Numéro 4 - Avril 2020

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

DETENTION PROVISOIRE

Crim., 21 avril 2020, n° 20-80.950, (P)

Rejet

Juridictions correctionnelles – Comparution du prévenu, détenu – Cour d'appel – Décision de renvoi à une audience ultérieure – Durée de la détention – Prolongation exceptionnelle – Motivation

Le président de la chambre des appels correctionnels qui prolonge, en application de l'article 509-1 du code de procédure pénale, à titre exceptionnel, la détention provisoire d'un prévenu n'a pas à motiver sa décision au regard des conditions fixées par les articles 137 et 144 du même code.

REJET du pourvoi formé par M. F... Q... contre l'ordonnance du président de la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel de Nîmes, en date du 16 janvier 2020, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs, notamment, d'organisation de mariages aux seules fins de faire obtenir un titre de séjour ou de faire acquérir la nationalité française, et complicité d'organisation de reconnaissance frauduleuse d'enfants, a ordonné la prolongation de sa détention provisoire.

LA COUR,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure ce qui suit.

2. À l'issue d'une information judiciaire, M. Q... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs précités par ordonnance du juge d'instruction en date du 12 mars 2018.

3. Le 4 avril 2019, il a été cité devant le tribunal correctionnel à son adresse déclarée par acte déposé à l'étude de l'huissier de justice.

4. Par jugement contradictoire à signifier, M. Q..., qui n'était ni comparant ni représenté, a été déclaré coupable des chefs reprochés et condamné à une peine d'emprisonnement de quatre ans et à une interdiction définitive du territoire français.

5. Le tribunal a décerné à son encontre un mandat d'arrêt, qui a été mis à exécution. M. Q... a interjeté appel du jugement le 19 septembre 2019, ainsi que le ministère public.

6. En raison de la grève des avocats à laquelle s'est associé le conseil du prévenu, l'audience prévue le 14 janvier 2020 a été renvoyée au 24 mars suivant pour examen au fond et au 16 janvier 2020 devant le président de la chambre aux fins de voir statuer, conformément aux dispositions de l'article 509-1 du code de procédure pénale, sur la prolongation de la détention pendant une nouvelle durée de quatre mois.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen est pris de la violation des articles 558 et 593 du code de procédure pénale et 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs, manque de base légale.

8. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a n'a pas répondu aux exceptions de nullité soulevées par le prévenu, ainsi qu'à sa demande relative à son placement sous contrôle judiciaire ou sous surveillance électronique, alors :

1°/ que la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel était tenue de répondre aux conclusions régulièrement déposées par la défense et qu'en omettant ou en refusant de se prononcer sur les demandes des parties, ladite chambre a méconnu les dispositions susvisées ;

2°/ qu'en statuant par jugement contradictoire à signifier bien que M. Q... n'ait pas été informé de la date de l'audience, la juridiction n'était pas valablement saisie de sorte que sa décision est nulle tout comme les actes subséquents dont le mandat d'arrêt.

Réponse de la Cour

9. Pour prolonger la détention provisoire de M. Q..., l'ordonnance attaquée énonce que l'affaire, en état d'être jugée le 14 janvier 2020, soit dans les quatre mois de son appel, n'a pu l'être du fait de la grève du barreau à laquelle l'avocat du prévenu s'était associé.

10. Statuant en application de l'article 509-1 du code de procédure pénale, après renvoi demandé par le prévenu qui exigeait d'être jugé en présence de son avocat, le président de la chambre des appels correctionnels conclut que ces raisons de fait faisant obstacle au jugement de l'affaire dans le délai légal, il y a lieu, à titre exceptionnel, d'ordonner, pour une durée n'excédant pas quatre mois, la prolongation de la détention de l'intéressé dont les domiciliations évolutives ne permettent pas de garantir la représentation.

11. En l'état de ces énonciations, le président a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués.

12. En premier lieu, l'ordonnance rendue en application de l'article 509-1 du code de procédure pénale a exposé, sans insuffisance ni contradiction, les raisons de fait et de droit faisant obstacle au jugement de l'affaire dans le délai légal.

13. En deuxième lieu, le juge qui prolonge dans ce cadre, à titre exceptionnel, la détention provisoire d'un prévenu, n'a pas à motiver sa décision au regard des conditions fixées par les articles 137 et 144 du même code.

14. Enfin, l'exception de nullité de la citation devant le tribunal correctionnel ne peut, en cause d'appel, être soulevée que devant la juridiction statuant au fond, et non devant le président de la chambre des appels correctionnels statuant dans les limites de l'article 509-1 précité.

15. Ainsi, le moyen doit être écarté.

16. Par ailleurs, l'ordonnance est régulière en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Bonnal - Avocat général : M. Croizier -

Textes visés :

Article 509-1 du code de procédure pénale.

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