Numéro 11 - Novembre 2021

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

RESTITUTION

Crim., 17 novembre 2021, n° 21-82.084, (B)

Cassation

Chambre de l'instruction – Confiscation du bien prévue par la loi ou objet dangereux – Fondement de la saisie indifférent – Refus (non)

La chambre de l'instruction saisie de l'appel interjeté contre l'ordonnance du juge d'instruction rejetant une demande de restitution peut refuser celle-ci lorsque la confiscation de l'objet est prévue par la loi, peu important le fondement de la saisie.

Encourt la cassation, l'arrêt de la chambre de l'instruction qui, pour ordonner la restitution de bijoux placés sous main de justice, constate que la personne mise en examen encourt la peine de confiscation de tout ou partie des biens lui appartenant définie par l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, mais retient que la restitution ne saurait cependant être refusée au motif que les bijoux sont confiscables sur ce fondement, alors qu'ils ont été saisis par un officier de police judiciaire et non par ordonnance du juge d'instruction rendue en application de l'article 706-148 du code de procédure pénale.

Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 4e section, en date du 26 février 2021, qui, dans l'information suivie contre Mme [M] [F] des chefs de fausse attestation, complicité d'obtention indue de document administratif, et aide à l'entrée ou au séjour irréguliers d'étrangers en France en bande organisée, a infirmé l'ordonnance de refus de restitution du bien saisi rendue par le juge d'instruction.

Par ordonnance en date du 28 juin 2021, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Au cours de l'information judiciaire diligentée contre Mme [F] des chefs susvisés, ont été saisis des bijoux lors d'une perquisition effectuée au cabinet médical de son époux.

2. Par déclaration au greffe du 24 janvier 2018, l'avocat de Mme [F] a sollicité leur restitution.

3. Par ordonnance du 7 février 2018, le juge d'instruction a rejeté la demande au motif que la confiscation des bijoux est prévue par la loi, dès lors que Mme [F] encourt la peine complémentaire de confiscation de patrimoine définie par l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, en répression du délit d'aide à l'entrée ou au séjour irréguliers d'étrangers en France en bande organisée.

4. L'avocat de Mme [F] a interjeté appel de la décision.

Examen de la recevabilité du mémoire en défense

Le mémoire personnel en défense de Mme [M] [F] est irrecevable, en application de l'article 585 du code de procédure pénale.

Examen des moyens

Sur le moyen proposé par le procureur général

5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Mais sur le moyen soulevé d'office et mis dans le débat

Vu l'article 99 du code de procédure pénale :

6. Il résulte de ce texte que la chambre de l'instruction saisie de l'appel interjeté contre l'ordonnance du juge d'instruction rejetant une demande de restitution peut refuser la restitution lorsque la confiscation de l'objet est prévue par la loi, peu important le fondement de la saisie.

7. Pour infirmer l'ordonnance attaquée et ordonner la restitution des bijoux, l'arrêt constate qu'étant mise en examen pour aide à l'entrée ou au séjour irréguliers d'étrangers en France en bande organisée, Mme [F] encourt la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie des biens lui appartenant définie par l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal.

8. Les juges retiennent cependant que les bijoux ont été saisis par les services de police, et non par ordonnance du juge d'instruction rendue en application de l'article 706-148 du code de procédure pénale organisant la procédure de saisie de patrimoine, de sorte que la restitution ne saurait être refusée au motif que la confiscation des bijoux est encourue à titre de confiscation de patrimoine.

9. En se déterminant ainsi, alors que le fondement de la saisie n'était pas de nature à lui interdire de confirmer l'ordonnance attaquée au motif que la confiscation des bijoux était prévue par la loi, et qu'il lui appartenait seulement d'apprécier souverainement s'il y avait lieu, ou non, au regard des dispositions de l'article 99 du code de procédure pénale, de faire droit à la demande de restitution, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé.

10. La cassation est par conséquent encourue.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 26 février 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Ascensi - Avocat général : M. Bougy -

Textes visés :

Article 131-21, alinéa 6, du code pénal ; article 706-148 du code de procédure pénale.

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