Numéro 1 - Janvier 2024

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

COMPARUTION SUR RECONNAISSANCE PREALABLE DE CULPABILITE

Crim., 30 janvier 2024, n° 23-84.773, (B), FRH

Annulation sans renvoi

Ordonnance d'homologation – Recours – Recours du procureur de la République – Absence – Effets – Ouverture à cassation en seul cas d'excès de pouvoir – Cas – Infraction faisant encourir une peine n'autorisant pas le recours à la CRPC

Aucun texte n'envisageant la possibilité d'un recours du procureur de la République contre l'ordonnance d'homologation des peines proposées sur sa requête dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, un pourvoi en cassation contre une telle décision n'est possible que si son examen fait apparaître un risque d'excès de pouvoir relevant du contrôle de la Cour de cassation.

Commet un tel excès de pouvoir le juge délégué qui homologue une proposition de peines en répression de faits de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours par le conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité et par une personne agissant en état d'ivresse manifeste, faisant encourir au prévenu, en application des articles 222-11 et 222-12 du code pénal, une peine de sept ans d'emprisonnement alors qu'en application de l'article 495-7 du code de procédure pénale, sont exclus du champ d'application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité les délits d'atteintes volontaires et involontaires à l'intégrité des personnes et d'agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu'ils sont punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à cinq ans.

Le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Dieppe a formé un pourvoi contre l'ordonnance du juge délégué par le président dudit tribunal, en date du 10 juillet 2023, qui, dans la procédure suivie contre M. [U] [Z] du chef de violences aggravées, a homologué sa proposition de peine et a prononcé sur les intérêts civils.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. [U] [Z] a fait l'objet d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité du chef précité.

Examen de la recevabilité du pourvoi

3. Aucun texte n'envisageant la possibilité d'un recours du procureur de la République contre l'ordonnance d'homologation des peines proposées sur sa requête dans le cadre d'une procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, un pourvoi en cassation contre une telle décision n'est possible que si son examen fait apparaître un risque d'excès de pouvoir relevant du contrôle de la Cour de cassation.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Le moyen est pris d'un excès de pouvoir du juge délégué par le président du tribunal en ce que la décision attaquée a condamné M. [Z] pour des faits de violences aggravées réprimés par les articles 222-11 et 222-12 du code pénal d'une peine de sept ans d'emprisonnement alors que l'article 495-7 du code de procédure pénale exclut du champ d'application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité les délits d'atteintes volontaires à l'intégrité des personnes prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu'ils sont punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à cinq ans.

Réponse de la Cour

Vu l'article 495-7 du code de procédure pénale :

5. Il résulte de ce texte que sont exclus du champ d'application de la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité les délits d'atteintes volontaires et involontaires à l'intégrité des personnes et d'agressions sexuelles prévus aux articles 222-9 à 222-31-2 du code pénal lorsqu'ils sont punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée supérieure à cinq ans.

6. En homologuant une proposition de peines par la voie d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité en répression de faits de violences volontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à huit jours par le conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité et par une personne agissant en état d'ivresse manifeste, faisant encourir au prévenu, en application des articles 222-11 et 222-12 du code pénal, une peine de sept ans d'emprisonnement, le juge délégué a commis un excès de pouvoir.

7. Dès lors, l'ordonnance déférée doit être annulée.

Portée et conséquences de l'annulation

8. L'annulation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.

9. Il y a lieu de constater que, du fait de cette annulation, le ministère public recouvre sa faculté d'apprécier l'orientation à donner aux poursuites.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

ANNULE l'ordonnance susvisée du juge délégué par le président du tribunal judiciaire de Dieppe, en date du 10 juillet 2023 ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du tribunal judiciaire de Dieppe et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée.

Arrêt rendu en formation restreinte hors RNSM.

- Président : M. Bonnal - Rapporteur : Mme Chaline-Bellamy - Avocat général : M. Desportes -

Rapprochement(s) :

Sur l'ouverture du seul recours pour excès de pouvoir devant la Cour de cassation contre l'ordonnance de refus d'homologation des peines proposées par le procureur de la République : Crim., 30 mars 2021, pourvoi n° 20-86.358, Bull. crim. (irrecevabilité).

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