"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (II – la responsabilité des présidents de TGI à l’égard de la communauté des magistrats de sa juridiction)

Actes de colloque

Cette manifestation, qui s'est déroulée le 30 juin 2017 et qui s’est inscrite dans une démarche concertée, tendait à favoriser l’émergence de solutions de consensus pour la mise en œuvre, jusque dans ses modalités les plus concrètes, des dispositions relatives aux obligations déontologiques des magistrats issues de la loi du 8 août 2016 modifiant l’ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature. La déclaration d’intérêts du magistrat, l’entretien déontologique de ce dernier avec l’autorité à laquelle est remise la déclaration, ainsi que les suites et prolongements que les uns et les autres peuvent comporter étaient plus particulièrement concernés.

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Actes de colloque

"La déontologie des magistrats de l’ordre judiciaire - La déclaration d’intérêts" (II – la responsabilité des présidents de TGI à l’égard de la communauté des magistrats de sa juridiction)

II – la responsabilité des présidents de TGI à l’égard de la communauté des magistrats de sa juridiction

Les incidences de la déclaration :

Par la remise de la déclaration d’intérêts faite sous double pli cacheté qu’il appartient au chef de juridiction de décacheter lors de l’entretien déontologique, sont portés à la connaissance du chef de juridiction des éléments relatifs à de possibles conflits d’intérêts.

Quelles conséquences doit-il en tirer concernant l’organisation des services ? La lecture des débats parlementaires permet de constater que le chef de juridiction est invité à organiser les services ou la distribution des dossiers en fonction de ces éléments ( Cf rapport de la commission des lois N° 119 déposé le 28 octobre 2015 page 116) .

Il est certain que le principe de précaution va s’imposer à lui. Et, sans attendre une demande de déport, le chef de juridiction va tenter d’anticiper les difficultés.

Il peut organiser les services mais il n’a pas connaissance de situations ponctuelles surgissant à l’occasion d’une affaire particulière. Il faut rappeler que l’obligation d’impartialité est une obligation personnelle du magistrat et qu’elle est la meilleure garantie du principe d’impartialité.

Par ailleurs, même informé de liens d’intérêts et animé d’une volonté de prévenir tout conflit, quelle organisation pourra t-il envisager concernant son unique juge d’instance dont l’époux est huissier de justice ou directeur de l’office d’HLM ? Ou concernant son seul juge d’instruction dont le concubin est officier de police judiciaire ?

La difficulté sera réelle pour organiser le service d’un magistrat à titre temporaire dont l’activité professionnelle antérieure a pu être riche et auquel l’article 41-14 de l’ordonnance statutaire permet d’exercer une activité professionnelle concomitamment à ses fonctions judiciaires « sous réserve que cette activité ne soit pas de nature à porter atteinte à la dignité de la fonction et à son indépendance » alors que les services que l’on peut leur confier sont limités.

Les incidences de la déclaration et de la connaissance qu’en aura le président de juridiction sont extrêmement complexes en matière d’organisation, de management et de dialogue en ce que l’impératif de confidentialité se heurte au souci constant d’un chef de juridiction d’élaborer des organisations dans la transparence et le dialogue. En effet, les organisations de service sont soumises à l’assemblée générale des magistrats. Le chef de juridiction va donc devoir expliquer devant l’ensemble des magistrats qu’il modifie les attributions de tel collègue mais sans pouvoir en dévoiler les raisons ( du fait de la stricte confidentialité attachée à la déclaration d’intérêts) et donc sans pouvoir argumenter son choix.

Comment expliquer que finalement tel magistrat initialement prévu sur un procès de plusieurs mois impliquant une multinationale ne pourra pas siéger car il est détenteur de participations financières directes dans cette société ?

Comment faire pour le chef de juridiction pour que cette décision ne soit pas interprétée par les autres magistrats comme une sanction injustifiée à l’égard du magistrat déchargé ou au contraire comme une mesure de faveur tout aussi injustifiée ?

Les difficultés se trouvent majorées pour le nouveau chef de juridiction qui arrive, doit organiser les services sans avoir eu le temps d’aller consulter les déclarations faites par ses magistrats. Son prédécesseur s’est bien sur interdit de conserver une quelconque copie des déclarations et a peut être quitté la juridiction depuis plusieurs mois. Aucun « passage de relai » ne peut donc être fait.

Par ailleurs, comme l’a rappelé le CSM, le chef de juridiction est le premier garant de la protection des magistrats et à ce titre, une levée de confidentialité pourrait être souhaitée par le magistrat concerné lui même, notamment à l’occasion d’une mise en cause médiatique. Les textes ne le prévoient pas.

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