Arrêt n°659 du 17 avril 2019 (18-15.321) - Cour de cassation - Chambre sociale - ECLI:FR:CCASS:2019:SO00659
EmploiRejet
Sommaire :
Il résulte des dispositions combinées des articles L. 8251-1 et L. 8252-1 du code du travail qu’un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France n’est pas assimilé à un salarié régulièrement engagé au regard des obligations pesant sur l’employeur entrant en cas de transfert du contrat de travail.
Les dispositions de l’article L. 8251-1 du code du travail font obstacle à ce que l’entreprise entrante soit tenue, en vertu de dispositions conventionnelles applicables en cas de changement de prestataire de services, à la poursuite du contrat de travail d’un étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.
Dès lors la cour d’appel, qui a constaté qu’à la date du changement de prestataire de services le salarié ne détenait pas un titre de séjour l’autorisant à exercer une activité salariée en France, a exactement décidé que l’entreprise entrante n’était pas tenue de poursuivre le contrat de travail de l’intéressé en application des dispositions de l’avenant n°3 du 26 février 1986 relatif au changement de prestataires de services de la convention collective nationale du personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin 1983.
Demandeur : M Z...R...
Défendeur(s) : société Compass Group France
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 16 novembre 2017), que M. R... ,
ressortissant d’un Etat tiers à l’Union européenne, a été engagé en
qualité d’employé polyvalent de restauration à compter du 26 mars 2010
par la société Api restauration sans être titulaire d’un titre de séjour l’autorisant à travailler ; qu’il a été affecté sur le site de la caisse régionale d’assurance-maladie de Bordeaux dont la société Api restauration a perdu le marché et qui a été repris par la société Compass Group France à compter du 1er janvier 2012 ; qu’à la suite du refus de cette dernière de le reprendre à son service, M. R... a saisi la juridiction prud’homale d’une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société Compass Group France ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt de juger que son contrat de travail n’a pas été transféré auprès de la société Compass Group France et de le débouter en conséquence de toutes ses demandes dirigées contre cette société alors, selon le moyen :
1°/
que l’article 3 de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 garantit le
maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d’entreprise ;
qu’aux termes de l’article 2 d) de ladite directive, le travailleur est
défini comme toute personne qui est protégée en tant que travailleur
dans le cadre de la législation nationale sur l’emploi ; qu’il en
résulte que la circonstance que les dispositions de l’article L. 8251-1
du code du travail, en vertu desquelles le salarié étranger employé
irrégulièrement est assimilé à un salarié régulièrement engagé, ne
prévoient pas expressément qu’il l’est au regard des obligations de
l’employeur définies en matière de transfert de contrat de travail, ne
fait pas obstacle à la protection du travailleur dont le contrat, même
irrégulier, a été transféré ; qu’en jugeant le contraire, la cour
d’appel a violé l’article L. 8252-1 du code du travail interprété à la
lumière des dispositions de la directive 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;
2°/
qu’en vertu de l’avenant n° 3 du 26 février 1986 relatif au changement
de prestataires de services de la convention collective nationale du
personnel des entreprises de restauration de collectivités, une
entreprise entrant dans le champ d’application de l’avenant qui se voit
attribuer un marché précédemment confié à une autre entreprise entrant
également dans le champ d’application dudit avenant est tenue de
poursuivre les contrats de travail des salariés de niveau I, II, III, IV
et V, employés par le prédécesseur pour l’exécution exclusive du marché
concerné ; que l’obligation incombant au nouveau prestataire n’est
subordonnée à aucune autre condition, restriction ou exclusion ; que la
cour d’appel, tout en constatant que l’exposant était lié à un contrat
de travail avec la société Api Restauration, a dit que son contrat de travail n’avait pas été transféré à la société Compass Group ; qu’en statuant comme elle l’a fait, quand l’exposant était lié à la société Api Restauration
par un contrat de travail en cours à la date du changement de
prestataire, qu’il n’était pas contesté, d’une part, que les deux
entreprises entraient dans le champ d’application dudit avenant et,
d’autre part, que le salarié, employé pour l’exécution exclusive du
marché, appartenait aux catégories de personnel concernées par
l’application de l’article 3 a) dudit avenant, ce dont il résultait que
la société Compass Group
était tenue de poursuivre le contrat du salarié qui était en cours à la
date du changement de prestataire, la cour d’appel a violé l’article 3
de l’avenant n°3 du 26 février 1986 relatif au changement de
prestataires de services de la convention collective nationale du
personnel des entreprises de restauration de collectivités, les articles
L. 8251-1, L. 8252-1 et L. 8252-2 du code du travail ;
Mais
attendu, d’abord, qu’il résulte des dispositions combinées des articles
L. 8251-1 et L. 8252-1 du code du travail qu’un étranger non muni du
titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France n’est pas
assimilé à un salarié régulièrement engagé au regard des règles
régissant le transfert du contrat de travail ;
Attendu,
ensuite, que les dispositions de l’article L. 8251-1 du même code font
obstacle à ce que le nouveau titulaire d’un marché soit tenu, en vertu
de dispositions conventionnelles applicables en cas de changement de
prestataire de services, à la poursuite du contrat de travail d’un
étranger non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée
en France ;
Et attendu qu’ayant constaté
que le salarié ne détenait pas un titre de séjour l’autorisant à
travailler à la date du changement de prestataire de services, la cour
d’appel a exactement décidé que l’entreprise entrante n’était pas tenue
de poursuivre le contrat de travail de l’intéressé en application des
dispositions de l’avenant n° 3 du 26 février 1986 relatif au changement
de prestataires de services de la convention collective nationale du
personnel des entreprises de restauration de collectivités du 20 juin
1983 ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Et
attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement
motivée sur les troisième, quatrième et cinquième branches du moyen,
ci-après annexé, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la
cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Président : M. Cathala
Rapporteur : Mme Marguerite, conseiller référendaire
Avocat général : M. Weissmann, avocat général référendaire
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP L. Poulet-Odent, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy
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