"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (Jean-Luc DUFOURNAUD, directeur de l’éthique et de la déontologie de la SNCF)

Actes de colloque

Cette manifestation, qui s'est déroulée le 30 juin 2017 et qui s’est inscrite dans une démarche concertée, tendait à favoriser l’émergence de solutions de consensus pour la mise en œuvre, jusque dans ses modalités les plus concrètes, des dispositions relatives aux obligations déontologiques des magistrats issues de la loi du 8 août 2016 modifiant l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. La déclaration d’intérêts du magistrat, l’entretien déontologique de ce dernier avec l’autorité à laquelle est remise la déclaration, ainsi que les suites et prolongements que les uns et les autres peuvent comporter étaient plus particulièrement concernés.

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Actes de colloque

"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (Jean-Luc DUFOURNAUD, directeur de l’éthique et de la déontologie de la SNCF)

Jean-Luc DUFOURNAUD, directeur de l’éthique et de la déontologie de la SNCF

Préambule

La vie en société implique naturellement que chaque personne ait des intérêts multiples et divers : professionnels, affectifs, familiaux, financiers, associatifs, culturels, sportifs, politiques, caritatifs, religieux, syndicaux, philosophiques… Les liens d’intérêts potentiels sont inhérents à toute vie sociale.

La direction de l’Ethique et de la Déontologie a sensibilisé les salariés du groupe SNCF sur le fait que ces différents intérêts pouvaient entrer en conflit avec leur activité professionnelle au moment où ils devaient prendre une décision, participer à une opération, conclure une convention en tant que représentant de SNCF, etc.

Cette sensibilisation vise par conséquent à aider ces salariés à prendre de bonnes décisions sur des bases objectives, à les protéger du risque pénal (notamment au regard des délits de prise illégale d’intérêts ou d’abus de bien social) et à préserver également l’image de SNCF et sa réputation.

Il est important de souligner que l’on parle de sensibilisation car il n’existe pas au sein du groupe SNCF de dispositif de déclaration préalable d’intérêts, sauf pour les cadres qui exercent par ailleurs une fonction de président ou directeur général d’une filiale de la SNCF (dès lors qu’elle a un chiffre d’affaires annuel supérieur à 10 millions d’euros) et qui doivent alors, en cette qualité de dirigeant d’une entreprise du secteur public (et non de salarié SNCF), établir une déclaration d’intérêts et de patrimoine au début et à la fin de leur mandat, en application de l’article 11 II 3° de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique créant la Haute Autorité pour la Transparence de la vie publique.

Cette sensibilisation s’est traduite concrètement par l’adoption en juin 2015 d’un guide pédagogique sur les conflits d’intérêts et par l’adoption d’un principe d’action n°5 dans la charte éthique du groupe SNCF (adoptée en novembre 2016) qui en compte 11.

Jean-Luc DUFOURNAUD

Directeur de l’Ethique et de la Déontologie SNCF

Ces documents ont pour objet :

  •     De définir ce qu’il faut entendre par conflit d’intérêts 

Il y a conflit d’intérêts lorsqu’un intérêt personnel (affectif, familial, financier, associatif, culturel, sportif, politique, caritatif, religieux, syndical, philosophique…) interfère avec ceux de SNCF et peut influencer ou paraître influencer la position ou la décision que le salarié est susceptible de prendre dans la cadre de son activité professionnelle.

Le conflit d’intérêts est donc caractérisé par le fait qu’une personne risque de perdre son indépendance intellectuelle ou son objectivité ou encore voir ses décisions remises en cause et se trouve ainsi fragilisée dans l’exercice de ses responsabilités professionnelles.

  •     De préciser de quels intérêts personnels il peut s’agir, à savoir :
  •     des intérêts familiaux : situation où des liens de nature familiale (conjoint, enfant, tout autre proche) vont interférer avec l’activité professionnelle ;
  •     des conflits de missions : situation où deux activités sont exercées par la même personne alors qu’elles peuvent entrer en conflit car défendant ou représentant des intérêts antagonistes ;
  •     des interventions pour son propre compte : situation où un salarié SNCF ou un de ses proches détient des intérêts personnels dans une entité qu’il peut avantager en raison de ses fonctions au sein de SNCF ;
  •     des cadeaux et invitations : cas où un salarié reçoit des dons, cadeaux, invitations de personnes avec lesquelles il se trouve en relation professionnelle, dont la nature, la valeur ou le caractère répété le met dans une situation d’obligé à l’égard de ces personnes. 

La nature des avantages est diverse, à savoir avantages pécuniaires bien sûr mais aussi non pécuniaires : obtention d’une autorisation, évitement d’une sanction, obtention d’une décoration, obtention d’une promotion pour soi-même ou une personne proche, obtention d’une faveur pour soi ou pour un proche, mise en place d’un lien juridique ou matériel dont on espère tirer ensuite avantage,..

 

  •     D’indiquer comment faire pour prévenir le risque de conflit d’intérêts 

Quatre séries de recommandations ont été formulées à cette fin, après un rappel préalable sur le fait qu’il est déterminant pour le salarié de se poser la question de savoir si la décision qu’il va prendre est ou non influencée, voire déterminée, par un intérêt autre que celui de SNCF. Il en va en effet de l’acceptabilité, de la crédibilité et de l’efficacité de cette décision.

Première recommandation : Identifier les conflits d’intérêts potentiels

L’identification des conflits d’intérêts potentiels est un élément clef pour en permettre l’anticipation et le traitement.

Les salariés SNCF sont donc invités à identifier en amont les conflits d’intérêts réels ou supposés. Cette phase doit leur permettre d’apprécier si en raison de leurs engagements externes ou de leurs relations, il existe ou non un risque que leur indépendance de jugement soit altérée, lorsqu’ils doivent prendre une décision pour le compte d’une entité du groupe.

C’est leur responsabilité.

Pour les aider dans cette recherche, neuf situations type de nature à influencer le comportement des salariés dans un sens pas nécessairement conforme à l’intérêt de SNCF, ont été décrites, à savoir :

  •      la détention d’intérêts pécuniaires ou non pécuniaires chez l’un des concurrents, fournisseurs, prestataires de SNCF ou d’intérêts dans des biens immobiliers donnés en location à SNCF ;
  •     l’acceptation d’une mission ou d’une fonction quelconque qui a des intérêts antagonistes à ceux qu’ils représentent ou défendent au sein de SNCF ;
  •     l’utilisation d’une entité quelconque de SNCF ou la Fondation SNCF à des fins différentes de son objet, notamment pour favoriser ou employer un proche ou allouer arbitrairement des ressources à des causes qui relèvent de leur engagement privé ;
  •     l’utilisation de leurs fonctions, leur expérience ou leur savoir-faire au sein de SNCF pour développer, au détriment de SNCF, une activité commerciale tirant partie de cette fonction, expérience ou savoir-faire ;
  •     la réception ou l’acceptation d’un cadeau, d’un voyage ou d’une invitation d’une valeur significative de la part d’un fournisseur, d’un partenaire ou d’un prestataire actuel ou potentiel ;
  •     la promotion d’un collaborateur auquel le salarié est lié au titre d’un des intérêts précités ;
  •     l’exercice d’une mission de membre du collège d’une autorité administrative indépendante, ou d’associé ou membre à quelque titre que ce soit d’un organisme de contrôle ou de certification qui serait amené à statuer sur un dossier concernant SNCF ;
  •     le fait d’être membre actif d’une association ou d’une organisation professionnelle qui est soutenue d’une manière quelconque par SNCF, situation permettant d’en tirer un ou des avantages personnels, soit au sein de cette association ou organisation, soit dans le cadre des fonctions SNCF,
  •     la détention d’un mandat électif local et la participation à des décisions concernant directement les intérêts de SNCF sur leur territoire d’élection.

Deuxième recommandation : Etre transparent

La transparence est fondamentale.

C’est la raison pour laquelle, dès lors qu’un risque de conflit d’intérêts est identifié, il est demandé au salarié de faire connaître spontanément ce risque à son supérieur hiérarchique et de solliciter son avis avant de prendre une décision ou d’agir, même s’il a le sentiment que le seul intérêt qui le guidera sera celui de SNCF.

Ce comportement responsable est encouragé car il est rappelé qu’agir ou prendre une décision dans un contexte de suspicion de conflits d’intérêts suscitera en tout état de cause, dès lors que cette situation viendra à être connue, des doutes (même infondés) de l’entourage professionnel du salarié concerné, de es fournisseurs, de ses clients ou de toute autre partie prenante et portera atteinte à sa réputation, à son autorité et à sa crédibilité.

Troisième recommandation : Solliciter le directeur de l’Ethique et de la Déontologie

Si le supérieur hiérarchique dont l’avis est demandé sur une situation potentielle de conflit d’intérêts a lui-même un doute persistant, ou si le salarié n’obtient pas une position claire de ce dernier sur cette situation, il doit alors saisir le directeur Éthique et Déontologie de SNCF.

Après entretien déontologique avec le salarié dûment formalisé, le directeur de l’Ethique et de la déontologie pourra :

  •     autoriser la prise de décision ou l’engagement de l’opération envisagée ;
  •     demander au salarié de s’abstenir et de recourir à un autre responsable de SNCF qui prendra la décision en ses lieux et places ;
  •     enjoindre au salarié de renoncer à la décision ou à l’engagement de l’opération ;
  •     recommander toutes autres mesures adéquates en fonction de la situation.

Un attachement de la décision ainsi prise sera alors effectué

Quatrième recommandation : Être exemplaire aux yeux des collaborateurs

Il est plus particulièrement recommandé aux cadres dirigeants et supérieurs dont les décisions et actions ont valeur d’exemple aux yeux des salariés placés sous leur responsabilité :

  •     d’organiser, dans leur champ respectif de responsabilité, une réflexion en interne sur la question des conflits d’intérêts ;
  •     d’inviter leurs collaborateurs à faire remonter systématiquement toute question sur le sujet dès lors qu’ils auraient un doute sur un risque de conflit d’intérêts pour eux-mêmes, comme pour leurs propres collaborateurs ;
  •     d’éviter enfin de les placer vous-même dans une situation potentielle de conflit d’intérêts.

Par ailleurs, les cadres dirigeants qui prennent une décision dont ils pourraient être ultérieurement suspectés qu’ils étaient en conflit d’intérêts ont la faculté de faire une déclaration auprès du directeur de l’Ethique et de la Déontologie, laquelle est consignée par ce dernier afin d’être produite, le cas échéant, en cas de litige.

 

Afin d’aider les salariés dans l’appréciation de ces situations, la direction de l’Ethique et de la Déontologie a mis en place un dispositif de conseil et d’appui appelé la Ligne Ethique caractérisée par une adresse postale et électronique (ligneethique@sncf.fr) dédiée et par une ligne téléphonique spécifique.

 A noter enfin que les salariés dont il serait établi qu’ils ont recherché un intérêt personnel quelconque à l’occasion de leur activité professionnelle encourent, indépendamment de poursuites judiciaires éventuelles, des sanctions disciplinaires sur le fondement d’un référentiel de l’entreprise (qui a valeur de règlement intérieur), relatif aux principes de comportement des personnels SNCF.

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