Arrêt n° 26 du 9 janvier 2019 (17-27.841) - Cour de cassation - Première chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2019:C100026
Agent immobilierRejet
Sommaire :
Les dispositions de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 et de son décret d’application ne sont pas applicables au sous-mandat donné par un notaire, mandataire initial, à un agent immobilier.
Demandeur(s) : M. Jérôme X...
Défendeur(s) : Société IFCA défiscalisation
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Riom, 20
septembre 2017), que, par acte sous seing privé du 15 mars 2013,
M. X... (le notaire), notaire agissant en qualité de mandataire de
M. Z... ainsi que de M. et Mme A... (les vendeurs), a confié à la
société IFCA défiscalisation (l’agent immobilier) la mission de
rechercher un acquéreur pour des biens et droits immobiliers leur
appartenant ; que, le 24 juillet 2014, celle-ci l’a assigné, sur le
fondement des articles 1779 et 1787 du code civil, en paiement de la
somme de 281 250 euros au titre de sa rémunération, correspondant à
7,5 % du prix de vente des biens ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le notaire fait grief à l’arrêt d’accueillir la demande de la société, alors, selon le moyen :
1°/ que les dispositions édictées
par la loi Hoguet et son décret d’application s’appliquent entre
professionnels de l’immobilier ; qu’en énonçant, pour déclarer recevable
l’action de la société, que les dispositions en cause ne s’appliquaient
pas au sous-mandat donné par le mandataire initial à un mandataire
substitué, lui-même agent immobilier, ni encore aux conventions de
rémunération conclues entre un agent immobilier et un autre
professionnel de l’immobilier, quand elles avaient vocation à
s’appliquer entre professionnels, dans les rapports entre le notaire et
la société, agent immobilier, la cour d’appel a violé les articles 1er
et 6 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite loi Hoguet, et 72 de son
décret d’application n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;
2°/ que c’est aux conventions de
rémunération conclues entre agents immobiliers que les dispositions de
la loi Hoguet et de son décret d’application ne sont pas applicables ;
qu’au demeurant, en retenant, pour déclarer l’action recevable, que
M. X... était notaire et qu’il n’exerçait pas la profession d’agent
immobilier, pour en déduire que les dispositions en cause n’étaient pas
applicables en tant que le notaire précisait que la société était
titulaire d’une carte professionnelle d’agent immobilier et qu’il lui
avait délégué partie du mandat qui lui avait été donné de vendre en lui
confiant la mission de rechercher un acquéreur, quand le mandat
litigieux n’était pas une convention de rémunération conclue entre
agents immobiliers, la cour d’appel a encore violé les articles 1er et 6
de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dite loi Hoguet, et 72 de son
décret d’application n° 72-678 du 20 juillet 1972 ;
Mais attendu qu’ayant constaté que le
notaire avait confié à l’agent immobilier un sous-mandat en qualité de
mandataire substitué des vendeurs, la cour d’appel a retenu, à bon
droit, que, dans les rapports existant entre le notaire et l’agent
immobilier, tous deux professionnels de l’immobilier, les dispositions
de la loi du 2 janvier 1970 et de son décret d’application n’étaient pas
applicables ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le notaire fait grief à
l’arrêt de le condamner à payer à l’agent immobilier une certaine somme
en réparation du dommage causé par la perte de sa rémunération, alors,
selon le moyen :
1°/ que la cassation à intervenir
sur le premier moyen du chef ayant déclaré recevable l’action de la
société entraînera, par voie de conséquence, celle du chef ayant
condamné le notaire à payer à cette société une somme de 150 000 euros
en réparation du dommage causé par la perte de sa rémunération, qui se
trouve dans un lien de dépendance nécessaire, et ce en application des
articles 624 et 625 du code de procédure civile ;
2°/ que le notaire a l’interdiction
de rémunérer de ses deniers personnels les membres d’autres professions
avec lesquelles il collabore ; qu’en se bornant, pour le condamner à
payer à la société une indemnité de 150 000 euros en réparation du
dommage causé par la perte de sa rémunération, à considérer qu’en sa
qualité de notaire instrumentaire, il lui appartenait de prévoir dans
l’acte que les frais de cette société étaient à la charge de l’acquéreur
et que, faute de l’avoir fait, il devait la dédommager pour l’avoir
privée de la faculté de percevoir sa rémunération de l’acquéreur, de
sorte que c’était vainement, que, pour se soustraire à cette
responsabilité, le notaire invoquait les dispositions de l’article 16 du
décret n° 78-262 du 8 mars 1978 prohibant le partage des rémunérations,
sans rechercher si, le partage d’émoluments ou d’honoraires de
négociation étant strictement interdit, sauf entre notaires, et ne
pouvant donc qu’être mis à la charge des clients eux-mêmes, la
commission litigieuse, à la supposer due, devait être réglée par
l’acquéreur, et si ce n’était d’ailleurs pas Mme D... qui avait réglé
les honoraires de négociation des notaires, ce dont la société avait
pleinement conscience puisqu’elle s’était adressée, dans un premier
temps, à celle-ci pour obtenir paiement, la cour d’appel a privé sa
décision de base légale au regard de l’article 16 du décret n° 78-262 du
8 mars 1978 ;
Mais attendu qu’ayant retenu qu’il
appartenait au notaire de prévoir, dans l’acte qu’il instrumentait, que
la rémunération de l’agent immobilier serait à la charge de l’acquéreur
et que, faute de l’avoir fait, il lui incombait de dédommager son
mandataire ainsi privé de la faculté de percevoir sa commission, la cour
d’appel, qui a condamné le notaire au paiement de dommages-intérêts et
non d’une rémunération, n’était pas tenue d’effectuer une recherche
inopérante ; que le moyen, rendu sans portée en sa première branche par
le rejet des griefs du premier moyen, n’est pas fondé en sa seconde ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme Le Gall, conseiller référendaire
Avocat(s) : SCP Jean-Philippe Caston - SCP Sevaux et Mathonnet
Partager cette page