Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Numéro 1 - Janvier 2022

MINEUR

Crim., 21 janvier 2020, n° 19-86.957, (P)

Rejet

Détention provisoire – Mineur devenu majeur – Débats – Publicité – Défaut – Portée

Il résulte de l'article 145 du code de procédure pénale que lorsque la personne mise en examen était mineure au moment des faits ou de l'un des faits, le débat devant le juge des libertés et de la détention en vue de son placement en détention provisoire se déroule et l'ordonnance est rendue en audience de cabinet.

L'intéressée ne saurait cependant se faire un grief de la violation du principe de publicité restreinte devant le juge des libertés et de la détention dès lors qu'elle était devenue majeure au moment du débat, d'une part, et que ni elle ni son avocat n'ont soulevé de contestation sur la publicité de l'audience, d'autre part.

REJET du pourvoi formé par M. G... J... contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 1ère section, en date du 29 octobre 2019, qui dans l'information suivie contre lui des chefs d'homicide volontaire aggravé, infractions à la législation sur les armes, association de malfaiteurs, vol, recel, destruction par incendie et détention de faux documents administratifs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.

LA COUR,

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. J..., né le [...], a été mis en examen pour des faits d'homicide volontaire concomitant à un autre crime, détention, acquisition, port et transport d'armes, éléments d'armes, munitions de catégorie B en réunion, association de malfaiteurs, vol en bande organisée, recel aggravé et destruction par incendie en bande organisée, commis en août 2018 alors qu'il était mineur.

3. Compte tenu des éléments retrouvés en sa possession au moment de son interpellation en octobre 2019, il a également été mis en examen des chefs de détention et d'acquisition non autorisée en réunion de matériel de guerre, arme, munition ou de leurs éléments de catégorie A, port et transport sans motif légitime de ces objets par au moins deux personnes et détention frauduleuse de plusieurs faux documents administratifs.

4. Après un débat contradictoire en audience publique, l'intéressé a été placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention du 18 octobre 2019, décision dont il a relevé appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen est pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 14 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, 145, 591 et 593 du code de procédure pénale.

6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré régulière l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. J... alors que la chambre de l'instruction, pour refuser de faire respecter le principe de publicité restreinte devant le juge des libertés et de la détention, ne pouvait, comme elle l'a fait, arguer que certains faits ayant donné lieu à sa mise en examen avaient été commis alors qu'il était majeur.

Réponse de la Cour

7. Il résulte de l'article 145 du code de procédure pénale que lorsque la personne mise en examen était mineure au moment des faits ou de l'un des faits, le débat devant le juge des libertés et de la détention en vue de son placement en détention provisoire se déroule et l'ordonnance est rendue en audience de cabinet.

8. Pour écarter le moyen de nullité de l'ordonnance de placement en détention provisoire tiré de la violation du principe de publicité restreinte devant le juge des libertés et de la détention alors que M. J... était mineur pour une partie des faits, l'arrêt énonce que l'intéressé est également mis en examen pour des faits commis alors qu'il était majeur.

9. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.

10. M. J... ne saurait cependant s'en faire un grief dès lors que, d'une part, il était majeur au moment du débat, d'autre part, ni lui ni son avocat n'ont soulevé devant le juge des libertés et de la détention de contestation sur la publicité de l'audience.

11. En conséquence, le moyen sera écarté.

12. L'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Barbier - Avocat général : M. Lemoine -

Textes visés :

Article 145 du code de procédure pénale.

Crim., 7 janvier 2020, n° 19-80.058, (P)

Cassation

Mineur de dix-huit ans – Casier judiciaire – Requête tendant à la suppression du casier judiciaire – Décision du tribunal pour enfants – Rééducation – Motivation – Défaut – Portée

Ne justifie pas sa décision le tribunal pour enfants qui, pour rejeter une requête tendant à la suppression du casier judiciaire d'une condamnation sur le fondement de l'article 770 du code de procédure pénale, se réfère « aux éléments du dossier » sans examiner, comme il y était invité, les éléments régulièrement produits par le requérant faisant valoir que sa rééducation apparaît acquise au sens du texte précité.

CASSATION du pourvoi formé par M. R... C..., contre le jugement du tribunal pour enfants d'Evry, en date du 23 novembre 2018, qui a rejeté sa requête en suppression du casier judiciaire de la fiche concernant la condamnation du chef de viol et violences aggravés, à deux ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis et mise à l'épreuve prononcée contre lui par le tribunal pour enfants le 8 décembre 2009.

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 770 du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code, défaut de motifs et manque de base légale, excès de pouvoir ;

en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de suppression du casier judiciaire de la fiche concernant la décision intervenue le 8 décembre 2009, formulée par M. R... C... ;

1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, le Tribunal pour enfants devait apprécier si les conditions de la suppression du casier judiciaire de M. C... de la fiche concernant la décision du 8 décembre 2009 le condamnant, étaient réunies et notamment si la rééducation de ce mineur apparaissait comme acquise et si le délai de trois ans à compter de ladite décision était accompli ; qu'en n'énonçant aucun motif de fait et en se bornant à rejeter la demande formulée par M. C... au regard des « éléments du dossier », sans précision ni aucune analyse, même succincte, de ces éléments, le tribunal pour enfants a violé les textes susvisés et excédé ses pouvoirs ;

2°) alors qu'à l'appui de la requête afin de suppression du casier judiciaire de la mention de la condamnation prononcée le 8 décembre 2009, en date du 24 mars 2018, il était fait spécialement état du comportement exemplaire du mineur depuis cette condamnation, du respect des obligations de la mise à l'épreuve, du parcours scolaire de l'intéressé, des diplômes obtenus et de l'emploi exercé par lui, démontrant que sa rééducation était acquise et qu'il remplissait toutes les conditions exigées par l'article 770 du code de procédure pénale ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces éléments de fait soumis à son appréciation, et en considérant qu'au regard des éléments du dossier, il y a lieu de rejeter la demande, le tribunal a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés.

Vu les articles 770 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que selon le premier de ces textes, lorsque, à la suite d'une décision prise à l'égard d'un mineur de dix-huit ans, la rééducation de l'intéressé apparaît comme acquise, le tribunal pour enfants peut, après l'expiration d'un délai de trois ans à compter de ladite décision et même si le mineur a atteint sa majorité, décider, à sa requête, à celle du ministère public ou d'office, la suppression du casier judiciaire de la fiche concernant la décision dont il s'agit ;

Attendu que selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure que M. C..., après avoir été condamné par le tribunal pour enfants le 8 décembre 2009, à la peine de deux ans d'emprisonnement, pour partie assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve, pour des faits de violences et de viol aggravés commis en novembre 2008 alors qu'il était âgé de 13 ans, a déposé une requête le 24 mai 2018, en vue de la suppression de son casier judiciaire de la fiche concernant cette condamnation ;

Attendu que le jugement énonce qu'au vu des éléments du dossier, il y a lieu de rejeter cette requête ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans examiner, comme il y était invité, les éléments produits par le requérant au soutien de sa requête faisant valoir qu'au vu de son parcours scolaire et de son insertion professionnelle, sa rééducation apparait acquise, le tribunal n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé du tribunal pour enfants d'Evry, en date du 23 novembre 2018, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal pour enfants d'Evry, autrement composé, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : Mme de Lamarzelle - Avocat général : M. Lemoine - Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan -

Textes visés :

Article 770 du code de procédure pénale.

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.