18 January 2024
Cour d'appel de Rouen
RG n° 22/02012

Chambre Sociale

Texte de la décision

N° RG 22/02012 - N° Portalis DBV2-V-B7G-JDKO





COUR D'APPEL DE ROUEN



CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE



ARRET DU 18 JANVIER 2024











DÉCISION DÉFÉRÉE :





Jugement du CONSEIL DE PRUD'HOMMES D'EVREUX du 17 Mai 2022





APPELANT :





Monsieur [S] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représenté par Me Frédéric CAULIER de la SELARL CAULIER VALLET, avocat au barreau de ROUEN







INTIMEES :





Me [O] [J] (SCP MANDATEAM) - Mandataire liquidateur de la S.A.S. SP GLOBAL PRODUCTIONS

[Adresse 3]

[Adresse 3]



n'ayant pas constitué avocat

régulièrement assignée le 05/08/2022



Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentée par Me Guillaume DES ACRES DE L'AIGLE de la SCP BONIFACE DAKIN & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN





















COMPOSITION DE LA COUR  :





En application des dispositions de l'article 805 du Code de procédure civile, l'affaire a été plaidée et débattue à l'audience du 06 Décembre 2023 sans opposition des parties devant Madame BACHELET, Conseillère, magistrat chargé du rapport.



Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :



Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère





GREFFIER LORS DES DEBATS :





M. GUYOT, Greffier





DEBATS :





A l'audience pu lique du 06 décembre 2023, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 janvier 2024





ARRET :





REPUTE CONTRADICTOIRE



Prononcé le 18 Janvier 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,



signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.










EXPOSÉ DU LITIGE



M. [S] [F], joueur d'e-sport, connu sous le pseudonyme '[P]', a signé le 13 février 2020 une promesse d'embauche avec la société SP global productions, alors qu'il était âgé de 15 ans pour être né le 22 juillet 2004, et ce, aux fins de débuter le contrat le 22 juillet 2020.



Il a été transmis le 20 août 2020 à M. [F] un sms afin de lui faire part de ce qu'il avait été décidé de mettre fin à la relation contractuelle.



Par requête du 16 février 2021, M. [F], soutenant avoir été engagé par le biais d'un contrat à durée déterminée à compter du 1er août 2020, a saisi le conseil de prud'hommes d'Evreux en contestation de la rupture, ainsi qu'en paiement de rappels de salaire et indemnités.



Par jugement du 19 août 2021, le tribunal de commerce d'Evreux a prononcé la liquidation judiciaire de la société SP global productions et a désigné la SCP Mandateam en qualité de mandataire liquidateur.



Par jugement du 17 mai 2022, le conseil de prud'hommes a pris acte de l'intervention de l'AGS-CGEA de [Localité 4], fixé au passif de la liquidation judiciaire de la Société SP global productions les sommes de 12 500 euros à titre de prime de signature et 1 500 euros au titre de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile, dit le jugement opposable à l'AGS-CGEA de [Localité 4] dans les limites de sa garantie légale, débouté M. [F] de ses autres demandes et condamné la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens.



M. [F] a interjeté appel de cette décision le 15 juin 2022 et a signifié la déclaration d'appel à la SCP Mandateam, ès qualités, le 5 août 2022.



L'Unedic délégation AGS-CGEA de [Localité 4] a interjeté appel de cette décision le 16 juin 2022 et a signifié la déclaration d'appel à la SCP Mandateam, ès qualités, le 1er août 2022.



Les deux dossiers ouverts suite à ces appels ont été joints le 8 septembre 2022 par mention au dossier.



Par conclusions remises le 30 août 2023, signifiées à la SCP Mandateam, ès qualités, le 11 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, M. [F] demande à la cour d'infirmer le jugement en ce qu'il a qualifié la somme de 12 500 euros de 'prime de signature' et non de salaire et l'a débouté de ses autres demandes, le confirmer pour le surplus, et y ajoutant, de :



- dire qu'il a travaillé comme salarié pour le compte de la société SP global productions à compter du 13 février 2020, dire que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée intervenue à l'initiative de la société SP global productions en août 2020 est injustifiée et en conséquence abusive, dire que seul le salarié peut se prévaloir de la transgression des dispositions d'ordre public du code du travail et en conséquence, fixer au passif de la société SP global productions les créances suivantes :








rappels de salaire pour les mois travaillés de février à juillet 2020 : 12 500 euros nets,

congés payés y afférents : 1 250 euros nets,

indemnité forfaitaire de travail dissimulé : 15 000 euros,

dommages et intérêts d'un montant égal aux rémunérations qu'il aurait dû percevoir jusqu'au terme du contrat de travail à durée déterminée : 36 000 euros,

indemnité de précarité : 3 600 euros,

indemnité pour perte de chance d'obtenir son bonus contractuellement prévu : 18 000 euros,

indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance : 1 500 euros supplémentaires

indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés durant la procédure d'appel : 5 000 euros




- à titre subsidiaire, si la relation contractuelle était requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée, fixer au passif de la société SP global productions les créances suivantes :




rappels de salaire pour les mois travaillés de février à juillet 2020 : 12 500 euros nets,

congés payés y afférents : 1 250 euros nets,

indemnité forfaitaire de travail dissimulé : 15 000 euros,

indemnité de requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée : 3 000 euros,

indemnité de préavis : 6 000 euros,

indemnité pour perte de chance d'obtenir son bonus contractuellement prévu : 18 000 euros,

indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la première instance : 1 500 euros supplémentaires,

indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés durant la procédure d'appel : 5 000 euros




- en tout état de cause, débouter l'AGS-CGEA de toutes ses demandes, dire que l'arrêt lui est opposable dans les limites de sa garantie, dire que l'arrêt est opposable au mandataire liquidateur et condamner les organes de la procédure aux entiers dépens, ordonner la capitalisation des intérêts légaux et condamner les organes de la procédure à lui remettre les documents afférents à la rupture et bulletins de paie conformes à la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard, la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte ainsi prononcée.



Par conclusions remises le 30 août 2022, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, l'Unedic délégation AGS-CGEA de [Localité 4] demande à la cour de lui donner acte de son intervention dans l'instance au titre des dispositions de l'article L 625-3 du code de commerce, et de :



- infirmer le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la liquidation judiciaire de la société SP global productions les sommes de 12 500 euros au titre d'une prime de signature et de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le jugement lui ayant été déclaré opposable dans les limites de sa garantie légale,





- prononcer la nullité du contrat de travail invoqué par M. [F] et le débouter en conséquence de l'ensemble de ses demandes, y compris de son appel du jugement et la mettre hors de cause,



- subsidiairement, débouter M. [F] des demandes indemnitaires formulées sur la base du contrat à durée déterminée, ainsi que de sa demande au titre du travail dissimulé et de l'indemnité pour perte de chance,



- dire que les dispositions de l'arrêt à intervenir ne lui seront déclarées opposables que dans les limites de la garantie légale de l'AGS, la garantie de l'AGS étant plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié à un des trois plafonds définis aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,



- lui déclarer inopposables les dispositions de l'arrêt qui seraient relatives à la remise de documents sous astreinte, à l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.



La SCP Mandateam, ès qualités, n'a pas constitué avocat.



L'ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 16 novembre 2023.




MOTIFS DE LA DÉCISION



Tout en rappelant que la nullité d'un acte juridique ne peut être invoquée que par la personne que la loi a entendu protéger et qu'ainsi, s'agissant de l'incapacité de contracter et des règles édictées dans le code du travail, il est le seul à pouvoir en exciper, M. [F] explique avoir travaillé pour le compte de la société SP global productions dès la signature de la promesse d'embauche le 13 février 2020, et ce, alors même qu'il n'avait pas encore 16 ans et qu'il n'était prévu une date d'embauche en contrat à durée déterminée que le 22 juillet 2020.



A cet égard, il relève que la prime de signature évoquée dans cette promesse d'embauche pour une somme de 12 500 euros payable le 22 juillet, laquelle ne lui a jamais été payée, correspond exactement au montant du salaire prévu à l'embauche sur cinq mois, soit du 13 février au 22 juillet, ce qui doit non seulement conduire à lui donner la qualification de salaire, avec en conséquence paiement des congés payés afférents, mais aussi à retenir l'existence d'un travail dissimulé lui ouvrant droit à l'indemnité forfaitaire de six mois, sachant qu'il n'a jamais été déclaré durant toute la période d'embauche du 13 février au 20 août 2020.



Par ailleurs, et alors qu'il a régularisé un contrat à durée déterminée envoyé par la société SP global productions qui ne contestait pas l'avoir signé en première instance, il réclame le paiement de dommages et intérêts d'un montant égal à la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'au terme du contrat, outre la prime de précarité, sachant que la société SP global productions a rompu ce contrat par sms de manière abusive le 20 août 2020. En tout état de cause, il soutient que la signature de la seule promesse d'embauche suffit à analyser la rupture en une rupture anticipée du contrat à durée déterminée.



Enfin, à supposer que la relation contractuelle soit qualifiée de contrat à durée indéterminée en considérant que le contrat aurait été formé dès la promesse d'embauche, il réclame les sommes reprises au dispositif de ses conclusions.



En réponse, l'Unedic délégation AGS-CGEA soutient que le contrat de travail ayant lié la société SP global productions à M. [F] est nul dès lors que ce dernier a contracté sans l'accord de son représentant légal, et bien plus, alors que cela était illégal puisqu'il avait moins de seize ans. Aussi, et considérant qu'il s'agit d'une violation d'une règle ayant pour objet, non pas l'intérêt particulier du salarié, mais l'intérêt général, comme en témoigne d'ailleurs la sanction pénale encourue, elle estime pouvoir soulever cette nullité et rappelle en conséquence qu'elle doit être mise hors de cause dès lors que sa garantie ne peut être mise en oeuvre qu'à l'égard d'un contrat de travail valablement et légalement souscrit.



A titre subsidiaire, à supposer que la cour retienne l'argumentation de M. [F], à savoir que le contrat a été formé par son acceptation dès le 13 février 2020, elle considère qu'il doit donc recevoir la qualification de contrat à durée indéterminée, étant au surplus rappelé que la société SP global productions ne bénéficiait pas de l'agrément du ministre chargé du numérique pourtant obligatoire pour contracter un contrat à durée déterminée avec un joueur professionnel de jeux vidéos.



Il résulte de l'article L. 4153-1 du code du travail, qu'à l'exception de trois situations limitativement énumérées qui ne concernent pas le cas d'espèce, il est interdit d'employer des travailleurs de moins de seize ans.



Selon l'article 1128 du code civil, sont nécessaires à la validité d'un contrat : le consentement des parties, leur capacité de contracter et un contenu licite et certain.



Selon l'article 1162 du code civil, le contrat ne peut déroger à l'ordre public ni par ses stipulations, ni par son but, que ce dernier ait été connu ou non par toutes les parties.



Selon l'article 1178, un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord. Le contrat annulé est censé n'avoir jamais existé. Les prestations exécutées donnent lieu à restitution dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9. Indépendamment de l'annulation du contrat, la partie lésée peut demander réparation du dommage subi dans les conditions du droit commun de la responsabilité extracontractuelle.



Selon l'article 1179 du code civil, la nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l'intérêt général. Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d'un intérêt privé.



Selon l'article 1180 du code civil, la nullité absolue peut être demandée par toute personne justifiant d'un intérêt, ainsi que par le ministère public. Elle ne peut être couverte par la confirmation du contrat.



Selon l'article 1181, la nullité relative ne peut être demandée que par la partie que la loi entend protéger. Elle peut être couverte par la confirmation. Si l'action en nullité relative a plusieurs titulaires, la renonciation de l'un n'empêche pas les autres d'agir.











En l'espèce, la société SP global productions et M. [F] ont régularisé une promesse d'embauche le 13 février 2020 rédigée de la manière suivante :



'Veuillez considérer par la présente mon souhait de donner une suite positive à votre candidature.

Aussi, je vous propose un emploi au poste suivant : joueur d'e-sport dans le cadre d'un contrat à durée déterminée.

Le salaire correspondant est de 2 500 euros nets par mois.

La société s'engage à verser à [S] [F] la somme de 12 500 euros nets comme prime de signature au jour même de sa signature du contrat, à savoir le 22 juillet 2020.

Dans le cas où vous accepteriez, sans réserve, les présentes, votre entrée en fonction se fera le 22 juillet 2020.

Je vous prie, afin de prendre toutes les dispositions préalables en vue de votre intégration, de me donner une réponse à cette proposition d'embauche au plus tôt. Dans l'attente de votre réponse, que j'espère positive, je vous prie d'agréer l'assurance de ma considération distinguée.'



Au-delà de cette promesse d'embauche, M. [F] soutient avoir en réalité été lié par un contrat de travail à l'égard de la société SP global productions dès le 13 février 2020 et produit pour en justifier des captures d'écran permettant de constater qu'il a effectivement dès le 14 février, était présenté comme faisant partie de l'équipe Trainhard esport, à savoir l'équipe de la société SP global productions, puis, qu'il a, à compter de cette date, régulièrement participé à des tournois et compétitions, ce qui permet de s'assurer non seulement de la réalité de prestations mais aussi d'un lien de subordination, et ce, d'autant que cette période précédait la signature du contrat et impliquait nécessairement que M. [F] donne satisfaction à son futur employeur.



Aussi, couplé à la prime de signature de 12 500 euros prévue dans la promesse d'embauche dont il ressort des sms versés aux débats qu'elle a été calculée sur la base des cinq mois séparant la signature de la promesse avec la signature du contrat, il convient de retenir l'existence d'un contrat de travail entre M. [F] et la société SP global productions, étant d'ailleurs relevé que cette qualification n'est pas en soi contestée par le CGEA qui n'invoque que la nullité du contrat de travail.



A cet égard, s'il est exact que l'incapacité de contracter relève d'une nullité relative qui peut seule être soulevée par M. [F], néanmoins les précédents développements permettent de retenir que la promesse d'embauche, sous couvert d'un contenu a priori licite pour porter sur un engagement ne devant débuter qu'à compter du 22 juillet 2020, soit à compter des seize ans de M. [F], a en réalité eu pour objet de signer un contrat de travail débutant immédiatement et ce, en prévoyant une rémunération pour chacun des mois de travail accomplis jusqu'aux seize ans de M. [F], ce qu'il soutient d'ailleurs expressément en rejetant la qualification de prime de signature.



Aussi, et alors que l'article L. 4153-1 du code du travail n'a pas pour seul objet la défense d'un intérêt privé, mais relève au contraire de la défense d'un intérêt général, comme en témoigne d'ailleurs le fait qu'en cas de constat par une autorité habilitée, un tel contrat ne pourrait être poursuivi malgré l'accord du mineur et de ses représentants légaux, il convient de prononcer la nullité de cette promesse d'embauche, de même que celle de la relation contractuelle ayant uni M. [F] et la société SP global productions du 13 février au 21 juillet 2020.



Or, si en cas de nullité du contrat de travail, l'intéressé doit être indemnisé pour les prestations qu'il a fournies, il ne peut prétendre au paiement de salaires et, le juge n'étant pas tenu, sauf règles particulières, de changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes formées par les parties, il convient de débouter M. [F] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 13 février au 22 juillet 2020, ainsi que les congés payés afférents, et ce, d'autant que M. [F] demande expressément à ce que la qualification de prime de signature soit écartée et rappelle, qu'en tout état de cause, la somme ainsi versée devrait s'analyser en un salaire.



Enfin, compte tenu de la nullité ainsi prononcée, ne peut être considérée comme valable que la relation contractuelle ayant débuté le 22 juillet 2020, laquelle, à défaut de toute signature du contrat à durée déterminée produit aux débats et au regard de la nullité de la promesse d'embauche, ne peut que recevoir la qualification de contrat à durée indéterminée.



Il convient en conséquence, à défaut de tout contrat à durée déterminée initial, de débouter M. [F] de sa demande d'indemnité de requalification.



Par ailleurs, il convient de le débouter de ses demandes en lien avec l'existence et la rupture d'un contrat à durée déterminée, à savoir, sa demande d'indemnité de précarité et sa demande de dommages et intérêts fondée sur l'article L. 1243-4 du code du travail.



Enfin, si M. [F] réclame le paiement d'une indemnité de préavis de deux mois, compte tenu de la nullité affectant le contrat de travail jusqu'au 21 juillet 2020, il ne peut qu'être constaté qu'il avait moins d'un mois d'ancienneté au moment du licenciement.



Néanmoins, et alors qu'il est mentionné dans ses conclusions qu'il était soumis à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, sans que ce point ne soit remis en question par le CGEA, il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société SP global production la somme due à M. [F] à 3 000 euros à titre d'indemnité de préavis correspondant à un mois de salaire, durée de préavis prévue par l'article 4.4.3.2 de ladite convention pour une ancienneté de moins de deux ans.



Il convient au contraire de le débouter de sa demande d'indemnité pour perte de chance d'obtenir un bonus contractuellement prévu, cette disposition n'apparaissant que sur le contrat à durée déterminée versé aux débats et non signé par les parties.



Enfin, s'agissant de l'indemnité pour travail dissimulé, les conditions même de signature de la promesse d'embauche et de l'emploi qui s'en est suivi démontrent l'intentionnalité de se soustraire aux obligations de déclaration préalable à l'emploi et de délivrance de bulletins de salaire et cette intentionnalité s'est poursuivie après le 22 juillet 2020 comme en témoigne le fait que M. [F] a continué à travailler jusqu'au 20 août sans signature d'un contrat, sans déclaration préalable à l'embauche et sans remise d'un bulletin de salaire pour ce mois de travail ni davantage de documents de fin de contrat.









Aussi, dès lors que ce travail dissimulé s'est poursuivi sur la période de validité du contrat de travail, il convient non seulement de fixer la somme de 15 000 euros au passif de la société SP global productions à titre d'indemnité pour travail dissimulé mais également de dire que l'AGS doit sa garantie pour cette somme.



Sur la garantie de l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 4]



Compte tenu de la nature des sommes allouées, l'AGS CGEA doit sa garantie dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail.



Sur les intérêts



Les sommes allouées en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions prononcées.



Les intérêts échus produiront intérêts, dés lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière à compter de l'arrêt, conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.



La cour rappelle néanmoins que le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations.



Sur la remise de documents



Il convient d'ordonner à la SCP Mandateam, ès qualités, de remettre à M. [F] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire conformes à la présente décision, sans que les circonstances de la cause justifient de prononcer une astreinte.



Sur les dépens et frais irrépétibles



En qualité de partie succombante, il y a lieu de condamner la SCP Mandateam, ès qualités, aux entiers dépens, y compris ceux de première instance et de la condamner à payer à M. [F] la somme de 1 500 euros sur ce même fondement pour les frais engagés en cause d'appel, en plus de la somme allouée en première instance, laquelle est confirmée.



PAR CES MOTIFS



LA COUR



Statuant et publiquement, par arrêt réputé contradictoire et mis à disposition au greffe,



Infirme le jugement en toutes ses dispositions sauf celles relatives aux dépens, à la somme allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a débouté M. [S] [F] de ses demandes de dommages et intérêts pour rupture anticipée du contrat à durée déterminée, d'indemnité de précarité et d'indemnité pour perte de chance d'obtenir un bonus ;



Statuant à nouveau et y ajoutant,



Prononce la nullité de la promesse d'embauche signée le 13 février 2020 et de la relation de travail ayant uni M. [S] [F] à la SAS SP global productions pendant la période du 13 février au 21 juillet 2020 ;



Dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité du contrat de travail à durée indéterminée ayant débuté le 22 juillet 2020 et ayant pris fin le 20 août 2020 ;



Déboute M. [S] [F] de sa demande d'indemnité de requalifiation ;



Déboute M. [S] [F] de sa demande de rappels de salaire et des congés payés afférents ;



Fixe au passif de la SAS SP global productions les créances de M. [S] [F] aux sommes suivantes :




indemnité pour travail dissimulé : 15 000 euros

indemnité compensatrice de préavis : 3 000 euros




Déclare l'UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 4] tenue à garantie pour ces sommes dans les termes des articles L. 3253-8 et suivants du code du travail, en l'absence de fonds disponibles;



Dit que les sommes allouées en appel à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et celles à caractère indemnitaire à compter du jugement de première instance pour les dispositions confirmées et du présent arrêt pour les dispositions prononcées ;



Dit que les intérêts échus produiront intérêts, dès lors qu'ils seront dus au moins pour une année entière à compter de l'arrêt ;



Rappelle néanmoins que le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que tous intérêts de retard et majorations ;



Ordonne à la SCP Mandateam, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS SP global productions, de remettre à M. [S] [F] un certificat de travail, une attestation Pôle emploi et un bulletin de salaire conformes à la présente décision ;



Dit n'y avoir lieu à astreinte ;



Condamne la SCP Mandateam, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS SP global productions, aux entiers dépens ;



Condamne la SCP Mandateam, en qualité de mandataire liquidateur de la SAS SP global productions à payer à M. [S] [F] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, outre la somme allouée en première instance.



La greffière La présidente

Vous devez être connecté pour gérer vos abonnements.

Vous devez être connecté pour ajouter cette page à vos favoris.

Vous devez être connecté pour ajouter une note.