Arrêt n°667 du 12 novembre 2020 (19-14.025 ; 19-14.112) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2020:C100667
Rejet
Demandeur(s) : M. S... T...
Défendeur(s) : société Confort transactions, société à responsabilité limitée et autre(s) ;
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 18 décembre 2018), par acte du 20 mars 2013, la SCI Le Clos de l’Aubépin (la SCI), promoteur immobilier, a confié à la société Confort transactions, par l’intermédiaire de M. T... ,
agent commercial habilité par cette dernière, un mandat non exclusif
pour la commercialisation sous le régime de la vente en l’état futur
d’achèvement de vingt-quatre lots du programme immobilier « Le Clos du moulin ».
3. Le 21 octobre 2014, la société Confort transactions a mis en demeure la SCI de lui verser la somme de 206 480 euros au titre de sa commission, puis l’a assignée en paiement. M. T... est intervenu volontairement à l’instance.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi n° H 19-14.112, pris en sa seconde branche, ci-après annexé
4.
En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure
civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement
motivée sur ce grief qui n’est manifestement pas de nature à entraîner
la cassation.
Sur le moyen du pourvoi n° N 19-14.025 et le moyen du pourvoi n° H 19-14.112, pris en sa première branche, réunis
Enoncé des moyens
5. Par son moyen, M. T... fait grief à l’arrêt de prononcer la nullité du mandat de vente et de rejeter ses demandes, alors :
«
1°/ que le titulaire d’une carte professionnelle d’agent immobilier
peut habiliter une personne à négocier, s’entremettre ou s’engager pour
son compte, la personne ainsi habilitée devant justifier de la qualité
et de l’étendue de ses pouvoirs par la production de l’attestation visée
par l’article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 ; que si, en
vertu de cette disposition, les nom et qualité du titulaire de
l’attestation doivent être mentionnés sur le mandat de vente qu’il
conclut avec un tiers au nom et pour le compte du titulaire de la carte
professionnelle, cette mention n’est pas prescrite à peine de nullité
dudit mandat ; que, pour prononcer l’annulation du mandat du 20 mars
2013, conclu entre la société Confort transactions, titulaire de la carte professionnelle, et la SCI, par l’intermédiaire de M. T... ,
titulaire de l’attestation, la cour d’appel a retenu que le nom et la
qualité de ce dernier n’étaient pas mentionnés sur le mandat au mépris
des exigences de l’article 9 du décret du 20 juillet 1972, disposition
d’ordre public ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé ce texte,
ensemble l’article 4 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 dans leur
rédaction applicable à l’espèce ;
2°/ que
l’annulation du contrat de mandat d’un agent immobilier à raison de
l’omission, sur l’acte, de la mention du nom et de la qualité de la
personne habilitée qui l’a négocié, constitue une sanction
disproportionnée ; qu’en prononçant une telle annulation, nonobstant la
circonstance, acquise aux débats, que grâce à ce mandat, les
vingt-quatre lots composant le programme immobilier avaient été vendus à
un bailleur social, la cour d’appel a violé l’article 4 de la loi n°
70-9 du 2 janvier 1970 et l’article 9 du décret n° 72-678 du 20 juillet
1972 dans leur rédaction applicable en l’espèce, ensemble l’article 1er
du 1er protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales. »
6. Par son moyen pris en sa première branche, la société Confort transactions
fait le même grief à l’arrêt, alors « que le titulaire d’une carte
professionnelle d’agent immobilier peut habiliter une personne physique,
tel qu’un agent commercial, à conclure un mandat en son nom et pour son
compte ; que cette personne justifie alors de la qualité et de
l’étendue de ses pouvoirs par la production d’une attestation délivrée
par l’agent immobilier ; que, si le mandat conclu par cette personne
physique doit mentionner le nom et la qualité de cette dernière, cette
mention n’est pas requise à peine de nullité ; qu’en l’espèce, la cour
d’appel a jugé que le mandat conclu le 20 mars 2013 entre la société Confort transactions et la SCI avait été signé par M. T... , agent commercial lié à la société Confort transactions,
sans que le mandat ne mentionne le nom et la qualité du signataire, et
qu’il en résultait la violation d’une disposition d’ordre public,
justifiant la nullité du mandat ; qu’en se prononçant ainsi, tandis que
ces indications ne sont pas prescrites à peine de nullité du mandat de
vente, la cour d’appel a violé les articles 4 et 6 de loi n° 70-9 du 2
janvier 1970 et 9 du décret du 20 juillet 1972. »
Réponse de la Cour
7.
En premier lieu, selon l’article 4, alinéa 1er, de la loi n° 70-9 du 2
janvier 1970, toute personne habilitée par un titulaire de la carte
professionnelle à négocier, s’entremettre ou s’engager pour le compte de
ce dernier justifie de sa qualité et de l’étendue de ses pouvoirs dans
les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. L’article 9, dernier
alinéa, du décret n° 72-678 du 20 juillet 1972 dispose que les nom et
qualité du titulaire de l’attestation doivent être mentionnés dans les
conventions visées à l’article 6 de la loi précitée lorsqu’il intervient
dans leur conclusion, ainsi que sur les reçus de versements ou remises
lorsqu’il en délivre.
8. Il résulte de
ces dispositions d’ordre public, qu’à défaut de mention, dans le mandat,
du nom et de la qualité de la personne habilitée par un titulaire de la
carte professionnelle à négocier, s’entremettre ou s’engager pour le
compte de ce dernier, cette convention est nulle.
9.
Dès lors, la cour d’appel a fait l’exacte application de ces textes en
annulant le mandat de vente du 20 mars 2013, après avoir constaté que la
carte professionnelle d’agent immobilier était détenue par la société Confort transactions et que, si M. T... était le signataire de ce mandat, celui-ci ne faisait pas mention de son nom et de sa qualité.
10.
En second lieu, si l’annulation du mandat de vente prive l’agent
immobilier et l’intermédiaire de la rémunération prévue au mandat, qui
constitue une créance entrant dans le champ d’application de l’article
1er du premier Protocole additionnel de la Convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales, cette mesure est
proportionnée à l’objectif poursuivi par les dispositions de la loi du 2
janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972 d’organiser l’accès à la
profession d’agent immobilier, d’assurer la compétence et la moralité
des agents immobiliers et de protéger le mandant qui doit pouvoir
s’assurer que la personne à qui il confie le mandat est habilitée par
l’agent immobilier, est titulaire de l’attestation légale et dispose des
pouvoirs nécessaires.
11. Les moyens ne sont donc pas fondés.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Le Gall
Avocat général : M. Chaumont
Avocat(s) : SCP Thouin-Palat et Boucard - SCP Rousseau et Tapie - SCP Boutet et Hourdeaux
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