Numéro 11 - Novembre 2020

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

PROTECTION DES CONSOMMATEURS

Crim., 24 novembre 2020, n° 19-85.829, (P)

Rejet

Crédit à la consommation – Crédit affecté – Délai de rétractation – Délit de perception irrégulière d'acompte – Définition – Paiement sous quelque forme que ce soit – Caractérisation – Remise de chèque non encaissé

Caractérise le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation la remise par le consommateur d'un chèque, fût-il non encaissé, dès lors que la vente a été réalisée au moyen d'un crédit affecté souscrit pour la totalité du montant de l'acquisition.

REJET du pourvoi formé par la société Centre caravaning de l'Oise « Wattelier père et fils » contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 7 août 2019, qui pour infractions au code de la consommation, l'a condamnée à 15 000 euros d'amende avec sursis.

Un mémoire a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. La société Centre caravaning de l'Oise, ayant pour enseigne « Wattelier père et fils » (société Wattelier) a été poursuivie devant le tribunal correctionnel notamment pour s'être, en sa qualité de vendeur de camping-cars, fait remettre par cinq clients un chèque d'acompte avant que le contrat de crédit servant à l'acquisition n'ait été définitivement conclu.

3. La société Wattelier a été déclarée coupable de ce chef, ainsi que de celui de pratique commerciale trompeuse, et condamnée à la peine de 20 000 euros d'amende.

4. Elle a relevé appel de cette décision, le procureur de la République ayant interjeté appel incident.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen est pris de la violation des articles L. 311-40, devenu L. 312-50 alinéa 1, du code de la consommation, ainsi que les articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale.

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué pour avoir confirmé la condamnation prononcée en première instance en ce qu'il a déclaré la société Centre caravaning De L'Oise « Wattelier père et fils » représentée par son président en la personne de la société financière Y... M..., elle-même représentée par son gérant I... M... coupable d'avoir à Erquery (60600), entre le 1er octobre 2011 et le 14 août 2012, en tout cas sur le territoire national et depuis temps n'emportant pas prescription, commis l'infraction de perception par un vendeur ou prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation, alors « que l'article L. 311-40 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation, applicable à l'époque des faits, autorise le vendeur à recevoir paiement au comptant d'une partie du prix de vente sous certaines conditions dont le défaut d'accomplissement n'était pas allégué en l'espèce ; en retenant que l'infraction de perception par un vendeur ou prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation était constituée, dès lors que des chèques étaient inscrits sur les bons de commande considérés et qu'étant libératoires, ils devaient s'analyser comme des acomptes prohibés, quand ces chèques de dépôt n'avaient en réalité vocation qu'à être imputés sur le prix à payer au comptant, que constituait le montant de la reprise des anciens véhicules des acheteurs, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés. »

Réponse de la Cour

7. Pour dire établi le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation, l'arrêt attaqué énonce dans un premier temps que sur les bons de commande des cinq clients cités en qualité de victimes, il a été indiqué que la vente était faite au comptant alors que ces clients ont cependant eu recours à un crédit à la consommation afin de financer l'acquisition du camping-car, que ce crédit a été contracté le jour même de la vente auprès d'un organisme prêteur partenaire de la société Wattelier et que s'ils ont bénéficié d'une reprise de leur ancien véhicule par cette dernière, ce qui ne pouvait avoir pour effet de transformer cet achat à crédit en achat au comptant, ces clients ont signé et remis au vendeur un chèque d'un montant compris entre 2 000 et 5 000 euros qui leur a été ensuite restitué.

8. Les juges d'appel relèvent d'autre part que les cinq clients qui ont remis un chèque à la société Wattelier le jour de la conclusion de la vente, ont souscrit ledit crédit pour la totalité du prix d'acquisition du camping-car.

9. En l'état de ces seules énonciations, et dès lors qu'à l'occasion d'un achat à crédit, la remise par l'acheteur d'un chèque, fût-il non encaissé, avant l'expiration du délai de rétractation, constitue un paiement sous quelque forme que ce soit, la cour d'appel a caractérisé le délit de perception par un vendeur ou un prestataire de service à crédit d'un paiement avant l'expiration du délai de rétractation.

10. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.

11. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Leblanc - Avocat général : M. Lemoine - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Articles L. 311-40, devenu L. 312-50 alinéa 1, du code de la consommation ; articles 485, 591 et 593 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur l'assimilation à un paiement de la remise d'un chèque, même non encaissé, à rapprocher : Crim., 12 décembre 1991, pourvoi n° 90-87.170, Bull. crim. 1991, n° 476 (rejet) ; Crim., 23 septembre 2003, pourvoi n° 03-82.338, Bull. crim. 2003, n° 169 (cassation), et les arrêts cités.

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