Numéro 11 - Novembre 2019

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

COUR D'ASSISES

Crim., 14 novembre 2019, n° 18-83.122, (P)

Cassation partielle

Débats – Accusé – Comparution – Accusé refusant de comparaître – Poursuite des débats – Formalités – Signification des arrêts rendus en son absence

Selon l'article 320 du code de procédure pénale, lorsque l'accusé refuse de comparaître à l'audience malgré la sommation qui lui a été faite, il lui est, à chaque audience, donné lecture, par le greffier, du procès-verbal des débats tenus en son absence. Il lui est aussi signifié copie des réquisitions du ministère public et des arrêts rendus par la cour, qui sont tous réputés contradictoires. Doivent être signifiés non seulement les arrêts incidents, mais aussi les arrêts sur le fond. Le délai de pourvoi en cassation de l'accusé contre l'arrêt de condamnation prononcé en son absence part de la date à laquelle il lui est signifié.

Arrêt – Arrêt de condamnation – Voies de recours – Pourvoi – Pourvoi de l'accusé – Accusé absent lors du prononcé de l'arrêt de condamnation – Délai – Point de départ – Signification de l'arrêt

Débats – Pièces à conviction – Présentation – Modalités – Impossibilité – Disparition d'un scellé – Atteinte aux droits de la défense – Défaut – Portée

Selon l'article 341 du code de procédure pénale, le président de la cour d'assises fait présenter les pièces à conviction au cours des débats. Cette présentation n'est pas obligatoire, sauf si l'accusé la demande. En ce cas, si la présentation d'une pièce à conviction est devenue impossible en raison de sa disparition, la nullité de la procédure n'est pas encourue, en l'absence de preuve d'une quelconque atteinte aux droits de la défense résultant de la disparition de ce scellé.

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par M. UM... CC... contre l'arrêt de la cour d'assises de Paris, en date du 15 mars 2018, qui, pour assassinats et tentatives, dégradations volontaires aggravées et infraction à la législation sur les armes, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité et a ordonné la confiscation des scellés, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour d'assises a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Faits et procédure

1. Il résulte des faits et de la procédure ce qui suit.

2. Le 15 septembre 1974, vers 17 heures 10, un homme a jeté, depuis le premier étage du [...] à Paris, [...], un engin explosif, avant de prendre la fuite. Cet attentat a causé la mort de deux personnes, ainsi que des blessures à trente-quatre autres victimes.

L'enquête a établi que l'engin était une grenade explosive, volée dans une base militaire américaine en Allemagne.

3. L'information judiciaire alors ouverte a été clôturée par une ordonnance de non-lieu, le 24 mars 1983, avant d'être réouverte sur charges nouvelles, le 10 janvier 1995, à la suite de l'arrestation de M. UM... CC..., dit OW....

Par arrêt du 15 janvier 1999, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a ordonné un non-lieu dans cet affaire. Cet arrêt a été cassé par la Cour de cassation, par arrêt du 15 décembre 1999.

Par arrêt du 12 octobre 2000, statuant sur renvoi après cassation, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a ordonné un supplément d'information.

Par arrêt du 29 janvier 2010, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a estimé que la prescription de l'action publique concernant l'attentat du [...] avait été interrompue par les investigations visant des attentats postérieurs, en raison de la connexité.

4. Par ordonnance du 3 octobre 2014, le juge d'instruction de Paris a ordonné la mise en accusation de M. CC... devant la cour d'assises de Paris, spécialement composée. Cette décision a été confirmée par arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel, en date du 29 janvier 2016, qui a opéré des requalifications.

Par arrêt du 3 mai 2016 (n° 16-81.048), la Cour de cassation a rejeté les pourvois contre les arrêts précités, prononcés par la chambre de l'instruction le 29 janvier 2010 et le 29 janvier 2016.

5. La cour d'assises de Paris, spécialement composée, par arrêt du 28 mars 2017, a condamné M. CC..., pour assassinats, tentative d'assassinats, destruction du bien d'autrui par l'effet d'une substance explosive et infraction à la législation sur les armes, à la réclusion criminelle à perpétuité, a prononcé la confiscation des scellés et l'inscription au fichier judiciaire national des auteurs d'infractions terroristes.

Par arrêt distinct du même jour, la cour d'assises a prononcé sur les intérêts civils.

6. L'accusé a relevé appel à titre principal de ces deux arrêts, le ministère public et les parties civiles ont relevé appel incident.

Par arrêt du 21 juin 2017, la chambre criminelle a désigné, pour statuer en appel, la cour d'assises de Paris, spécialement et autrement composée.

7. Par arrêt du 15 mars 2018, la cour d'assises de Paris, spécialement et autrement composée, statuant en appel, a déclaré M. UM... CC... coupable d'assassinats, de tentatives d'assassinats, de dégradations volontaires par l'effet d'une substance explosive et de transport ou port d'un engin explosif, en l'espèce une grenade explosive, hors de son domicile et sans motif légitime, et l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, a constaté son inscription au fichier judiciaire national des auteurs d'infractions terroristes et a prononcé la confiscation des scellés.

8. Par arrêt distinct du même jour, la cour d'assises a prononcé sur les intérêts civils.

Examen de la recevabilité, contestée, du pourvoi

9. Ces arrêts ont été frappés de pourvoi par M. CC..., le 15 mai 2018, par une déclaration faite au chef de l'établissement pénitentiaire où il est détenu.

La recevabilité du pourvoi est contestée en défense.

10. Alors que les débats duraient depuis le 5 mars 2018, le dernier jour du procès, soit le 15 mars 2018 au matin, l'accusé n'a pas comparu à l'ouverture de l'audience, à 11 heures 21. Il n'avait pas voulu comparaître et se trouvait alors dans le local d'attente gardée du Palais de justice de Paris.

La présidente de la cour d'assises a désigné un huissier de justice pour lui délivrer la sommation de comparaître prévue par l'article 319 du code de procédure pénale, qui lui a été remise à midi.

L'accusé a indiqué à l'huissier de justice qu'il refusait de participer au procès, ses avocats restant à l'audience.

Les débats ont alors repris et deux avocats ont présenté la défense de l'accusé.

L'audience, suspendue à 12 heures 53, a repris à 14 heures 21, toujours en l'absence de l'accusé, et deux autres avocats que ceux intervenus le matin ont présenté la défense de l'accusé.

La présidente a ordonné la clôture des débats et la cour d'assises s'est retirée pour délibérer à 17 heures 54.

L'audience a repris à 20 heures pour le prononcé du verdict. Ces indications résultent du procès-verbal des débats (pages 18 et 19).

11. Le greffier de la cour d'assises a signifié le même jour à l'accusé, à 21 heures 20, le procès-verbal des débats tenus en son absence, par un procès-verbal qui ne fait pas état d'une quelconque signification de l'arrêt pénal ni de l'arrêt civil, ni d'une quelconque information donnée à l'accusé par le greffier sur leur contenu.

Le procès-verbal des débats tenus en l'absence de l'accusé, seul document qui lui ait été alors remis, n'indique pas la nature du verdict, ni le délai pour se pourvoir en cassation.

12. Pour les parties civiles, qui invoquent la teneur d'un courrier du procureur général de Paris, cette signification a informé l'accusé de la nature de la décision et des modalités d'exercice du pourvoi en cassation, et, dès lors, a fait courir le délai de pourvoi en cassation.

13. Mais l'article 320 du code de procédure pénale prévoit que, si l'accusé, absent de la salle d'audience, n'obtempère pas à la sommation d'assister aux débats, le président de la cour d'assises peut ordonner sa comparution forcée, ou ordonner qu'il sera passé outre aux débats, en dépit de l'absence de l'accusé.

En pareil cas, le texte précité impose deux diligences distinctes : la lecture du procès-verbal des débats, d'une part, et la signification des arrêts rendus par la cour, d'autre part, cette signification devant porter sur tous les arrêts prononcés en l'absence de l'accusé, qu'il s'agisse des arrêts avant dire droit ou des arrêts sur le fond.

14. L'article 379-7 du code de procédure pénale, issu de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, prévoit que, si l'absence de l'accusé, sans excuse valable, est constatée au cours des débats de la cour d'assises, statuant en appel, le procès se poursuit jusqu'à son terme, le délai de pourvoi en cassation partant de la date à laquelle l'arrêt est porté à la connaissance de l'accusé.

15. En l'espèce, la première formalité exigée par l'article 320, soit la lecture du procès-verbal des débats, a été accomplie le soir de l'audience, mais la seconde, la signification des arrêts rendus hors la présence de l'accusé, ne l'a été que le 14 mai 2018.

16. L'arrêt pénal et l'arrêt civil de la cour d'assises ont été signifiés à la personne de l'accusé, par actes d'huissier de justice, le 14 mai 2018.

17. Comme seule la signification de l'arrêt fait partir le délai de pourvoi en cassation, le pourvoi formé, le 15 mai 2018, contre les arrêts, pénal et civil, signifiés le 14 mai 2018 est recevable.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

18. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 315, 316, 343, 591 et 593 du code de procédure pénale.

19. Le moyen critique la procédure suivie devant la cour d'assises : « en ce que la cour d'assises a refusé de faire droit à la demande de Maître Coutant Peyre sollicitant le renvoi des débats » ;

« 1°) alors qu'il résulte de l'article 316 du code de procédure pénale que la Cour seule a compétence exclusive pour régler les incidents contentieux, qu'en omettant de mentionner que c'est « la cour » proprement dite qui a rendu l'arrêt incident, la cour d'assises n'a pas mis en mesure la Cour de cassation d'exercer utilement son contrôle ;

2°) alors que tout arrêt incident doit, à peine de nullité, être motivé ; que n'a pas légalement justifié sa décision la cour d'assises qui, pour refuser de renvoyer les débats, s'est bornée à énoncer que l'accusé n'établit « pas l'atteinte de sa possibilité de se défendre devant la cour dès lors qu'il a eu accès jusqu'à très récemment et pendant une longue période au dossier de la procédure, qu'il a donc disposé du temps et des facilités nécessaires pour préparer sa défense » sans répondre au chef péremptoire de ses conclusions qui soulignaient que ses notes personnelles étaient indispensables à sa défense, les seules exigences de sécurité n'expliquant pas en quoi il était impossible pour les autorités de les mettre à la disposition de l'accusé ».

Réponse de la Cour

20. Lors de la première audience de la cour d'assises consacrée à l'examen de l'affaire, le 5 mars 2018 au matin, la défense de l'accusé a déposé des conclusions demandant le renvoi de l'affaire, au motif que M. CC... avait été récemment transféré dans un nouvel établissement pénitentiaire, et qu'il avait été privé, à cette occasion, de la possibilité d'emporter avec lui le dossier de la procédure et ses notes personnelles sur l'affaire.

La cour a rejeté cette demande par arrêt incident, en relevant que l'accusé ne justifiait pas avoir formulé une demande expresse auprès de l'administration pénitentiaire à l'occasion de son changement de lieu de détention, effectué le 28 février 2018, et qu'il n'y avait aucune atteinte portée aux droits de la défense, l'accusé ayant reçu la copie du dossier de la procédure et ayant eu accès à ce dossier : « jusqu'à très récemment et pendant une longue période » (procès-verbal des débats, pages 5 et 6).

21. L'arrêt attaqué et le procès-verbal des débats établissent que la cour d'assises était composée conformément aux dispositions de l'article 698-6 du code de procédure pénale, c'est à dire d'un président et de six assesseurs, et qu'elle statuait sans jurés. Il en résulte que l'arrêt incident rejetant la demande de renvoi a été prononcé, comme toutes les décisions de la cour d'assises spécialement composée, sans la participation du jury.

22. Ainsi, le grief de la première branche du moyen ne peut être admis.

23. Les conclusions déposées à l'appui de la demande de renvoi soulignaient que l'accusé ne pouvait assurer sa défense si l'administration pénitentiaire ne lui remettait pas son exemplaire du dossier, ainsi que ses notes personnelles.

24. Selon l'article 279 du code de procédure pénale, l'accusé doit recevoir copie, gratuitement, des pièces du dossier de la procédure. Cette remise des pièces du dossier est faite pour permettre à l'accusé de l'étudier et de disposer du dossier, ainsi que des notes qu'il a pu prendre, afin de se défendre lors de son procès.

25. Il résulte du procès-verbal des débats qu'à partir de l'après-midi du 5 mars, l'accusé a participé à quatorze demi-journées d'audience, il a été interrogé sur sa personnalité et sur les faits. Il a ainsi assisté et participé aux débats, jusqu'au 14 mars inclus. A aucun moment il n'a fait déposer de conclusions, ou soulevé d'incident pour qu'il lui soit donné acte qu'il était gêné dans l'exercice de sa défense, pour poser des questions, ou intervenir de quelque manière dans les débats, en raison de l'impossibilité d'accéder à son dossier ou à ses notes personnelles. Si l'accusé s'était trouvé en difficulté pour se défendre pour ce motif, il pouvait alors l'indiquer à l'audience, et demander qu'il lui en soit donné acte, afin de rapporter la preuve d'une difficulté concrète à se défendre, résultant de la privation d'un accès au dossier ou à ses notes personnelles. Il n'y a rien de tel au dossier. Il n'est donc pas établi que l'accusé ait été entravé dans l'exercice des droits de sa défense par l'impossibilité d'accéder aux documents contenus dans la cellule de l'ancien établissement pénitentiaire où il était incarcéré.

26. Le moyen sera donc écarté.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

27. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 341, 591 et 593 du code de procédure pénale.

28. Le moyen critique la procédure suivie devant la cour d'assises : « en ce que la cour a refusé de faire droit à la demande de Maître Coutant Peyre sollicitant la présentation du scellé correspondant à la photographie figurant à la cote D 356, planche n° 8, alors que la disparition de pièces à conviction est une cause de nullité lorsqu'elle porte atteinte aux droits de la défense ; que n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations la présidente de la cour d'assises qui s'est bornée à constater l'impossibilité de faire droit à la demande du conseil de M. CC... sollicitant expressément la présentation de la photographie figurant à la cote D 356, utile aux droits de la défense, sans en déduire que cela viciait la procédure ».

Réponse de la Cour

29. Il résulte du procès-verbal des débats que, le 8 mars 2018, la défense de l'accusé a déposé des conclusions sollicitant la présentation aux parties du scellé : « correspondant à la photographie figurant à la cote D 356, planche n° 8 ».

La présidente de la cour d'assises a indiqué qu'elle rendrait sa décision à l'audience du 12 mars 2018. A cette date, le procès-verbal des débats indique que : « la présentation de cette pièce à conviction est devenue impossible par suite de sa disparition, le non lieu intervenu le 24 mars 1983 et la reprise de la procédure sur charges nouvelles le 10 janvier 1995 n'ayant pas permis de retrouver les scellés de la procédure » (procès-verbal des débats, pages 14 et 16).

30. Selon l'article 341 du code de procédure pénale, le président de la cour d'assises fait, s'il est nécessaire, dans le cours ou à la suite des dépositions, présenter à l'accusé ou aux témoins les pièces à conviction et reçoit leurs dépositions. Il en résulte que la présentation des pièces à conviction est, en principe, facultative, et ne devient obligatoire que si elle est réclamée par l'accusé.

31. La Cour de cassation juge, dans ce dernier cas, que, lorsque les pièces à conviction ont disparu, leur disparition n'est pas une cause de nullité s'il n'est pas établi qu'elle a porté atteinte aux droits de la défense (Crim., 6 novembre 2013, pourvoi n° 13-80.038).

32. Au cas présent, le demandeur n'explique pas en quoi précisément cette absence de présentation de la pièce à conviction litigieuse a porté atteinte aux droits de sa défense, ni ce que pouvait apporter à la compréhension de l'affaire et à la manifestation de la vérité un débat sur cette photographie. Il ne résulte pas de la feuille de motivation que la déclaration de culpabilité repose sur la teneur de ce scellé, qui n'y est pas évoquée.

33. En l'absence de preuve d'une quelconque atteinte aux droits de la défense résultant de la disparition de ce scellé, il n'apparaît pas que son défaut de présentation ait porté atteinte aux droits de la défense, et ait pu vicier la procédure.

34. En conséquence, le moyen doit être écarté.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

35. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 421-1 du code pénal, préliminaire, 349, 591 et 593 du code de procédure pénale.

36. Le moyen critique la procédure suivie devant la cour d'assises : « en ce que la cour et le jury ont répondu affirmativement aux questions n° 1, 3, 5 et 7 ainsi libellées :

1) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, volontairement donné la mort à RL... Q... et à AW... O... ?

(...)

3) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, tenté de donner volontairement la mort à DV... F..., YW... P... épouse X..., WF...-LV... N..., YF... A... veuve Q... veuve B..., SQ... W..., OO... LO..., EA...-EN... ON..., AU... E... veuve Y..., NR... H..., BL... S..., JC... S..., GM... J..., LQ... J..., EA... C... veuve R..., CQ... G... veuve O..., RQ... O... épouse T..., IV... D... épouse K..., XT... L... épouse OY..., LS... AF... épouse YX..., XM... AM..., EN...-SA... PM... divorcée RS..., GF... RS..., UV... RD... épouse PR..., VN... RD..., VD... RD..., UO... RI... épouse KL..., EN... HE... épouse YD..., TC... LC... épouse QA..., AS... AJ..., JP... TX... divorcée IS..., JX... YC... divorcée KM..., OL... QU..., MT... XP... divorcée QU..., ZU... PX... épouse QI..., WF...-JJ... AT... et IK... TV... épouse PC..., ladite tentative manifestée par un commencement d'exécution n'ayant été suspendue ou n'ayant manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ?

(...)

5) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, détruit volontairement en tout ou en partie, par l'effet d'une substance explosive, de nature à créer un danger pour les personnes, des édifices, magasins, ou leurs dépendances, et généralement tous objets mobiliers ou immobiliers de quelque nature qu'ils soient, en l'espèce l'immeuble sis [...], divers commerces, infrastructures et biens de la société Publicis, ainsi que des vêtements et objets personnels, au préjudice de la société Publicis, DV... F..., YW... P... épouse X..., WF...-LV... N..., YF... A... veuve Q... veuve B..., SQ... W..., OO... LO..., EA...-EN... ON..., AU... E... veuve Y..., NR... H..., BL... S..., JC... S..., GM... J..., LQ... J..., EA... C... veuve R..., CQ... G... veuve O..., RQ... O... épouse T..., IV... D... épouse K..., XT... L... épouse OY..., LS... AF... épouse YX..., XM... AM..., EN...-SA... PM..., divorcée RS..., GF... RS..., UV... RD... épouse PR..., VN... RD..., VD... RD..., UO... RI... épouse KL..., EN... HE... épouse YD..., TC... LC... épouse QA..., AS... AJ..., JP... TX... divorcée IS..., JX... YC... divorcée KM..., OL... QU..., MT... XP... divorcée QU..., ZU... PX... épouse QI..., WF...-JJ... AT... et IK... TV... épouse PC... ?

(...)

7) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, hors de son domicile et sans motif légitime, portée ou transporté un engin explosif assimilé à la catégorie A, en l'espèce une grenade à main explosive défensive d'origine américaine du type M26 ?, alors qu'en application de l'article 349 du code de procédure pénale, la cour doit, à peine de nullité, être interrogée sur toutes les circonstances constitutives de l'infraction ; qu'en ne caractérisant pas que les infractions reprochées à M. CC... ont été commises en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, la cour d'assises a privé sa décision de base légale ».

Réponse de la Cour

37. Aucune référence à la nature terroriste des faits reprochés à l'accusé ne figure sur la feuille de question, la feuille de motivation, l'arrêt criminel, ni sur l'arrêt de renvoi.

En effet, le code pénal, dans sa rédaction entrée en vigueur en 1994, a fait des actes de terrorisme des infractions autonomes, mais a aussi créé une circonstance aggravante de terrorisme pouvant assortir une qualification de droit commun, qui a pour résultat d'élever les pénalités encourues, ce qui est prévu par l'article 421-3 du code pénal. Cette circonstance aggravante a été créée après la commission de l'attentat reproché à l'accusé, qui date de 1974.

En conséquence, elle n'a pu être visée par l'accusation, en vertu du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère prévu par l'article 112-1 du code pénal.

38. Le caractère terroriste de l'infraction a eu, dans la présente affaire, pour seule conséquence la compétence de la juridiction spécialisée (Crim., 5 novembre 1997, n° 97-81.334).

L'article 706-16 du code de procédure pénale n'a pas institué de nouvelles incriminations pénales mais s'est borné à désigner les infractions relevant de la cour d'assises spécialement composée, compétente, selon les articles 698-6 et 706-25 du code de procédure pénale, quand les infractions ainsi énumérées sont en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Crim., 7 mai 1987, pourvoi n° 87-80.822, Bull. n° 186 ; Crim., 24 septembre 1987, pourvoi n° 87-84.128, Bull. n° 313).

39. La cour d'assises n'avait pas à être interrogée sur la nature terroriste des faits, qui, dans la présente espèce, n'était ni une infraction ni une circonstance aggravante, mais seulement un critère de compétence.

40. Le moyen ne peut donc être accueilli.

Sur le quatrième et le cinquième moyens

Enoncé des moyens

41. Le quatrième moyen est pris de la violation des articles 4 du Protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4, 121-4, 121-5, 221-1, 322-5 du code pénal, préliminaire, 365-1, 591 et 593 du code de procédure pénale.

42. Le moyen critique la procédure suivie devant la cour d'assises : « en ce que la Cour et le jury ont répondu affirmativement aux questions n° 1, 3, 5 et 7 ainsi libellées :

1) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, volontairement donné la mort à RL... Q... et à AW... O... ?

(...)

3) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, tenté de donner volontairement la mort à DV... F..., YW... P... épouse X..., WF...-LV... N..., YF... A... veuve Q... veuve B..., SQ... W..., OO... LO..., EA...-EN... ON..., AU... E... veuve Y..., NR... H..., BL... S..., JC... S..., GM... J..., LQ... J..., EA... C... veuve R..., CQ... G... veuve O..., RQ... O... épouse T..., IV... D... épouse K..., XT... L... épouse OY..., LS... AF... épouse YX..., XM... AM..., EN...-SA... PM... divorcée RS..., GF... RS..., UV... RD... épouse PR..., VN... RD..., VD... RD..., UO... RI... épouse KL..., EN... HE... épouse YD..., TC... LC... épouse QA..., AS... AJ..., JP... TX... divorcée IS..., JX... YC... divorcée KM..., OL... QU..., MT... XP... divorcée QU..., ZU... PX... épouse QI..., WF...-JJ... AT... et IK... TV... épouse PC..., ladite tentative manifestée par un commencement d'exécution n'ayant été suspendue ou n'ayant manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ?

(...)

5) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, détruit volontairement en tout ou en partie, par l'effet d'une substance explosive, de nature à créer un danger pour les personnes, des édifices, magasins, ou leurs dépendances, et généralement tous objets mobiliers ou immobiliers de quelque nature qu'ils soient, en l'espèce l'immeuble sis [...], divers commerces, infrastructures et biens de la société Publicis, ainsi que des vêtements et objets personnels, au préjudice de la société Publicis, DV... F..., YW... P... épouse X..., WF...-LV... N..., YF... A... veuve Q... veuve B..., SQ... W..., OO... LO..., EA...-EN... ON..., AU... E... veuve Y..., NR... H..., BL... S..., JC... S..., GM... J..., LQ... J..., EA... C... veuve R..., CQ... G... veuve O..., RQ... O... épouse T..., IV... D... épouse K..., XT... L... épouse OY..., LS... AF... épouse YX..., XM... AM..., EN...-SA... PM... divorcée RS..., GF... RS..., UV... RD... épouse PR..., VN... RD..., VD... RD..., UO... RI... épouse KL..., EN... HE... épouse YD..., TC... LC... épouse QA..., AS... AJ..., JP... TX... divorcée IS..., JX... YC... divorcée KM..., OL... QU..., MT... XP... divorcée QU..., ZU... PX... épouse QI..., WF...-JJ... AT... et IK... TV... épouse PC... ?

(...)

7) L'accusé UM... CC... est-il coupable d'avoir, à Paris, le 15 septembre 1974, hors de son domicile et sans motif légitime, portée ou transporté un engin explosif assimilé à la catégorie A, en l'espèce une grenade à main explosive défensive d'origine américaine du type M26 ? », alors que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu à plusieurs déclarations de culpabilité ; que n'a pas légalement justifié sa décision, la cour d'assises qui, pour déclarer M. CC... coupable de meurtre, de tentative de meurtre, de destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes et de port d'un engin explosif, s'est fondée sur des faits relevant de manière indissociable de la même intention coupable ».

43. Le cinquième moyen est pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2, 3, 371 à 375, 591 et 593 du code de procédure pénale.

44. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que la cour d'assises d'appel statuant sur l'action civile a condamné l'accusé à payer diverses sommes aux parties civiles, alors que la cassation de l'arrêt pénal entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt civil qui se trouvera alors dépourvu de toute base légale.

Réponse de la Cour

45. Les deux moyens de cassation sont réunis pour une réponse commune.

Vu la règle ne bis in idem ;

46. Selon cette règle, des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même accusé, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes (Crim., 26 octobre 2016, pourvoi n° 15-84.552, Bull. n° 276 ; Crim., 24 janvier 2018, pourvoi n° 16-83.045 ; Crim., 28 mars 2018, pourvoi n° 17-81.114).

47. Dans la présente affaire, l'accusé a été déclaré coupable, d'une part, d'assassinats, de tentatives d'assassinats, et de destructions, et dégradations dangereuses pour les personnes commises par l'effet d'une substance explosive, et, d'autre part, en raison de la réponse affirmative à la question numéro 7, de transport ou port, hors de son domicile et sans motif légitime, d'un engin explosif assimilé à la catégorie A, en l'espèce une grenade à main explosive défensive d'origine américaine.

48. Il apparaît que l'infraction de port ou transport d'une grenade était une opération préalable nécessaire à la commission des autres infractions, perpétrées le même jour, dont l'accusé a été reconnu coupable. Cette infraction à la législation sur les armes et les explosifs procède, de manière indissociable, d'une action unique avec les autres infractions dont l'accusé a été reconnu coupable, caractérisée par une seule intention coupable, et ne pouvait donner lieu à une déclaration de culpabilité distincte.

49. La cassation de l'arrêt pénal est donc encourue. Elle interviendra, sur la culpabilité, par voie de retranchement des dispositions de l'arrêt de la cour d'assises ayant déclaré l'accusé coupable du délit de transport illicite d'un engin explosif. Cette cassation interviendra avec renvoi, sur les peines, de réclusion criminelle à perpétuité et de confiscation des scellés.

50. La cassation ne s'étendra pas aux dispositions civiles de l'arrêt, qui trouvent leur seul fondement dans les déclarations de culpabilité pour assassinats, tentatives d'assassinats et dégradations volontaires, lesquelles ne sont pas remises en cause par la cassation prononcée.

51. Ainsi, le cinquième moyen ne peut être admis.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

Sur la déclaration de culpabilité :

CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt de la cour d'assises de Paris, spécialement composée, en date du 15 mars 2018, en ce qu'il a déclaré M. UM... CC... coupable du délit de port ou transport d'un engin explosif hors de son domicile et sans motif légitime, toutes autres dispositions portant sur la culpabilité étant maintenues ;

Sur les peines :

CASSE et ANNULE l'arrêt précité en ses dispositions concernant les peines prononcées à l'encontre de l'accusé ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, spécialement et autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil, afin qu'il soit de nouveau statué sur les peines, envers l'accusé ;

FIXE à 3 600 euros l'unique somme que M. CC... devra payer aux défendeurs, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale, la cassation prononcée étant sans incidence sur les intérêts civils.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. de Larosière de Champfeu - Avocat général : M. Salomon - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Foussard et Froger -

Textes visés :

Article 320 du code de procédure pénale ; article 341 du code de procédure pénale.

Crim., 27 novembre 2019, n° 18-83.942, (P)

Rejet

Débats – Oralité – Communication à la Cour et au jury des pièces de la procédure – Moment de la communication

L'absence de tout incident contentieux ou demande de donné-acte fait présumer qu'aucune irrégularité de nature à porter atteinte aux droits de la défense n'a été commise au cours de l'audience lorsque le procès-verbal des débats énonce que, pendant l'exposé de deux experts, pour faciliter l'intelligence de l'affaire, le président a communiqué à la cour et aux jurés, trois pièces issues de la procédure d'instruction et ce, même s'il ne résulte d'aucune mention expresse dudit procès-verbal que lesdites pièces ont été soumises à un débat contradictoire.

REJET du pourvoi formé par M. Y... S..., contre l'arrêt de la cour d'assises des Côtes-d'Armor, en date du 31 mai 2018, qui, pour assassinat par conjoint, l'a condamné à vingt-cinq ans de réclusion criminelle, quinze ans d'interdiction de détenir une arme soumise à autorisation et a ordonné une mesure de confiscation, ainsi que contre l'arrêt du 1er juin 2018 par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 310, 347, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que :

Au cours de cet exposé, pour faciliter l'intelligence de l'affaire, Mme la présidente a fait passer aux assesseurs et aux jurés les documents cotés D264/20, D264/47, D264/48. Aucune observation n'a été faite par le ministère public ni par aucune des parties (procès verbal des débats, p. 18, § 8) ;

alors que le débat devant la cour d'assises doit être oral et la violation de la règle de l'oralité constitue une nullité absolue qui ne peut être couverte ni par le silence ni par le consentement de l'accusé ; que dès lors, en communiquant aux assesseurs et aux jurés des documents issus de la procédure sans en donner préalablement lecture aux parties, le président a méconnu la règle précitée » ;

Attendu que le procès-verbal des débats énonce qu'au cours de l'exposé de deux experts, pour faciliter la compréhension de l'affaire, le président a communiqué à la cour et aux jurés, trois pièces, visées au moyen, issues de la procédure d'instruction ;

Attendu que s'il ne résulte d'aucune des mentions du procès-verbal des débats que lesdites pièces ont été soumises à un débat contradictoire, la cassation n'est cependant pas encourue, dès lors que l'absence de tout incident contentieux ou demande de donné acte fait présumer qu'aucune irrégularité de nature à porter atteinte aux droits de la défense n'a été commise au cours de l'audience ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli » ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 327, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que :

Mme la présidente s'est conformée aux dispositions de l'article 327 du code de procédure pénale en présentant de façon concise les faits reprochés à l'accusé tels qu'ils résultent de la décision de renvoi, en exposant les éléments à charge et à décharge tels que mentionnés dans la décision de renvoi et en donnant lecture de la qualification légale des faits objets de l'accusation.

En outre, elle a donné connaissance de la décision rendue en premier ressort par la cour d'Assises d'Ille et Vilaine le 25 novembre 2016, de sa motivation et de la condamnation prononcée » (procès-verbal des débats, p. 8, § 1) ;

alors qu'il résulte de l'article 327 du code de procédure pénale que c'est seulement à l'issue de sa présentation que le président doit donner lecture de la qualification légale des faits objets de l'accusation ; que dès lors, en donnant lecture de cette qualification avant de donner connaissance du sens de la décision rendue en premier ressort, contrairement à ce que prescrit exactement le texte, le président en a méconnu le sens et la portée” ;

Attendu que d'une part, l'accusé ne saurait se faire un grief de l'ordre dans lequel les formalités prévues à l'article 327 du code de procédure pénale ont été accomplies dès lors que le procès-verbal des débats mentionne que le président s'est conformé aux prescriptions de ce texte, d'autre part, il doit être présumé, en l'absence de tout incident contentieux ou demande de donné acte, qu'aucune méconnaissance desdites dispositions, de nature à porter atteinte aux droits de la défense, n'a été commise ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté » ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 331, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que :

- (à l'audience du 28 mai 2018) :

« - Mme P... V..., âgée de 42 ans, ATSEM, demeure l'[...],

Régulièrement cité et signifié a été entendu oralement par visioconférence avec le Tribunal de Grande Instance de Senlis où il était présent ainsi qu'en atteste le procès-verbal des opérations techniques établi par la juridiction de Senlis et annexé ci-après, après avoir prêté serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de ce témoin, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après la déposition dudit témoin, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été observées » ;

« - Mme E... H..., âgée de 64 ans, assistante maternelle, demeurant [...],

Régulièrement cité et signifié a été entendu oralement par visioconférence avec le Tribunal de Grande Instance de Brive La Gaillarde où il était présent ainsi qu'en atteste le procès-verbal des opérations techniques établi par la juridiction de Brive La Gaillarde et annexé ci-après, après avoir prêté serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de ce témoin, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après la déposition dudit témoin, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été observées » ;

« - Mme N... S..., âgée de 58 ans, enseignante, demeurant [...],

- Mme Z... T... née M..., âgée de 48 ans, technicienne agricole, demeurant [...],

- M. TH... J..., âgé de 51 ans, chauffeur routier, demeurant [...],

- M. GY... W..., âgé de 42 ans, chauffeur, demeurant [...],

- Mme QK... FZ... R... épouse A..., âgé de 37 ans, demeurant [...], régulièrement cités et signifiés ont été successivement introduits dans l'auditoire où ils ont été entendus oralement et séparément chacun après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de chacun des témoins, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après les dépositions desdits témoins, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées »

- (audience du 29 mai 2018) :

« - Mme RL... C..., âgée de 35 ans, sans profession, demeurant [...],

- M. ZQ... I..., âgé de 36 ans, cuisiner, demeurant [...],

- Mme EP... F..., âgée de 41 ans, promoteur de ventes, demeurant [...],

- M. GK... D..., âgé de 33 ans, commercial, demeurant [...],

régulièrement cités et signifiés ont été successivement introduits dans l'auditoire où ils ont été entendus oralement et séparément chacun après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de chacun de ces témoins, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après les dépositions desdits témoins, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées » ;

« - M. NM... X..., âgé de 28 ans, chef d'équipe, demeurant [...],

régulièrement cité et signifié a été introduit dans l'auditoire où il a été entendu oralement après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de ce témoin, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après la déposition dudit témoin, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées » ;

« - M. KY... Q..., âgé de 37 ans, militaire, demeurant [...] (Guyane)

régulièrement cité et signifié a été entendu oralement par visioconférence avec le tribunal de grande instance de Cayenne où il était présent ainsi qu'en atteste le procès-verbal des opérations techniques établi par la juridiction de Cayenne et annexé ci-après, après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de ce témoin, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après la déposition dudit témoin, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées » ;

« - Mme HP... B..., âgée de 34 ans, militaire, demeurant [...],

- M. WG... G..., âgé de 49 ans, chauffeur, demeurant [...],

- Mme RK... U..., âgée de 41 ans, promoteur de ventes, demeurant [...], [...],

- M. GK... D..., âgé de 37 ans, chauffeur, demeurant [...],

- M. RD... O..., âgé de 45 ans, opérateur, demeurant [...],

régulièrement cités et signifiés ont été successivement introduits dans l'auditoire où ils ont été entendus oralement et séparément chacun après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de chacun de ces témoins, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après les dépositions desdits témoins, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées » ;

- (audience du 30 mai 2018) :

« - M. YA... K..., âgé de 61 ans, éducateur spécialisé à la retraite, élisant domicile [...],

- M. DX... L..., âgé de 57 ans, chef de service pour adolescents, élisant domicile [...],

régulièrement cités et signifiés ont été successivement introduits dans l'auditoire où ils ont été entendus oralement et séparément chacun après avoir prêté le serment de « parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité, rien que la vérité » ;

Après l'audition de chacun de ces témoins, les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées ;

Après les dépositions desdits témoins, les dispositions des articles 312 et 332 du code de procédure pénale ont été également observées » ;

« alors que l'accomplissement des formalités de l'article 331 du code de procédure pénale doivent précéder la déposition des témoins ;qu'en l'espèce, il résulte du procès-verbal des débats que les formalités de l'article 331 du code de procédure pénale ont été observées après l'audition des témoins ; que dès lors, la cour d'assises a méconnu les dispositions susvisées » ;

Attendu que s'il résulte des énonciations du procès-verbal des débats, que, pour chacun des témoins entendus, la mention de l'accomplissement des formalités prescrites par l'article 331 du code de procédure pénale est indiquée après leur déposition, l'accusé ne saurait s'en faire un grief dès lors qu'il résulte des autres mentions du procès-verbal des débats, figurant avant la déposition des témoins, que l'ensemble desdites formalités ont été respectées ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté » ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 318, 378, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

“en ce qu'il résulte ne résulte pas des mentions du procès-verbal des débats que, lors des reprises d'audience après suspension des débats, l'accusé a comparu libre ;

“alors qu'il résulte de l'article 318 du code de procédure pénale que l'accusé comparaît libre et seulement accompagné de gardes pour l'empêcher de s'évader ; qu'en ne mentionnant pas au procès-verbal des débats que, lors des reprises d'audience après suspension des débats, l'accusé a comparu libre, la cour d'assises n'a pas mis en mesure la Cour de cassation d'exercer utilement son contrôle ;

Attendu qu'à défaut de réclamations ou de constatations contraires résultant d'une mention du procès-verbal des débats, il y a présomption que l'accusé a comparu libre pendant toutes les audiences ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté » ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil, 2, 3, 371 à 375, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la cour d'assises d'appel statuant sur l'action civile a condamné l'accusé à payer diverses sommes aux parties civiles ;

“alors que la cassation de l'arrêt pénal entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt civil qui se trouvera alors dépourvu de toute base légale” ;

Attendu que le moyen est devenu inopérant par suite du rejet des moyens dirigés contre l'arrêt pénal ;

Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury » ;

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : Mme Drai - Avocat général : M. Salomon - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 347 du code de procédure pénale.

Rapprochement(s) :

Sur le fait que le principe de l'oralité des débats s'oppose à ce que le président communique, sans lecture préalable, des documents de la procédure écrite, avant l'audition d'un expert, en sens contraire : Crim., 9 avril 1986, pourvoi n° 85-93.491, Bull. crim. 1986 n° 120 (cassation) ; Crim., 13 février 2008, pourvoi n° 07-84.341, Bull. crim. 2008, n° 39 (cassation).

Crim., 27 novembre 2019, n° 18-83.553, (P)

Rejet

Débats – Oralité – Défense – Réplique possible – Parole en dernier à l'accusé

Selon l'article 346 du code de procédure pénale, seul applicable devant la cour d'assises, une fois l'instruction à l'audience terminée, la partie civile ou son avocat est entendu, le ministère public prend ses réquisitions, l'accusé et l'avocat présentent leur défense. La réplique est permise à la partie civile et au ministère public mais l'accusé ou son avocat auront toujours la parole les derniers. Ce texte ne prévoit pas que le civilement responsable prenne la parole, lors des débats sur l'action publique, une fois l'instruction à l'audience terminée.

REJET du pourvoi formé par M. C... W... contre l'arrêt de la cour d'assises des mineurs des Yvelines, en date du 18 mai 2018, qui, pour viols aggravés et tentative de viol aggravé, l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle, sept ans de suivi socio-judiciaire, ainsi que contre l'arrêt du même jour, par lequel la cour d'assises a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

Faits et procédure

1. Il résulte des arrêts attaqués et des pièces de procédure que, par arrêt du 18 mai 2018, la cour d'assises des mineurs des Yvelines, statuant en appel, a déclaré M. W... coupable de viols aggravés et de tentative de viol aggravé, et, en répression, l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle et sept ans de suivi socio-judiciaire.

La cour d'assises a ordonné la confiscation des scellés.

Par arrêt du même jour, la cour d'assises a prononcé sur les intérêts civils.

2. M. W... s'est pourvu en cassation contre ces arrêts, par une déclaration de pourvoi régulièrement faite, le 23 mai 2018, par son avocat. Il s'est désisté de son pourvoi, le 5 juin 2018, ce désistement ayant été rétracté, le 21 juin 2018.

Examen des moyens

Sur le quatrième moyen

Enoncé du moyen

3. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 2, 3, 10, 346, 460, 591 et 593 du code de procédure pénale, 1382 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale.

4. Le moyen critique l'arrêt pénal en ce que le président de la cour d'assises des mineurs d'appel a donné la parole à Mme M... W..., née L..., en tant que civilement responsable de M. C... W..., et a reçu ses déclarations avant réquisitions du ministère public, alors que l'instruction à l'audience terminée, la partie civile est entendue en sa demande, le ministère public prend ses réquisitions, le prévenu, et, s'il y a lieu, la personne civilement responsable, présentent leur défense, le prévenu ou son avocat devant toujours avoir les paroles en dernier ; qu'il ressort du procès-verbal des débats (p. 11 et 12) que, lors de l'audience du 17 mai à 14 heures 40, les parties civiles ayant présenté leurs observations, « le président a donné la parole à W... M..., née L..., en tant que civilement responsable et a reçu ses déclarations ; les dispositions de l'article 460 du code de procédure pénale ont été observées », puis que l'avocat général « a développé les charges qui appuyaient l'accusation et requis l'application de la loi pénale » et qu'enfin, « Maître X... G..., avocat au barreau de Nanterre, a présenté les moyens de défense de l'accusé » ; que, le lendemain, à l'audience du 18 mai à 9 heures 45, « W... C... sur interpellation du président a eu la parole en dernier » ; qu'il s'ensuit que la civilement responsable ayant été invitée à présenter ses observations avant les réquisitions du ministère public et n'ayant pas eu la parole en dernier, la cour d'assises des mineurs d'appel a méconnu les dispositions susvisées ».

Réponse de la Cour

5. Il résulte du procès-verbal des débats qu'une fois l'instruction à l'audience terminée, le ministère public et les parties ont été entendues dans l'ordre voulu par l'article 346 du code de procédure pénale. Ce texte, seul applicable devant la cour d'assises, ne prévoit pas que, devant cette juridiction, une fois l'instruction terminée, le civilement responsable doive être entendu, après le ministère public.

6. Ainsi, les dispositions légales ont été respectées et le moyen ne peut être admis.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen est pris de la violation des articles 20, alinéa 11, 20-2 de l'ordonnance du 2 février 1945, modifiée, 222-22, 222-23, 222-24, 227-22 du code pénal, préliminaire, 349, 365-1, 485 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale.

8. Le moyen critique l'arrêt pénal en ce que la cour d'assises des mineurs des Yvelines statuant en appel a condamné M. C... W... à la peine de douze années de réclusion criminelle assortie d'une mesure de suivi socio-judiciaire durant sept ans et injonction de soins, en fixant à trois ans la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas de non observation des obligations qui lui sont imposées, après avoir répondu aux questions n° 8 et 9 et les avoir résolues ainsi : Question n° 8 « Y a-t-il lieu d'appliquer à l'accusé W... C... une condamnation pénale ? » « sans objet » ; Question n° 9 « Y a-t-il lieu d'exclure l'accusé W... C... du bénéfice de la diminution de peine prévue à l'article 20-2 de l'ordonnance modifiée du 2 février 1945 ? » « sans objet » ;

1°) alors que selon l'article 20, alinéa 11, de l'ordonnance du 2 février 1945, modifiée, si le mineur a moins de dix-huit ans, le président doit poser, à peine de nullité, la question suivante : « Y a-t-il lieu d'appliquer à l'accusé une sanction pénale ? » ; que de la réponse à cette question dépend la légalité de la peine prononcée ; qu'en déclarant sans objet la question n° 8, sans aucune autre précision, la cour d'assises des mineurs d'appel n'a pas légalement justifié le prononcé de la peine et a violé les dispositions susvisées ;

2°) alors que selon l'article 20, alinéa 11, de l'ordonnance du 2 février 1945, modifiée, si le mineur a moins de dix-huit ans, le président doit poser, à peine de nullité, la question suivante : « Y a-t-il lieu d'exclure l'accusé du bénéfice de la diminution de peine prévue à l'article 20-2 ? » ; que de la réponse à cette question dépend la légalité de la peine prononcée ; qu'en déclarant sans objet la question n° 9, sans aucune autre précision, la cour d'assises des mineurs d'appel n'a pas légalement justifié le prononcé de la peine et a violé les dispositions susvisés ;

3°) alors que, en toute hypothèse, la procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties ; qu'alors qu'il était expressément prévu de poser à la cour d'assises deux questions relatives à l'excuse de minorité, ces deux questions ont été déclarées « sans objet », alors même que l'éventuelle application de la règle du concours réel d'infractions n'avait pas été soulevée lors des débats, l'enregistrement audio de ceux-ci en faisant foi ; qu'en statuant ainsi, la cour d'assises des mineurs d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les dispositions susvisées ;

4°) alors qu'en cas de condamnation, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge exposés au cours des délibérations qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises ; que la feuille de motivation ne donnant aucune explication au caractère « sans objet » des questions 8 et 9, la cour d'assises des mineurs d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les dispositions susvisées ».

Réponse de la Cour

9. Selon l'article 20, alinéa 11, de l'ordonnance du 2 février 1945 modifiée, relative à l'enfance délinquante, devant la cour d'assises des mineurs, si l'accusé a moins de dix huit ans, le président doit poser, à peine de nullité, deux questions, portant, l'une, sur la nécessité de prononcer une condamnation pénale, et, l'autre, sur l'exclusion du bénéfice de l'excuse atténuante de minorité.

10. Mais ces questions ne doivent être posées que si tous les faits dont l'accusé est reconnu coupable ont été commis quand il était mineur. Si l'accusé est reconnu coupable de plusieurs crimes dont l'un au moins a été commis quand il était majeur, ces questions deviennent sans objet, ainsi que l'a jugé la Cour de cassation (Crim., 8 avril 1998, n° 97-82.905 ; Crim., 6 février 2013, n°11-97.657).

En effet, en application de l'article 132-3 du code pénal, dans ce cas, l'accusé encourt une seule peine de réclusion criminelle, commune à tous les faits dont il a été reconnu coupable. Si la peine la plus élevée qu'il encourt est celle relative aux faits commis quand il était majeur, elle ne peut être réduite en vertu des dispositions d'atténuation propres aux infractions commises par un mineur.

11. Il en résulte que la mention de la feuille de questions, déclarant sans objet les deux questions prévues par l'article 20, alinéa 11, précité, procède d'une exacte application des dispositions de la loi et que le moyen ne peut être accueilli.

Sur le troisième moyen

Enoncé du moyen

12. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-22 et 222-23 du code pénal, 365-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale.

13. Le moyen critique l'arrêt pénal en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. C... W... coupable de tentative de viol sur la personne de Mme Q... B..., et de viol sur les personnes de Mmes E... Z... O... et D... S... et l'a condamné à la peine de douze ans de réclusion criminelle, avec mesure de suivi socio-judiciaire durant sept ans et injonction de soins, en fixant à trois ans la durée maximum de l'emprisonnement encouru en cas de non observation des obligations qui lui sont imposées, alors qu'en cas de condamnation, la motivation consiste dans l'énoncé des principaux éléments à charge exposés au cours des délibérations qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, ont convaincu la cour d'assises ; que, la cour d'assises des mineurs d'appel ayant répondu positivement à l'ensemble des questions principales relatives à la culpabilité de l'accusé, la feuille de motivation ne fait état d'aucune énonciation propre à caractériser les éléments constitutifs du viol ou de la tentative de viol, sur lesquels elle aurait fondé sa conviction ; qu'en statuant ainsi, la cour d'assises n'a pas justifié sa décision ».

Réponse de la Cour

14. La feuille de questions indique que l'accusé a été reconnu coupable d'avoir, le 28 mars 2014, commis un acte de pénétration sexuelle par violence, contrainte, menace ou surprise, sur la personne de Mme E... O... U..., et ce, avec usage ou sous la menace d'une arme.

La feuille de motivation précise que la culpabilité de l'accusé est établie par les confidences faites par la victime à un témoin, les investigations portant sur la téléphonie et les aveux de l'accusé.

L'ordonnance de mise en accusation précise que la victime a été contrainte, sous la menace d'une arme, à une pénétration vaginale et à une fellation.

15. La feuille de questions indique que l'accusé a été reconnu coupable d'avoir, le 4 avril 2014, commis un acte de pénétration sexuelle par violence, contrainte, menace ou surprise, sur la personne de Mme D... S..., et ce, avec usage ou sous la menace d'une arme.

La feuille de motivation précise que la culpabilité de l'accusé est établie par les déclarations de la victime, les auditions des témoins ayant reçu ses confidences, les éléments matériels, soit les investigations portant sur la téléphonie et l'ADN retrouvé au domicile de la victime, ainsi que par les aveux de l'accusé.

L'ordonnance de mise en accusation précise que la victime a été contrainte, sous la menace d'une arme, à une pénétration vaginale et à une fellation.

16. La feuille de questions indique que l'accusé a été reconnu coupable d'avoir, le 19 février 2014, tenté, par violence, contrainte, menace ou surprise, de commettre un acte de pénétration sexuelle sur la personne de Mme B..., cette tentative ayant été commise en concours avec les deux viols dont l'accusé a été reconnu coupable.

La feuille de motivation précise qu'en dépit de ses dénégations, la culpabilité de l'accusé est établie par les déclarations de la victime, les circonstances de la révélation des faits, les investigations portant sur la téléphonie, la vive résistance de la victime ayant fait échouer cette tentative de viol.

L'ordonnance de mise en accusation précise que l'accusé a voulu imposer un acte de pénétration sexuelle à la victime.

17. Ces énonciations des pièces de procédure soumises au contrôle de la Cour de cassation établissent que la cour d'assises, statuant en appel, a caractérisé, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, les principaux éléments à charge qui l'ont convaincue de sa culpabilité.

18. Il en résulte que le moyen sera écarté.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

19. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 359, 360, 362, 364, 366, 591 et 593 du code de procédure pénale.

20. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que la feuille de questions ne mentionne que les réponses de la cour et du jury aux questions visant la culpabilité de M. C... W..., à l'exclusion de toute mention relative à la décision sur la peine ;

1°) alors que la cour d'assises, en cas de réponse affirmative sur la culpabilité, doit se prononcer sans désemparer sur la peine en une délibération unique, après lecture des articles 130-1, 132-1 et 132-18 du code pénal, et mention des décisions prises doit être portée sur la feuille de questions, qui est signée séance tenante par le premier juré et le président ; que ces dispositions sont d'ordre public ; qu'au cas d'espèce, la feuille de questions ne porte aucune mention de la décision prise sur la peine ; d'où il suit que la cour d'assises des mineurs d'appel a violé les dispositions susvisés ;

2°) alors que ne met pas la Cour de cassation en mesure de vérifier à quelle majorité a été acquise la culpabilité la feuille de questions qui ne mentionne pas la décision de la cour et du jury sur la peine ;

3°) alors qu'en toute hypothèse, les énonciations de l'arrêt de condamnation devant, à peine de nullité, être en concordance avec celles de la feuille de questions qui lui sert de base, prive sa décision de toute base légale la cour d'assises qui condamne l'accusé à une peine d'emprisonnement dont il n'est pas fait mention dans la feuille de question ».

Réponse de la Cour

21. Contrairement aux énonciations du moyen, il apparaît que la feuille de questions indique les peines prononcées contre l'accusé et précise qu'elles ont été décidées à la majorité absolue par la cour et le jury, qui ont délibéré en commun.

Les peines ainsi mentionnées sont identiques à celles portées à l'arrêt pénal.

22. Le moyen manque donc en fait et sera écarté.

Sur le cinquième moyen

Enoncé du moyen

23. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 2, 3, 10, 371 et suivants, 591 et 593 du code de procédure pénale, 1382 du code civil, dans sa rédaction alors applicable, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale.

24. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevables les constitutions de partie civile de Mme A... F..., épouse U..., M. R... O..., M. I... O..., Mme J... F..., M. H... F..., Mme D... S... et Mme K... V..., ès qualités d'administrateur ad hoc de T... Y... et condamné M. C... W... à leur verser diverses sommes au titre de leur préjudice moral ;

1°) alors que dans ses conclusions d'appel (p. 2), M. C... W... contestait, en l'absence de production d'un acte de naissance et d'un acte d'hérédité, la réalité du lien de filiation de T... O... à l'égard de E... Z... O... U..., ainsi que son domicile en France, étant précisé que la pièce d'identité figurant au dossier démontre que T... porte un autre nom ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'assises des mineurs d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;

2°) alors que dans ses conclusions d'appel (p. 2), M. C... W... contestait, en l'absence de production de tout document, la réalité du lien de parenté de Mme A... F..., épouse U..., M. R... O..., M. I... O..., Mme J... F..., M. H... F... à l'égard de E... Z... O... U... ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'assises des mineurs d'appel a méconnu les dispositions susvisées ;

3°) alors que dans ses conclusions d'appel (p. 3), M. C... W... faisait valoir que Mme A... F..., épouse U..., M. R... O..., M. I... O..., Mme J... F..., M. H... F... ne pouvaient prétendre à une indemnisation au titre d'un vague préjudice moral par ricochet du fait du viol subi par E... Z... O... U..., sans apporter la preuve d'un dommage dont ils auraient personnellement souffert, découlant directement des faits poursuivis, « les intéressés semblant confondre la demande de dommages et intérêts pour le préjudice moral qu'ils ont subi du fait du décès de E... Z... O... U... », décès dont M. C... W... n'est en rien responsable ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'assises des mineurs d'appel a méconnu les dispositions susvisées ».

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en sa première branche

25. L'arrêt civil de la cour d'assises indique que l'enfant T... Y... est héritier de E... O... U..., décédée depuis les faits dont elle a été victime. Cette décision lui accorde des dommages et intérêts, en réparation de son préjudice, et de celui subi par sa mère décédée.

26. En l'état de ces motifs, la cour d'assises a justifié sa décision, et ce grief ne peut être admis.

Sur le moyen, pris en ses autres branches

27. Les conclusions déposées par l'accusé à l'audience civile de la cour d'assises, statuant en appel, relèvent que Mme A... U... et M. R... O..., mère et père de la victime E... Z... U..., M. I... O..., M. H... F... et Mme J... F..., frères et soeur de cette même victime, ne produisent aucun document justifiant leur lien de parenté à son égard. Ces conclusions ajoutent que chacune de ces parties civiles ne peut obtenir de dommages et intérêts qu'en justifiant du caractère direct et certain de son préjudice.

28. En accordant à ces parties civiles des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu'elles ont subi, la cour d'assises a déduit des circonstances de la cause, des débats et des pièces produites à l'audience civile, que chacune d'elles justifiait d'un préjudice personnel, résultant directement du crime de viol commis sur E... Z... U....

29. Le moyen, qui critique cette appréciation souveraine, ne peut être admis.

29. Par ailleurs, la procédure est régulière et les peines ont été légalement appliquées aux faits déclarés constants par la cour et le jury.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. de Larosière de Champfeu - Avocat général : M. Valleix - Avocat(s) : Me Carbonnier ; SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret -

Textes visés :

Article 346 du code de procédure pénale.

Crim., 14 novembre 2019, n° 19-80.420, (P)

Rejet

Débats – Président – Pouvoir discrétionnaire – Exercice – Décision – Révocabilité

Le président de la cour d'assises est investi d'un pouvoir discrétionnaire en vertu duquel il peut prendre toutes mesures qu'il croit utiles pour découvrir la vérité.

Ce pouvoir est révocable. Le président peut, à tout moment, modifier ou rétracter une décision qu'il a prise dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.

Ainsi, le président de la cour d'assises qui a annoncé qu'il ordonnait un transport de la cour d'assises sur les lieux et qu'il ne poserait pas de questions, pendant le transport, à deux témoins déjà entendus par la cour d'assises, qui assisteraient à ce transport, est-il libre, au cours de ce transport, de décider de poser des questions à ces témoins, sur les emplacements où ils se trouvaient lors des faits.

IRRECEVABILITE et REJET sur les pourvois formés par M. M... L..., contre l'arrêt de la cour d'assises du Rhône, en date du 5 décembre 2018, qui, pour séquestration suivie de mort, l'a condamné à la réclusion criminelle à perpétuité et a fixé à vingt-deux ans la période de sûreté, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal par une déclaration de pourvoi faite par l'avocat du demandeur :

Sur sa recevabilité :

Attendu que M. L... ayant épuisé, par la déclaration qu'il avait faite à l'établissement pénitentiaire où il est détenu, le 7 décembre 2018, son droit de se pourvoir en cassation contre l'arrêt pénal rendu contre lui, le pourvoi formé, contre le même arrêt, à la même date, par une déclaration faite par son avocate, n'est pas recevable ;

II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal par la déclaration de pourvoi du demandeur, et sur le pourvoi formé contre l'arrêt civil :

Vu le mémoire produit ;

Sur le 6e moyen de cassation :

Sur le 7e moyen de cassation :

Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;

Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à conduire à l'admission du pourvoi ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 316, 331, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que : (audience du mercredi 21 novembre 2018),

- « A 10 heures 30, Maître Varlet a déposé des conclusions saisissant le président et en tant que de besoin la cour, d'une demande de donner acte » (procès-verbal des débats, p. 22, § 6) ;

- Puis, il a été procédé comme suit : M. le président a alors prononcé à haute voix l'arrêt dont la teneur suit :

(...)

Attendu que Maître Varlet et Maître Nicolle demandent au président et, en tant que de besoin à la cour, de leur donner acte que le témoin M. E... A..., au cours de sa déposition, a consulté des notes écrites sans autorisation préalable du président qui, sur remarque de Maître Varlet, a donné cette autorisation ;

Attendu que c'est après sa déposition spontanée et seulement au cours des questions posées par le président au témoin, ce dont sont convenus les avocats de la défense, que celui-ci a sorti de sa poche un feuillet qu'il a consulté uniquement pour vérifier le nombre d'interventions qu'il avait effectuées en qualité de maître-chien, ce qui ne constitue pas un élément de témoignage sur les faits ;

Qu'aussitôt, il a été autorisé par le président à s'aider de ses notes en tant que de besoin, ce qu'il n'a plus fait au cours de sa déposition devant la Cour » ;

PAR CES MOTIFS ;

Dit qu'avant autorisation expresse du président, le témoin M. E... A... a consulté un document uniquement pour vérifier le nombre d'interventions qu'il avait effectuées en qualité de maître-chien »

(procès-verbal des débats, pp. 23-24) ;

« alors que les témoins déposent oralement, le président pouvant autoriser exceptionnellement l'usage de notes ; que n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, la cour qui a refusé de constater la violation de ce principe quand elle actait elle-même, à la demande de la défense, que le témoin M. A... avait « sorti de sa poche un feuillet qu'il a consulté » avant autorisation expresse du président, peu importe la circonstance, radicalement inopérante, que cette consultation de document ait été uniquement destinée à vérifier le nombre d'interventions qu'il avait effectuées en qualité de maître-chien et ait eu lieu au cours des questions qui lui étaient posées » ;

Attendu qu'il résulte des mentions du procès-verbal des débats que lors de sa déposition un témoin, M. A..., a utilisé un feuillet qu'il a consulté, sans y avoir été préalablement autorisé par le président ;

Que, par arrêt incident, la cour a constaté que, d'une part, le feuillet n'avait été utilisé par le témoin que dans la phase des questions lui étant posées, après sa déposition spontanée, d'autre part, cet écrit n'avait pour objet que de donner une réponse à une question concernant le nombre d'interventions qu'il avait effectuées en qualité de maître-chien ;

Attendu qu'en prononçant ainsi la cour a justifié sa décision, dès lors que si, selon l'article 331,alinéa 3, du code de procédure pénale, les témoins déposent oralement et ne peuvent consulter des notes qu'après y avoir été autorisés par le président, ces dispositions ne concernent que la phase de la déposition spontanée du témoin et non celle des questions lui étant posées, régie par les règles distinctes de l'article 332 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 306, 308, 312, 331, 332, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que : (audience du jeudi 29 novembre 2018)

« A cet instant, M. le président a indiqué aux parties qu'il envisageait un transport de la cour d'assises du Rhône statuant en appel le lundi 3 décembre 2018 à 14 heures à Mâcon » (procès-verbal des débats, p. 53, § 11) ;

(...)

« M. le président a alors indiqué que la cour se transporterait comme annoncé ; Puis, M. le président a alors indiqué que se posent les questions, lors de ce déplacement, de la publicité des débats et de l'enregistrement du procès qui se déroule en appel, le matériel d'enregistrement de la salle d'audience n'étant pas transportable ;

Le ministère public, le conseil des parties civiles, les conseils de l'accusé et l'accusé ayant eu la parole en dernier, ayant été entendus sur le prononcé d'un huis clos, M. le président a indiqué que la décision était mise en délibéré ; Aucune observation n'a été faite par les parties ; Quant à la poursuite de l'enregistrement des débats, le conseil des parties civiles, le ministère public ont déclaré renoncé à cet enregistrement ;

La défense, ayant été entendue en dernier, a indiqué ne pas y renoncer ;

Sur quoi, M. le Président a fait connaître que l'enregistrement pourra se poursuivre à l'aide d'un matériel d'enregistrement transportable » (procès-verbal des débats, p. 54, §§ 2-6) ;

(audience du vendredi 30 novembre 2018)

« L'audience se continuant, M. le président a alors prononcé l'arrêt mis en délibéré concernant la publicité de l'audience de l'audience lors du transport prévu le lundi 3 décembre 2018 :

La cour, après en avoir délibéré sans l'assistance du jury, « Ouï le Conseil des parties civiles ;

Ouï le ministère public ; Ouï les conseils de l'accusé et l'accusé lui-même, celui-ci ayant la parole ;

Vu le transport décidé par le président en vertu de son pouvoir discrétionnaire et prévu le lundi 3 décembre 2018 à partir de 14 heures sur la voie publique à Macon (abords du théâtre municipal et bord de Saône) ;

Attendu que la publicité serait dangereuse pour l'ordre compte tenu de la nature de l'affaire et de la nécessité de garantir la sécurité de l'accusé ;

Vu l'article 306 du code de procédure pénale,

Ordonne que les débats auront lieu à huis clos lors du transport de la cour ;

Et a été signé le présent arrêt par M. le président et le greffier »

M. le président a indiqué que le transport consisterait en une simple visualisation des lieux, qu'il n'y aurait pas de reconstitution ni de vérifications, qu'il n'y aurait pas d'audition des témoins présents ni d'interrogatoire de l'accusé et que les observations éventuelles des parties seraient formulées le mardi 4 décembre 2018 lors de la reprise de l'audience ;

Aucune observation, ni objection n'a été formulée par le conseil des parties civiles, le ministère public, les conseils de l'accusé et l'accusé lui-même, celui-ci ayant eu la parole en dernier » (procès-verbal des débats, p. 61, §§ 1-12) ;

(audience du lundi 3 décembre 2018)

« Et en l'audience à huis clos de la cour d'assises du département du Rhône statuant en appel de ce jour lundi 3 décembre 2018 à 14 Heures à Macon, la cour ayant la même composition que le vendredi 30 novembre 2018, l'assesseur supplémentaire, le ministère public, les greffiers Mmes N... Z... et R... I..., les neuf jurés de jugement et les trois jurés supplémentaires, ayant repris leurs places respectives, M. le président a déclaré que l'audience était reprise » (procès-verbal des débats, p. 62, § 2) ;

(...)

« Puis il a été procédé comme suit :

Sont présents, sur place les deux témoins, déjà entendus et toujours sous la foi du serment : MM. W... U... et E... A... ; Il a été demandé au témoin M. W... U... d'indiquer les changements intervenus dans la configuration des lieux depuis les faits ; Puis il a été demandé au témoin M. A... de montrer les itinéraires identifiés par son chien pisteur comme ayant été empruntés par la victime, comme il l'avait précédemment déclaré. Toutes les personnes présentes se sont ainsi déplacées sur les lieux prédéfinis par le président, à savoir les abords du théâtre municipal (notamment le parking où Mme G... B... avait stationné son véhicule), le parking de la Maisons des vins (où se tenait le témoin M. V... X... lorsqu'il dit avoir vu Mme G... B... partir suivie par un véhicule à bord duquel se trouvaient deux hommes), la rampe d'accès à partir de laquelle le véhicule de la victime a été immergée puis, en suivant l'itinéraire montré par le maître-chien, les locaux du Creps (cour intérieure) et le ponton où la trace de la victime a été perdue » (procès-verbal des débats, pp. 62-63) ;

« 1°) alors que la cour a affirmé un fait en contradiction avec les pièces de la procédure en indiquant que « le transport consisterait en une simple visualisation des lieux, qu'il n'y aurait pas de reconstitution ni de vérifications, qu'il n'y aurait pas d'audition des témoins présents » quand il résultait des mentions mêmes du procès-verbal des débats que les deux témoins présents sur place, MM. W... U... et E... A..., avaient été interrogés ;

« 2°) alors que et en tout état de cause, si le transport de la cour d'assises en dehors de la salle d'audience est une mesure ordinaire d'instruction, cette mesure doit toutefois avoir lieu dans le respect des règles qui président aux débats devant la cour d'assises ; que dès lors, la cour d'assises ne pouvait interroger les témoins MM. U... et A... sans respecter les règles édictées aux articles 331 et 333 du code de procédure pénale, aucune mention du procès-verbal des débats ne permettant de s'assurer de leur respect ;

« 3°) alors que par ailleurs, les débats de la cour d'assises font l'objet d'un enregistrement sonore sous le contrôle du président lorsque la cour d'assises statue en appel, sauf renonciation expresse de l'ensemble des accusés ; que n'a pas mis la chambre criminelle en mesure de s'assurer du respect des dispositions de l'article 308 du code de procédure pénale, la cour qui a expressément décidé que, lors du transport sur les lieux, « l'enregistrement pourra se poursuivre à l'aide d'un matériel d'enregistrement transportable » sans jamais faire mention de cet enregistrement, auquel la défense n'avait pas renoncé, lors de ce déplacement ;

« 4°) alors qu'enfin, la publicité des débats est une règle d'ordre public, le huis clos, exception à la règle, devant être interprété d'autant plus strictement qu'il intervient pour une seule mesure de transport sur les lieux ; qu'au cas présent, la cour ne pouvait valablement mettre fin à la publicité des débats pour le seul transport sur les lieux, en se contentant d'indiquer que, lors de ce déplacement, le huis clos sera ordonné compte tenu « de la nature de l'affaire et de la nécessité de garantir la sécurité de l'accusé », ces indications - peu étayées - n'étant pas de nature à justifier que la publicité des débats soit ainsi interrompue » ;

Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats que le président a organisé un transport de la cour d'assises sur les lieux, en présence de deux témoins préalablement entendus par la cour ; que la défense n'a pas renoncé à l'enregistrement sonore des débats pendant la réalisation de cet acte ; que la cour a ordonné le huis-clos durant sa réalisation ;

Attendu que l'accusé ne peut se faire grief que le président, après avoir indiqué que les deux témoins ne seraient pas entendus, ait procédé à leur audition sur les lieux, dans le but de leur faire préciser les emplacements qu'ils avaient évoqués, le président conservant, sur le fondement de son pouvoir discrétionnaire, révocable, la possibilité de réaliser tous les actes qu'il croit utiles à la manifestation de la vérité, même s'ils n'avaient pas été envisagés ou avaient été écartés ; que, s'il est fait grief au procès-verbal des débats de ne pas mentionner la possibilité offerte aux parties, lors de ce transport, de poser des questions aux témoins, ceux-ci avaient déjà été entendus par la cour d'assises, des questions avaient pu leur être posées et aucune observation n'a été formulée ultérieurement au cours des débats par la défense sur le fait qu'elle aurait été empêchée de poser des questions aux témoins lors du transport, alors que le président leur avait expressément offert la possibilité, tant lors du transport, qu'à la reprise des débats dans la salle d'audience, de formuler toutes observations sur le transport réalisé ;

Que les mentions du procès-verbal des débats selon lesquelles l'enregistrement sonore des débats a été mis en oeuvre dès leur ouverture et que l'enregistrement a été poursuivi au moyen d'un dispositif portatif lors du transport permettent à la Cour cassation de s'assurer de la réalité de cet enregistrement ;

Qu'enfin la cour a suffisamment justifié sa décision d'ordonner le huis-clos lors du transport, au regard des dispositions de l'article 306 du code de procédure pénale, par la dangerosité de la publicité pour l'ordre, compte tenu de la nature de l'affaire et de la nécessité de garantir la sécurité de l'accusé ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 347, 379, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la cour a rejeté la demande de donner acte formulée par conclusions déposées par Maître Varlet à l'audience du 20 novembre 2018 dénonçant une violation de l'oralité des débats et tendant à faire mention de la déposition de M. U..., témoin (procès-verbal des débats, p. 16, § 6) ;

« 1°) alors qu'il résulte du principe d'oralité des débats l'interdiction pour le président de donner lecture des déclarations de témoins ou experts non encore entendus ; qu'en rejetant la demande de donner acte aux motifs, inopérants, qu'il ne saurait être reproché à un directeur d'enquête de faire état d'investigations réalisées quand l'interrogation de l'avocat général était nécessairement prématurée, le témoin M. A..., maître-chien, devant précisément être interrogé par la suite, ce qui caractérisait une violation du principe de l'oralité des débats ;

« 2°) alors que la prohibition de l'article 379 du code de procédure pénale n'est pas absolue, le président pouvant ordonner qu'il soit fait mention du contenu des dépositions au procès-verbal des débats ; qu'en l'espèce, n'a pas légalement justifié sa décision, la cour d'assises qui a refusé la déposition du témoin aux motifs, péremptoires et erronés, que « la demande ne peut aboutir à contourner la prohibition prévue à l'article 379 du code de procédure pénale » ;

Attendu qu'il ressort des mentions du procès-verbal des débats que la défense a déposé des conclusions aux fins qu'il lui soit donné acte que l'avocat général avait interrogé un témoin, M. U..., directeur d'enquête, sur les opérations réalisées par un témoin, M. A..., maître-chien, devant être ultérieurement entendu par la cour d'assises ;

Que, pour rejeter ces conclusions, la cour retient que, d'une part, la demande présentée ne peut viser à contourner l'interdiction prévue à l'article 379 du code de procédure pénale de mentionner au procès-verbal des débats le contenu des déclarations des témoins entendus devant la cour d'assises, d'autre part, il ne saurait être reproché à un enquêteur de faire état des investigations réalisées au cours de l'enquête qu'il a dirigée ;

Que, par ces énonciations, la cour a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 325, 331, 332, 333, 334, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la cour a rejeté la demande de donner acte et la demande d'enquête formulée par Maître Varlet, conseil de l'accusé, dénonçant une violation des exigences résultant du droit de toute personne à un procès équitable résultant des conditions dans lesquelles a été entendu M. S... K... (procès-verbal des débats, p. 32, dernier §) ;

« 1°) alors qu'a méconnu les exigences du droit à un procès équitable et l'équilibre des droits des parties, la cour qui a rejeté la demande de donner acte tout en admettant que la demande d'audition du fonctionnaire de police à la retraite M. K... n'avait été formalisée et débattue contradictoirement qu'après la reprise de l'audience, à 13 heures 50, et que cette audition avait ensuite été décidée par le président quand elle relevait elle-même que l'avocate de la partie civile s'était entretenue avec le président au greffe, avant que cette question ne soit débattue, en lui précisant que ce témoin l'avait avisée par mail qu'il se tenait à la disposition de la cour et que le président avait alors demandé au greffe de le contacter par téléphone ou par courriel afin de savoir s'il pourrait se présenter devant la cour ;

« 2°) alors qu'à tout le moins, il appartenait à la cour d'ordonner une enquête afin de vérifier l'exactitude des faits allégués et, éventuellement, de lever tout doute sur la neutralité du témoin ; que la cour d'assises ne pouvait, sans violer les exigences résultant du droit de toute personne à un procès équitable, refuser d'ordonner une enquête afin de vérifier les conditions exactes dans lesquelles M. K..., le témoin en relation avec l'avocate de la partie civile, avait été précisément convoqué, ces conditions étant discutables et discutées » ;

Attendu que la défense a déposé des conclusions concernant les conditions dans lesquelles un témoin, M. K..., policier retraité ayant participé à l'enquête, avait été amené à déposer devant la cour d'assises, en vertu du pouvoir discrétionnaire du président, à la demande de l'avocat de la partie civile ;

Qu'il résulte de l'arrêt incident de la cour intervenu sur ce point et des mentions du procès-verbal des débats qu'à l'occasion d'une rencontre au greffe, lors d'une suspension d'audience, l'avocat de la partie civile a sollicité du président la possibilité d'entendre M. K... ; que le président a adressé un courriel à cette personne pour s'assurer de sa disponibilité ; que, la réponse étant positive, et le principe de l'audition du témoin ayant été débattu à l'audience, le témoin a été entendu par la cour d'assises, en vertu du pouvoir discrétionnaire du président, à la demande de l'avocat de la partie civile ;

Attendu que l'accusé ne peut se faire grief de ce qu'il ait été ainsi procédé, dans le respect du droit à un procès équitable, dès lors que, d'une part, le président, qui n'a aucunement pris l'initiative de cette audition, s'est borné à s'assurer préalablement de la disponibilité du témoin, d'autre part, que les parties ne pouvaient s'opposer à cette audition décidée sur le fondement du pouvoir discrétionnaire du président et qu'enfin, aucune enquête ne se révélait utile dès lors que la cour et son président étaient en mesure, notamment dans leur décision, d'apporter toutes les indications utiles sur les conditions dans lesquelles cette audition avait été décidée ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 310, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce qu'il résulte du procès-verbal des débats que :

(audience du vendredi 23 novembre 2018)

« Puis, M. le président a indiqué que les recherches effectuées pour retrouver les experts Mmes N... Y... et H... P... n'avaient pas abouti ; Il a alors successivement donné la parole à chacune des parties qui ont pu formuler leurs observations, la défense ayant eu la parole en dernier ; Maître Varlet, conseil de l'accusé, a à cet instant indiqué à la cour et aux parties qu'il avait effectué des recherches sur le site « Linkedin » et que ces experts avaient été retrouvés ; qu'il versera aux débats, contradictoirement sur papier, les coordonnées des experts qu'il avait pu obtenir afin que ces experts puissent être contactés, ce à quoi M. le président a répondu que dès que le greffe aura ces informations, ils seront contactés pour procéder à leur audition soit le lundi 26 novembre à 11 heures ou 16 heures, soit le mardi 27 novembre à 15 heures » (procès-verbal des débats, p. 32, §§ 8-10) ;

(audience du lundi 26 novembre 2018)

« M. le président a alors demandé à Maître Varlet s'il entendait fournir les coordonnées des experts Mmes Y... et P..., comme il l'avait indiqué à l'audience du 23 novembre 2018 au matin, en vue de les aviser pour être entendus ce jour ou le mardi 27 comme envisagé ; Maître Varlet a indiqué ne pas avoir eu le temps de communiquer les coordonnées mais qu'il était prêt à la faire ; M. le président a indiqué qu'en l'état de l'avancée des débats et compte tenu du temps nécessaire pour localiser et faire venir au moins l'un ou l'autre de ces experts devant la cour, leur audition apparaissait difficilement envisageable ; Puis, M. le président a donné successivement la parole au conseil des parties civiles, au ministère public, aux conseils de la défense de l'accusé, celui-ci ayant la parole le dernier, qui ont pu former leurs observations » (procès-verbal des débats, p. 39, §§ 6-8) ;

« alors que si le président n'a pas à rendre compte de l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, celui-ci doit s'exercer dans le respect de l'équilibre des droits des parties et dans l'intérêt de la manifestation de la vérité ; qu'en l'espèce, le président ne pouvait se contenter, pour passer outre l'audition des experts Mmes Y... et P..., de considérer que les recherches entreprises n'avaient pas abouti, en se dispensant de procéder lui-même aux recherches « Linkedin » évoquées par la défense, le seul fait pour le conseil de l'accusé de ne pas lui avoir communiqué ces recherches, accessibles à tous, ne le dispensant pas d'oeuvrer utilement, la cour ayant elle-même indiqué, s'agissant de l'audition de M. K..., témoin que « le président peut prendre toutes les mesures nécessaires à l'exercice effectif de son pouvoir discrétionnaire, et notamment lors d'une pause, pour faire venir un témoin devant la cour en urgence » (procès-verbal des débats, p. 35, § 2) ;

Attendu que l'accusé ne peut se faire grief de ce que le président ait passé outre l'audition de deux experts défaillants, dès lors que, d'une part, la défense ne s'y est pas expressément opposée et, d'autre part aucun texte n'exige la réalisation de recherches, à la charge du président, avant qu'il soit passé outre ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;

PAR CES MOTIFS, la Cour :

I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal par une déclaration de pourvoi faite par l'avocat du demandeur :

Le déclare IRRECEVABLE ;

II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt pénal par la déclaration de pourvoi du demandeur, et sur le pourvoi formé contre l'arrêt civil :

Les REJETTE.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. de Larosière de Champfeu - Avocat général : M. Salomon - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Articles 306, 308, 312, 331 et 332 du code de procédure pénale.

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