INSTRUCTION

Crim., 11 décembre 2019, n° 19-86.039, (P)

Rejet

Détention provisoire – Décision de prolongation – Débat contradictoire – Demande de renvoi – Délai de convocation – Renonciation – Courrier d'avocat – Portée

Il se déduit des dispositions de l'article 114 alinéa 1 du code de procédure pénale que la renonciation à se prévaloir de l'irrégularité de la convocation doit émaner de la personne mise en examen, en présence de son avocat ou celui-ci dûment appelé, et qu'elle ne peut intervenir qu'au moment du débat contradictoire.

Dès lors, ne constitue pas une demande nouvelle impliquant une réponse du juge des libertés et de la détention, celle par laquelle l'avocat d'une personne mise en examen précise, au soutien d'une précédente demande de renvoi rejetée par le juge des libertés et de la détention, qu'il renonce expressément à se prévaloir de l'inobservation du délai de convocation prescrit pour la tenue du débat contradictoire dans le cadre d'une éventuelle prolongation de la détention provisoire.

REJET sur le pourvoi formé par M. E... T... contre un arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 30 août 2019, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de vols aggravés et escroqueries, a prononcé sur la prolongation de sa détention provisoire.

LA COUR,

Un mémoire a été produit.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Dans le cadre d'une information ouverte le 14 décembre 2018 au cabinet du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Saint-Nazaire, M. T... a été, le même jour, placé en détention provisoire.

3. Le juge des libertés et de la détention a fixé à l'audience du 7 août 2019 le débat contradictoire portant sur la demande de prolongation de la détention provisoire, qui devait se tenir au plus tard le 13 août 2019.

4. Par télécopie adressée au greffe de ce magistrat, le lundi 5 août 2019, l'avocat de M. T... a sollicité le report du débat au motif qu'il était retenu au même moment devant le tribunal correctionnel de Nantes.

5. Le juge des libertés et de la détention y a répondu, par télécopie envoyée le 6 août 2019, en indiquant qu'il maintenait le débat et rejetait la demande de renvoi sollicitée selon lui de manière tardive, en relevant, en outre, qu'au regard des dispositions de l'article 114 du code de procédure pénale, il n'était plus dans les délais pour pouvoir le convoquer à une autre date.

6. Par nouvelle télécopie adressée le 6 août 2019 à 18 h 02, l'avocat de M. T... a maintenu sa demande de renvoi en faisant valoir qu'il renonçait expressément à se prévaloir de l'inobservation du délai de convocation de cinq jours ouvrables avant le débat.

7. Après débat contradictoire tenu le 7 août 2019 en l'absence de l'avocat de la personne mise en examen, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de cette détention.

8. M. T... a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le moyen pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. Le moyen est pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles préliminaire et 114 du code de procédure pénale.

11. Le moyen critique l'arrêt attaqué « en ce la chambre de l'instruction a rejeté le moyen de nullité de l'ordonnance de prolongation et confirmé la prolongation de la détention provisoire, alors que le rejet d'une demande de report d'une audience de prolongation de détention provisoire doit être suffisamment motivé sous peine d'emporter la nullité de l'ordonnance de prolongation, que le report peut intervenir par simple avis, sans que s'impose le respect du délai de cinq jours ouvrables entre la convocation et la date du débat contradictoire ; qu'en considérant que la motivation de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention était suffisante, alors qu'elle ne répondait pas à ces éléments, expressément invoqué par l'avocat du mis en examen, la chambre de l'instruction a violé l'article 114 du code de procédure pénale ».

Réponse de la Cour

12. Pour écarter le moyen de nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la prolongation de la détention sans répondre à la seconde demande de renvoi présentée par l'avocat, la chambre de l'instruction énonce que le juge des libertés et de la détention y a répondu par télécopie en date du 6 août 2019, permettant ainsi à ce dernier de prendre toute mesure utile aux intérêts de son client.

13. Les juges retiennent qu'il importe peu qu'aucune mention de la demande de report et de la décision motivée de rejet ne soit portée à l'ordonnance de prolongation ou au procès-verbal de débat contradictoire.

14. Les juges relèvent enfin qu'il est indifférent que le juge des libertés et de la détention n'ait pas réitéré sa décision de rejet motivé après l'envoi de la nouvelle télécopie de l'avocat de M. T... par laquelle il maintenait sa demande en faisant valoir, pour la première fois, qu'il renonçait expressément aux prescriptions de l'article 114 du code de procédure pénale.

15. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.

16. En effet il résulte des dispositions de l'article 114 du code de procédure pénale que la renonciation à se prévaloir de l'irrégularité de la convocation ne peut intervenir qu'au moment du débat contradictoire.

17. Dès lors le juge des libertés et de la détention, qui avait apporté une réponse à la demande de renvoi présentée par l'avocat de M. T..., n'était pas tenu de répondre à sa seconde demande, qui ne comportait pas d'élément nouveau.

18. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

19. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Turbeaux - Avocat général : M. Petitprez - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 114 du code de procédure pénale.

Crim., 18 décembre 2019, n° 19-86.338, (P)

Rejet

Ordonnances – Ordonnance de règlement – Appel – Durée de la détention provisoire – Effet

Lorsque le juge d'instruction a rendu son ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, et même en cas d'appel formé contre cette ordonnance, la chambre de l'instruction, pour rejeter une demande de mise en liberté, n'est pas tenue aux exigences de motivation prévues par l'article 145-3 du code de procédure pénale, dès lors qu'en application de l'article 186-5 du même code, les délais relatifs à la durée de la détention provisoire prévus aux articles 145-1 à 145-3 ne sont alors plus applicables, ce texte ne distinguant pas selon que la chambre a ou non prescrit un supplément d'information.

REJET du pourvoi formé par M. X... K... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 1re section, en date du 20 septembre 2019, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de participation à un groupement formé ou une entente établie en vue de la préparation d'un acte de terrorisme, a rejeté sa demande de mise en liberté.

Un mémoire a été produit.

LA COUR,

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 145-3 du code de procédure pénale ;

en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de M. K..., détenu depuis le 10 février 2017 ;

alors que lorsque la durée de la détention provisoire excède un an en matière criminelle, la décision rejetant la demande de mise en liberté doit comporter les indications particulières qui justifient en l'espèce la poursuite de l'information et le délai prévisible d'achèvement de la procédure ; que l'arrêt attaqué ne comporte aucune de ces indications et se borne à dire que la durée de la détention provisoire ne présente pas de caractère excessif ; que l'arrêt attaqué a ainsi été rendu en violation de l'article 145-3 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... K..., détenu depuis le 10 février 2017, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par ordonnance des juges d'instruction co-saisis, en date du 25 avril 2019, dont le ministère public a interjeté appel ; que, par arrêt du 2 juillet suivant, la chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information ; que, le 6 septembre 2019, M. K... a saisi cette juridiction d'une demande de mise en liberté, conformément aux dispositions des articles 148-1 et 148-2 du code de procédure pénale ;

Attendu que le requérant ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction, pour rejeter sa demande de mise en liberté, n'a pas satisfait aux exigences de motivation prévues par l'article 145-3 du code de procédure pénale, dès lors qu'en application de l'article 186-5 du même code, les délais relatifs à la durée de la détention provisoire prévus aux articles 145-1 à 145-3 ne sont plus applicables lorsque le juge d'instruction a rendu son ordonnance de renvoi devant la juridiction de jugement, même en cas d'appel formé contre cette ordonnance, ce texte ne distinguant pas selon que la chambre a ou non prescrit un supplément d'information ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. d'Huy - Avocat général : M. Petitprez - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 145-1 à 145-3 et 186-5 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur les conséquences sur le délai de détention, de l'ordonnance de renvoi, à rapprocher : Crim., 10 avril 2018, pourvoi n° 18-80.371, Bull. crim. 2018, n° 70 (rejet).

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