Arrêt n°1190 du 09 décembre 2020 (19-20.319) - Cour de cassation - Chambre sociale - ECLI:FR:CCASS:2020:SO01190
Travail réglementation, durée de travailCassation partielle
Sommaire :
Selon les articles L. 3121-10 et L. 3123-1 du code du travail dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, un salarié dont la durée du travail est inférieure à trente-cinq heures par semaine civile ou, si elle est inférieure, à la durée fixée conventionnellement par la branche ou l’entreprise ou à la durée du travail applicable dans l’établissement, est un salarié à temps partiel.
L’article L.3123-14 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 prévoit que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.
Il en résulte, à la lumière de la clause 3 de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel, qu’est travailleur à temps partiel, un salarié dont la durée normale de travail, calculée sur une base hebdomadaire ou en moyenne sur une période d’emploi pouvant aller jusqu’à un an, est inférieure à celle d’un travailleur à temps plein comparable. A cet égard, est considéré comme un travailleur à temps plein comparable, un salarié à temps plein du même établissement ayant le même type de contrat ou de relation de travail, occupant un travail ou un emploi identique ou similaire. Cette comparaison peut prendre en compte d’autres considérations telles que l’ancienneté et les qualifications ou les compétences. En l’absence d’un travailleur à temps plein comparable dans le même établissement, la comparaison s’effectue alors par référence à la convention collective applicable ou, en l’absence de convention collective applicable, conformément à la législation et aux conventions collectives ou aux pratiques nationales.
Il en découle que la qualification de travail à temps partiel et le formalisme afférent ne sont pas liés à la durée du contrat de travail, mais s’apprécient au regard de la durée de travail du salarié concerné.
Doit être cassé l’arrêt qui, pour débouter le salarié de sa demande de requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, retient que les dispositions de l’article L.3123-14 du code du travail qui portent sur la durée et la répartition du travail et qui se réfèrent à des durées hebdomadaires ou mensuelles ne s’appliquent pas aux contrats de travail d’une durée inférieure à une semaine.
Demandeur(s) : Mme I... G...
Défendeur(s) : la société Ipsos Observer, société anonyme
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 20 mars 2019), Mme G... a été engagée par la société Ipsos Observer en qualité d’enquêtrice vacataire à compter du 1er octobre 2007 par contrats à durée déterminée d’usage.
2.
Le 8 février 2016, elle a saisi la juridiction prud’homale de demandes
en requalification de ses contrats de travail à durée déterminée en
contrat de travail à durée indéterminée, en paiement de rappels de
salaire, de diverses indemnités et de dommages-intérêts.
3. L’employeur a été avisé de l’existence de cette action le 16 février 2016.
4.
Les contrats à durée à déterminée ont été requalifiés en contrat à
durée indéterminée par arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 20
mars 2019 qui a dit que la rupture de la relation contractuelle
produisait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à
compter du 24 juillet 2016, date à partir de laquelle il n’a plus été
confié d’enquête à la salariée.
Examen des moyens
Mais sur le premier moyen , pris en sa première branche
Enoncé du moyen
10.
La salariée fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes en
requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de
travail à temps complet, de rappel de salaire pour les périodes
interstitielles et en paiement d’indemnités pour les titres-restaurant,
alors « que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner
la durée du travail prévue et sa répartition y compris lorsque le
contrat est d’une durée inférieure à la semaine ; que l’absence d’écrit
mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que
l’emploi est à temps complet et il incombe à l’employeur qui conteste
cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte
convenue, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans
l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il
n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur ;
qu’en considérant que les dispositions de l’article L. 3123-14 du code
du travail n’étaient pas applicables aux contrats requalifiés en contrat
à durée indéterminée car, bien que ne mentionnant pas la durée du
travail et sa répartition, ils avaient tous été conclus pour une durée
inférieure à la semaine, la cour d’appel a violé par refus d’application
l’article L. 3123-14 du code du travail dans sa version applicable en
la cause. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
11. L’employeur soutient que le moyen nouveau, comme étant mélangé de fait et de droit, est irrecevable.
12. Le moyen, qui est de pur droit, est recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu
les articles L. 3121-10, L. 3123-1, L. 3123-14 du code du travail dans
leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 interprétés
à la lumière de la clause 3 de l’accord-cadre sur le travail à temps
partiel du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du
Conseil du 15 décembre 1997 concernant l’accord-cadre sur le travail à
temps partiel :
13. Selon les deux
premiers textes, un salarié dont la durée du travail est inférieure à
trente-cinq heures par semaine civile ou, si elle est inférieure, à la
durée fixée conventionnellement par la branche ou l’entreprise ou à la
durée du travail applicable dans l’établissement est un salarié à temps
partiel.
14.Le troisième de ces textes
prévoit que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner
la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la
répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les
semaines du mois.
15. Il en résulte, à la
lumière de la clause 3 de l’accord-cadre sur le travail à temps partiel
du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du Conseil du 15
décembre 1997 concernant l’accord-cadre sur le travail à temps partiel,
qu’est travailleur à temps partiel, un salarié dont la durée normale de
travail, calculée sur une base hebdomadaire ou en moyenne sur une
période d’emploi pouvant aller jusqu’à un an, est inférieure à celle
d’un travailleur à temps plein comparable. A cet égard, est considéré
comme un travailleur à temps plein comparable, un salarié à temps plein
du même établissement ayant le même type de contrat ou de relation de
travail, occupant un travail ou un emploi identique ou similaire. Cette
comparaison peut prendre en compte d’autres considérations telles que
l’ancienneté et les qualifications ou les compétences. En l’absence d’un
travailleur à temps plein comparable dans le même établissement, la
comparaison s’effectue alors par référence à la convention collective
applicable ou, en l’absence de convention collective applicable,
conformément à la législation et aux conventions collectives ou aux
pratiques nationales.
16. Il en découle
que la qualification de travail à temps partiel et le formalisme
afférent ne sont pas liés à la durée du contrat de travail, mais
s’apprécient au regard de la durée de travail du salarié concerné.
17.Pour
débouter la salariée de sa demande de requalification des contrats de
travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, l’arrêt
retient qu’il ressort de l’article L. 3123-14 que les dispositions qui
portent sur la durée et la répartition du travail et qui se réfèrent à
des durées hebdomadaires ou mensuelles ne s’appliquent pas aux contrats
de travail signés par la salariée car ils sont tous d’une durée
inférieure à une semaine.
18. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
PAR CES MOTIFS, sans qu’il soit nécessaire de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déboute Mme G...
de ses demandes de requalification des contrats de travail en contrat
de travail à temps complet, de rappel de salaire pour les périodes
interstitielles et d’indemnité au titre des tickets restaurant, l’arrêt
rendu le 20 mars 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
Remet,
sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se
trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de
Paris autrement composée ;
Condamne la société Ipsos Observer aux dépens ;
Président : M. Cathala
Rapporteur : Mme Ala, conseiller référendaire
Avocat général : Mme Rémery
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy - SCP Lyon-Caen et Thiriez
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