Arrêt n°658 du 04 novembre 2020 (19-15.150) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2020:C100658
Rejet
Demandeur(s) : M. S... G... L...
Défendeur(s) : procureur général près la cour d’appel de Paris
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt
attaqué (Paris, 19 mars 2019), un jugement du tribunal de grande
instance de Paris du 7 septembre 2017 a constaté l’extranéité de M. G... L..., né le [...] à Djibouti, au motif qu’il ne démontrait pas avoir conservé la nationalité française lors de l’indépendance de ce territoire.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé
2.
En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure
civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement
motivée sur ce grief qui est irrecevable.
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
3. M. G... L... fait grief à l’arrêt de dire qu’il n’est pas de nationalité française, alors :
«
1°/ que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale
; que si l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de
l’homme et des libertés fondamentales ne garantit pas un droit
d’acquérir une nationalité ou une citoyenneté particulière, un refus
arbitraire fondé sur un critère discriminatoire, au sens de l’article 14
de la Convention, porte une atteinte disproportionnée au droit de mener
une vie familiale normale ; que M. G... L...
faisait valoir que les articles 3 et 4 de la loi n° 77-625 du 20 juin
1977, prévoyant les conditions de la conservation de la nationalité
française à la suite de l’indépendance du territoire français des Afars
et des Issas, mettaient en oeuvre des critères discriminatoires fondés
sur l’appartenance ethnique et/ou religieuse ; que, pour débouter M. G... L...
de ses demandes, la cour d’appel a affirmé que les conditions
d’attribution par un État de sa nationalité n’entrent pas dans le champ
d’application de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales ; qu’en statuant ainsi, l’arrêt attaqué a
violé les articles 8 et 14 de ladite Convention ;
2°/
que le droit au respect de la vie privée et familiale doit être assuré,
sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la
couleur, la langue, la religion, les opinions politiques, ou toutes
autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une
minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ;
que les articles 3, 4 et 5 de la loi n° 77-625 du 20 juin 1977
soumettaient à une obligation de déclaration de reconnaissance de la
nationalité française, avant le 27 juin 1978, les seules personnes
originaires du territoire français des Afars et des Issas, à condition
de surcroît qu’elles aient établi leur domicile, à la date du 8 mai
1977, dans le territoire de la République française à l’exception du
territoire des Afars et des Issas ; qu’en donnant effet à une
disposition législative discriminatoire, la cour d’appel a violé les
articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et
des libertés fondamentales, ensemble l’article 55 de la Constitution du
4 octobre 1958. »
Réponse de la Cour
4.
La détermination, par un Etat, de ses nationaux par application de la
loi sur la nationalité ne peut constituer une discrimination au sens de
l’article 14 de la Convention européenne des droits de l’homme dès lors
qu’est assuré le droit à une nationalité (1re Civ., 25 avril 2007,
pourvoi n° 04-17.632, Bull. 2007, I, n° 159).
5.
Abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la
première branche du moyen, c’est sans méconnaître les exigences
résultant des articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits
de l’homme et des libertés fondamentales que la cour d’appel a fait
application de la loi n° 77-625 du 20 juin 1977 relative à
l’indépendance du territoire français des Afars et des Issas, qui
détermine les catégories de personnes qui conserveront la nationalité
française lors de l’indépendance de ce territoire, et, après avoir
constaté que M. G... L...
ne rentrait dans aucune des catégories visées pour conserver la
nationalité française, a retenu qu’il avait perdu cette nationalité.
6. Le moyen ne peut donc être accueilli.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Le Cotty, conseiller référendaire
Avocats : Me Isabelle GALY
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