Arrêt n°693 du 08 juillet 2020 (18-15.603) - Cour de cassation - Chambre sociale - ECLI:FR:CCASS:2020:SO00693
Statut collectif du travailcassation partielle
Sommaire :
La signature par ses membres du document consignant l’avis de la commission de conciliation d’entreprise sur une sanction disciplinaire envisagée par l’employeur et la transmission de ce document au salarié, prévues à l’article 58.4 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme du 12 mars 1993, dans sa rédaction en vigueur au 1er juillet 2014, ne constituent pas des garanties de fond.
Encourt en conséquence la cassation l’arrêt qui juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison de la méconnaissance de ces dispositions conventionnelles, sans constater une atteinte aux droits de la défense du salarié.
Demandeur(s) : la société Thomas Cook ; et autres
Défendeur(s) : Mme F... Y...
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Vu
les articles 55.4, 58.1, 58.3 et 58.4 de la convention collective
nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme
du 12 mars 1993, dans sa rédaction en vigueur au 1er juillet 2014 ;
Attendu
que selon le premier des textes susvisés, la commission de conciliation
d’entreprise est appelée à formuler un avis sur les sanctions que
l’employeur se propose d’infliger à un salarié, à l’exception de
l’avertissement et du blâme ; que selon le second, les avis de la
commission de conciliation sont formulés à la majorité des membres la
constituant ; que selon l’article 58.3, en cas d’avis défavorable à la
mesure disciplinaire envisagée à l’encontre du salarié, l’employeur
conserve son droit d’appliquer la mesure ; qu’enfin, l’article 58.4
prévoit que les avis de la commission de conciliation d’entreprise sont
consignés dans un document signé par ses membres, lequel sera notifié au
salarié par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai
maximum de cinq jours à compter du jour de la réunion de la commission ;
la sanction éventuelle fera l’objet d’un envoi d’avis, la sanction
pouvant prendre effet dès après la réunion de la commission et avant
cette notification ;
Attendu selon l’arrêt attaqué, que Mme Y... a été engagée à compter du 1er janvier 1991 par la société Aquatour, aux droits de laquelle est venue la société Thomas Cook
SAS, en qualité d’employée qualifiée selon contrat de travail régi par
la convention collective nationale de travail du personnel des agences
de voyage et de tourisme du 12 mars 1993 et a été nommée à compter du
1er avril 2000 en qualité de responsable d’agence ; qu’elle a été
licenciée pour faute grave le 19 décembre 2014 après que la commission
de conciliation de l’entreprise, réunie à sa demande le 5 décembre 2014,
a rendu à la majorité de ses membres un avis favorable au licenciement ;
qu’elle a contesté celui-ci devant la juridiction prud’homale ; qu’un
jugement ayant prononcé la liquidation judiciaire de la société Thomas Cook SAS le 28 novembre 2019, la société BTSG et la société [...]
sont intervenues à la procédure en qualité de liquidateurs de cette
société par conclusions de reprise d’instance du 27 mai 2020 ;
Attendu
que pour dire le licenciement de la salariée sans cause réelle et
sérieuse et condamner l’employeur à lui payer diverses sommes, l’arrêt
retient que la transmission au salarié dans le délai de cinq jours à
compter de la date de réunion de la commission de conciliation
d’entreprise de l’avis de cette dernière, émargé par ses membres,
constitue une garantie de fond dont la violation prive le licenciement
de cause réelle et sérieuse ; qu’il ajoute que le procès-verbal n’ayant
pas été signé par l’ensemble des membres de la commission et n’ayant pas
été transmis à l’issue de la réunion à la salariée, la garantie de fond
de la procédure conventionnelle a été méconnue ;
Qu’en
statuant ainsi, alors qu’il ne résultait pas de ses constatations que
le défaut de signature du procès-verbal par l’ensemble des membres de la
commission et de transmission de celui-ci à l’issue de la réunion, qui
ne constituent pas des garanties de fond, avaient porté atteinte aux
droits de la défense de la salariée, la cour d’appel a violé les textes
susvisés ;
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il confirme le jugement en ses dispositions ayant débouté Mme Y...
de ses demandes en paiement de rappel de salaire ainsi que de
dommages-intérêts pour licenciement irrégulier et préjudice moral,
l’arrêt rendu le 23 février 2018, entre les parties, par la cour d’appel
de Douai ;
Remet, sauf sur ces points,
l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet
arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Douai autrement composée ;
Président : M. Cathala
Rapporteur : Mme Richard
Avocat général : M. Weissmann, référendaire
Avocat(s) : SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol - SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret
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