Arrêt n°60 du 17 janvier 2019 (17-28.861) - Cour de cassation - Deuxième chambre civile - ECLI:FR:CCASS:2019:C200060
Responsabilité délictuelle ou quasi délictuelleRejet
Sommaire :
Une cour d’appel qui relève que la chute d’une cavalière, engagée au pas avec un autre cavalier dans une impasse, ne peut s’expliquer que par l’emballement de son cheval du fait de deux gros chiens qui se sont soudainement mis à courir vers eux, ou du fait de l’autre cheval, lui même affolé par ceux-ci et qui souligne que le fait que ces chiens non tenus en laisse soient arrivés en courant d’un talus en surplomb non visible a accentué l’effet de surprise et de peur au moins pour le premier cheval, caractérise le comportement anormal des chiens et peut retenir la responsabilité de leurs propriétaires.
Demandeur(s) : Société Filia-Maif et autre(s)
Défendeur(s) : CPAM de l’Ain et autre(s)
Sur le moyen unique du pourvoi principal et du pourvoi incident qui sont identiques :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Lyon, 5 octobre 2017), que le [...], Mme E... a été victime d’une chute de cheval alors qu’elle se promenait avec un autre cavalier et que les chiens de Mme Y... et de Mme Z... se sont trouvés sur leur chemin ; qu’avec ses parents, M. Alain E... et Mme Christiane E... , elle a assigné Mme Y... et son assureur, la société Filia-Maif, et Mme Z... et son assureur, la société Mutuelle de l’Est la Bresse assurances, en indemnisation de leurs préjudices, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie de l’Ain ;
Attendu que Mme Y... , Mme Z... et leurs assureurs font grief à l’arrêt de les déclarer responsables in solidum de l’accident dont a été victime Mme E... , de les déclarer tenues in solidum à réparer les dommages causés à Mme Audrey E... , ainsi qu’Alain E... et Christiane E... , alors, selon le moyen :
1°/
que la responsabilité du propriétaire d’un animal suppose la preuve du
rôle actif de cet animal dans la survenance du dommage ; qu’en l’absence
de contact avec la victime, le rôle actif de l’animal résulte soit de
l’anomalie de sa position, soit de son comportement ; qu’en l’espèce, la
cour d’appel a constaté que le chien de Mme Y... comme celui de Mme Z...
ne se sont pas approchés à moins de dix mètres des chevaux ; qu’il
résultait ainsi des propres constatations de la cour d’appel qu’il n’y
avait eu aucun contact matériel entre le chien de Mme Y... et la victime ou son cheval ; qu’en affirmant pour retenir la responsabilité de Mme Y... ,
que l’engagement de la responsabilité du gardien de l’animal n’est pas
subordonnée au caractère anormal du comportement de celui-ci, la cour
d’appel a violé l’article 1385, devenu 1243, du code civil ;
2°/
que la responsabilité du propriétaire d’un animal suppose la preuve du
rôle actif de cet animal dans la survenance du dommage ; qu’en l’absence
de contact avec la victime, le rôle actif de l’animal résulte soit de
l’anomalie de sa position, soit de son comportement ; qu’en l’espèce, la
cour d’appel a constaté que les chiens ne se sont pas approchés à moins
de dix mètres des chevaux, qu’ils n’ont pas eu un comportement
exceptionnel ou inhabituel et, en particulier, qu’ils n’ont pas montré
une quelconque agressivité à l’encontre des chevaux et ne se sont pas
trouvés en état de divagation ; qu’en affirmant néanmoins que le rôle
actif des chiens dans la réalisation du dommage est démontré, la cour
d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de
ses propres constatations, a violé l’article 1385, devenu 1243, du code
civil ;
3°/ que la responsabilité du
propriétaire d’un animal suppose la preuve du rôle actif de cet animal
dans la survenance du dommage ; qu’en l’absence de contact avec la
victime, le rôle actif de l’animal résulte soit de l’anomalie de sa
position, soit de son comportement ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a
constaté que les chiens ne se sont pas approchés à moins de dix mètres
des chevaux, que, courant dans le chemin, ils n’ont pas eu un
comportement exceptionnel ou inhabituel et, en particulier, n’ont pas
montré une quelconque agressivité à l’encontre des chevaux et ne se sont
pas trouvés en état de divagation ; qu’en affirmant que la seule
circonstance qu’à la vue des chiens, le cheval de Mme E... ait pu être apeuré ou se soit affolé sous l’effet de l’emballement du cheval de M. F...
qui le précédait, suffisait à établir le rôle actif des chiens dans la
réalisation du dommage, la cour d’appel a violé l’article 1385, devenu
1243, du code civil ;
Mais attendu
qu’ayant relevé d’une part qu’alors que les deux cavaliers avaient fait
une vingtaine de mètres dans l’impasse dans laquelle ils s’étaient
engagés au pas, deux gros chiens qui jouaient ensemble se sont soudain
mis à courir vers eux, d’autre part que ces deux chiens de grosse
taille, débouchant du talus en surplomb en courant en direction des
chevaux, ont manifestement affolé celui de M. F... ,
quand bien même ils ne se sont pas approchés à moins de dix mètres des
chevaux et n’ont montré aucune agressivité et que la chute de Mme E... ,
cavalière confirmée et de très bon niveau, ne peut s’expliquer que par
l’emballement de son propre cheval, soit du fait des chiens, soit du
fait du cheval de M. F... lui-même
affolé par les chiens et enfin souligné que le fait que ces deux gros
chiens non tenus en laisse soient arrivés en courant d’un talus en
surplomb non visible a accentué l’effet de surprise et de peur au moins
pour le premier cheval, la cour d’appel, qui a ainsi caractérisé le
comportement anormal des chiens a pu, par ces seuls motifs et
abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la première
branche du moyen, retenir que Mme Y... et Mme Z... , propriétaires des chiens à l’origine du dommage, devaient indemniser les consorts E... ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Président : M. Savatier, conseiller doyen faisant fonction de président
Rapporteur : Mme Bohnert, conseiller référendaire
Avocat général : M. Grignon Dumoulin
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
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