Numéro 12 - Décembre 2022

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

DETENTION PROVISOIRE

Crim., 13 décembre 2022, n° 22-85.602, (B), FRH

Rejet

Ordonnances – Ordonnances du juge des libertés et de la détention – Appel – Forme – Mention manuscrite sur le récépissé de réception d'une copie de décision notifiée par le greffe de l'établissement pénitentiaire – Recevabilité (non)

Ne constitue ni un appel, ni une déclaration d'intention à cette fin, la mention manuscrite « je veux faire appel » apposée dans l'établissement pénitentiaire, par la personne détenue, sur le document destiné à lui notifier la décision rendue en matière de détention provisoire et devant être retourné au seul greffier du juge d'instruction.

M. [U] [Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 528 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 16 septembre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, en récidive, et association de malfaiteurs, a dit qu'elle n'était pas saisie.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Le 23 janvier 2022, M. [U] [Y] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire.

3. Le 12 juillet 2022, il a formé une demande de mise en liberté, rejetée par ordonnance du 18 juillet suivant.

4. Ce même jour, le greffier du juge saisi a transmis, pour notification de cette décision et remise de copie à l'intéressé, au greffe de l'établissement pénitentiaire, un récépissé que M. [Y] a renseigné le lendemain, 19 juillet, en y apposant, de sa main, la date, sa signature et, au-dessous de celle-ci, les mots « je veux faire appel du rejet ».

5. Le 5 septembre 2022, l'avocat de M. [Y] a saisi le juge d'instruction d'une demande de mise en liberté au motif que l'intéressé était détenu sans titre, faute pour la chambre de l'instruction d'avoir statué dans le délai légal sur l'appel interjeté dans les conditions sus-décrites.

6. Le même jour, le greffe du juge d'instruction a enregistré un appel, en annexant à cet acte le récépissé précité.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen d'annulation, a constaté qu'il n'avait pas été interjeté appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Toulon du 18 juillet 2022, et a constaté que M. [Y] était valablement en détention provisoire, alors :

« 1°/ que la déclaration d'intention du prévenu, claire et dénuée d'ambiguïté de faire appel, entraîne, sans autre conditions de forme, l'obligation pour les agents du greffe pénitentiaire ou du greffe de la juridiction d'enregistrer sa déclaration d'appel sans délai, la déclaration d'intention faisant, à défaut de cet enregistrement à bref délai, courir le délai pour statuer à compter de sa date ; que la mention manuscrite « je veut faire appel du rejet » apposée, le 19 juillet 2022 par M. [Y] au bas du récépissé de notification de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention portant rejet d'une demande de mise en liberté, retourné au greffe de la juridiction, constitue une déclaration d'intention claire et dépourvue d'ambiguïté qu'il appartenait au greffe pénitentiaire qui avait procédé à la notification ou à celui de la juridiction auquel la notification avait été retournée d'enregistrer sans délai ; qu'en affirmant néanmoins que faute de déclaration au greffe pénitentiaire ou de transcription au greffe de la juridiction il n'y avait pas d'appel recevable la chambre de l'instruction violé les articles 194, 502 et 503 du code de procédure pénale ;

2°/ que l'arrêt constate que l'appel du détenu a donné lieu à l'établissement d'une déclaration d'appel par le greffier de la juridiction le 5 septembre ; que l'arrêt attaqué se borne à relever que « la cour ignore les conditions et pour quelles raisons exactes cet acte d'appel avait été établi », sans relever aucune circonstance imprévisible et insurmontable justifiant le retard mis à l'enregistrement de l'appel que l'intéressé, le 19 juillet, avait clairement et précisément indiqué vouloir faire, et le report du point de départ délai pour statuer ; que dès lors en se prononçant sur cet appel le 16 septembre sans ordonner la mise en liberté d'office, l'arrêt attaqué a violé les articles 194, 502 et 203 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

8. Pour constater qu'il n'a pas été relevé appel de l'ordonnance de rejet de demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce que les dispositions de l'article 503 du code de procédure pénale n'ont pas été respectées, de sorte que la question soumise à la chambre de l'instruction est celle de l'existence même d'un appel et non de sa seule recevabilité.

9. Les juges relèvent qu'en l'absence de toute autre manifestation de l'intéressé, la réalité de cet appel repose sur la seule mention apposée par M. [Y] sur le récépissé de notification de l'ordonnance.

10. Ils observent qu'un tel document n'est pas destiné au greffe de l'établissement pénitentiaire mais à celui du magistrat et retiennent qu'aucun défaut de diligence ne peut être imputé à l'administration.

11. Ils en déduisent que la seule mention ci-dessus, apposée sur le formulaire de notification, dans les conditions sus-décrites, ne peut être considérée comme un appel.

12. En l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen, pour les motifs qui suivent.

13. D'une part, la mention « je veux faire appel du rejet », qui n'a été apposée, ni au pied de l'ordonnance contestée, ni en présence du greffier du juge saisi, mais sur un imprimé dédié à la notification de la décision, ne saurait valoir appel.

14. D'autre part, cet imprimé était destiné, non au greffe de l'établissement pénitentiaire, saisi pour seule exécution de la formalité, mais à celui du juge d'instruction, de sorte qu'il ne valait pas lettre d'intention.

15. Ainsi, le moyen, qui n'est pas fondé en sa première branche et, dès lors, est inopérant en sa seconde, doit être écarté.

16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : M. Seys - Avocat général : M. Aldebert - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 503 du code de procédure pénale.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.