Arrêt n° 857 du 4 octobre 2018 (17-23.190) - Cour de cassation - Troisième chambre civile
- ECLI:FR:CCASS:2018:C300857
Construction immobilière
Cassation partielle
Sommaires :
1 - Ayant relevé que l’expert avait répondu aux maîtres de l’ouvrage, qui tentaient de rattacher une quatrième et nouvelle microfissure à celles constatées précédemment, que, techniquement, si ces fissures avaient toutes eu la même origine, la nouvelle aurait modifié les existantes, ce qui n’était pas le cas, une cour d’appel peut en déduire que la quatrième microfissure, qui procède d’une causalité différente de celle des trois autres fissures et qui a été constatée plus de dix ans après la réception de l’ouvrage, ne peut s’analyser en un désordre évolutif.
2 - Viole l’article 4 du code civil une cour d’appel qui refuse d’évaluer le montant d’un dommage dont elle constate l’existence en son principe.
Demandeur (s) : M. Philippe X... ; et autre
Défendeur (s) : M. Francis Z... ; et autres
Attendu, selon l’arrêt attaqué
(Aix-en-Provence, 23 mars 2017), que M. et Mme Z... ont vendu à M. X...
et Mme Y... (les consorts X...-Y...) une villa avec piscine, qu’ils
avaient fait construire ; que les lots gros oeuvre, maçonnerie,
charpente et couverture avaient été confiés à M. B..., assuré auprès de
la société Axa France ; que la réception des travaux a été prononcée
sans réserve le 3 mars 1998 ; qu’ayant constaté la présence de fissures,
les consorts X...-Y... ont, après expertise, assigné M. et Mme Z...,
M. B... et la société Axa France en indemnisation de leurs préjudices ;
Sur le second moyen :
Attendu que les consorts X...-Y... font
grief à l’arrêt de juger prescrite leur demande concernant la quatrième
fissure, alors, selon le moyen, que le désordre évolutif est celui
qui, né après l’expiration du délai décennal trouve son siège dans
l’ouvrage où un désordre de même nature a été constaté présentant le
caractère de gravité requis par l’article 1792 du code civil et ayant
fait l’objet d’une demande en réparation en justice pendant le délai
décennal ; que pour juger prescrite l’action des consorts X...-Y... au
titre de la quatrième fissure, la cour d’appel a retenu qu’il n’avait
pas un caractère évolutif ; qu’en statuant ainsi, alors que cette
fissure trouvait son siège dans l’ouvrage où d’autres fissures de même
nature et d’ordre décennal avaient été constatées et avait fait l’objet
d’une demande de réparation dans les dix ans à compter de la réception,
la cour d’appel a violé l’article 1792 du code civil ;
Mais
attendu qu’ayant relevé que l’expert avait répondu aux consorts
X...-Y..., qui tentaient de rattacher la quatrième et nouvelle
microfissure à celles constatées précédemment, que, techniquement, si
ces fissures avaient toutes eu la même origine, la nouvelle aurait
modifié les existantes, ce qui n’était pas le cas, la cour d’appel a pu
en déduire que cette quatrième microfissure, qui procédait d’une
causalité différente de celle des trois autres fissures et qui avait été
constatée pour la première fois le 10 mars 2009, ne pouvait s’analyser
en un désordre évolutif ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l’article 4 du code civil ;
Attendu que, pour rejeter les demandes
formées par les consorts X...-Y... au titre des fissures affectant le
mur pignon ouest, l’arrêt retient que seules sont recevables les
demandes au titre des fissures affectant le mur pignon ouest, à
l’exception de la quatrième fissure, mais que ces demandes ne peuvent
prospérer, faute pour les consorts X...-Y... de justifier du montant des
travaux de reprise les concernant spécifiquement, l’expert judiciaire
s’étant borné à indiquer que les fissures de la façade ouest devaient
être reprises obligatoirement dans le poste de la confortation des
fondations du mur ouest ;
Qu’en statuant ainsi, en refusant d’évaluer le montant d’un dommage dont elle constatait l’existence en son principe, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce
qu’il rejette les demandes formées par les consorts X...-Y... au titre
des fissures affectant le mur pignon ouest à l’exception de la demande
concernant la quatrième fissure, jugée prescrite, l’arrêt rendu le 23
mars 2017, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ;
remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état
où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les
renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Président : M. Chauvin
Rapporteur : M. Pronier
Avocat général : M. Kapella
Avocat(s) : Me Le Prado - SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer
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