation du condamné – Application immédiate (non)

Les dispositions des articles 132-45, 18° bis, et 132-45-1, du code pénal, issues de l'article 10 de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, qui, combinées à l'article 763-3 du code de procédure pénale, permettent l'ajout, par le juge de l'application des peines, de l'obligation de porter un dispositif anti-rapprochement dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, relèvent de l'article 112-2, 3°, du code pénal. Elles ont pour résultat d'aggraver la situation du condamné et ne s'appliquent donc pas aux condamnations prononcées pour des faits commis avant leur entrée en vigueur.

Le procureur général près la cour d'appel de Colmar a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de ladite cour d'appel, en date du 5 juillet 2022, qui a prononcé sur la modification du suivi socio-judiciaire de M. [N] [R].

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [N] [R] a été condamné, le 17 octobre 2016, par la cour d'assises de la Moselle, à dix ans de réclusion criminelle et cinq ans de suivi socio-judiciaire, comportant, notamment, une interdiction d'entrer en contact avec la victime, pour des faits de tentative d'assassinat commis le 16 février 2014.

3. Le 28 mars 2022, le procureur de la République a requis le juge de l'application des peines d'ajouter le port d'un dispositif anti-rapprochement aux obligations auxquelles M. [R] est astreint dans le cadre du suivi socio-judiciaire.

4. Par jugement du 25 mai 2022, le juge de l'application des peines a refusé d'ordonner cette mesure.

5. Le ministère public a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen est pris de la violation de l'article 112-2, 3°, du code pénal.

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé la décision du juge de l'application des peines refusant le prononcé d'un dispositif de surveillance électronique dans le cadre de la peine de suivi socio-judiciaire de M. [R], au motif que, les faits commis par ce dernier étant antérieurs à l'entrée en vigueur des dispositions créant cette mesure, il ne pouvait être fait application de cette loi pénale qui a pour effet d'aggraver la situation de la personne condamnée, alors que ce dispositif ne peut être considéré comme une peine, mais doit s'analyser comme une mesure de sûreté, ayant une fonction uniquement préventive de la commission d'une nouvelle infraction sur le conjoint, de sorte que les dispositions de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019 l'ayant créée, sont applicables immédiatement.

Réponse de la Cour

8. Pour refuser d'ajouter l'obligation de porter un dispositif anti-rapprochement dans le cadre du suivi socio-judiciaire prononcé le 17 octobre 2016 à l'encontre de M. [R], l'arrêt attaqué retient que les faits, objet de la condamnation, ont été commis avant l'entrée en vigueur des dispositions de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, permettant la mise en place de ce dispositif, de sorte que ces dernières, ayant pour effet de rendre plus sévère la condamnation prononcée, ne peuvent s'y appliquer.

9. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application du texte visé au moyen.

10. En effet, les dispositions des articles 132-45, 18° bis, et 132-45-1, du code pénal, issues de l'article 10 de la loi n° 2019-1480 du 28 décembre 2019, qui, combinées à l'article 763-3 du code de procédure pénale, permettent l'ajout, par le juge de l'application des peines, de l'obligation de porter un dispositif anti-rapprochement dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire, relèvent de l'article 112-2, 3°, du code pénal. Elles ont pour résultat d'aggraver la situation du condamné et ne s'appliquent donc pas aux condamnations prononcées pour des faits commis avant leur entrée en vigueur.

11. Dès lors, le moyen doit être écarté.

12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : Mme Guerrini - Avocat général : M. Valat -

Textes visés :

Articles 112-2, 3°, 132-45, 18° bis, et 132-45-1 du code pénal ; article 763-3 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Avis de la Cour de cassation, 22 septembre 2021, n° 21-96.001, Bull. crim. (avis sur saisine) ; Crim. 25 janvier 2023, pourvoi n° 22-82.432, Bull. crim. (rejet).

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