Numéro 3 - Mars 2022

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

COUR D'ASSISES

Crim., 9 mars 2022, n° 21-80.345, (B), FRH

Cassation partielle

Appel – Cour d'assises statuant en appel – Réexamen de l'affaire – Portée – Références aux éléments recueillis lors des débats en premier ressort

Le réexamen de l'affaire auquel doit procéder la cour d'assises statuant en appel n'implique pas que celle-ci doive forger sa conviction sans se référer à aucun des éléments recueillis au cours des débats qui se sont déroulés devant la juridiction qui a statué en premier ressort.

N'encourt pas de critique la feuille de motivation qui retient que les déclarations d'un accusé ont varié entre l'audience de première instance et celle d'appel, ou que, lors de l'audience de la cour d'assises du premier ressort, une des victimes a formellement reconnu un autre accusé comme étant l'auteur d'une infraction.

M. [J] [G] et M. [RS] [S] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises de la Vienne, en date du 18 décembre 2020, qui a condamné, le premier, pour vols aggravés et délit connexe de blanchiment, à seize ans de réclusion criminelle, cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation, le second, pour recel, à un an d'emprisonnement avec sursis, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. La chambre de l'instruction de la cour d'appel de Poitiers a, par arrêt du 28 juin 2016, ordonné la mise en accusation de M. [J] [G] et son renvoi devant la cour d'assises des chefs de vol en bande organisée, avec arme, avec violences, vol suivi de violences ayant entraîné la mort, vol en bande organisée suivi de violences et délit connexe de blanchiment.

3. M. [RS] [S] a été renvoyé pour délit connexe.

4. La cour d'assises de la Charente-Maritime les a condamnés par arrêt du 15 juin 2017.

5. MM. [G] et [S] ont relevé appel, le ministère public a relevé appel incident à l'égard du premier d'entre eux.

Déchéance du pourvoi formé par M. [RS] [S]

6. M. [S] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.

Examen des moyens

Sur les deuxième, troisième et cinquième moyens

7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur les premier et quatrième moyens

Enoncé des moyens

8. Le premier moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [G] coupable de vol en bande organisée avec arme au préjudice des époux [B], alors :

« 1°/ qu'en matière criminelle, l'appel met à néant la décision de la cour d'assises de première instance attaquée, la cour d'assises statuant en appel procédant au réexamen de l'affaire en son entier comme en cas de renvoi après cassation ; que l'arrêt de la cour d'assises statuant en appel ne peut en conséquence être motivé au regard d'éléments procédant des débats devant la cour d'assises de première instance et de l'arrêt rendu par cette juridiction ; qu'en faisant référence dans sa feuille de motivation, pour déclarer l'accusé coupable des faits commis au préjudice des époux [B], aux déclarations de M. [S] passées lors de l'audience de première instance, la cour d'assises statuant en appel a violé l'article 380-1 du code de procédure pénale ;

2°/ que devant la cour d'assises le débat doit être oral ; que les déclarations d'un coaccusé devant la cour d'assises statuant en première instance, non réitérées lors de sa déposition orale devant la cour d'assises statuant en appel et n'ayant figuré dans aucun élément de procédure dont il a été fait lecture à l'audience de la cour d'assises statuant en appel, ne peuvent être visées dans la feuille de motivation de la cour d'assises statuant en appel ; qu'en visant, pour déclarer M. [G] coupable de vol en bande organisée avec arme au préjudice des époux [B], les déclarations passées par M. [S] devant la cour d'assises statuant en première instance qui ne figurent pourtant dans aucun élément de procédure dont il a été donné lecture à l'audience par le président de la cour d'assises statuant en appel, la cour d'assises statuant en appel a violé le principe de l'oralité des débats, ensemble l'article 347 du code de procédure pénale. »

9. Le quatrième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [G] coupable de vol avec violences en bande organisée au préjudice de Mme [Z], alors « qu'en matière criminelle, l'appel met à néant la décision de la cour d'assises de première instance attaquée, la cour d'assises statuant en appel procédant au réexamen de l'affaire en son entier comme en cas de renvoi après cassation ; que l'arrêt de la cour d'assises statuant en appel ne peut en conséquence être motivé au regard d'éléments procédant des débats devant la cour d'assises de première instance et de l'arrêt rendu par cette juridiction ; qu'en faisant référence dans sa feuille de motivation, pour déclarer l'accusé coupable des faits commis au préjudice de Mme [Z], aux déclarations de Mme [Z] devant la cour d'assises de première instance, la cour d'assises a violé l'article 380-1 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

10. Les moyens sont réunis.

11. Le réexamen de l'affaire auquel doit procéder la cour d'assises statuant en appel n'implique pas que celle-ci doive forger sa conviction sans se référer à aucun des éléments recueillis au cours des débats qui se sont déroulés devant la juridiction qui a statué en premier ressort.

12. La loi a prévu que le président donne, lors de l'ouverture des débats, connaissance de la motivation de la décision rendue en premier ressort. Il peut être, lors des débats, procédé à la lecture des déclarations de l'accusé ou de la déposition d'un témoin, consignées au procès-verbal des débats en application des articles 333 et 379 du code de procédure pénal, et l'enregistrement sonore des débats, s'il a été réalisé en premier ressort, peut être utilisé devant la cour d'assises statuant en appel, comme le prévoit l'article 308 du même code. Enfin, l'article 347 du même code énonce que l'arrêt rendu par la cour d'assises ayant statué en premier ressort ainsi que la feuille de motivation qui l'accompagne sont conservés en vue de la délibération de la cour d'assises statuant en appel.

13. La feuille de motivation de l'arrêt critiqué énonce que, parmi les éléments à charge qui ont été discutés lors des débats, la cour d'assises retient, s'agissant de certains des faits, que les déclarations de M. [S] ont varié entre l'audience de première instance et celle d'appel ; pour d'autres faits, que, lors de l'audience de la cour d'assises du premier ressort, une des victimes a formellement reconnu M. [G] comme étant l'un des auteurs du vol.

14. En se déterminant ainsi, la cour d'assises n'a méconnu aucun des textes et principe visés au moyen.

Mais sur le sixième moyen

Enoncé du moyen

15. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [G] à la confiscation des scellés référencés de 1/SD7A à 24/SD7A inclus (IPAC D387), alors « que la motivation consiste également dans l'énoncé des principaux éléments ayant convaincu la cour d'assises dans le choix de la peine, au vu des éléments exposés au cours de la délibération prévue à l'article 362 ; que la motivation de la peine de confiscation autre que celle que du produit ou de l'objet de l'infraction est nécessaire ; que si la cour d'assises n'a pas à préciser les raisons qui la conduisent à ordonner la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction, elle doit néanmoins énumérer les objets dont elle ordonne la confiscation et indiquer, pour chacun d'eux, s'ils constituent l'instrument, le produit ou l'objet de l'infraction, afin de mettre la Cour de cassation en mesure de s'assurer de la légalité de sa décision, et d'apprécier, le cas échéant, son caractère proportionné ; qu'en ordonnant à l'encontre de M. [G] la confiscation des scellés référencés de 1/SD7A à 24/SD7A inclus (IPAC D387) sans indiquer la nature et l'origine des objets placés sous scellés dont elle a ordonné la confiscation, ni le fondement de cette peine, la cour d'assises n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision et a violé les articles 365-1 du code de procédure pénale, 131-21 du code pénal et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 131-21 du code pénal et 365-1 du code de procédure pénale :

16. Selon le premier de ces textes, la confiscation est encourue de plein droit pour les crimes et porte sur tous les biens ayant servi à le commettre, ainsi que sur ceux qui en sont l'objet, ou le produit direct ou indirect.

17. Selon le second, la motivation consiste, en cas de condamnation, dans l'énoncé des principaux éléments ayant convaincu la cour d'assises dans le choix de la peine, la motivation de la peine de la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction n'étant pas nécessaire.

18. Il résulte de ces textes que, si la cour d'assises n'a pas à préciser les raisons qui la conduisent à ordonner la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction, elle doit néanmoins énumérer les objets dont elle ordonne la confiscation et indiquer, pour chacun d'eux, s'ils constituent l'instrument, le produit ou l'objet de l'infraction, afin de mettre la Cour de cassation en mesure de s'assurer de la légalité de sa décision, et d'apprécier, le cas échéant, son caractère proportionné.

19. Après avoir déclaré l'accusé coupable et l'avoir condamné à une peine de réclusion criminelle et d'interdiction de port et détention d'arme soumise à autorisation, la cour d'assises a ordonné la confiscation des scellés référencés 1/SD7A à 24/SD7A inclus.

20. En prononçant ainsi, sans indiquer la nature et l'origine des objets placés sous scellés dont elle a ordonné la confiscation, ni le fondement de cette peine, la cour d'assises n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision.

21. Il en résulte que la cassation est encourue de ce chef.

Sur le septième moyen

Enoncé du moyen

22. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [G] à payer à MM. [K], [E] et [TV] [OO] en leur qualité d'héritiers de [H] [OO] la somme de 15 000 euros au titre du préjudice personnel de celui-ci, en leur qualité d'héritiers de [I] [OO] les sommes de 12 000 euros au titre du préjudice personnel subi par celle-ci et 25 000 euros au titre de son préjudice d'affection lié à la perte de son époux et la somme de 154 140 euros au titre du préjudice matériel, au titre de leur préjudice d'affection à M. [K] [OO] et MM. [E] et [TV] [OO] en leur qualité d'héritiers de [T] [OO] la somme de 20 000 euros, à Mme [F] [OO], MM. [C], [E], [TV], et [AV] [OO] la somme de 10 000 euros, à Mmes [P], [Y], [W], [ML] et [U] [OO] et MM. [D], [R], [N], et [CY] [OO] ainsi que M. [E] [OO] et Mme [X] [YB], ès-qualités de représentants légaux de leur fils, [O], la somme de 5 000 euros, à Mme [V] [A], Mme [X] [YB], Mme [I] [M] et Mme [W] [KI] la somme de 1 000 euros, à Mme [L] [Z] la somme de 8 000 euros au titre du préjudice moral, alors « que la cassation de l'arrêt pénal entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt civil qui se trouvera alors dépourvu de toute base légale au regard des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 311-1, 311-9, 311-10, 324-1 du code pénal, 1240 du code civil, 2, 3, 371, 375, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

23. Le rejet des moyens dirigés contre la régularité de la procédure et la déclaration de culpabilité rend sans objet le moyen qui critique l'arrêt civil.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [RS] [S] :

CONSTATE la déchéance du pourvoi ;

Sur le pourvoi formé par M. [J] [G] :

CASSE et ANNULE l'arrêt pénal de la cour d'assises de la Vienne, en date du 18 décembre 2020, mais en ses seules dispositions relatives à la mesure de confiscation prononcée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises des Deux-Sèvres, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de la Vienne et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Turbeaux - Avocat général : Mme Zientara-Logeay - Avocat(s) : SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh -

Crim., 9 mars 2022, n° 21-81.506, n° 21-81.507, (B), FRH

Cassation partielle

Débats – Incident contentieux – Audition du ministère public et des parties – Omission – Demande de donné acte – Défaut – Effet

Après un arrêt de sursis de statuer ordonné par la cour, en application de l'article 316 du code de procédure pénale, et poursuite des débats, il est prononcé par arrêt incident sur le bien fondé de la demande, après une nouvelle audition du ministère public et des parties. Si le procès-verbal ne mentionne pas que la parole a, de nouveau, été donnée au ministère public et aux parties, la nullité n'est pas encourue, en l'absence de donné-acte que la défense pouvait solliciter, ou de conclusions d'incident qu'elle pouvait déposer jusqu'à la clôture des débats pour faire constater cette irrégularité. Le moyen qui se prévaut d'une telle irrégularité, présenté pour la première fois devant la Cour de cassation, est irrecevable.

M. [E] [O] a formé des pourvois respectivement contre l'arrêt de la cour d'assises de la Seine-Saint-Denis, en date du 4 février 2021 (pourvoi n° 21-81.506), qui, pour viols en récidive et agressions sexuelles, aggravés, l'a condamné à quinze ans de réclusion criminelle, cinq ans de suivi socio-judiciaire et dix ans d'inéligibilité, ainsi que contre l'arrêt du 12 février 2021 (pourvoi n° 21-81.507) par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par ordonnance du 18 juin 2019, M. [E] [O] a été renvoyé devant la cour d'assises de Seine-et-Marne sous l'accusation de viols et agressions sexuelles, aggravés.

3. Par arrêt du 11 février 2020, cette juridiction a condamné M. [O] à quinze ans de réclusion criminelle, quatre ans de suivi socio-judiciaire avec une injonction de soins et a prononcé une mesure de confiscation.

Par arrêt distinct du même jour, la cour a prononcé sur les intérêts civils.

4. M. [O] a relevé appel des arrêts pénal et civil et le ministère public a formé appel incident.

Sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal, pris en ses premier et deuxième moyens

Examen des moyens

Sur le deuxième moyen

5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [O] pour viol sur mineur de quinze ans en récidive et agression sexuelle sur mineur de quinze ans, à la peine de quinze ans de réclusion criminelle, à une mesure de suivi socio-judiciaire pour une durée de cinq ans, avec injonction de soins et fixation de la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations de ce suivi à quatre ans, dit que l'accusé fera l'objet d'une privation de son droit d'éligibilité durant dix ans et constaté son inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, alors « que lors des débats devant la cour d'assises, tous incidents contentieux sont réglés par la cour, le ministère public, les parties ou leurs avocats entendus ; que cette règle s'applique lorsque, saisie de conclusions d'incident, la cour, après avoir ordonné un sursis à statuer par un premier arrêt, répond aux conclusions par un second arrêt ; que le ministère public et les parties doivent être entendus de nouveau avant le prononcé de ce nouvel arrêt ; qu'il résulte des mentions du procès-verbal des débats qu'à l'audience du 2 février, la défense a déposé des conclusions aux fins de supplément d'information ; que, après avoir entendu les parties et le ministère public, par un premier arrêt, la cour a sursis à statuer ; que le 4 février, après avoir de nouveau entendu la défense et l'accusé, par un second arrêt, la cour a rejeté les demandes et dit qu'il sera passé outre aux débats ; que le procès-verbal des débats n'indique pas qu'avant de prononcer ce second arrêt, la cour, comme elle était tenue de le faire, a de nouveau entendu le ministère public et la partie civile ; que la cassation est encourue pour violation de l'article 316 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

7. Il résulte du procès-verbal des débats que, saisie, le 2 février 2021, de conclusions de la défense tendant à voir ordonner un supplément d'information, la cour, statuant sans la participation du jury, après avoir entendu le ministère public et les parties, a rendu, le 3 février 2021, un arrêt ordonnant un sursis à statuer sur cette demande, jusqu'à l'achèvement de l'instruction à l'audience.

8. Le 4 février 2021, la cour, rappelant qu'elle avait entendu le 2 février 2021, l'avocat de la défense et l'accusé ainsi que l'avocat de la partie civile et le ministère public, puis, à nouveau, l'avocat de la défense et l'accusé, qui a eu la parole en dernier, a rendu un arrêt rejetant la demande de supplément d'information présentée.

9. Cependant, il ne résulte pas du procès-verbal des débats que, lors de la lecture de l'arrêt rejetant la demande de supplément d'information, la défense, qui était en mesure de le faire, ait sollicité un donné acte ou déposé des conclusions pour indiquer que cette décision avait été rendue sans que la parole ait été redonnée au ministère public et aux parties, sur la nécessité du supplément d'information, après le sursis à statuer.

10. Le moyen est dès lors, irrecevable en tant qu'il soulève, pour la première fois devant la Cour de cassation, un grief tiré d'une irrégularité affectant la procédure suivie au cours des débats.

Sur le pourvoi formé par M. [O] contre l'arrêt civil

Examen du moyen

Enoncé du moyen

11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [O] entièrement responsable du dommage causé à [X] [J] par le crime de viol sur mineur de quinze ans en récidive et le délit d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans dont il a été déclaré coupable, déclaré recevable et fondée en son principe la constitution de partie civile de [X] [J] et condamné M. [O] à lui payer la somme de 30 000 euros en réparation de son préjudice moral et celle de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 375 du code de procédure pénale, avec exécution provisoire, alors « que la cassation de l'arrêt pénal ayant déclaré M. [O] coupable de viol sur mineur de quinze ans en récidive et d'agression sexuelle sur mineur de quinze ans, entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt civil dont il est le support nécessaire ».

Réponse de la cour

12. Ce moyen, tiré de la cassation de l'arrêt civil par voie de conséquence de l'arrêt pénal, est inopérant, les moyens dirigés contre la déclaration de culpabilité n'étant pas fondés.

Mais, sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal, pris en son troisième moyen

Enoncé du moyen

13. Le troisième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [O] à la peine de quinze ans de réclusion criminelle, à une mesure de suivi socio-judiciaire pour une durée de cinq ans, avec injonction de soins, et dit que M. [O] fera l'objet d'une privation de son droit d'éligibilité durant dix ans, alors « que selon l'article 222-45 du code pénal, seul applicable à la date des faits et dans sa version en vigueur à cette date, le prononcé de la peine complémentaire d'inéligibilité encourue est facultatif ; qu'aux termes de l'article 131-26-2 du code pénal, le prononcé de la peine complémentaire d'inéligibilité mentionnée au 2° de l'article 131-26 et à l'article 131-26-1 est obligatoire à l'encontre de toute personne coupable d'un crime ; qu'à la date des faits (2005-2006), antérieure à la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017, l'article 131-26-2 n'existait pas ; qu'en l'espèce, après avoir énoncé que les faits sont punis notamment par l'article 131-26-2 du code pénal, la cour d'assises a dit que M. [O] fera l'objet d'une privation de son droit d'éligibilité durant dix ans ; qu'elle a violé les textes susvisés, ensemble les articles 131-1 et 132-1 du code pénal. »

Réponse de la cour

Vu les articles 222-45, 131-26-2 du code pénal et 365-1 du code de procédure pénale :

14. Il résulte des deux premiers textes précités qu'à la date à laquelle les faits ont été commis, ils étaient passibles de la peine complémentaire de l'inéligibilité, sans que son prononcé soit obligatoire.

15. Selon le troisième de ces textes, la motivation des arrêts de la cour d'assises consiste, d'une part, dans l'énoncé des principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, l'ont convaincue et qui ont été exposés au cours des délibérations, menées par la cour et le jury préalablement au vote sur les questions et, d'autre part, dans l'énoncé des principaux éléments l'ayant convaincue dans le choix de la peine au vu des éléments exposés au cours de la délibération, la motivation des peines complémentaires obligatoires n'étant pas nécessaire.

16. En condamnant l'accusé à une peine complémentaire de dix ans d'inéligibilité, sans motiver sa décision, alors que le prononcé de cette peine n'était pas obligatoire à la date des faits, la cour d'assises a méconnu les textes susvisés.

17. La cassation est en conséquence encourue. Elle sera limitée aux dispositions de l'arrêt relatives aux peines prononcées.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi n° 21-82.507 :

LE REJETTE ;

Sur le pourvoi n° 21-82.506 :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives aux peines, l'arrêt pénal de la cour d'assises de la Seine-Saint-Denis, en date du 4 février 2021, toutes les autres dispositions relatives à la culpabilité étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation prononcée ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'assises de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. [E] [O] devra payer à M. [X] [J] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'assises de la Seine-Saint-Denis et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : Mme Sudre - Avocat général : Mme Zientara-Logeay - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; Me Balat -

Textes visés :

Article 316 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Crim., 8 février 1984, pourvoi n° 83-94.285, Bull. crim. 1984, n° 47 (cassation), et les arrêts cités.

Crim., 9 mars 2022, n° 21-82.136, (B), FS

Rejet

Procédure antérieure aux débats – Signification à l'accusé – Listes des témoins, experts et jurés – Modalités – Chef d'établissement pénitentiaire

Au cas où l'accusé est détenu, les listes des témoins, experts et jurés de session peuvent être notifiées par le chef de l'établissement pénitentiaire, en application de l'article 555-1 du code de procédure pénale.

Procédure antérieure aux débats – Signification à l'accusé – Liste des jurés – Omission – Absence de grief – Cas – Connaissance par l'accusé d'un arrêt de révision de la liste

L'accusé ne saurait se faire un grief d'une notification irrégulière de la liste des jurés de session, prévue par l'article 282 du code de procédure pénale, dès lors qu'en application de l'article 292 du même code, l'arrêt de révision de ladite liste a été porté à sa connaissance.

M. [C] [A], M. [Y] [F] et M. [D] [K] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises du Var, en date du 13 mars 2021, qui, pour assassinat en récidive, a condamné le premier à vingt-huit ans de réclusion criminelle, pour assassinat, a condamné le second à vingt-huit ans de réclusion criminelle, pour assassinat et délits connexes, a condamné le troisième à vingt ans de réclusion criminelle, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Par arrêt du 18 mars 2019, la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a mis en accusation MM. [C] [A], [Y] [F] et [D] [K] des chefs d'association de malfaiteurs et d'assassinat de [B] [S], la récidive étant visée à l'encontre du premier, le troisième étant renvoyé en outre des chefs de délits connexes, et les a renvoyés devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône.

3. MM. [A], [F], [K] et le ministère public ont relevé appel des arrêts pénal et civil prononcés par ladite cour d'assises le 16 janvier 2020.

Examen de la recevabilité des pourvois

4. M. [A] ayant épuisé par l'exercice qu'il en a fait, par déclaration faite au greffe de l'établissement pénitentiaire le 15 mars 2021, son droit de se pourvoir en cassation contre les arrêts pénal et civil attaqués, son avocat était irrecevable à se pourvoir, le même jour, contre les mêmes décisions.

5. Seul le pourvoi formé par M. [A] est recevable.

6. M. [F] ayant épuisé par l'exercice qu'il en a fait, par déclaration faite au greffe de l'établissement pénitentiaire, le 15 mars 2021, son droit de se pourvoir en cassation contre l'arrêt pénal attaqué, son avocat était irrecevable à se pourvoir, le 17 mars 2021, contre la même décision.

7. Seul le pourvoi formé par M. [F], contre l'arrêt pénal, est recevable, de même que le pourvoi formé par son avocat contre l'arrêt civil.

8. M. [K] ayant épuisé par l'exercice qu'il en a fait, par déclaration faite au greffe de l'établissement pénitentiaire le 15 mars 2021, son droit de se pourvoir en cassation contre l'arrêt pénal attaqué, son avocat était irrecevable à se pourvoir, le 17 mars 2021, contre la même décision.

9. Seul le pourvoi formé par M. [K], contre l'arrêt pénal, est recevable, de même que le pourvoi formé par son avocat contre l'arrêt civil.

Examen des moyens

Sur le premier moyen présenté pour M. [A], et sur le même moyen, rédigé dans les mêmes termes, présenté pour M. [F] et M. [K]

Enoncé des moyens

10. Le premier moyen présenté pour M. [A], pour M. [F], critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné ces derniers des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt-huit ans de réclusion criminelle, le premier moyen présenté pour M. [K], critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné ce dernier des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt ans de réclusion criminelle, alors :

« 1°/ que le ministère public, l'accusé et la partie civile font citer par huissier de justice, dans les conditions prescrites par les articles 550 et suivants du code de procédure pénale, les personnes qu'ils désirent faire entendre en qualité de témoin au cours des débats ; que la citation doit, pour produire ses effets légaux, être délivrée avant l'ouverture des débats ; que les dispositions jurisprudentielles combinées des articles 281 et 550 du code de procédure pénale, en ce qu'elles ne prévoient pas de régime spécifique pour la citation et la signification de la liste complémentaire des témoins, et qu'il en résulte en pratique que l'accusé ou la partie civile doivent solliciter le parquet général pour qu'il soit procédé à la citation de témoins supplémentaires, sans connaître au préalable la liste des témoins que le parquet général va citer, n'est pas conforme au droit à un procès équitable, à l'égalité des justiciables et aux droits de la défense, garantis par l'article 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il y a lieu de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; qu'à la suite de la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra et qui empêchera toute poursuite sur le fondement de ces textes, l'arrêt attaqué se trouvera privé de fondement juridique ;

2°/ qu'en tout état de cause, les dispositions jurisprudentielles combinées des articles 281 et 550 du code de procédure pénale, en ce qu'elles ne prévoient pas de régime spécifique pour la citation et la signification de la liste complémentaire des témoins, et qu'il en résulte en pratique que l'accusé ou la partie civile doivent solliciter le parquet général pour qu'il soit procédé à la citation de témoins supplémentaires, sans connaître au préalable la liste des témoins que le parquet général va citer, violent le droit à un procès équitable qui comprend l'égalité des justiciables devant la justice, l'égalité des armes et le respect des droits de la défense, garantis par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

11. Les moyens sont réunis.

12. Les dispositions contestées n'imposent, en elles-mêmes, aucun ordre d'antériorité entre le ministère public et les parties, dans la communication des noms des témoins dont ils sollicitent la comparution devant la cour d'assises. Elles s'appliquent de la même manière aux accusés et aux parties civiles, qui, dans les mêmes conditions, reçoivent la signification de la liste des témoins que le ministère public envisage de citer et lui font connaître les témoins qu'elles demandent de faire citer. Il n'en résulte, dès lors, aucun manquement au principe d'égalité.

Par ailleurs la dénonciation des témoins doit intervenir un mois au moins avant l'ouverture des débats ce qui permet à l'accusé de faire citer lui-même les témoins dont l'audition lui paraît utile, en étant dispensé des frais de citation si ses ressources sont insuffisantes et qu'il a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

13. Il en résulte que lesdites dispositions ne méconnaissent aucun des textes et principes invoqués.

Sur le deuxième moyen présenté pour M. [A], et sur le même moyen, rédigé dans les mêmes termes, présenté pour M. [F] et pour M. [K]

Enoncé des moyens

14. Le deuxième moyen présenté pour M. [A], pour M. [F], critique l'arrêt en ce qu'il a condamné ces derniers des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt-huit ans de réclusion criminelle, le deuxième moyen présenté pour M. [K], critique l'arrêt en ce qu'il a condamné ce dernier des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt ans de réclusion criminelle, alors :

« 1°/ que d'une part, au visa de l'article 282 du code de procédure pénale, la signification de la liste des jurés de session est une formalité substantielle du procès d'assises dont la méconnaissance est prescrite à peine de nullité ; qu'il n'existe pas de présomption légale de régularité, laquelle doit être constatée par la remise au dossier de l'acte de signification qui doit avoir lieu au plus tard l'avant-veille de l'ouverture des débats ; que dès lors, la cour d'assises ne pouvait, sans violer les articles préliminaire, 282, 305-1, 343, 550 et suivants, 591 et 593 du code de procédure pénale, refuser de renvoyer l'affaire en déclarant régulière la liste des jurés, quand M. [A] signalait, avant l'ouverture des débats, n'avoir pas reçu copie des listes des jurés, experts et témoins ; quand M. [F] signalait, avant l'ouverture des débats, n'avoir jamais reçu la signification de cette liste des jurés et certifiait ne pas avoir signé de sa main l'exploit d'huissier comportant cette en déposant une plainte pour faux et falsification, avec versement de plusieurs avis techniques graphologiques confirmant qu'il ne s'agissait pas de son écriture ; quand M. [K] signalait, avant l'ouverture des débats, n'avoir pas reçu copie des listes des jurés, experts et témoins ; a violé l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que les articles 282, 305-1, 343, 550 et suivants du code de procédure pénale ;

2°/ que d'autre part, au visa de l'article 281 du code de procédure pénale, la signification de la liste des témoins ainsi que des experts est une formalité substantielle du procès d'assises ; qu'il n'existe pas de présomption légale de régularité, laquelle doit être constatée par la remise au dossier de l'acte de signification qui doit avoir lieu au plus tard l'avant-veille de l'ouverture des débats ; que l'irrégularité de la procédure ouvre le droit à la partie à laquelle la signification était due le droit de s'opposer à l'audition du témoin, auquel cas la cour doit rechercher si le grief est fondé, à défaut d'irrégularité de l'audition de ce témoin ; qu'ainsi, la cour d'assises ne pouvait, sans violer les articles préliminaire, 281, 305-1, 343, 550 et suivants, 591 et 593 du code de

procédure pénale, refuser de renvoyer l'affaire et interroger les témoins et experts dont la liste n'avait jamais été régulièrement signifiée à M. [A], à M. [F], à M. [K].»

Réponse de la Cour

15. Les moyens sont réunis.

16. Il résulte des pièces de procédure qu'à l'ouverture des débats, les accusés ont sollicité le renvoi de l'affaire, soutenant qu'ils n'avaient pas reçu une notification régulière de la liste des jurés, des témoins et des experts.

Par arrêt incident, la cour a estimé que la preuve du défaut d'accomplissement des significations dans les délais prévus n'était pas rapportée, les accusés se bornant à procéder par allégations. Elle a relevé que les listes des témoins et des experts du procès en appel reprennent celles du procès tenu en première instance, en ayant ajouté les témoins dont l'audition a été expressément sollicitée par la défense.

17. C'est à tort que la cour a énoncé que les accusés ne rapportaient pas la preuve de l'irrégularité des significations contestées, sans constater la présence, à la procédure, des actes en cause, ou de la remise régulière des listes aux accusés, dans les formes de l'article 555-1 du code de procédure pénale.

18. Toutefois, la nullité de la procédure n'est pas encourue, pour les raisons suivantes :

19. D'une part, le procès-verbal des débats indique qu'avant l'ouverture de l'audience, le greffier de la cour d'assises a porté à la connaissance des accusés la liste du jury de session, telle qu'elle résultait de la révision.

L'accomplissement de cette formalité, prévue par l'article 292 du code de procédure pénale, a mis les accusés en mesure d'exercer leurs droits de récusation.

20. D'autre part, l'absence de signification de la liste des témoins ne peut conduire à l'annulation de la déclaration de la cour d'assises sur la culpabilité et sur la peine, mais permet seulement à la partie à qui la signification n'a pas été faite de s'opposer à l'audition du témoin dont elle ignorait qu'il allait comparaître, la cour pouvant, par arrêt incident, ordonner l'audition du témoin en cause, ainsi que le prévoit l'article 330 du code de procédure pénale.

21. Enfin, la signification de la liste des experts n'est pas prescrite à peine de nullité.

22. Les moyens seront donc écartés.

Sur le troisième moyen présenté pour M. [A], et sur le même moyen, rédigé dans les mêmes termes, présenté pour M. [F] et pour M. [K]

Enoncé des moyens

23. Le troisième moyen présenté pour M. [A], pour M. [F] critique l'arrêt en ce qu'il a condamné ces derniers des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt-huit ans de réclusion criminelle, le troisième moyen présenté pour M. [K] critique l'arrêt en ce qu'il a condamné ce dernier des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt ans de réclusion criminelle,

alors :

« 1°/ que d'une part, en vertu de l'article 316 du code de procédure pénale, l'arrêt rendu sur un incident contentieux doit, à peine de nullité, être suffisamment motivé et répondre aux chefs péremptoires des conclusions ; qu'en l'espèce, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles préliminaire, 316, 591 et 593 du code de procédure pénale la cour d'assises, qui par arrêts incidents, a rejeté les demandes de renvoi et de supplément d'information en se fondant sur le fait que « la rédaction de la mission confiée à [W] [R] est imprécise et limitative », en statuant ainsi sur la valeur probante des avis techniques fournis par la défense, tout en retenant, dans le même temps, que « le responsable du greffe de la maison d'arrêt de [Localité 1] qui précise que la notification a été faite en cellule par l'agent notificateur du greffe », motifs contradictoires qui ne permettent pas à la cour de cassation d'exercer un contrôle utile ;

2°/ que d'autre part, en vertu de l'article 316 du code de procédure pénale, l'arrêt rendu sur un incident contentieux doit, à peine de nullité, être suffisamment motivé et ses motifs ne doivent pas être entachés de contradiction entre eux ou avec le dispositif ; que n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles préliminaire, 316, 591 et 593 du code de procédure pénale et a excédé négativement son office la cour d'assises qui a relevé, tout à la fois que les propos de M. [F] constituent de « simples allégations », tout en s'abstenant de considérer les avis techniques dont elle estimait, par ailleurs, qu'ils n'avaient qu'une valeur probante relative, sans plus de justification, et en refusant de faire droit aux demandes de supplément d'information qui auraient précisément servi à faire la lumière sur la falsification de signature de M. [F] sur l'acte d'huissier ;

3°/ qu'en outre, en vertu de l'article 316 du code de procédure pénale, l'arrêt rendu sur un incident contentieux ne peut, à peine de nullité, préjuger du fond, la cour et le jury réunis étant seuls à même de juger de la culpabilité de l'accusé à la fin des débats ; qu'a méconnu ces principes ainsi que les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, articles préliminaire, 316, 347, 591 et 593 du code de procédure pénale, la cour d'assises qui a rendu un arrêt incident rejetant la demande de renvoi de l'affaire avant l'ouverture des débats puis juste après celle-ci, et avant toute audition au fond, en énonçant que les accusés se contenaient de « simples allégations » et en se référant à la liste des témoins et experts du premier procès, même complétée par des témoins sollicités par la défense mais non encore entendus lors du procès en appel ;

4°/ qu'en tout état de cause, la cour ne peut se référer à la procédure écrite sans violer le principe de l'oralité des débats ; que la cour d'assises qui s'est abstenue de surseoir à statuer, en rendant un arrêt incident rejetant la demande de renvoi de l'affaire avant l'ouverture des débats puis juste après celle-ci, et avant toute audition au fond, en énonçant que les accusés se contenaient de « simples allégations » et en se référant à la liste des témoins et experts du premier procès a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 316, 347, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble le principe de l'oralité des débats. »

Réponse de la Cour

24. Les moyens sont réunis.

Sur les moyens, pris en leurs deux premières branches

25. Au cours des débats, M. [F] a soutenu que la signature figurant sur l'acte selon lequel la copie des listes des jurés, des témoins et des experts lui avait été remise n'était pas la sienne.

Au soutien de cette affirmation, il a produit l'avis de deux techniciens, spécialisés dans l'examen des écritures, dont l'un a été entendu lors des débats devant la cour d'assises, en vertu du pouvoir discrétionnaire du président.

26. Pour écarter, par arrêts incidents, les demandes de renvoi présentées par cet accusé, fondées sur ces avis, la cour indique que leur valeur probante est relative et qu'elle est insuffisante à contredire les indications données par le responsable du greffe de la maison d'arrêt, qui a précisé que la notification avait été faite à ce demandeur, dans sa cellule, par un agent de l'administration pénitentiaire. Elle souligne qu'il est inutile, en l'état de ces précisions, de procéder à un supplément d'information.

27. En prononçant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction, et procédant de son appréciation souveraine, la cour a justifié sa décision de rejeter la demande de renvoi présentée par M. [F]. Il en résulte que les griefs, irrecevables en tant qu'ils sont soulevés par MM. [K] et [A], qui sont sans qualité à se prévaloir de la réponse apportée à une demande présentée par un autre accusé, ne peuvent être admis.

Sur les moyens, pris en leurs deux dernières branches

28. Pour rejeter, à l'ouverture des débats, par arrêt incident, les demandes de renvoi présentées par les accusés, qui contestaient les conditions dans lesquelles les listes des jurés, des témoins et des experts leur avaient été remises, la cour énonce que les prévenus procèdent par simples allégations. Ce terme, qui ne contient aucune prise de position sur la culpabilité des accusés, ne constitue pas une manifestation d'opinion prohibée, ne préjudicie pas à la décision sur le fond, et ne porte pas atteinte aux règles et principes visés aux moyens.

29. Il en va de même de l'énonciation de cet arrêt incident, selon laquelle les listes des témoins et experts reprenaient, devant la cour d'assises statuant en appel, celles du procès tenu en première instance en y ajoutant les témoins dont l'audition avait été demandée par la défense, cette référence ne pouvant être assimilée à une méconnaissance de l'oralité des débats, dès lors qu'elle ne se réfère pas au contenu du dossier d'information, portant sur les faits et la personnalité des accusés, mais à une pièce de procédure, destinée à informer les parties sur le déroulement du procès, afin de leur permettre de préparer leur défense.

30. Il en résulte que les moyens doivent être écartés.

Sur le quatrième moyen présenté pour M. [A], et sur le même moyen, rédigé dans les mêmes termes, présenté pour M. [F] et pour M. [K]

Enoncé des moyens

31. Le quatrième moyen présenté pour M. [A], pour M. [F] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné ces derniers des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt-huit ans de réclusion criminelle, le quatrième moyen présenté pour M. [K] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné ce dernier des chefs d'assassinat et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime à la peine de vingt ans de réclusion criminelle, alors :

« 1°/ que d'une part, en vertu de l'article 379 du code de procédure pénale, à moins que le président n'en ordonne autrement d'office ou sur la demande du ministère public ou des parties, il n'est fait mention au procès-verbal, ni des réponses des accusés, ni du contenu des dépositions, sans préjudice, toutefois, de l'exécution de l'article 333 concernant les additions, changements ou variations dans les déclarations des témoins ; qu'en l'espèce, a violé le principe d'oralité des débats et les articles préliminaire, 332, 347, 379 du code de procédure pénale, le président qui a ordonné la consignation au procès verbal des déclarations du témoin M. [L] [H] au visa de l'article 332 du code de procédure pénale qui ne prévoit que la possibilité pour le président de poser des questions aux témoins ;

2°/ que d'autre part, en vertu de l'article 379 du code de procédure pénale, à moins que le président n'en ordonne autrement d'office ou sur la demande du ministère public ou des parties, il n'est fait mention au procès-verbal, ni des réponses des accusés, ni du contenu des dépositions, sans préjudice, toutefois, de l'exécution de l'article 333 concernant les additions, changements ou variations dans les déclarations des témoins ; qu'en l'espèce, il résulte du procès-verbal que : « - sur question de savoir si il y avait eu un problème avec [Z] [O] (?) ;- sur la question de savoir si il y avait eu un trou dans la caisse commis par [Z] [O] » ; qu'ainsi, le président qui a ordonné la consignation des déclarations du témoin M. [L] [H] « sur question » sans précision de l'identité de la personne posant les questions n'a pas permis à la chambre criminelle de s'assurer du respect des dispositions de l'article 379 et, partant, a méconnu cet article ainsi que les articles 332, 347, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

3°/ qu'en tout état de cause, en retranscrivant les déclarations du témoin [L] [H] au procès-verbal sans aucune indication du fondement le permettant, la cour d'appel d'assises a violé le principe d'oralité des débats et les articles préliminaire, 332, 347, 379, 591 et 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

32. Les moyens sont réunis.

33. Le procès-verbal des débats mentionne qu'il a été procédé à la transcription de la déposition d'un témoin et de ses réponses à deux questions, sur ordre du président de la cour d'assises. Cette indication établit que les dispositions de l'article 379 du code de procédure pénale ont été respectées.

En effet, aucune règle n'impose que le procès-verbal des débats vise le texte précité ou précise l'identité de la personne qui a posé la question dont la réponse est transcrite, la référence à l'article 332 du code de procédure pénale, faite par le procès-verbal des débats, établissant seulement que le ministère public et les parties ont pu poser des questions au témoin, en prenant la parole dans l'ordre voulu par ce dernier texte.

34. Les moyens ne peuvent, dès lors, être admis.

35. Par ailleurs, la procédure est régulière et les faits souverainement constatés par la cour et le jury justifient les qualifications et les peines.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur les pourvois formés contre l'arrêt pénal par les avocats des accusés

Les DECLARE irrecevables ;

Sur les pourvois formés par les accusés

Les REJETTE.

Arrêt rendu en formation de section.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Turbeaux - Avocat général : Mme Bellone - Avocat(s) : SCP Spinosi -

Textes visés :

Article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ; articles 282, 305-1, 343, 550 et suivants, 591 et 593 du code de procédure pénale.

Crim., 23 mars 2022, n° 21-82.958, (B), FRH

Déchéance et rejet

Question – Circonstances aggravantes – Eléments constitutifs – Défaut de l'un des éléments constitutifs dans la question posée – Mention de l'élément constitutif omis dans la question dans la feuille de motivation – Effet – Cas – Crime commis contre une personne dépositaire de l'autorité publique

Les mentions de la feuille de motivation sont de nature à établir que la cour et le jury ont été interrogés sur les éléments constitutifs de la circonstance aggravante d'un crime, au cas où la question qui s'y rapporte ne les a pas tous indiqués.

N'encourt pas la censure l'arrêt dont la feuille de motivation indique que la qualité des victimes, fonctionnaires de police, était apparente, cette circonstance n'étant pas spécifiée dans la question correspondante.

[J] [K], M. [H] [T] et M. [W] [B] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'assises des mineurs de Paris, 3e section, en date du 18 avril 2021, qui, pour tentatives de meurtres, aggravés, les a condamnés, chacun, à dix-huit ans de réclusion criminelle.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Quatre fonctionnaires de police, à bord de deux véhicules, ont été attaqués, à [Localité 1], par un groupe d'une quinzaine de personnes qui ont jeté dans leur direction des bouteilles incendiaires et des pavés.

3. [J] [K], mineur au moment des faits, MM. [H] [T] et [W] [B] ont été mis en examen et renvoyés, avec dix autres personnes, devant la cour d'assises des mineurs de l'Essonne, des chefs de tentatives de meurtres sur personnes dépositaires de l'autorité publique.

4. La cour d'assises a statué par arrêt du 4 décembre 2019.

5. [J] [K], MM. [T], [B] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.

Déchéance du pourvoi formé par M. [B]

6. M. [B] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen proposé pour [J] [K], le premier moyen et le second moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches, proposés pour M. [T]

7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le second moyen, pris en sa première branche, proposé pour M. [T]

8. La Cour de cassation ayant, par arrêt du 24 novembre 2021, dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel de la question prioritaire de constitutionnalité, le grief est devenu sans objet.

Sur le premier moyen proposé pour [J] [K]

Enoncé du moyen

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré [J] [K] coupable d'avoir, le 8 octobre 2016, tenté de donner volontairement la mort à quatre personnes dépositaires de l'autorité publique, l'a exclu du bénéfice de la diminution de peine prévue par l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 et l'a condamné à une peine de dix-huit ans de réclusion criminelle, alors :

« 1°/ que le jury de jugement est composé de six jurés lorsque la cour statue en premier ressort et de neuf jurés lorsqu'elle statue en appel ; qu'en l'espèce, à l'issue des débats, « la cour et les six jurés de jugement ainsi que les quatre jurés supplémentaires, conformément aux dispositions de l'article 296 du code de procédure pénale, sont entrés dans la chambre des délibérations » ; qu'en statuant, à hauteur d'appel, en présence de six jurés, la cour d'assises des mineurs a violé les articles 296 et 592 du code de procédure pénale, ensemble l'article 20 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ;

2°/ que le jury de jugement est composé de six jurés lorsque la cour statue en premier ressort et de neuf jurés lorsqu'elle statue en appel ; que tout jugement ou arrêt doit contenir la preuve de la composition régulière de la juridiction dont il émane ; qu'en l'espèce il ressort du procès-verbal des débats, tout à la fois que neuf jurés ont été désignés à l'ouverture des débats et que « la cour et les six jurés de jugement (...) sont entrés dans la chambre des délibérations » ; que du fait de ces mentions contradictoires, la cour d'assises des mineurs, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 296, 592 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 20 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante. »

Réponse de la Cour

10. Si le procès-verbal des débats indique qu'à la clôture des débats, lors de la suspension d'audience, les six jurés de jugement sont entrés dans la salle des délibérations, le procès-verbal mentionne, dans l'ordre dans lequel ils ont été tirés, les noms des neuf jurés de jugement, tout en indiquant également la présence des neuf jurés de jugement lors de chaque reprise des débats, après les suspensions.

11. En cet état, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que le jury était légalement composé.

12. Ainsi le moyen, qui se fonde sur une simple erreur matérielle, ne peut qu'être écarté.

Sur le deuxième moyen proposé pour [J] [K]

Enoncé du moyen

13. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré [J] [K] coupable, d'avoir le 8 octobre 2016, tenté de donner volontairement la mort à quatre personnes dépositaires de l'autorité publique, l'a exclu du bénéfice de la diminution de peine prévue par l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 et l'a condamné à une peine de dix-huit ans de réclusion criminelle, alors « que chaque circonstance aggravante doit faire l'objet d'une question distincte ; que constitue une circonstance aggravante de la tentative de meurtre la circonstance que la victime était une personne dépositaire de l'autorité publique, dans l'exercice ou du fait de ses fonctions, lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur ; qu'en retenant une telle circonstance aggravante en répondant par l'affirmative à la question n° 2 se bornant à indiquer que la tentative de meurtre avait été commise sur des personnes dépositaires de l'autorité publique, dans l'exercice ou du fait de leurs fonctions, sans préciser la dernière exigence de ce texte, à savoir que cette qualité était « apparente ou connue de l'auteur », la cour d'assises d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 349 du code de procédure pénale, ensemble l'article 221-4 du code pénal. »

Réponse de la Cour

14. La deuxième question de la feuille de questions, est ainsi rédigée : « la tentative de meurtre, ci-dessus spécifiée a-t-elle été commise sur des personnes dépositaires de l'autorité publique, dans l'exercice ou du fait de leurs fonctions » ?

15. Si cette formulation omet de préciser que la qualité des victimes était apparente ou connue des auteurs, ainsi que le prévoit l'article 221-4, 4°, du code pénal, la cassation n'est toutefois pas encourue, dès lors que la feuille de motivation indique que la tentative de meurtre a été commise sur des personnes dépositaires de l'autorité publique, à savoir des fonctionnaires de la police nationale en service, dont la qualité était parfaitement apparente, ce dont il résulte que la cour et le jury ont été interrogés sur tous les éléments constitutifs de la circonstance aggravante retenue.

Sur le quatrième moyen proposé pour [J] [K]

Enoncé du moyen

16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré [J] [K] coupable d'avoir, le 8 octobre 2016, tenté de donner volontairement la mort à quatre personnes dépositaires de l'autorité publique, l'a exclu du bénéfice de la diminution de peine prévue par l'article 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 et l'a condamné à une peine de dix-huit années de réclusion criminelle, alors « que la tentative de meurtre suppose la commission d'un acte matériel positif de nature à causer la mort d'autrui ; qu'en bornant à retenir, d'une part, que « les faits constituent une scène unique de violence, qui doit être appréciée dans son ensemble, sans qu'il soit nécessaire de préciser les faits et gestes de chacun des participants à l'attaque », et, d'autre part, que [J] [K] était présent sur les lieux au moment de l'attaque, sans caractériser le moindre acte positif susceptible de causer la mort des victimes à l'encontre de celui-ci, la cour d'assises d'appel a statué par des motifs inopérants à caractériser une tentative de meurtre et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 121-4, 121-5, 221-1 et 221-4 du code pénal, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

17. Pour déclarer l'accusé coupable de tentatives de meurtres aggravés, la feuille de motivation énonce que seize hommes vêtus de noir, dont les visages étaient dissimulés, sont arrivés groupés, en courant, à l'arrière d'un des véhicules de police, qu'ils étaient porteurs de pavés et d'une douzaine de cocktails Molotov déjà allumés, lancés à très courte distance dans l'habitacle du véhicule, qui s'est immédiatement embrasé, alors que deux policiers se trouvaient à l'intérieur.

18. Les juges énoncent que l'intention homicide des auteurs est établie par différents éléments, résultant notamment des auditions des parties civiles, des constatations effectuées par les enquêteurs, et des films de vidéosurveillance projetés à l'audience.

19. Ils ajoutent que l'attaque a duré quelques dizaines de secondes, qu'elle est l'oeuvre d'un groupe organisé et préparé, qui a manifestement effectué un repérage préalable.

20. Ils concluent à cet égard que les faits constituent donc une scène unique de violence, qui doit être appréciée dans son ensemble, sans qu'il soit nécessaire de préciser les faits et gestes de chacun des participants à l'attaque.

21. S'agissant de [J] [K] spécialement, la feuille de motivation énonce, notamment, que l'accusé reconnaît appartenir à la bande de la « Serpente », et énumère les éléments au titre desquels elle retient qu'il en est le meneur. Elle se fonde sur les déclarations de deux personnes, selon lesquelles, la veille des faits, [J] [K] a été vu préparer des cocktails Molotov, avec deux autres personnes dont le visage était dissimulé par des cagoules. Elle relève que parmi les attaquants filmés par un tiers, apparaît un individu dont la main gauche est totalement blanche, et que [J] [K] n'a pas contesté à l'audience que le 17 juillet 2016, il avait été opéré de la main gauche, après s'être blessé la veille avec un mortier d'artifice. Elle se réfère à la mise en cause de l'accusé par deux renseignements anonymes, mais aussi par un témoin anonyme et par deux témoins, l'un d'eux ayant maintenu à l'occasion d'une confrontation l'avoir reconnu à son physique, sans connaître son nom, parmi les fuyards, après l'attaque, mais aussi avoir appris par un tiers qu'il faisait partie des assaillants.

22. Elle conclut qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, [J] [K] doit être déclaré coupable des faits de tentative de meurtre sur personnes dépositaires de l'autorité publique.

23. En statuant ainsi, la cour d'assises n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

24. En effet, d'une part, lorsque des violences ont été exercées volontairement et simultanément, dans une intention homicide, par plusieurs accusés, au cours d'une scène unique, l'infraction peut être appréciée dans son ensemble, sans qu'il soit nécessaire pour les juges du fond de préciser la nature des violences exercées par chacun des accusés sur chacune des victimes.

25. D'autre part, les énonciations de la feuille de questions et celles de la feuille de motivation mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'assises, statuant en appel, a caractérisé les principaux éléments à charge, résultant des débats, qui l'ont convaincue de la culpabilité de [J] [K].

26. Par ailleurs la procédure est régulière et les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la cour et le jury.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur le pourvoi formé par M. [W] [B] :

CONSTATE la déchéance du pourvoi ;

Sur les pourvois formés par [J] [K] et M. [H] [T] :

Les REJETTE.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. de Larosière de Champfeu (conseiller le plus ancien faisant fonction de président) - Rapporteur : M. Turbeaux - Avocat général : M. Bougy - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan ; SCP Thouin-Palat et Boucard -

Textes visés :

Article 349 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur le fait que la cour et le jury doivent être interrogés sur toutes les circonstances constitutives de l'infraction : Ass. Plén., 8 juillet 2005, pourvoi n° 99-83.846, Bull. Crim. 2005, n° 1 (cassation).

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