Arrêt n°1396 du 09 octobre 2019 (17-24.773) - Cour de cassation - Chambre sociale - ECLI:FR:CCASS:2019:SO01396
Protection des droits de la personneRejet
Sommaire :
Lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice introduite pour faire valoir ses droits.
Demandeur : M. O... Y...
Défendeur(s) : société Assurances 2000, société par actions simplifiée
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 4 juillet 2017 ), qu’engagé le 8 mars 2004 par la société Assurances 2000 en qualité d’attaché commercial, M. Y...
a saisi le 15 septembre 2011 la juridiction prud’homale de demandes en
paiement d’heures supplémentaires et de primes ; que mis à pied à titre
conservatoire et convoqué à un entretien préalable le 29 septembre 2011,
il a été licencié pour faute grave par lettre du 13 octobre 2011, au
motif qu’il aurait eu le 29 septembre 2011 une attitude agressive et
injurieuse à l’égard de deux supérieurs hiérarchiques et aurait dénigré
l’entreprise ;
Sur les trois dernières
branches du moyen unique du pourvoi principal du salarié et le moyen
unique du pourvoi incident de l’employeur :
Attendu
qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée
sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à
entraîner la cassation ;
Sur les autres branches du moyen unique du pourvoi principal du salarié :
Attendu
que le salarié fait grief à l’arrêt de dire son licenciement justifié
et de rejeter l’ensemble de ses demandes à ce titre, alors, selon le
moyen :
1°/ que lorsque le licenciement
intervient concomitamment à la saisine du conseil de prud’hommes par le
salarié, il appartient à l’employeur d’établir que sa décision est
justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner
l’exercice, par le salarié, de son droit d’agir en justice ; qu’à
défaut, le licenciement est nul ; qu’en déboutant le salarié de sa
demande en nullité du licenciement qui a suivi sa saisine du conseil de
prud’hommes, au motif qu’il n’apportait pas la preuve de ce que les
événements du 29 septembre 2011 qui ont motivé son licenciement avaient
eu pour origine son action prud’homale, quand il bénéficiait d’une
présomption à cet égard qu’il appartenait à l’employeur de renverser en
apportant la preuve contraire, la cour d’appel a violé l’article 1315 du
code civil, l’article L. 1221-1 du code du travail et l’article 6 § 1
de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des
libertés fondamentales ;
2°/ qu’en
jugeant qu’aucun élément ne permettait de rattacher les événements du 29
septembre 2011 à la procédure prud’homale qu’il venait d’initier à
l’encontre de son employeur, sans avoir recherché si, comme le salarié
le soutenait dans ses conclusions d’appel, la société ASSU
2000 n’avait pas soudainement évoqué de prétendues difficultés
commerciales de l’agence depuis 2008, sans aucune remarque ni rappel à
l’ordre préalable, le mois précisément où le salarié avait réalisé le
meilleur chiffre commercial des agences de son secteur, ce qui était de
nature à établir que l’incident et la décision de le licencier était en
lien avec la procédure prud’homale récemment initiée par le salarié, la
cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article
L. 1221-1 du code du travail et 6 § 1 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Mais
attendu que lorsque les faits invoqués dans la lettre de licenciement
caractérisent une cause réelle et sérieuse de licenciement, il
appartient au salarié de démontrer que la rupture de son contrat de
travail constitue une mesure de rétorsion à une action en justice
introduite pour faire valoir ses droits ;
Et
attendu que la cour d’appel a constaté, d’une part, que les faits
invoqués dans la lettre de licenciement étaient caractérisés, et,
d’autre part, procédant implicitement mais nécessairement à la recherche
prétendument omise, que le déplacement à l’agence de deux supérieurs
hiérarchiques avait pour but de trouver une solution concernant les
mauvais résultats commerciaux de l’agence, lesquels étaient établis par
la production d’extraits informatiques, ce dont il résultait que le
salarié ne démontrait pas l’existence d’éléments permettant de rattacher
les événements du 29 septembre 2011 à la procédure prud’homale
précédemment engagée ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Président : M. Cathala
Rapporteur : Mme Duvallet, conseiller référendaire
Avocat général : Mme Berriat
Avocat (s) : SCP Rousseau et Tapie - SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre
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