Arrêt n°631 du 21 octobre 2020 (19-12.644) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2020:C100631
AvocatRejet
Sommaire :
Selon l’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, les litiges nés à l’occasion d’un contrat de collaboration libérale sont, en l’absence de conciliation, soumis à l’arbitrage du bâtonnier, à charge d’appel devant la cour d’appel. L’article 144 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 précise que les parties peuvent, à tous les stades de la procédure, être assistées par un avocat. En application de l’article 16 du même décret, le recours devant la cour d’appel est instruit et jugé selon les règles applicables en matière contentieuse à la procédure sans représentation obligatoire. Enfin, aux termes de l’article 931 du code de procédure civile, les parties se défendent elles-mêmes, elles ont la faculté de se faire assister ou représenter selon les règles applicables devant la juridiction dont émane le jugement, et le représentant doit, s’il n’est avocat, justifier d’un pouvoir spécial.
Il résulte de la combinaison de ces textes que, lors de l’appel d’une décision d’arbitrage rendue par le bâtonnier, les parties au litige ont la faculté de se faire assister ou représenter par un avocat, à l’exclusion de toute autre personne.
Demandeur(s) : Mme C... F...
Défendeur(s) : société groupement [...]
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt
attaqué (Paris, 19 décembre 2018), rendu sur renvoi après cassation (1re
Civ. 11 mai 2017, pourvoi n° 16-15.817), la société groupement [...] a conclu avec Mme F... ,
un contrat de collaboration libérale prenant effet à compter de sa
prestation de serment, intervenue le 18 décembre 2008, et succédant à un
contrat de travail en qualité de juriste salariée.
2. Après que le cabinet eut mis fin à son contrat de collaboration le 3 février 2014, Mme F...
a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats au barreau de Paris d’une
demande de requalification de son contrat de collaboration libérale en
contrat de collaboration salariée, à compter du 1er octobre 2008, et de
demandes en paiement de diverses sommes et indemnités résultant de cette
requalification.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3 Mme F...
fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de requalification du
contrat de collaboration libérale en contrat de collaboration salariée,
alors « qu’en matière de procédure sans représentation obligatoire, la
procédure est orale ; qu’en matière de procédure orale, seules les
conclusions écrites réitérés à l’audience saisissent valablement le juge
; que l’article 144 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, s’il
autorise les parties à se faire assister, ne prévoit pas qu’elles
puissent se faire représenter ; que, dans ces conditions, dès lors
qu’une partie ne comparaît pas à l’audience, la cour d’appel doit
considérer que celle-ci n’a pas réitéré ses conclusions écrites et
partant que, nonobstant la présence de son avocat, elle ne l’a
valablement saisi d’aucun moyen ni d’aucune demande ; qu’en décidant que
les conclusions écrites du groupement [...]
avait été reprises à l’audience quand il résulte de l’arrêt que ce
dernier, qui n’avait pas la faculté d’être représenté, n’a pas comparu à
l’audience, la cour d’appel a violé les articles 446-1, 931 et 946,
ensemble l’article 144 décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991. »
Réponse de la Cour
4.
Selon l’article 7 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, les litiges
nés à l’occasion d’un contrat de collaboration libérale sont, en
l’absence de conciliation, soumis à l’arbitrage du bâtonnier, à charge
d’appel devant la cour d’appel. L’article 144 du décret n° 91-1197 du 27
novembre 1991 précise que les parties peuvent, à tous les stades de la
procédure, être assistées par un avocat. En application de l’article 16
du même décret, le recours devant la cour d’appel est instruit et jugé
selon les règles applicables en matière contentieuse à la procédure sans
représentation obligatoire. Enfin, aux termes de l’article 931 du code
de procédure civile, les parties se défendent elles-mêmes, elles ont la
faculté de se faire assister ou représenter selon les règles applicables
devant la juridiction dont émane le jugement, et le représentant doit,
s’il n’est avocat, justifier d’un pouvoir spécial.
5.
Il résulte de la combinaison de ces textes que, lors de l’appel d’une
décision d’arbitrage rendue par le bâtonnier, les parties au litige ont
la faculté de se faire assister ou représenter par un avocat, à
l’exclusion de toute autre personne.
6.
Ayant relevé que les écritures établies par le cabinet, non présent,
avaient été reprises à l’audience par son avocat, c’est à bon droit que
la cour d’appel a statué sur ces écritures qui la saisissaient
valablement.
7. Le moyen n’est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. Mme F...
fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de requalification du
contrat de collaboration libérale en contrat de collaboration salariée,
alors « que l’avocat salarié est celui qui est lié par un contrat de
travail à un autre avocat et dont le lien de subordination est
caractérisé notamment par l’impossibilité de développer une clientèle
personnelle dans les conditions prévues par l’article 129 du décret du
27 novembre 1991 ; qu’en s’abstenant de rechercher, comme l’y invitait
la demanderesse, si Mme F... n’était pas dans l’impossibilité de développer une clientèle personnelle dès lors que le groupement [...]
imposait un objectif de facturation de 2050 heures annuelles, soit de 9
heures facturables par jour, pour pouvoir bénéficier de l’intégralité
de la rémunération variable, la cour d’appel a privé sa décision de base
légale au regard de l’article 7 de la loi du 31 décembre 1971 et de
l’article 129 du décret du 27 novembre 1991. »
Réponse de la Cour
9. Après avoir relevé qu’il incombait à Mme F...
d’établir qu’il ne lui avait pas été matériellement possible de créer
une clientèle personnelle et analysé ses conditions d’exercice au sein
du cabinet, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu’elle a
fait en sorte d’obtenir des résultats suffisants pour gagner une année
sur la grille prévue des rémunérations du cabinet, puisqu’en cinquième
année, elle percevait une rémunération correspondant normalement à la
sixième année et qu’elle ne démontre pas avoir été soumise à une charge
de travail telle qu’elle aurait été effectivement empêchée de créer et
développer une clientèle personnelle. Il en déduit que l’absence de
développement immédiat d’une clientèle personnelle procédait d’un choix
de Mme F... de se consacrer aux dossiers du cabinet.
10.
La cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le
détail de leur argumentation, a ainsi légalement justifié sa décision.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Le Gall, conseiller référendaire
Avocat(s) : SCP Foussard et Froger - SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol
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