Arrêt n°735 du 29 mai 2019 (18-11.436) - Cour de cassation - Deuxième chambre civile
- ECLI:FR:CCASS:2019:C200735
Sécurité sociale, cotisations et contributions du régime général
Rejet
Sommaire :
Il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale, L. 129-13, devenu L. 7233-4 du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8 du même code, que n’ont pas le caractère d’une rémunération entrant dans l’assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, au sens du premier de ces textes, les aides financières de l’entreprise versées en faveur des salariés lorsqu’elles sont destinées à financer, dans la limite d’un montant maximum de 1830 euros par année civile et par bénéficiaire, des établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de six ans ou des établissements et services publics accueillant des enfants de moins de six ans.
En conséquence, doit être approuvé l’arrêt qui retient que constitue un avantage en nature soumis à cotisations le financement par un département de la mise à disposition exclusive de ses agents, pendant leur temps de travail, d’une crèche interne accueillant leurs enfants de moins de trois ans pour la partie de ce financement qui excède 1830 euros par an et par bénéficiaire.
Demandeur (s) : Département du Nord,
Défendeur(s) : Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) Nord Pas-de-Calais
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Douai, 30 novembre 2017), qu’à la suite d’un contrôle portant sur les années 2007 et 2008, l’URSSAF du Nord Pas-de-Calais a notifié au département du Nord (le département), un redressement, suivi de la notification, le 11 juin 2010, d’une mise en demeure, portant notamment sur la réintégration dans l’assiette des cotisations de l’avantage en nature représenté par le financement par le département, au profit de ses agents, d’une crèche interne de garde d’enfants ; que contestant le bien fondé de ce chef de redressement, le département a saisi d’un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Attendu que le département fait grief à l’arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, qu’il
résulte de l’article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail
dans sa version applicable au litige que le financement par un employeur
d’une structure interne de garde d’enfant au bénéfice de ses salariés
n’a pas le caractère d’une rémunération et n’est pas légalement soumis à
un plafond ; que le décret n° 2005-1401 du 14 novembre 2005 relatif aux
conditions d’application de l’ancien article L. 129-13 du code du
travail a créé l’article D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail
qui dispose, dans sa version applicable au litige, que « le montant
maximum de l’aide financière prévue à l’article L. 129-13 est fixé à 1
830 euros par année civile et par bénéficiaire ayant eu recours à un ou
plusieurs services financés par cette aide » ; qu’un tel plafond, dont
le principe n’a pas été prévu par la loi, n’est pas de nature à
favoriser la création d’établissement d’accueil pour enfant au sein de
l’entreprise, en sorte que le décret est contraire à l’objet de la loi
et doit demeurer inappliqué ; qu’en jugeant que le financement par
l’employeur d’une crèche d’entreprise constituait un avantage en nature
pour son montant supérieur au plafond annuel de 1 830 euros par
bénéficiaire, la cour d’appel a violé l’article L. 129-13, devenu L.
7233-4, du code du travail alors applicable et l’article D. 129-31,
devenu D. 7233-8 du même code, ensemble l’article 34 de la
Constitution ;
Mais attendu que, selon l’article L.
129-17, devenu l’article L. 7233-9 du code du travail, un décret précise
les conditions d’application de l’article L. 129-13, devenu les
articles L. 7233-4 à L. 7233-8 ; qu’il est manifeste, dès lors, qu’en
fixant à 1 830 euros par année civile et par salarié le montant maximum
de l’aide financière de l’employeur exclue de l’assiette des cotisations
et contributions sociales, l’article D. 129-31, devenu l’article D.
7233-8 du code du travail, ne méconnaît pas les dispositions
législatives susmentionnées ainsi que l’article 34 de la Constitution ;
D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;
Et sur le même moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches, qui sont recevables :
Attendu que le département fait le même grief à l’arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que le financement par un
employeur d’une structure interne de garde d’enfant au bénéfice de ses
salariés n’a pas le caractère d’une rémunération ; qu’en l’espèce, la
cour d’appel a jugé par motifs propres et adoptés que le financement par
le conseil départemental du Nord d’une crèche au bénéfice de ses agents
devait être réintégré dans l’assiette des cotisations sociales aux
motifs inopérants que la crèche n’a servi exclusivement qu’à son
personnel et n’a reçu aucun agrément de la caisse d’allocations
familiales ou de la Caisse nationale d’allocations familiales ; qu’en
statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 129-13, devenu L.
7233-4, du code du travail, ensemble l’article L. 242-1 du code de la
sécurité sociale ;
2°/ que le financement par un employeur d’une structure interne de garde d’enfant au bénéfice de ses salariés n’a pas le caractère d’une rémunération ; que le dépassement du montant maximum de l’aide financière prévue à l’article L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail n’a pas pour effet de conférer au financement un caractère de rémunération ; qu’en jugeant le contraire, la cour d’appel a violé, par fausse application, les articles L. 129-13, devenu L. 7233-4, du code du travail et D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail alors applicables, ensemble l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que la participation du salarié
en vue de l’accès à une crèche d’entreprise ne peut constituer un
avantage si elle est égale au barème imposé par l’employeur gestionnaire
de la crèche ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a jugé que la
participation des salariés, calculée pourtant conformément au règlement
intérieur de la crèche, constituait un avantage en nature aux motifs que
l’employeur ne disposait pas d’un agrément et que le règlement
intérieur de la crèche ne pouvait être assimilé à un barème et reconnu
équivalent à ceux mis en place par les communes ou la Caisse nationale
d’allocations familiales ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a
violé, par fausse application, les articles L. 129-13, devenu L. 7233-4,
du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8, du code du travail,
alors applicables, l’article L. 2324-1 du code de la santé publique,
ensemble l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu’il résulte de la combinaison des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale, L. 129-13, devenu L. 7233-4 du code du travail, D. 129-31, devenu D. 7233-8 du même code, dans leur rédaction applicable à la date d’exigibilité des cotisations litigieuses, que n’ont pas le caractère d’une rémunération entrant dans l’assiette des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, au sens du premier de ces textes, les aides financières de l’entreprise versées en faveur des salariés lorsqu’elles sont destinées à financer, dans la limite d’un montant maximum de 1 830 euros par année civile et par bénéficiaire, des établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de six ans ou des établissements et services publics accueillant des enfants de moins de six ans ;
Et attendu qu’ayant constaté, d’une part, que le département du Nord avait mis à la disposition exclusive de ses agents, durant leur temps de travail, une crèche départementale accueillant leurs enfants jusqu’à l’âge de trois ans, d’autre part, que la participation financière des agents, fixée par le règlement intérieur, était inférieure au coût effectif du service rendu supporté par l’employeur, la cour d’appel en a exactement déduit qu’il en résultait un avantage en nature soumis à cotisations pour la partie du financement excédant 1 830 euros par an et par bénéficiaire, de sorte que le chef de redressement en litige était justifié ;
D’où il suit, qu’inopérant en ses première et quatrième branches, le moyen n’est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Président : Mme Flise
Rapporteur : Mme Palle, conseiller référendaire
Avocat général : M. Aparisi, avocat général référendaire
Avocat (s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez - SCP Gatineau et Fattaccini
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