Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Numéro 1 - Janvier 2022

QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE

Crim., 7 janvier 2020, n° 19-82.011, (P)

QPC - Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

Perquisition – Code de procédure pénale – Article 56-1 – Article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen – Caractère sérieux – Défaut – Non-lieu à renvoi au Conseil constitutionnel

M. I... K... a présenté, par mémoire spécial reçu le 15 octobre 2019, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 31 janvier 2019, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prononcé sur une contestation élevée en matière de saisie effectuée dans le cabinet d'un avocat.

LA COUR,

La chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 56-1 du code de procédure pénale, en ce qu'elles prohibent tout recours contre la décision du juge des libertés et de la détention ordonnant que soient versées au dossier de la procédure les pièces saisies lors d'une perquisition au cabinet ou au domicile d'un avocat, à tout le moins en ce qu'elles n'autorisent aucun recours pour l'avocat concerné pour l'atteinte portée au secret professionnel dont il est le gardien, sont-elles contraires aux droits et libertés que la Constitution garantit, notamment à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui protège les droits de la défense et instaure une garantie des droits impliquant l'existence d'un recours effectif ? »

2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux dès lors que l'article 56-1 du code de procédure pénale ne saurait être regardé comme portant une atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction.

5. En effet, la perquisition dans le cabinet ou au domicile d'un avocat est exécutée par un magistrat à la suite d'une décision motivée indiquant la nature de l'infraction ou des infractions sur lesquelles portent les investigations ainsi que les raisons et l'objet de la mesure, le contenu de cette décision étant, dès le début de son exécution, communiqué au bâtonnier ou à son délégué dont l'assistance obligatoire à la perquisition se déroule ainsi en connaissance de cause.

6. La confidentialité des documents susceptibles d'être saisis est assurée par la circonstance que leur consultation est réservée au magistrat et au bâtonnier ou à son délégué, et que ce dernier peut s'opposer à la mesure envisagée, toute contestation à cet égard étant alors soumise au juge des libertés et de la détention.

7. Ne peuvent être saisis que des documents ou objets relatifs aux infractions mentionnées dans la décision de l'autorité judiciaire, sous réserve de ne pas porter atteinte à la libre défense.

8. Le juge des libertés et de la détention ne rend sa décision qu'au terme d'une procédure de contestation contradictoire et suspensive, et cette décision est elle-même susceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir devant la Cour de cassation.

9. Enfin, la décision de verser des pièces saisies au dossier de la procédure n'exclut pas la possibilité pour les parties de demander ultérieurement la nullité tant de la perquisition que de la saisie, ou encore de solliciter la restitution des pièces placées sous main de justice.

10. Compte tenu de l'ensemble de ces garanties, propres à sauvegarder le libre exercice de la profession d'avocat ainsi que le secret professionnel, il est sans emport que ne soit pas prévu un second degré de juridiction, principe qui n'a, selon le Conseil constitutionnel, pas valeur constitutionnelle (décisions n° 2012-243/244/245/246 QPC du 14 mai 2012 et n°2013-338/339 QPC du 13 septembre 2013, notamment).

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Barbier - Avocat général : Mme Bellone - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

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