Numéro 10 - Octobre 2020

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

INSTRUCTION

Crim., 7 octobre 2020, n° 20-84.067, (P)

Rejet

Détention provisoire – Décision de prolongation – Débat contradictoire – Demande de renvoi – Absence de réponse du juge des libertés et de la détention – Nullité (non) – Conditions – Pièce justificative illisible à l'appui de la demande de renvoi

Un mis en examen ne saurait se faire un grief de l'absence de réponse par le juge des libertés et de la détention à la demande, présentée par son avocat, de renvoi du débat contradictoire relatif à la prolongation de sa détention provisoire, cette demande accompagnée d'une pièce justificative illisible ne mettant pas en mesure le juge d'en apprécier la pertinence, celui-ci devant statuer dans des délais contraints.

REJET du pourvoi formé par M. K... T... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Poitiers en date du 30 juin 2020, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.

Un mémoire personnel a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Mis en examen du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, M. K... T... a été placé en détention le 16 février 2020.

3. Le juge des libertés et de la détention de La Rochelle a convoqué son avocat de M. T... afin d'assister ce dernier dans le cadre d'une audience de prolongation de la détention provisoire fixée au 8 juin 2020.

4. Par télécopie du 5 juin, l'avocat a sollicité le renvoi de l'audience, indiquant qu'il était par ailleurs retenu le même jour au tribunal judiciaire de Paris pour assister deux prévenues dans le cadre d'une audience au fond.

5. M. T... a comparu au débat contradictoire qui s'est tenu à la date initialement fixée, sans l'assistance d'un avocat.

6. A l'issue, le juge des libertés et de la détention a prolongé la détention provisoire de M. T... pour une durée de quatre mois par ordonnance du 8 juin 2020.

7. Celui-ci a relevé appel de cette décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen pris en sa seconde branche et le second moyen

8. Il ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. Le moyen est pris de la violation des articles préliminaire, 114, 137-3, 145-1, 145-2, 591, 593, 802 et 803-1 du code de procédure pénale ainsi que les articles 5, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.

10. Il critique l'arrêt de la chambre de l'instruction ayant confirmé l'ordonnance de prolongation de la détention de M. T... rendue par le juge des libertés et de la détention, alors :

« 1°/ que la demande de renvoi, accompagnée d'une pièce dont la qualité ne peut être due qu'au mode de transmission par télécopie, n'était pas dénuée de motif ; qu'en considérant cependant que le motif de la demande était équivoque et que le juge des libertés et de la détention n'était pas tenu d'y répondre alors que, selon la jurisprudence, l'absence de réponse ne constitue pas un grief que dans l'hypothèse où la demande est dépourvue de motifs, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, la chambre de l'instruction s'est contredite et a méconnu la portée des textes susvisés. »

Réponse de la Cour

11. Pour écarter le moyen de nullité tiré du défaut de réponse à la demande de renvoi adressée par l'avocat au juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué retient que l'énoncé du motif de cette demande, peu explicite, ne permettait pas au juge des libertés et de la détention d'estimer concrètement en quoi l'audience au tribunal judiciaire de Paris pouvait présenter un caractère prioritaire.

12. Les juges précisent que la pièce jointe à la demande était illisible de sorte qu'aucun renseignement utile ne pouvait en être tiré.

13. Ils ajoutent que le motif tel que formulé et la pièce produite à l'appui ne permettaient pas au juge d'apprécier la pertinence de la demande de renvoi.

14. Ils en déduisent que le juge des libertés et de la détention n'était pas tenu de répondre à cette demande.

15. En statuant ainsi, par une motivation exempte de contradiction, alors que le demandeur ne peut se faire un grief de l'absence de réponse, par le juge des libertés et de la détention, à une demande de renvoi du débat contradictoire, cette demande étant accompagnée d'un seul justificatif illisible, ce qui ne mettait pas en mesure son destinataire d'en apprécier la pertinence, celui-ci devant statuer dans des délais contraints, la chambre de l'instruction a justifié sa décision et n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.

16. Ainsi, le moyen doit être écarté.

17. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Pauthe - Avocat général : Mme Zientara-Logeay -

Textes visés :

Articles préliminaire, 114, 137-3, 145-1, 145-2, 591, 593, 802 et 803-1 du code de procédure pénale ; articles 5, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Rapprochement(s) :

S'agissant de l'absence de réponse par le juge des libertés et de la détention à la demande de renvoi ne contenant aucun motif, à rapprocher : Crim., 5 avril 2016, pourvoi n° 16-80.294, Bull. crim. 2016, n° 121 (rejet).

Crim., 13 octobre 2020, n° 20-81.199, (P)

Rejet

Interrogatoire – Matière criminelle – Enregistrement – Domaine d'application – Autres mis en examen pour des faits délictuels – Défaut d'enregistrement – Sanction (non)

Dès lors que l'article 116-1, alinéa 1, du code de procédure pénale vise à faire bénéficier d'une protection plus grande les personnes mises en examen d'un chef criminel, il n'y a pas lieu de faire procéder, dans le cabinet du juge d'instruction, à l'enregistrement des interrogatoires des personnes mises en examen seulement pour un ou plusieurs délits, peu important que ces mises en examen aient eu lieu dans une procédure ouverte au criminel.

REJET des pourvois formés par Mme J... C... et M. F... D... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 31 janvier 2020, qui, dans l'information suivie contre eux, notamment des chefs de blanchiment aggravé et association de malfaiteurs, a prononcé sur leurs demandes d'annulation d'actes de procédure.

Par ordonnance en date du 18 mai 2020, le président de la chambre criminelle a joint les pourvois et prescrit leur examen immédiat.

Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. A la suite d'une enquête préliminaire relative à des faits de recels en bande organisée de métaux précieux et de bijoux provenant de vol et de blanchiment, une information judiciaire a été ouverte le 11 juillet 2014 des chefs de recels en bande organisée, association de malfaiteurs et blanchiment en bande organisée, au cours de laquelle ont été mis en cause, notamment, Mme C..., directrice d'un palace à Marrakech, soupconnée de faire échapper d'importantes sommes d'argent au fisc marocain en remettant des espèces à des intermédiaires finançant des trafics et alimentant, en contrepartie, le compte bancaire ouvert à son nom dans la banque suisse D... et Cie, ainsi que M. D..., responsable du compte de Mme C... dans ladite banque.

3. Plusieurs réquisitoires supplétifs sont intervenus, notamment le 16 octobre 2015 étendant la période prévention jusqu'à octobre 2015.

4. Mme C... a été mise en examen le 25 novembre 2016 des chefs de blanchiment aggravé et association de malfaiteurs en raison de faits commis jusqu'au 13 octobre 2015, puis a fait l'objet d'une mise en examen supplétive le 16 août 2018 pour des faits commis jusqu'en novembre 2016.

5. M. D..., interpellé et placé en garde à vue le 11 février 2018, a été mis en examen le 13 février suivant, des mêmes chefs, pour des faits commis jusqu'en novembre 2016.

6. Mme C... et M. D... ont saisi la chambre de l'instruction de requêtes en nullité, auxquelles celle-ci a fait partiellement droit en annulant les mises en examen supplétive de la première et la mise en examen du second, mais uniquement du chef d'association de malfaiteurs pour des faits commis jusqu'en novembre 2016.

Examen des moyens

Sur les premier, quatrième et cinquième moyen et la troisième branche du deuxième moyen proposés pour Mme C... et les quatre moyens proposés pour M. D...

7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le deuxième moyen proposé pour Mme C..., pris en ses deux premières branches

Enoncé du moyen

8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les demandes d'annulation de la mise en examen supplétive de Mme C... d'une part et des demandes d'entraide judiciaire suisse et de leurs pièces d'exécution d'autre part, tirées d'un excès de saisine, alors :

« 1°/ que le juge d'instruction ne peut informer qu'en vertu d'un réquisitoire du procureur de la République ; qu'en l'espèce, pour écarter le moyen pris d'un excès de saisine tendant à l'annulation de la mise en examen supplétive de Mme C... des chefs de blanchiment aggravé et d'association de malfaiteurs commis « sur le territoire national, en Belgique et en Suisse », après avoir pourtant constaté que les réquisitoires introductif et supplétifs visent des faits de blanchiment et d'association de malfaiteurs commis sur le seul territoire national (arrêt, p. 42 et p. 43), la chambre de l'instruction a énoncé que les actes commis sur le territoire national ne prennent sens qu'au regard des actes commis à l'étranger, dont ils sont indivisibles, et que, pour cette raison, « le juge d'instruction est autorisé à informer sur l'ensemble, y compris sur les actes mis en évidence à l'étranger, alors même que l'acte de poursuite, en l'espèce le réquisitoire supplétif du 13 février 2018, ne viserait que ceux commis sur le territoire national » (arrêt, p. 43) ; qu'en statuant ainsi, lorsque, même à les supposer indivisibles, les faits commis à l'étranger, distincts de ceux dont le magistrat instructeur était saisi, s'analysaient en des faits nouveaux sur lesquels ce magistrat ne pouvait valablement instruire sans réquisitoire préalable du procureur de la République et que les actes dont l'annulation était sollicitée excédaient de simples vérifications sommaires, la chambre de l'instruction a violé l'article 80 du code de procédure pénale ;

2°/ que pour écarter les moyens pris d'un excès de saisine tendant à l'annulation des demandes d'entraide judiciaire adressées par le juge d'instruction aux autorités helvétiques les 22 février 2016, 25 octobre 2016 et 22 novembre 2016 aux fins de communication d'informations bancaires concernant Mme C..., après avoir pourtant constaté que les réquisitoires introductif et supplétifs visent des faits de blanchiment et d'association de malfaiteurs commis sur le seul territoire national (arrêt, p. 42 et p. 43), la chambre de l'instruction a énoncé que les actes commis sur le territoire national ne prennent sens qu'au regard des actes commis à l'étranger, dont ils sont indivisibles, et que, pour cette raison, « le juge d'instruction est autorisé à informer sur l'ensemble, y compris sur les actes mis en évidence à l'étranger, alors même que l'acte de poursuite, en l'espèce le réquisitoire supplétif du 13 février 2018, ne viserait que ceux commis sur le territoire national » (arrêt, p. 43) ; qu'en statuant ainsi, lorsque, même à les supposer indivisibles, les faits commis à l'étranger, distincts de ceux dont le magistrat instructeur était saisi, s'analysaient en des faits nouveaux sur lesquels ce magistrat ne pouvait valablement instruire sans réquisitoire préalable du procureur de la République et que les actes dont l'annulation était sollicitée excédaient de simples vérifications sommaires, la chambre de l'instruction a violé l'article 80 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

9. Pour dire que le juge d'instruction était fondé à mettre supplétivement en examen Mme C... au titre des faits susceptibles d'avoir été commis en Belgique et en Suisse, l'arrêt retient que la compréhension du mécanisme de blanchiment ne peut être conçue à compter des seuls actes commis sur le territoire national, qui ne prennent sens qu'au regard de la mise en évidence des actes commis à l'étranger, ces actes étant indivisibles et constituant une opération unique, de sorte que le juge d'instruction était autorisé à informer sur l'ensemble des faits, alors même que le réquisitoire supplétif du 13 février 2018 ne viserait que les faits commis sur le territoire national.

10. En prononçant ainsi, les juges n'encourent pas le grief allégué dès lors que le juge d'instruction était saisi des faits commis en Belgique et en Suisse, indivisibles de ceux commis en France dont ils n'étaient que le prolongement.

11. Ainsi, le moyen n'est pas fondé.

Sur le troisième moyen proposé pour Mme C...

Enoncé du moyen

12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen de nullité tiré de l'absence d'enregistrement audiovisuel de l'interrogatoire aux fins de mise en examen supplétive de Mme C..., alors « que lorsque l'information judiciaire porte sur des faits de nature criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen réalisés dans le cabinet du juge d'instruction doivent faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel ; que, pour écarter le moyen de nullité pris du défaut d'enregistrement audiovisuel de l'interrogatoire aux fins de mise en examen supplétive de Mme C..., la chambre de l'instruction retient que l'exigence d'enregistrement ne concerne que les interrogatoires des personnes mises en examen pour des faits de nature criminelle et en déduit que le magistrat instructeur, bien que saisi de faits criminels, n'était pas contraint d'enregistrer l'interrogatoire de Mme C... qui n'était poursuivie que pour des délits ; qu'en statuant ainsi, lorsque l'obligation d'enregistrement audiovisuel, qui doit être appréciée en début d'interrogatoire, ne peut dépendre de la qualification juridique notifiée à son issue à la personne mise en examen, mais trouve à s'appliquer à chaque fois que le magistrat instructeur est saisi de faits de nature criminelle, la chambre de l'instruction a violé l'article 116-1 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

13. Pour écarter le moyen de nullité, selon lequel l'interrogatoire de Mme C... du 16 août 2018 ayant donné lieu à sa mise en examen supplétive aurait dû faire l'objet d'un enregistrement audiovisuel, l'arrêt attaqué énonce que l'exigence d'un enregistrement audiovisuel prévu par l'article 116-1 alinéa 1er du code de procédure pénale concerne les seuls interrogatoires des personnes mises en examen pour des faits de nature criminelle, ce qui n'est pas le cas de Mme C... qui n'est poursuivie que pour des délits, peu important qu'elle le soit dans le cadre d'une procédure criminelle.

14. En l'état de ces énonciations, et dès lors que l'article 116-1 alinéa 1er dudit code vise à faire bénéficier d'une protection plus grande les personnes mises en examen d'un chef criminel, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.

15. Ainsi, le moyen doit être écarté.

16. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : Mme Ménotti - Avocat général : M. Lagauche - Avocat(s) : SCP Foussard et Froger ; SCP Spinosi et Sureau -

Textes visés :

Article 116-1 du code de procédure pénale.

Crim., 14 octobre 2020, n° 20-83.011, (P)

Cassation sans renvoi

Mandats – Mandat d'amener – Exécution – Rétention de plus de vingt-quatre heures – Conditions – Mineurs – Détention provisoire – Possibilité – Nécessité (non)

La mise à exécution d'un mandat d'amener est indépendante de la possibilité de placement en détention provisoire.

Doit être cassé l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui énonce que ne peut être retenu plus de vingt-quatre heures en exécution d'un mandat d'amener, le mineur qui, en raison de son âge et de la qualification des faits qui lui sont reprochés, ne peut être placé en détention provisoire.

CASSATION SANS RENVOI sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Nancy contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour, en date du 12 mai 2020, qui, dans l'information suivie contre C... X... du chef de vols aggravés, a confirmé l'ordonnance du juge des enfants ordonnant sa mise en liberté.

Un mémoire a été produit.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. C... X..., né le [...], a été mis en examen le 30 janvier 2020, par le juge des enfants de Nancy, du chef de vols en réunion.

3. Il a été placé sous contrôle judiciaire et confié à l'aide sociale à l'enfance.

4.Le 6 mars 2020, le parquet de Nancy a été informé par le commissariat de Toulouse d'un nouveau placement en garde à vue pour vol aggravé de C... X....

Le juge d'instruction de permanence de Nancy, agissant en remplacement du juge des enfants, a délivré un mandat d'amener.

5. Le 7 mars 2020, l'intéressé a été écroué en exécution de ce mandat à l'établissement pénitentiaire de Lavaur (81).

6. Le 9 mars, le juge des enfants a ordonné sa mise en liberté.

7. Le ministère public a interjeté appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

8. Le moyen est pris de la violation des articles 123 alinéa 3, 127, 128, 129, 130, 130-1 du code de procédure pénale.

9. Le moyen critique l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du juge des enfants ayant ordonné la mise en liberté de C... X..., alors :

« 1°/ que le juge des enfants de Nancy qui avait la possibilité de ne pas ordonner le transfèrement de la personne visée par le mandat, ne pouvait, sans excéder les pouvoirs qu'il tient du code de procédure pénale et sans constater que les délais prévus aux articles 127 et 130 n'avaient pas été respectés, ordonner la mise en liberté de C... X... ; que cette mise en liberté, manifestement fondée sur l'impossibilité de placer le mineur en détention provisoire, sauf en cas de non respect d'un placement en centre éducatif fermé par application des articles 10-2, 11 et 11-2 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, ne peut s'analyser comme une décision de refus de transfèrement ; que la « conduite en maison d'arrêt » visée à l'article 128 du code de procédure pénale, même décidée par le juge judiciaire, garant des libertés individuelles, ne peut se confondre avec une mesure de détention provisoire alors qu'il ne s'agit que d'une modalité d'exécution du transfèrement requis ; que par conséquent, le mineur concerné, qui n'était pas en détention provisoire, ne pouvait être remis en liberté d'office par le juge des enfants ;

2°/ que la chambre de l'instruction qui a conforté l'analyse du juge s'est d'ailleurs contredite en affirmant « que l'ordonnance d'incarcération provisoire subie en exécution d'un mandat d'amener n'est pas un titre de détention et par conséquent ne constitue pas le point de départ de la détention provisoire tout en indiquant qu'il s'agit d'une privation de liberté qui s'impute sur la peine prononcée par la juridiction de jugement en application des dispositions de l'article 716-4 alinéa 2 du code de procédure pénale », dispositions qui n'ont aucune vocation à s'appliquer en l'espèce, l'intéressé n'ayant pas été condamné. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 122, alinéa 3, 127, 128 et 129 du code de procédure pénale :

10. Il résulte de ces articles que le mandat d'amener peut être décerné à l'encontre d'une personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction.

11. Lorsque la personne recherchée en vertu d'un mandat d'amener est trouvée à plus de 200 km du siège du juge d'instruction ou du juge des enfants qui a délivré le mandat, et qu'il n'est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant ce magistrat, elle est conduite devant le juge des libertés et de la détention du lieu de l'arrestation qui lui demande notamment si elle accepte son transfert ou si elle préfère prolonger les effets du mandat en attendant, au lieu où elle se trouve, la décision du juge mandant. Si la personne refuse son transfert, elle est conduite dans la maison d'arrêt, et avis immédiat est donné au juge d'instruction compétent, qui apprécie, après réception des pièces transmises, s'il maintient le transfert ou y renonce.

12.Pour confirmer l'ordonnance de mise en liberté du juge des enfants, les juges retiennent que les articles 123, 127, 128, 129 et 130-1 du code de procédure pénale donnent au magistrat qui décerne le mandat d'amener l'entière maîtrise de l'exécution de ce dernier puisque, in fine, il décide ou non d'ordonner le transfèrement de la personne découverte à plus de 200 kilomètres et qu'en cas de non-respect des délais de transfèrement, la personne est libérée sur l'ordre du magistrat saisi de l'affaire.

13. Les juges ajoutent qu'il résulte des articles 10-2 et 11 de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante que les mineurs de treize à dix-huit ans mis en examen par le juge d'instruction ou le juge des enfants ne peuvent être placés en détention provisoire par le juge des libertés et de la détention que dans les cas qu'ils précisent ou si le contrôle judiciaire comporte l'obligation de respecter les conditions d'un placement dans un centre éducatif fermé prévu à l'article 33 de la même ordonnance.

14. Les juges relèvent qu'en l'espèce, C... X..., mineur de 15 ans comme étant né le [...], a été mis en examen du chef de vol en réunion ce qui lui fait encourir une peine de cinq ans d'emprisonnement ; que, du fait de son âge et de la qualification retenue, la seule mesure coercitive qui pouvait être prise à son encontre était une mesure de contrôle judiciaire, ce qui a été décidé par le juge des enfants ; que le mineur s'étant soustrait à plusieurs des obligations de ce contrôle judiciaire, le juge des enfants ne pouvait que renforcer ses obligations et ordonner son placement en centre éducatif fermé ; que, s'il est constant que l'ordonnance d'incarcération provisoire subie en exécution d'un mandat d'amener n'est pas un titre de détention et par conséquent ne constitue pas le point de départ de la détention provisoire, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une privation de liberté qui s'impute sur la peine prononcée par la juridiction de jugement en application des dispositions de l'article 716-4 alinéa 2 du code de procédure pénale.

15. La chambre de l'instruction conclut que si un mandat d'amener peut être délivré contre toute personne à l'encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction, sans que l'article 122 du code de procédure pénale n'exige que cette infraction soit réprimée par une peine privative de liberté, il n'en reste pas moins que la conciliation entre la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions, d'une part, et l'exercice des libertés constitutionnellement garanties, d'autre part, ne peut être regardée comme équilibrée lorsque la privation de liberté résultant de l'exécution d'un mandat d'amener excède vingt-quatre heures, durée de principe de la rétention dans un tel cadre selon l'article 126 du code de procédure pénale, lorsque la personne à l'encontre de laquelle le mandat d'amener est décerné n'est pas susceptible d'être placée en détention provisoire.

16. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés pour les motifs qui suivent.

17. En premier lieu, la privation de liberté subie en exécution d'un mandat d'amener ne fait pas courir la détention provisoire.

18. En second lieu, si la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne pourrait être regardée comme équilibrée si la privation de liberté prévue par l'article 130 pouvait être mise en œuvre, dans le cadre d'un mandat d'amener, à l'encontre d'une personne qui n'encourt pas une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave (Cons Constit, 24 juin 2011, no 2011-133 QPC), tel n'est pas le cas lorsque cette personne, qui encourt une peine de cette nature, ne peut pas être placée en détention provisoire.

Portée et conséquences de la cassation

19. La Cassation est dès lors encourue.

20. N'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, la cassation aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L.411-3 du code de l'organisation judiciaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, en date du 12 mai 2020.

DIT n'y avoir lieu à renvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Guéry - Avocat général : M. Valat -

Textes visés :

Articles 122, alinéa 3, 127, 128 et 129 du code de procédure pénale.

Crim., 13 octobre 2020, n° 20-80.490, (P)

Cassation

Nullités de l'instruction – Annulation d'actes pour violation de l'article 6-1 du code de procédure pénale – Effets – Interdiction de tirer des actes et pièces annulés aucun renseignement contre les parties – Article 174 du code de procédure pénale – Portée – Réitération d'investigations dans une procédure distincte – Effet

L'interdiction de tirer des actes et des pièces ou parties d'actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties, prévue par l'article 174 du code de procédure pénale, ne s'applique pas à la partie qui, ayant bénéficié de l'annulation d'actes portant atteinte à ses intérêts, s'en prévaut dans le cadre d'une procédure distincte.

Lorsque des investigations ont été annulées en application de l'article 6-1 du code de procédure pénale, au motif que la plainte avec constitution de partie civile à la suite de laquelle elles ont été effectuées, qui se prévalait de la violation antérieure de dispositions de procédure pénale, avait été déposée avant que le caractère illégal des actes accomplis eût été définitivement constaté, l'article 174 du code de procédure pénale ne saurait interdire que, sur une plainte identique, réitérée une fois satisfaite cette condition, le juge d'instruction procède à nouveau aux investigations précédemment annulées.

CASSATION sur le pourvoi formé par la société Le Monde, partie civile, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 29 novembre 2019, qui dans l'information suivie, sur sa plainte contre personne non dénommée, des chefs de collecte de données à caractère personnel par moyen frauduleux, déloyal ou illicite et atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions, a prononcé sur des demandes d'annulation de pièces de la procédure.

Par ordonnance en date du 25 février 2020, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.

Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Nanterre du chef de violation du secret de l'instruction et du secret professionnel, à la suite de la parution d'un article dans l'édition du Monde datée du 2 septembre 2010 faisant état d'une perquisition réalisée la veille au domicile de Mme D....

3. Les services de l'inspection générale des services de la police nationale (IGPN) ont adressé des réquisitions à divers opérateurs téléphoniques notamment pour identifier les numéros des téléphones portables de MM. P... et M..., journalistes au Monde, ainsi que les numéros des appels entrants et sortants de ces lignes, sur les instructions de M. Q... T..., procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nanterre, et de son adjointe, Mme H... J....

4. L'information ensuite ouverte du chef de violation du secret professionnel a été conduite par la juridiction d'instruction de Bordeaux, désignée dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

5. Les réquisitions susmentionnées ont été annulées le 5 mai 2011 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, le pourvoi formé contre cet arrêt étant rejeté le 6 décembre 2011.

6. Le 25 février 2011, la société Le Monde, MM. M... et P... ont déposé une plainte avec constitution de partie civile des chefs de collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite, et d'atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique.

7. Le 1er juin 2011, une information judiciaire a été ouverte de ces chefs.

8. Par arrêt du 22 mars 2012, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris a annulé les investigations diligentées dans ce cadre, notamment les perquisitions et saisies effectuées au siège de l'IGPN, ainsi que les mises en examen ordonnées, pour violation des dispositions de l'article 6-1 du code de procédure pénale.

Le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté le 25 juin 2013.

9. Le 2 juillet 2014, la société Le Monde et les deux journalistes précités ont réitéré leur plainte avec constitution de partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Paris.

10. L'information ensuite ouverte a été conduite par la juridiction d'instruction de Lille, désignée dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

11. Le juge d'instruction a notamment procédé à la perquisition des locaux de l'IGPN et à la saisie de la copie des actes d'investigations réalisés dans le cadre de l'enquête préliminaire ouverte par le parquet de Nanterre du chef de violation du secret de l'instruction et du secret professionnel.

12. M. T..., tout comme Mme J..., placés sous le statut de témoin assisté, ont présenté une requête en annulation de pièces, en exposant que ces investigations ont méconnu les dispositions de l'article 174 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

13. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit à la requête en nullité, et a annulé en conséquence les cotes D31 à D34, en ce compris le scellé IGPN 1, D36, D37, D38, D39, D41 et D47, alors :

« 1°/ que l'article 174 du code de procédure pénale, selon lequel des actes annulés ne peuvent être utilisés dans une autre procédure, ne s'applique pas à l'hypothèse où la seconde procédure porte sur des faits distincts et vise des personnes distinctes ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans violer ce texte, se fonder sur l'annulation des réquisitions de septembre 2010 prononcée dans une première information judiciaire qui portait sur des faits de violation du secret professionnel, pour annuler la copie de ces mêmes réquisitions, versée dans la présente information judiciaire, qui concerne des faits distincts de collecte de données à caractère personnel, imputés par les parties civiles à des membres du parquet ;

2°/ que et en tout état de cause, lorsqu'une infraction est commise à l'occasion de la mise en oeuvre de règles de procédure pénale par des autorités publiques, l'annulation de l'acte litigieux ne fait pas obstacle à ce que soit menées des investigations sur celui-ci dans le cadre d'une procédure ultérieure ; qu'il peut d'autant moins en aller ainsi que l'article 6-1 du code de procédure pénale subordonne la recevabilité des poursuites à un constat d'illégalité préalable ; qu'en annulant les actes d'investigation effectués sur les réquisitions litigieuses du 2 septembre 2010, qui constituent les faits objet de l'information dénoncés par les parties civiles, sur la base du constat d'illégalité précédemment opéré, la chambre de l'instruction a violé les articles 174 et 6-1 du Code de procédure pénale ;

3°/ qu'en se prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a procédé à une application excessivement formaliste des articles 174 et 6-1 du code de procédure pénale, conduisant à ériger un obstacle disproportionné au droit d'accès au juge des parties civiles, celles-ci se trouvant de facto dans l'impossibilité de faire réaliser des investigations sur les actes annulés, en raison de l'illégalité précédemment constatée ; qu'elle a violé ces articles, ainsi que l'article 6§1 de la Convention européenne des droits de l'homme. »

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit à la requête en nullité et a annulé en conséquence les cotes D31 à D34, en ce compris le scellé IGPN 1, D36, D37, D38, D39, D41 et D47, alors :

« 1°/ que lorsque des actes sont déclarés nuls comme ayant été accomplis en violation des règles de procédure, et que la juridiction fait application de l'alinéa 2 de l'article 174 du code de procédure pénale pour décider que l'annulation ne doit pas être limitée à la procédure viciée mais « s'étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure », la reconstitution d'actes ne faisant pas partie des actes viciés dans la première procédure n'est pas interdite ; qu'en considérant qu'il n'était pas possible d'informer à nouveau sur les réquisitions ordonnées en septembre 2010, lorsque dans l'arrêt d'annulation du 22 mars 2012 dont se prévalait le requérant, ces réquisitions ne faisaient pas partie des actes accomplis de manière illégale, la chambre de l'instruction a violé le principe précité, ainsi que les articles préliminaire et 174 du code de procédure pénale ;

2°/ que lorsque l'annulation d'une procédure intervient en raison du constat selon lequel l'exception préjudicielle au déclenchement de l'action publique prévue à l'article 6-1 du code de procédure pénale n'a pas été respectée, ce qui revient à constater le caractère prématuré de l'action, aucun obstacle, hormis la prescription, ne peut exister à la reprise des investigations sur ces mêmes actes ; qu'en annulant la copie des réquisitions du 2 septembre 2010 réalisée dans la présente procédure en se fondant sur l'annulation du réquisitoire introductif du 1er juin 2011, délivré prématurément au regard de l'article 6-1 du code de procédure pénale, la chambre a de nouveau méconnu la combinaison des articles 174 et 6-1 du code de procédure pénale ;

3°/ que la chambre de l'instruction a ce faisant érigé un tel obstacle à l'action de la partie civile, qui a réitéré une action dont l'irrecevabilité n'avait, précédemment, pas été constatée dans le cadre d'une ordonnance de non-informer, comme elle aurait du l'être ; qu'elle a violé l'article 6§1 de la Convention européenne et l'article 6-1 du code de procédure pénale, en méconnaissant le droit d'accès au juge de l'exposante. »

Réponse de la Cour

15. Les moyens sont réunis.

Vu les articles 6-1 et 174 du code de procédure pénale :

16. Il résulte du premier de ces textes que, lorsque les délits dénoncés impliquent la violation de dispositions de procédure pénale, l'action publique ne peut être engagée qu'après la constatation définitive du caractère illégal des actes accomplis.

17. Le second de ces textes interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d'actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties. Toutefois, une telle interdiction ne s'applique pas à la partie qui, ayant bénéficié de l'annulation d'actes portant atteinte à ses intérêts, s'en prévaut dans le cadre d'une procédure distincte.

18. Enfin, lorsque des investigations ont été annulées en application du premier de ces textes au motif que la plainte avec constitution de partie civile à la suite de laquelle elles ont été effectuées, qui se prévalait de la violation antérieure de dispositions de procédure pénale, avait été déposée avant que le caractère illégal des actes accomplis eût été définitivement constaté, le second de ces textes ne saurait interdire que, sur une plainte identique, réitérée une fois satisfaite cette condition, le juge d'instruction procède à nouveau aux investigations précédemment annulées.

19. Pour prononcer l'annulation de la perquisition diligentée dans les locaux de l'IGPN et de la saisie d'une copie d'archives de la procédure d'enquête préliminaire ouverte du chef de violation du secret de l'instruction le 2 septembre 2010, ainsi que des actes subséquents, l'arrêt relève que cette procédure a été annulée par arrêt du 5 mai 2011 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux et par arrêt du 22 mars 2012 de la 6e chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.

20. Les juges énoncent qu'il n'était dès lors pas possible d'informer à nouveau sur les réquisitions ordonnées dans le cadre de cette enquête préliminaire qui avaient été annulées.

21. Ils retiennent que la plainte déposée le 2 juillet 2014 par la société éditrice du Monde et par les journalistes précités, identique à celle déposée le 25 février 2011, est intervenue alors que l'arrêt du 22 mars 2012 était définitif.

22. Les juges en déduisent que la perquisition et la saisie d'une copie d'archives dans les locaux de l'IGPN n'ont été que des artifices pour retrouver une copie des pièces annulées par cette décision.

23. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés pour les motifs qui suivent.

24. En premier lieu, les juges ne pouvaient retenir que l'annulation des actes concernés, par arrêt du 5 mai 2011 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, constituait un obstacle à l'action de la partie civile, alors que cette décision était la condition de sa recevabilité.

25. En second lieu, ils ne pouvaient déduire de la seule réitération d'actes annulés par un juge d'instruction l'existence d'un artifice de nature à reconstituer, au mépris des droits de la défense, la substance des actes annulés dans une autre procédure, alors que cette annulation avait été prononcée au seul motif que les actes avaient été effectués avant que la condition résultant de l'article 6-1 du code de procédure pénale ne soit satisfaite.

26. La cassation est par conséquent encourue.

Portée et conséquences de la cassation

27. En application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de MM. M... et P..., parties civiles, qui ne se sont pas pourvus, en raison de l'indivisibilité des faits.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen, la Cour :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 29 novembre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT que la cassation aura effet à l'égard de MM. M... et P...

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Violeau - Avocat général : M. Lagauche - Avocat(s) : SCP Spinosi et Sureau ; SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Articles 6-1 et 174 du code de procédure pénale.

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