Numéro 1 - Janvier 2022

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Numéro 1 - Janvier 2022

ETRANGER

Crim., 22 janvier 2020, n° 19-84.160, (P)

Cassation

Entrée et séjour – Entrée et séjour irréguliers – Procédure de rétention administrative – Reconduite à la frontière – Soustraction – Constatation de l'infraction – Délai – Calcul – Portée

Il résulte des articles L551-1 et L552-7 du CESEDA qu'à l'expiration du délai initial de 48 heures, la rétention d'un étranger peut être prolongée, sous certaines conditions, d'un délai de vingt-huit jours puis, le cas échéant, d'un nouveau délai de quinze jours.

Le délai de rétention, dès lors qu'il est exprimé en jours, expire le dernier jour à vingt-quatre heures.

Doit être cassé l'arrêt qui relaxe un prévenu du chef de soustraction à l'obligation de quitter le territoire national en retenant qu'il n'existait plus de cadre légal légitimant une mesure de coercition pour la reconduite à la frontière d'une personne qui se trouvait en rétention administrative depuis le 13 juillet 2018 à 14 h 15, rétention prolongée successivement jusqu'au 27 août 2018, et qui avait été conduite à la passerelle d'embarquement le même jour, à 15 h 15.

CASSATION sur le pourvoi formé par le procureur général près la cour d'appel de Lyon a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 7e chambre, en date du 19 juin 2019, qui a relaxé M. K... Q... du chef de soustraction à l'obligation de quitter le territoire national ;

Un mémoire a été produit.

LA COUR,

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L 551-1 et L 624-1-1 du CESEDA, 641 et 642 du code de procédure civile et 591 du code de procédure pénale, violation de la loi et défaut de base légale ;

Vu les articles L551-1 et L552-7 du CESEDA,

Attendu qu'il résulte de ces textes qu'à l'expiration du délai initial de 48 heures, la rétention d'un étranger peut être prolongée, sous certaines conditions, d'un délai de vingt-huit jours puis, le cas échéant, d'un nouveau délai de quinze jours ;

Attendu qu'à l'expiration de ce délai initial de 48 heures, le délai de rétention, dès lors qu'il est exprimé en jours, expire le dernier jour à vingt-quatre heures ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que, le 13 juillet 2018, le préfet du Puy de Dôme a rendu un arrêté à l'encontre de M. Q... le contraignant à quitter sans délai le territoire français et a fixé à trois ans à compter de la notification de la décision, l'interdiction de retour sur le territoire national, que cet arrêté a été notifié à l'intéressé le même jour à 14h15 ; qu'à la même heure, M. Q... a été placé en rétention administrative, prolongée ultérieurement jusqu'au 27 août 2018 ; qu'à cette dernière date, et à 15h15, M. Q... a refusé d'embarquer dans l'avion qui devait procéder à son éloignement ;

Attendu que, pour confirmer le jugement, l'arrêt relève que les mesures de rétention concernant des étrangers se décomptent d'heure à heure, que, compte tenu du début de la mesure initiale de rétention à 14h15 le 13 juillet 2018, cette mesure expirait irrévocablement le 27 août à 14h15, et qu'en raison d'un retard dû à l'organisation des transports, ce n'est qu'à 15h15, le 27 août, que M. Q... a été amené à la passerelle d'embarquement à un moment où la mesure coercitive de rétention n'était plus effective ; qu'en conséquence, la mesure de rétention ayant pris fin une heure auparavant, il n'existait plus à 15h15 de cadre légal légitimant une mesure de coercition pour la reconduite à la frontière ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le dernier délai dont il était fait application était exprimé en jours, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de prononcer sur le premier moyen :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 19 juin 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Guéry - Avocat général : Mme Moracchini - Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez -

Textes visés :

Articles L551-1 et L552-7 du CESEDA.

Crim., 21 janvier 2020, n° 19-83.852, (P)

Rejet

Interdiction du territoire français – Interdiction temporaire du territoire français – Relèvement – Requête – Recevabilité – Conditions – Conditions remplies depuis le dépôt de la requête jusqu'à son examen – Nécessité

Les conditions de recevabilité de la demande en relèvement d'une interdiction du territoire énoncées à l'article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être remplies depuis le dépôt de la requête jusqu'au moment où celle-ci est examinée par la juridiction saisie.

REJET du pourvoi formé par M. Y... P... contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 30 janvier 2019, qui a déclaré irrecevable sa requête en relèvement d'une interdiction du territoire français.

LA COUR,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. Kwizera a été condamné, des chefs d'outrages, menaces de mort, apologie du terrorisme, exhibition sexuelle, vol et contrefaçon de chèque, notamment à dix mois d'emprisonnement et à une interdiction définitive du territoire français, par arrêt du 1er mars 2017 de la cour d'appel de Caen, devenu définitif.

3. Le 13 avril 2018, il a formé une requête en relèvement de l'interdiction du territoire français.

Examen du moyen

Exposé du moyen

4. Le moyen est pris de la violation de l'article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré la requête irrecevable, alors que le demandeur était détenu au moment où la cour d'appel l'a examinée, date à laquelle le respect des conditions de recevabilité doit être apprécié.

Réponse de la Cour

6. Pour déclarer la requête irrecevable, l'arrêt attaqué énonce, en substance, que le requérant était libre et résidait en France, sans être assigné à résidence, et que sa situation ne correspond donc à aucune des exceptions légales.

7. En l'état de ces seules énonciations, la cour d'appel a fait l'exacte application du texte visé au moyen.

8. En effet, les conditions de recevabilité de la demande en relèvement d'une interdiction du territoire énoncées à l'article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être remplies depuis le dépôt de la requête jusqu'au moment où celle-ci est examinée par la juridiction saisie.

9. Ainsi, le moyen doit être écarté.

10. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

- Président : M. Soulard - Rapporteur : M. Bonnal - Avocat général : Mme Caby -

Textes visés :

Article L. 541-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Rapprochement(s) :

Sur la recevabilité d'une demande de relèvement d'une interdiction du territoire français, sous l'empire de l'ordonnance du 2 novembre 1945, à rapprocher : Crim., 28 mars 2001, pourvoi n° 00-87.029, Bull. crim. 2001, n° 85 (rejet).

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