Numéro 12 - Décembre 2020

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

CIRCULATION ROUTIERE

Crim., 15 décembre 2020, n° 20-82.503, (P)

Rejet

Titulaire du certificat d'immatriculation redevable pécuniairement – Titulaire personne morale – Représentant légal – Responsabilité pénale – Compatibilité avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (oui)

L'article L. 121-6 du code de la route est compatible avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme pour les raisons qui suivent.

En premier lieu, les dispositions de l'article L. 121-6 précité sont destinées à améliorer la répression d'infractions routières et ainsi, à protéger l'ensemble des usagers de la route, en évitant l'impunité d'un conducteur dont le comportement dangereux est avéré, notamment en matière de perte de points.

En deuxième lieu, la personne morale ayant fait le choix d'être titulaire du certificat d'immatriculation et pris la responsabilité de confier le véhicule à la personne qui a commis l'infraction, l'article L.121-6 du code de la route fait obligation à son représentant d'indiquer aux autorités compétentes les renseignements en sa possession sur l'identité et l'adresse du conducteur du véhicule au moment où l'infraction au code de la route a été constatée, ce qui constitue une simple information qui n'est pas en soi incriminante.

En troisième lieu, la peine encourue est une amende contraventionnelle, d'un montant modéré, de sorte qu'elle est strictement proportionnée à l'objectif poursuivi de prévention des infractions.

Enfin, le représentant de la personne morale peut s'exonérer de sa responsabilité en établissant que le véhicule a été volé ou qu'il y a eu usurpation des plaques d'immatriculation ou tout autre cas de force majeure.

REJET du pourvoi formé par la société Garage Saint-Mathieu contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 18e chambre, en date du 17 février 2020, qui, pour non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur d'un véhicule, l'a condamnée à deux amendes de 1 875 euros.

Un mémoire personnel a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Un véhicule appartenant à la société Garage Saint-Mathieu a été verbalisé pour excès de vitesse, relevés les 27 décembre 2016 et 27 janvier 2017.

3. Les 24 avril et 29 mai 2017, la société, destinataire des avis de contravention initiaux, a fait l'objet de deux avis de contravention pour non-transmission de l'identité des conducteurs, puis de deux avis d'amende forfaitaire majorée, qu'elle a contestés.

4. La société a été citée devant le tribunal de police, qui a rejeté l'exception de nullité et l'a condamnée à deux amendes de 1 875 euros.

5. Appel a été interjeté, à titre principal, par la société prévenue et, à titre incident, par l'officier du ministère public.

Examen des moyens

Sur le troisième moyen

6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen est pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré la société Garage Saint-Mathieu coupable de l'infraction prévue à l'article L.121-6 du code de la route, alors que ce texte porte atteinte au droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination, en sanctionnant la non-désignation du conducteur d'une amende pénale de 3 750 euros, alors que le montant de l'amende initiale pour l'infraction est de 90 euros.

Réponse de la Cour

9. Pour écarter l'exception de nullité tirée de l'inconventionnalité de l'article L. 121-6 du code de la route, l'arrêt énonce que l'obligation de communiquer l'identité du conducteur imposée par ce texte au représentant légal de la personne morale détenant le véhicule n'est pas en soi incriminante, ledit représentant légal pouvant contester être l'auteur de l'infraction en établissant l'existence d'un vol ou de tout autre événement de force majeure ou en apportant tous éléments permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction.

10. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

11. En premier lieu, les dispositions de ce texte sont destinées à améliorer la répression d'infractions routières et, ainsi, à protéger l'ensemble des usagers de la route, en évitant l'impunité d'un conducteur dont le comportement dangereux est avéré, notamment en matière de perte de points.

12. En deuxième lieu, la personne morale ayant fait le choix d'être titulaire du certificat d'immatriculation et pris la responsabilité de confier le véhicule à la personne qui a commis l'infraction, l'article L.121-6 du code de la route fait obligation à son représentant d'indiquer aux autorités compétentes les renseignements en sa possession sur l'identité et l'adresse du conducteur du véhicule au moment où l'infraction au code de la route a été constatée, ce qui constitue une simple information qui n'est pas en soi incriminante.

13. En troisième lieu, la peine encourue est une amende contraventionnelle, d'un montant modéré, de sorte qu'elle est strictement proportionnée à l'objectif poursuivi de prévention des infractions.

14. Enfin, le représentant de la personne morale peut s'exonérer de sa responsabilité en établissant que le véhicule a été volé ou qu'il y a eu usurpation des plaques d'immatriculation ou tout autre cas de force majeure

15. Dès lors, le moyen doit être écarté.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

16. Le moyen fait grief à la cour d'appel d'avoir dénaturé les pièces du dossier, alors qu'elle aurait dû constater l'impossibilité matérielle du prévenu de pouvoir se conformer à ses obligations légales, le formulaire d'avis de contravention ne permettant pas d'identifier l'infraction reprochée et par voie de conséquence, le conducteur du véhicule ayant commis l'infraction relevée le 27 décembre 2016.

Réponse de la Cour

17. Le moyen est nouveau, mélangé de fait et comme tel, irrecevable.

18. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Violeau - Avocat général : M. Croizier -

Textes visés :

Article L. 121-6 du code de la route ; article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Rapprochement(s) :

S'agissant de la compatibilité des articles L.121-2 et L.121-3 du code de la route avec l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, à rapprocher : Crim., 1er février 2000, pourvoi n° 99-84.764, Bull. crim. 2000, n° 51 (rejet), et les arrêts cités. S'agissant de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme jugeant compatible la législation britannique en matière de circulation similaire aux dispositions de l'article L.121-6 du code de la route avec l'article 6 de la Convention, à rapprocher : CEDH, 29 juin 2007, gde ch., affaire O'Hallroan et Francis c. Royaume-Uni, req. n° 15809/02 et 25624/02.

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