Numéro 3 - Mars 2024

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

DETENTION PROVISOIRE

Crim., 26 mars 2024, n° 23-87.324, (B), FRH

Rejet

Cour criminelle départementale – Comparution de l'accusé détenu – Comparution dans le délai de six mois – Renvoi de l'affaire – Effet – Mandat de dépôt conservant sa force exécutoire jusqu'au jugement

Il résulte des articles 181, alinéa 8, et 181-1, alinéa 2, du code de procédure pénale que l'accusé détenu en raison des faits pour lesquels il est renvoyé devant la cour criminelle départementale doit être immédiatement remis en liberté s'il n'a pas comparu devant cette juridiction à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive.

C'est à bon droit qu'une chambre de l'instruction retient que dès lors que l'accusé a comparu devant la cour criminelle départementale qui a renvoyé l'affaire à une audience ultérieure, ce délai n'est plus applicable et le mandat de dépôt conserve, en application de l'article 181, alinéa 7, du code de procédure pénale, sa force exécutoire jusqu'au jugement.

M. [K] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Riom, en date du 19 décembre 2023, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de complicité de viol, torture ou actes de barbarie et violences aggravées, a rejeté sa demande de mise en liberté.

Un mémoire a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [K] [R] a été mis en accusation devant la cour criminelle départementale des chefs susmentionnés.

3. A l'issue d'une première audience, cette juridiction a renvoyé l'affaire à une date ultérieure et rejeté la demande de mise en liberté de l'accusé.

4. M. [R] a saisi la chambre de l'instruction d'une nouvelle demande de mise en liberté.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

5. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mise en liberté de M. [R], alors :

« 1°/ que le délai de six mois, courant à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive, dans lequel la personne détenue en raison des faits pour lesquels elle est renvoyée devant la cour criminelle départementale doit comparaître devant cette juridiction ne peut être interrompu que si l'audience sur le fond a débuté ; qu'en l'espèce, la mise en accusation de M. [R] est devenue définitive le 6 juin 2023 de sorte qu'il devait comparaître devant la cour criminelle départementale au plus tard le 6 décembre 2023 ; qu'à l'audience du 27 novembre 2023, la chambre criminelle départementale s'est bornée à prononcer un renvoi à une session ultérieure sans examiner l'affaire au fond ; qu'en jugeant néanmoins que M. [R] avait comparu au fond devant la chambre criminelle départementale à l'audience du 27 novembre 2023 avant que le renvoi soit ordonné, et que le délai de comparution de six mois avait été respecté, la chambre de l'instruction a violé les articles 144, 181, et 181-1 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Pour écarter le moyen tiré de ce que la détention de M. [R] serait arbitraire et rejeter sa demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce notamment que l'intéressé, mis en accusation par arrêt du 6 juin 2023, a comparu le 27 novembre 2023 devant la cour criminelle départementale régulièrement composée qui, après ouverture des débats et sur demandes de certaines parties, a décidé le renvoi de l'affaire à une session ultérieure.

8. Les juges constatent que le délai de comparution de six mois fixé par l'article 181-1, alinéa 2, du code de procédure pénale a été respecté et que ce texte a cessé de recevoir application.

9. Ils ajoutent que la cour criminelle départementale n'avait pas à ordonner le maintien en détention de l'accusé, le mandat de dépôt conservant son effet jusqu'au jugement.

10. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

11. En effet, dès lors que l'accusé a comparu devant la cour criminelle départementale, fût-ce pour une audience n'ayant donné lieu qu'à un renvoi, les délais prévus par les articles 181-1, alinéa 2, et 181, alinéa 8, du code de procédure pénale ne sont plus applicables et le mandat de dépôt conserve, en application de l'article 181, alinéa 7, du même code, sa force exécutoire jusqu'au jugement.

12. Ainsi, le moyen doit être écarté.

13. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : M. Charmoillaux - Avocat général : M. Desportes (premier avocat général) - Avocat(s) : SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon -

Textes visés :

Articles 181 et 181-1 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur le fait que la comparution de l'accusé devant la cour d'assises qui interrompt le délai d'un an prévu par l'article 181, alinéa 8, du code de procédure pénale, suppose la formation préalable du jury : Crim., 21 mai 2019, pourvoi n° 19-81.753, Bull. crim. 2019, n° 96 (rejet) ; Crim., 27 mars 2018, pourvoi n° 18-80.123, Bull. crim. 2018, n° 52 (cassation sans renvoi).

Crim., 26 mars 2024, n° 24-80.227, (B), FRH

Rejet

Ordonnances – Ordonnance du juge des libertés et de la détention – Appel – Déclaration d'appel – Forme – Mention manuscrite du mis en examen – Conditions de validité – Mention apposée sur un acte juridictionnel, dénuée d'équivoque et assortie de la signature du greffier – Cas – Signature du greffier sur la seule copie conforme de la décision

Pour que la mention « je fais appel » portée par la personne mise en examen sur une décision du juge des libertés et de la détention constitue valablement une déclaration d'appel satisfaisant aux exigences de l'article 502 du code de procédure pénale, elle doit être apposée sur un acte juridictionnel, être dénuée d'équivoque et être assortie de la signature du greffier qui authentifie l'intention de la personne de relever appel de cette décision.

La signature que le greffier appose sur une copie certifiée conforme n'authentifie que la conformité de cette copie à l'original de l'ordonnance, mais ne vient pas au soutien de l'authentification d'une déclaration d'appel.

M. [P] [B] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 10e section, en date du 27 décembre 2023, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de viol aggravé, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.

Un mémoire personnel a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [P] [B] a été mis en examen du chef susvisé et placé en détention provisoire le 15 décembre 2023.

3. Il a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen est pris de la violation des articles 186, 194, 502, 591 et 593 du code de procédure pénale.

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de remise en liberté immédiate de M. [B], alors :

1°/ que la mention « je fais appel » inscrite sur l'ordonnance de placement en détention provisoire équivaut à une déclaration d'appel au sens de l'article 502 du code de procédure pénale, laquelle implique une transcription immédiate sur le registre public prévu par cet article ; que ce n'est qu'en raison de la nécessité d'une transmission de l'appel reçu par le chef d'établissement pénitentiaire, en application de l'article 503 du code de procédure pénale, au greffe du tribunal judiciaire que la jurisprudence fixe au lendemain de la transcription de cet appel sur le registre public le point de départ du délai imparti à la chambre de l'instruction pour statuer ; qu'en appliquant cette règle à un appel formé auprès du greffier du juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

2°/ que tout retard, dans la transcription de cet acte d'appel, doit être justifié par une circonstance insurmontable et extérieure au service public de la justice, cette exigence n'étant pas subordonnée à l'existence d'un retard anormal ; qu'en retenant qu'il n'existait aucun retard anormal dans le traitement de la déclaration d'appel nécessitant qu'il soit justifié de circonstances insurmontables et extérieures au service public de la justice, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés.

Réponse de la Cour

6. Pour que la mention manuscrite portée par la personne mise en examen sur une décision du juge des libertés et de la détention constitue valablement une déclaration d'appel satisfaisant aux exigences de l'article 502 du code de procédure pénale, elle doit être apposée sur un acte juridictionnel, être dénuée d'équivoque et être assortie de la signature du greffier qui authentifie l'intention de la personne de relever appel de cette décision.

7. Tel n'est pas le cas en l'espèce, l'ordonnance de placement en détention provisoire portant la mention « je fais appel » n'étant pas revêtue de la signature du greffier. Celle que le greffier a apposée sur une copie certifiée conforme n'authentifie que la conformité de cette copie à l'original de l'ordonnance, mais ne vient pas au soutien de l'authentification d'une déclaration d'appel.

8. Dès lors, l'appel formé par M. [B] étant irrecevable, il ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction aurait statué tardivement.

9. Ainsi, le moyen doit être écarté.

10. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : M. Rouvière - Avocat général : M. Desportes (premier avocat général) -

Textes visés :

Article 502 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur l'apposition par le mis en examen de la mention « je fais appel » sur l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire dont le greffier est également signataire : Crim., 15 novembre 2022, pourvoi n° 22-85.097, Bull. crim., (cassation sans renvoi).

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