"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (Jacques BEAUME, procureur général honoraire près la cour d’appel de Lyon, ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature, membre du service d’aide de veille déontologique du Conseil supérieur de la magistrature)

Actes de colloque

Cette manifestation, qui s'est déroulée le 30 juin 2017 et qui s’est inscrite dans une démarche concertée, tendait à favoriser l’émergence de solutions de consensus pour la mise en œuvre, jusque dans ses modalités les plus concrètes, des dispositions relatives aux obligations déontologiques des magistrats issues de la loi du 8 août 2016 modifiant l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. La déclaration d’intérêts du magistrat, l’entretien déontologique de ce dernier avec l’autorité à laquelle est remise la déclaration, ainsi que les suites et prolongements que les uns et les autres peuvent comporter étaient plus particulièrement concernés.

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Actes de colloque

"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (Jacques BEAUME, procureur général honoraire près la cour d’appel de Lyon, ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature, membre du service d’aide de veille déontologique du Conseil supérieur de la magistrature)

Jacques BEAUME, procureur général honoraire près la cour d’appel de Lyon, ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature, membre du service d’aide de veille déontologique du Conseil supérieur de la magistrature

Merci à tous, merci monsieur le président, merci monsieur le procureur général. Je m’exprime ici à titre parfaitement personnel, en tant que membre de la cellule de veille déontologique que le Conseil supérieur de la magistrature a mis en place il y a exactement une année , mais évidemment ni au nom de toute la cellule, encore moins au nom du Conseil supérieur .

Nous sommes, dans la cellule, trois anciens membres du Conseil supérieur de la magistrature :

- Un ancien membre commun,

- un ancien premier président de cour d’appel,

- et moi-même, ancien procureur, membre de la formation « parquetière » du Conseil supérieur de la magistrature.

Nous sommes toujours à disposition par l’intermédiaire de la boîte à lettre mail dédiée du Conseil supérieur de la magistrature et nous pouvons répondre dans des délais extrêmement courts à des sollicitations individuelles d’un magistrat. Cela vise n’importe quel magistrat y compris les chefs de juridiction pour les questions propres à ces derniers . Réactivité, confidentialité absolue, absence de tout formalisme, aide à la réflexion hors de tout champ hiérarchique caractérisent notre forme d’action .

Concernant l’activité du service d’aide et de veille déontologique, en une année de fonction, cinquante-trois dossiers ont été traités, cela représente donc un dossier par semaine avec parfois une concentration de quatre ou cinq dossiers dans une semaine mais parfois quinze jours ou trois semaines sans aucune saisine.

Le corps judiciaire est assez bien représenté puisqu’on observe que parmi les saisines :

  •     trente-huit sollicitations émanaient de tribunaux de grande instance,
  •     six sollicitations émanaient de tribunaux d’instance,
  •     six sollicitations émanaient de cours d’appel,
  •     deux sollicitations émanaient de la Cour de cassation,
  •     une sollicitation émanait d’un magistrat détaché,
  •     quarante-cinq sollicitations émanaient de magistrats du siège,
  •     sept sollicitations émanaient de magistrats du parquet : cela s’explique par le fait, non pas que les magistrats du parquet soient plus vertueux ou moins exposés aux problèmes déontologiques que leurs collègues du siège, mais par le fait que l’indivisibilité du parquet permet de résoudre beaucoup de problèmes d’impartialité d’un magistrat du ministère public confronté à une difficulté puisqu’il peut être remplacé sans aucun formalisme par un autre magistrat du parquet alors que pour les magistrats du siège, la notion de juge naturel rend nécessaires des procédures beaucoup plus complexes pour respecter cette impartialité,
  •     sept sollicitations émanaient de présidents de juridictions,
  •     une sollicitation émanait d’un procureur,
  •     deux sollicitations émanaient de procureurs généraux,
  •     trois sollicitations émanaient de premiers présidents de cour d’appel.

 

On observe donc un échantillon relativement représentatif de la magistrature qui nous a saisi de problèmes d’ordre déontologique.

Par ailleurs, on remarque que 70% des saisines relèvent de près ou de loin des rapports entre la vie privée et la vie professionnelle. Les exemples que je prendrai confirmeront cette prééminence des questions d’ordre privé .

Il convient également de souligner que nous sommes de plus en plus souvent saisis de la question du rapport entre l’indépendance juridictionnelle du magistrat et le pouvoir d’organisation des juridictions, y compris par des magistrats du parquet, confrontés à un conflit de loyauté entre le principe hiérarchique et la conscience personnelle qu’ils peuvent éprouver et qui les amène à se sentir dans l’incapacité de faire tel ou tel acte qui leur est demandé.

Concernant la loi nouvelle d’août 2016, il est important de souligner que sur les cinquante-trois saisines que nous avons eues à traiter, il y en a très peu, voire aucune, qui concerne les huit cas de l’article 7-2. En réalité la déclaration d’intérêts ne constitue qu’une petite partie du problème déontologique qui se pose aux magistrats. On peut seulement retrouver deux cas qui peuvent être assez proches des diverses définitions de l’article 7-2 :

  •     Le premier cas était celui d’un magistrat qui avait saisi le service d’aide et de veille déontologique du CSM de la question de sa participation permanente au conseil de direction d’une université. La question était celle de l’indépendance du magistrat du siège, car lorsque le président de la juridiction en question émettait un avis , c’était évidemment en quelque sorte un avis judiciaire, avec toute l’autorité qui s’y attache, et en conséquence, la question des limites dans lesquelles le magistrat bénéficiait de sa liberté pour s’exprimer devant ce conseil d’administration se posait.
  •     Le second cas que l’on peut évoquer, c’est celui d’un magistrat qui avait été contacté pour faire partie d’un organisme déontologique dans un organe de presse. La question était de savoir s’il était possible de participer de manière institutionnelle à un organe de presse, alors même que des procédures pénales ou civiles pouvaient échoir à sa juridiction .

 

Pour le reste, très peu de cas se rattachent directement aux cas prévus par la loi. On peut néanmoins tenter quelques rapprochements de manière un peu artificielle . Pour ma part, j’ai tendance à considérer cette loi, restrictivement centrée sur le conflit d’intérêt, comme l’amorce, ou plus exactement, l’occasion utile d’une réflexion beaucoup plus générale et beaucoup plus accentuée sur l’ensemble des questions déontologiques qui se posent dans la magistrature .

Quelques cas de rapprochement avec les définitions de l’article 7.2 :

Des questions de compatibilité avec d’autres fonctions  : Les cas les plus proches des définitions de la loi concernent les magistrats intégrés, confrontés à leurs anciennes fonctions ou leurs anciennes attaches professionnelles . Par exemple, un avocat intégré, nommé juge des libertés et de la détention, pourra-t-il statuer sur les internements alors que, dans sa vie antérieure, il était l’avocat de l’établissement de santé de son ressort ?

Des questions relatives aux intérêts patrimoniaux, telles que :

- Un magistrat peut-il acheter le bien d’un failli à la barre de son tribunal ?

- Un magistrat peut-il aujourd’hui faire commerce de son appartement sur internet par le biais des divers réseaux collaboratifs que nous connaissons ?

- Un magistrat peut-il continuer à être porteur unique de parts d’une SCI qui loue un bâtiment à une société d’avocats qui plaident régulièrement devant sa juridiction ?

Voilà des exemples de questions qui ont été posées à la cellule de veille déontologique du CSM et qui peuvent entrer dans le champ des éventuels conflits d’intérêts patrimoniaux.

Toutes les questions liées au réseau relationnel ou au réseau affectif du magistrat. C’est très fréquent et plusieurs domaines recouvrent ces questions :

  •     Le premier domaine c’est le problème des conjoints en juridiction mais aussi des relations plus informelles, voire clandestines, au sein des juridictions et qui finissent par se savoir. La question peut alors se poser pour le magistrat de savoir comment se comporter dans sa juridiction lorsque l’on commence à savoir qu’il y a quelques relations personnelles qui peuvent apparaître au justiciable comme une connivence ou une partialité .
  •     Le deuxième grand domaine, c’est lorsqu’un proche subit un accident judiciaire important :Toute la question est alors celle de savoir quel comportement le magistrat doit adopter dans sa juridiction dès lors qu’un très proche fait l’objet d’une enquête pénale importante, parfois dans son propre ressort. Doit-il alors prendre l’initiative de provoquer un dépaysement ? A la limite, si ce lien de proximité n’est pas connu, personne ne demandera le dépaysement : il est donc légitime pour un magistrat de s’interroger sur le point de savoir s’il doit dévoiler ce lien qui relève de l’intimité en prenant l’initiative de cette procédure.
  •     Toujours en matière pénale, peut se poser la question de savoir si un magistrat peut continuer à poursuivre, à instruire ou à juger dans des domaines où la personne dont il est proche est mise en cause. Un magistrat peut effectivement se demander s’il est subjectivement impartial lorsqu’il est chargé, en tant que magistrat pénaliste, de la poursuite, de l’instruction ou du jugement d’affaires similaires à celle par laquelle son proche est concerné. Ensuite, nous avons le cas des réseaux relationnels au sein des juridictions :Le problème peut d’abord être celui de la proximité avec les avocats. Quelle décision pour un juge aux affaires familiale qui rencontrerait, dans un dossier, un avocat avec qui il entretient des liens d’amitié ou d’affection durable. Beaucoup de questions de cette nature peuvent ainsi se poser, soit de manière strictement ponctuelle dans un dossier individuel, mais aussi de manière plus institutionnelle tant il est vrai qu’ un magistrat peut être proche de tel cabinet d’avocats par sa parenté, par la camaraderie d’université ou encore par ses liens familiaux. Le magistrat peut ainsi se poser la question de savoir comment se comporter face à un tel risque de partialité au moins objective (signalement au président ? Aux parties ? Déport ?...).

    Le problème peut être aussi tout le réseau relationnel des magistrats parquetiers et plus globalement pénalistes avec des membres de la police judiciaire de leur ressort (mariage, concubinage, amitiés...) . Lorsque l’on est, par fonction, le contrôleur de la police judiciaire, peut-on entretenir des liens intimes avec un membre de la police et si tel est le cas, dans quelles conditions le magistrat peut-il continuer à exercer sans que la procédure ne soit moralement, mais surtout juridiquement mise en péril par la proximité que l’on est susceptible d’imputer au magistrat.

Les questions liées aux magistrats confrontés à une procédure judiciaire : Ici, le magistrat est placé dans le conflit d’intérêts avec sa propre institution. Comment peut-il se défendre face à une constitution de partie civile? Jusqu’où à t-il le droit d’aller dans l’exploitation de sa connaissance de l’institution ou de ses membres ? Quel type d’argument est—il loyalement en droit d’ utiliser ? Doit-il dire simplement qu’il est magistrat ou le taire ? Quand c’est es qualité que la constitution de partie civile est intervenue, il n’y a aucune difficulté, le magistrat chargé de la procédure le saura mais parfois c’est une constitution de partie civile « privée ». La question se pose alors de savoir si le magistrat doit cacher ou révéler au magistrat chargé de la procédure sa fonction en sachant très bien que le simple énoncé de la profession peut constituer une atteinte à la sérénité du débat voire créer une situation d’inégalité avec l’autre partie. Cela met le magistrat poursuivi comme le magistrat saisi dans une situation particulièrement délicate. La question peut aussi se poser de savoir si le magistrat doit avoir recours obligatoirement à un avocat, même dans les situations où la représentation n’est pas obligatoire pour créer un écran et ainsi éviter l’interférence directe entre sa profession et l’institution judiciaire ou s’il peut se défendre seul ?

Finalement, les situations les plus problématiques sont celles dans lesquelles des poursuites pénales sont engagées à l’encontre d’un magistrat. Il s’agit de situations extrêmement traumatisantes pour un magistrat qui sent bien que son droit de citoyen c’est d’avoir tous les droits du prévenu mais que sa situation privilégiée au sein de l’institution le met dans une situation de conflit d’intérêts quasiment systématique dans le cadre des procédures dont il fait l’objet.

Enfin, les questions liées aux engagements personnels des magistrats : La cellule de veille déontologique du CSM a été très peu saisie d’engagements associatifs, de manière très anecdotique dans des cas sans intérêt significatif . La loi exclut de la déclaration d’intérêts le champ politique, syndical, religieux et philosophique. Mais la cellule de veille déontologique du CSM a quand même été saisie trois fois de questions significatives en matière politique. Ainsi, par exemple :

  •     Un magistrat peut-il figurer es qualités (ou en photo...) dans les tracts de soutien à un candidat aux élections législatives ?
  •     Un magistrat instructeur de province a saisi le service d’aide et de veille déontologique du CSM car il était chargé d’une affaire financière importante concernant un certain parti politique et avait dans le même temps été contacté par un parti politique adverse pour être candidat député. Bien sûr il ne s’agissait pas d’être député dans son ressort, la loi était respectée, mais la question s’est quand même posée.
  •     Un président de juridiction a saisi la cellule de veille déontologique du CSM afin de savoir s’il est normal, qu’un de ses magistrats soit candidat aux élections législatives (dans un ressort tout proche) et fasse état systématiquement dans tous les débats publics de sa qualité de magistrat, à tel point que le président était saisi de deux récriminations de justiciables qui avaient des dossiers pendants devant la chambre où officiait ce magistrat. Les justiciables estimaient qu’il n’était pas impartial dans la mesure où il affichait clairement des opinions politiques opposées aux leurs.

On remarque donc que le champ politique qui est exclu par principe de l’article 7.2 pose quand même des questions déontologiques.

Pour conclure, je vais évoquer quatre idées :

• La première, c’est la différence entre l’impartialité et le conflit d’intérêts. Le conflit d’intérêts n’est qu’une petite partie de la grande question de l’impartialité des magistrats. Il faut être clair, dans les exemples donnés, qui sont des vrais exemples de difficultés déontologiques que rencontrent les magistrats, il y a très peu de cas qui auraient pu être traités au titre de l’article 7.2 alors qu’ils entraient notoirement dans le champ du questionnement idéologique . S’il est vrai que tous les conflits d’intérêts relevant de l’article 7.2 sont des risques d’atteinte à l’impartialité, l’inverse n’est pas vrai, les questions déontologiques auxquelles les magistrats sont confrontés vont bien au-delà du champ de la loi. De sorte qu’il ne faudrait pas que, par un effet pervers de la « légalisation » du conflit d’intérêt, le magistrat qui en aura rempli toutes les obligations, perde de vue que ce respect n’épuise pas, et de loin, ses obligations déontologiques relevant du champ bien plus vaste de l’impartialité .

• La deuxième idée concerne l’entretien déontologique. Le service d’aide et de veille déontologique du CSM été absolument frappé par la solitude des magistrats confrontés à une question déontologique. Il est très difficile pour un magistrat de se confronter à quelqu’un d’autre pour parler de son problème car, dans son for intérieur, il ressent, au-delà du caractère intime de la situation, comme un « péché » contre sa profession de se trouver simplement placé dans une situation de conflit . De sorte que, « fautif », il n’ose plus en parler avec quiconque, encore moins avec un membre de sa hiérarchie . D’où l’importance d’inscrire très clairement dans la loi qu’il puisse y avoir un espace ( au début obligatoire, petit à petit intégré, espérons-le, dans la vie professionnelle normale) pour un entretien déontologique qui intervienne AVANT et EN DEHORS de la survenance d’un problème déontologique concret.

A cet égard, je suis d’avis qu’il est indispensable que l’entretien déontologique soit beaucoup plus général que l’entretien strict sur les 8 cas prévus à l’article 7-2. L’entretien déontologique est un moment d’alerte fondamental, un moment de déblocage de la pensée, un moment de confrontation des comportements professionnels absolument nécessaire pour inciter le magistrat à en parler à un moment évidemment beaucoup plus libre puisqu’il n’y a pas (encore ou pas du tout) de problème déontologique . Pour le reste, la notion d’entretien unique semble tout à fait insuffisante, nous pensons qu’il faut que les chefs de juridiction, premiers niveaux opérationnels de veille déontologique, soient ouverts à d’éventuels entretiens supplémentaires lorsque survient une question déontologique au sein de la juridiction.

• La troisième idée, c’est l’importance de la confidentialité : nous l’avons ressenti avec beaucoup d’intensité . Si à travers les 8 cas de l’article 7.2 (appartient-on à telle association, quelle autre activité lucrative ou non exerçons-nous ?...) on atteint peu la sphère proprement intime (sauf peut-être par la profession du conjoint), on a vu à l’inverse que les cas soumis relevaient très souvent de la sphère intime : la conjugalité, la filiation, les amitiés, les fréquentations, les engagements personnels, les liens patrimoniaux … qui tous, en raison même de leur intimité ont à voir avec la « vraie » impartialité subjective. C’est pourquoi il faut que cet entretien se passe dans un climat de confiance absolue, avec l’assurance d’une discrétion définitive. Il faut en conséquence que les chefs de juridiction s’équipent pour qu’ils ne soient pas uniquement chef de juridiction dans le cadre de ces entretiens . Il faut qu’il y ait, sans connivence ni perte de lucidité, une forme d’empathie. Dans le cadre de cet entretien, ils doivent être, sans oblitérer leur rôle hiérarchique, des informateurs, des allumeurs d’alerte, des conseilleurs ou des orienteurs de la réflexion déontologique (à la fois personnelle et permanente) du magistrat qui doit ressentir qu’il s’agit d’un moment de renfort à sa propre réflexion . C’est pourquoi, il faudra également faire attention aux délégations. Certes l’entretien n’est pas intuitu persone mais ès qualité . Mais se confier à son chef de juridiction, ce n’est pas la même chose que de se confier à un collègue même d’un grade hiérarchique supérieur. Il faudra vraiment que la taille de la juridiction soit parfaitement légitime pour que ce genre de confidence puisse être donnée à un pair et non pas à un « père ».

• La dernière idée est celle du rôle des chefs de juridiction : En principe, la cellule de veille déontologique ne peut pas être saisie par un magistrat (même s’il est chef de juridiction ou de cour) d’un cas concernant un autre magistrat. Or, un des rôles fondamentaux confié aux chefs de juridiction par tout le corps de doctrine du CSM et implicitement par les grands textes nationaux ou européens relatifs à l’organisation judiciaire, c’est un rôle de veille déontologique (qui comporte du reste un volet de protection du magistrat contre les mises en cause injustifiées) . Il était donc difficile de dire à un chef de juridiction qui saisissait le service d’aide et de veille déontologique du CSM, pour exposer la difficulté qu’il rencontre dans sa juridiction et qui sollicite des conseils sur la manière d’y réagir, que nous n’étions pas compétents. En réalité, il nous est apparu que la cellule de veille déontologique pouvait être compétente. Car il y a, en quelque sorte deux déontologies conjointes, celle du collègue qui fait ceci ou cela et la déontologie du chef de juridiction qui se doit, en vertu de son obligation légale de veille déontologique, d’avoir, pour le magistrat d’une part, et pour l’institution, d’autre part, une réaction appropriée à la situation qu’il rencontre. Par ailleurs, l’une des meilleures préventions contre les problèmes déontologiques c’est l’utilisation pertinente des textes qui organisent le déport, le dessaisissement, la suspicion légitime et autres exceptions au juge naturel. Or l’autorité en charge de mettre en œuvre ces textes, ce sont bien le chef de juridiction et de cour.

C’est pourquoi, le service d’aide et de veille déontologique a toujours vérifié que le magistrat qui le saisissait d’une question déontologique en avait parallèlement parlé à son propre chef de juridiction ou de cour, tant il est vrai que la déontologie judiciaire c’est la déontologie de l’institution à travers celle du magistrat concerné . C’est pourquoi, s’il ne l’avait pas déjà fait (comme du reste très souvent), nous avons toujours veillé à inciter le magistrat à rencontrer son chef de juridiction et(ou) de cour. (Quasiment) aucune question déontologique ne saurait être résolue dans la solitude, sans un minimum de transparence avec le chef de juridiction et(ou) de cour .

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