Arrêt n°558 du 13 juin 2019 (18-12.389) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2019:C100558
Autorité parentaleRejet
Sommaire :
L’article 371-4 du code civil ne précise pas les modalités selon lesquelles le droit de visite et d’hébergement des grands-parents peut s’exercer et l’article 1180-5 du code de procédure civile n’est pas applicable aux relations entre les enfants et leurs grands-parents.
Dès lors, ne méconnaît pas l’étendue de ses pouvoirs une cour d’appel qui, organisant le droit de visite d’une grand-mère dans un espace de rencontre, fixe la durée de la mesure, le lieu et la périodicité des rencontres, sans préciser la durée des rencontres.
Demandeur(s) : Mme B... I... et autre(s)
Défendeur(s) : Mme K... L... et autre(s)
Attendu, selon les arrêts attaqués (Toulouse, 19 décembre 2017 et 13 mars 2018), que Mme L... , grand-mère maternelle d’E... D... I..., né le [...] , et d’H... et Z... M...-T...-I..., nées le [...] , a assigné sa fille, Mme I..., ainsi que MM. D... et M...-T...,
les pères des enfants, afin d’obtenir un droit de visite et
d’hébergement à l’égard de ceux-ci, adapté selon les relations établies
avec chacun d’eux ;
Sur le premier moyen,
pris en ses première et troisième branches, les deuxième et troisième
moyens du pourvoi n° P 18-12.389 et le moyen unique du pourvoi n° M
18-16.642, ci-après annexés :
Attendu
qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée
sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la
cassation ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° P 18-12.389, pris en sa deuxième branche :
Attendu que Mme I... et M. M...-T... font grief à l’arrêt du 19 décembre 2017 d’accorder à Mme L... un droit de visite et d’hébergement sur E... D... I... et un droit de visite médiatisé suivant certaines modalités sur H... et Z... M...-T...-I...
alors, selon le moyen, que lorsque le ministère public donne un avis
dans une procédure, celui-ci doit être communiqué aux parties ; que
l’arrêt mentionne que l’affaire a été régulièrement communiquée au
ministère public qui a fait connaître son avis ; qu’en statuant ainsi,
par une mention qui ne permet pas de savoir si l’avis du ministère
public, dont l’arrêt ne précise pas s’il était présent à l’audience, a
été communiqué aux parties, la cour d’appel, qui n’a pas mis la Cour de
cassation en mesure d’exercer son contrôle, a violé les articles 6, § 1,
de la Convention européenne des droits de l’homme et 16 du code de
procédure civile ;
Mais attendu que
l’avis écrit du ministère public, par lequel ce dernier déclare s’en
rapporter, étant sans influence sur la solution du litige, n’a pas à
être communiqué aux parties ; qu’il résulte des constatations de l’arrêt
que le ministère public a déclaré s’en rapporter ; que dès lors, cet
avis n’avait pas à être communiqué aux parties ; que le moyen n’est pas
fondé ;
Sur le quatrième moyen du même pourvoi :
Attendu que Mme I... et M. M...-T... font grief à l’arrêt du 19 décembre 2017 d’accorder à Mme L... un droit de visite sur ses petites-filles alors, selon le moyen :
1°/
que l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec
ses ascendants ; que l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à
l’exercice de ce droit ; qu’en retenant qu’un lien affectif s’était créé
entre H... et Z... M...-T... et leur grand-mère, Mme L...
aux motifs que celle-ci leur avait fait parvenir, par voie postale,
plusieurs présents, sans rechercher si le jeune âge des fillettes ne
faisait pas obstacle à l’établissement d’un lien affectif à distance, la
cour d’appel a violé l’article 371-4 du code civil ;
2°/
que l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec
ses ascendants ; que l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à
l’exercice de ce droit ; qu’en faisant droit à la demande de Mme L... , tendant à la mise en place d’un droit de visite médiatisé à l’égard de ses petites-filles H... et Z...,
sans rechercher, comme elle y était invitée, si la mise en place d’un
droit de visite médiatisé n’était pas contraire à l’intérêt des
fillettes, contraintes de se rendre dans un lieu neutre, en la seule
présence de Mme L... , qu’elles ne connaissent pas, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 371-4 du code civil ;
3°/
que l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec
ses ascendants ; que l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à
l’exercice de ce droit ; qu’en s’abstenant de rechercher, comme elle y
était pourtant invitée, si Mme L...
disposait de l’aptitude et des capacités nécessaires à s’occuper, une
journée durant de ses deux petites filles, jumelles, âgées de 6 ans, la
cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article
371-4 du code civil ;
Mais attendu qu’aux
termes de l’article 371-4 du code civil, l’enfant a le droit
d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants et seul
l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit ;
Et attendu que l’arrêt relève que si, en raison du conflit opposant Mme L...
à sa fille, celle-ci n’a pu rencontrer ses petites-filles, elle a
néanmoins instauré un lien avec elles, par des attentions régulières, de
sorte que sa place se trouve définie auprès des fillettes, qu’elle a
toujours pris soin de préserver l’unité de la fratrie, que son attitude
récente témoigne de la permanence de son engagement, malgré les
difficultés matérielles, et qu’il est de l’intérêt des mineures de
bénéficier, comme leur demi-frère, de relations avec leur grand-mère ;
qu’il ajoute que Mme I... et M. M...-T... n’établissent pas que Mme L...
n’aurait pas les capacités physiques de s’occuper de deux fillettes de 6
ans sur une journée, de 10 heures 30 à 18 heures, et précise que les
visites de Mme L...
auprès de ses petites-filles seront organisées de façon progressive,
sans instauration d’un droit d’hébergement ; que la cour d’appel, qui a
procédé aux recherches prétendument omises et s’est déterminée en
considération de l’intérêt des enfants, a ainsi légalement justifié sa
décision de ce chef ;
Sur le cinquième moyen du même pourvoi :
Attendu que Mme I... et M. M...-T... font grief à l’arrêt du 13 décembre 2017 de dire qu’en l’absence d’un accord amiable entre les parties, Mme L... rencontrera ses petites-filles, pendant une première période de cinq mois, au point rencontre de l’association Ecoute moi grandir,
le troisième samedi des mois de janvier, février, mars et mai, en
présence des accueillants et selon les modalités concrètes définies par
ceux-ci, alors, selon le moyen :
1°/ que
commet un excès de pouvoir le juge qui a refusé de statuer quand il
était tenu de le faire ; que le juge peut, si tel est l’intérêt de
l’enfant, fixer les modalités des relations entre celui-ci et ses
grands-parents ; que dans une telle hypothèse, il appartient ainsi au
juge de fixer la durée de ces rencontres ; qu’ainsi, en prononçant la
mise en place d’un droit de visite médiatisé entre Mme L...
et ses deux petites-filles sans fixer la durée de ces rencontres, la
cour d’appel, qui a excédé ses pouvoirs, a ainsi violé l’article 371-4
du code civil ;
2°/ que le juge ne peut
déléguer les pouvoirs que la loi lui confère ; que si tel est l’intérêt
de l’enfant, il appartient au juge aux affaires familiales, lui-même, de
fixer les modalités des relations entre l’enfant et ses grands-parents ;
que la cour d’appel a décidé que le droit de visite de Mme L...
s’exercerait dans un lieu médiatisé ; qu’en déléguant au secrétariat du
point rencontre désigné le pouvoir de préciser ses modalités concrètes,
dont la durée des rencontres, quand il lui appartenait de préciser
lui-même cette durée, la cour d’appel, qui a excédé ses pouvoirs, a
ainsi violé l’article 371-4 du code civil ;
Mais
attendu que l’article 371-4 du code civil ne précise pas les modalités
selon lesquelles le droit de visite et d’hébergement des grands-parents
peut s’exercer ; que, si l’article 1180-5 du code de procédure civile
dispose que, lorsque le juge décide que le droit de visite de l’un des
parents s’exercera dans un espace de rencontre, en application des
articles 373-2-1 ou 373-2-9 du code civil, il fixe la durée de la mesure
et détermine la périodicité et la durée des rencontres, ce texte n’est
pas applicable aux relations entre les enfants et leurs grands-parents ;
que dès lors, la cour d’appel ayant fixé la durée de la mesure, le lieu
et la périodicité des rencontres, elle n’a pas méconnu l’étendue de ses
pouvoirs ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne Mme I... et M. M...-T... aux dépens ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Le Cotty, conseiller référendaire
Avocat général : Mme Marilly
Avocat (s) : SCP Zribi et Texier
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