Numéro 9 - Septembre 2020

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Numéro 9 - Septembre 2020

CONTRAVENTION

Crim., 1 septembre 2020, n° 19-83.092, n° 19-86.433, (P)

Rejet

Amende forfaitaire – Amende forfaitaire majorée – Réclamation du contrevenant – Requête en exonération – Requête formée par l'avocat du contrevenant – Recevabilité (oui)

Il se déduit de la combinaison des articles 529-2 et 530 du code de procédure pénale, des dispositions de la loi n ° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, ainsi que des stipulations de l'article 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme que le contrevenant ou l'intéressé, lorsqu'il entend présenter une requête en exonération d'une infraction au code de la route qui lui est reprochée ou une réclamation en contestation d'une amende forfaitaire majorée, a la faculté, s'il l'estime nécessaire à la défense de ses intérêts et sans préjudice des prérogatives que l'autorité de poursuite tient de l'article 530-1 dudit code, d'être représenté dans ses démarches par un avocat.

REJET et NON-ADMISSION sur les pourvois formés par l'officier du ministère public prés le tribunal de police d'Orléans contre :

1- le jugement dudit tribunal, en date du 19 mars 2019 qui, dans la procédure suivie contre M. R... Y... du chef d'excès de vitesse, a ordonné la réouverture des débats ;

2- le jugement dudit tribunal en date du 10 septembre 2019, qui, pour le chef précité a condamné M. Y... à 150 euros d'amende.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires ont été produits.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte des jugements attaqués et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par requête en date du 10 mai 2018, M. K... D..., avocat, formulait auprès du Centre national de traitement des infractions routières de Rennes une requête en exonération d'une amende forfaitaire consécutive à un excès de vitesse d'au moins 20 et inférieur à 30 km/h par conducteur de véhicule à moteur, relevé par la gendarmerie nationale le 29 mars 2018 à l'encontre de M. Y....

3. Par courrier en date du 23 mai 2018, l'officier du ministère public notifiait à M. D... l'irrecevabilité de sa requête et l'invitait à demander à son client de se charger lui-même de cette formalité.

4. A la suite de la confirmation de sa décision par l'officier du ministère public après que M. D... eut exprimé le refus de son client de formuler lui-même une réclamation, M. D... a saisi le tribunal de police d'une requête en incident contentieux.

5. Par jugement en date du 19 mars 2019, le tribunal de police a reçu M.

Y... en son opposition et ordonné la réouverture des débats.

6. Le jugement avant-dire droit a fait l'objet d'un pourvoi de l'officier du

ministère public avec demande d'examen immédiat en application de l'article

570 du code de procédure pénale.

Par ordonnance en date du 3 juin 2019,

le président de la chambre criminelle a rejeté cette demande.

7. Par jugement en date du 10 septembre 2019, le tribunal de police a statué

au fond sur les poursuites engagées contre M. Y... du chef d'excès de vitesse.

Examen des moyens

Sur le moyen visant le jugement en date du 10 septembre 2019

Et sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, visant le jugement en date du 19 mars 2019

8. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le moyen, pris en sa première branche, visant le jugement en date du 19 mars 2019

Enoncé du moyen

9. Le moyen est pris de la violation des articles 453, 529-2, 591 et 593 du code de procédure pénale.

10. Le moyen critique le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré recevable la requête en exonération formulée pat Me K... D..., avocat de M. R... Y... coupable des faits poursuivis, alors que les dispositions de l'article 529-2 du code de procédure pénale relatives à la possibilité, pour le contrevenant de formuler, à défaut de paiement, une requête en exonération et l'interprétation qu'en a fait la chambre criminelle de la Cour de cassation dans son attendu de principe en tête de l'arrêt n°08-87.773 du 7 avril 2009 en réservant la possibilité au « seul contrevenant » de formuler ladite requête, auraient dû conduire le juge à se borner à constater que le tribunal de police était irrégulièrement saisi au fond de cette affaire plutôt que de statuer et de violer, par là même, les dispositions de cet article.

Réponse de la Cour

11. Pour déclarer l'opposition de M. Y... recevable et décider de la réouverture des débats, le tribunal de police énonce, notamment, en référence aux articles 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et 6 du règlement intérieur national de la profession d'avocat, que si un tiers ne peut faire opposition, pour un contrevenant, devant le tribunal de police, une lecture a contrario de l'article 4 autorise l'avocat, en qualité d'auxiliaire de justice et de profession réglementée, à représenter, en l'absence de disposition contraire, son client et à agir en son nom, à tout moment de la procédure et devant toutes les juridictions.

12. Il ajoute que si « l'intéressé » au sens de l'article 530-2 du code de procédure pénale doit s'entendre au sens large, c'est à dire le contrevenant mais également quand il est mandataire à son conseil, le mandant, les garanties de l'article 6§3 de la Convention européenne des droits de l'Homme comprennent toutes les phases de la procédure, et donc aussi la phase contentieuse des amendes forfaitaires majorées.

13. Il conclut que l'opposition ayant été réalisée par le conseil de M. Y..., en son nom et dans son intérêt, elle est recevable.

15. Il se déduit de la combinaison des articles 529-2 et 530 du code de procédure pénale, des dispositions de la loi n ° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, ainsi que des stipulations de l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme que le contrevenant ou l'intéressé, lorsqu'il entend présenter une requête en exonération d'une infraction au code de la route qui lui est reprochée ou une réclamation en contestation d'une amende forfaitaire majorée, a la faculté, s'il l'estime nécessaire à la défense de ses intérêts et sans préjudice des prérogatives que l'autorité de poursuite tient de l'article 530-1 dudit code, d'être représenté dans ses démarches par un avocat.

16. Ainsi, le moyen doit être écarté.

17. Par ailleurs, le jugement est régulier en la forme ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DÉCLARE NON ADMIS le pourvoi contre le jugement du tribunal de police d'Orléans en date du 10 septembre 2019 ;

REJETTE le pourvoi contre le jugement dudit tribunal en date du 19 mars 2019.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Maziau - Avocat général : Mme Caby -

Textes visés :

Articles 529-2 et 530 du code de procédure pénale ; article 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme ; loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

Rapprochement(s) :

S'agissant de la réclamation formulée par un « tiers » à l'encontre d'un titre executoire rendu par le ministère public aux fins de recouvrement de l'amende forfaitaire majorée de plein droit, en sens contraire : Crim., 7 avril 2009, pourvoi n° 08-87.773, Bull. crim. 2009, n° 68 (cassation sans renvoi).

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.